Depuis son accession à l'indépendance, le CENTRAFRIQUE est l'un des rares pays africains à avoir changé plusieurs fois de Présidents, si ce n'est le pays qui détient le record du continent dans ce domaine. Ces changements ont-ils été l'expression d'une respiration politique démocratique parfaite et saine ou plutôt les résultats provoqués par les secousses d'une gestion aléatoire et calamiteuse de systèmes politiques mis en place par les différents hommes qui ont eu la charge de conduire ce pays dans la situation où il se trouve actuellement ?
Personne n'aura besoin d'une loupe pour chercher la réponse à ces deux questions. Le CENTRAFRIQUE est aujourd'hui dans l'abîme à cause d'un bon nombre de ces hommes politiques, qui n'ont jamais eu à fixer, dans leurs différentes politiques, un véritable cap pour le pays. Des plans et des projets, certains parfois irréprochables et bien pensés, se sont succédé, sans jamais aboutir, par manque de suivi. Et ce constat, très amer, a été la ligne directrice de tous les gouvernements qui se sont succédé, les hommes ne sachant pas quelles étaient les priorités à poursuivre, quels que fussent les changements politiques. Ils se sont toujours cantonnés dans un archaïsme primaire, incapables d'innovation et d'esprit de créativité, pour adapter les différentes politiques menées aux réalités du pays.
L'université de BANGUI qui, à sa création devait contenir quelques centaines d'étudiants, est aujourd'hui une boîte de sardines élastique, qui ne souffre pas d'accueillir plus de dix mille malheureux étudiants. L'on peut multiplier les exemples, ils sont tous, autant parlants.
Et tout ça a été possible parce que dans ce pays, il suffit qu'on vous paie votre salaire, et quel salaire, pour que vous ne trouviez plus de raison de vous plaindre, quand bien même vous n'auriez plus d'hôpitaux pour vous soigner, plus de places pour vos enfants à l'école, plus de routes pour vous déplacer en toute sécurité, la liste est longue. Vous ne pourriez plus vous plaindre, vous avez été payé.
Les CENTRAFRICAINS devraient comprendre que les accords de LIBREVILLE ne se sont pas contentés de nommer un PREMIER MINISTRE issu de l'opposition. En fait, en imposant cette disposition au chef de l’État, ils voulaient réellement signifier que les choses devraient changer dans la façon de conduire les affaires de l’État, et cela, seuls les CENTRAFRICAINS devraient en être les artisans.
Aujourd'hui, l'on s'acharne à savoir combien de ministres doivent être nommés dans le camp présidentiel, combien dans les partis de l'opposition démocratique, combien dans la coalition SELEKA, et l'on se met à rêver que le nouveau PREMIER MINISTRE doit résoudre en une année presque tous les problèmes que ses prédécesseurs ont provoqués, en mettant en route une machine infernale difficile à arrêter ou à changer de direction, à cause de leur gestion quasi irresponsable des affaires du pays.
Aujourd'hui, la tâche n'est pas de savoir combien de ministères reviennent à tel ou tel camp, même s'il est indéniable qu'il faut accorder les postes majeurs aux acteurs politiques ou militaires qui le méritent, le reste des attributions dépendra du PREMIER MINISTRE, qui devra s'assurer que les hommes qui vont l'accompagner dans sa tâche seront les hommes qu'il faut et non ces « politicards » éternellement affamés, qui ont contribué à enfoncer le CENTRAFRIQUE dans l'abîme, en continuant à applaudir aux égarements d'une gestion où ils ne cessaient de tirer profit.
Les accords de LIBREVILLE doivent être compris comme un compromis pour lancer les bases de la refondation d'une vraie REPUBLIQUE, et il faut des hommes neufs, intègres, compétents et responsables pour réussir cette tâche, car un mélange hétéroclite qui inclurait des racines pourries, ne permettra pas à l'arbre de s'épanouir et de bien faire pousser ses branches, ses feuilles.
Cette période de transition sera une période cruciale, qui permettra au gouvernement d'asseoir une autre façon de gérer le pays, donnera aux partis politiques l'occasion de se consolider, de se densifier, de former et d'éduquer leurs adhérents dans le sens du civisme tant nécessaire, en vue des futures élections qui devront se dérouler dans le respect des règles démocratiques, de la transparence et de la justice.
La bataille pour la répartition des postes ministériels n'a aucun sens. Ce sont les hommes qui seront choisis qui devront faire leurs preuves pour imprimer de façon durable, une autre façon d'agir dans toutes les sphères de la vie sociale : civile, militaire ou privée.
Bon vent à cette future équipe pour que vogue paisiblement et avec un espoir immense le navire CENTRAFRICAIN.
Adolphe PAKOUA