MANIFESTE
POUR LE RESPECT DU DROIT DES CENTRAFRICAINS,
ET POUR UNE SORTIE DE CRISE PACIFIQUE, HONORABLE ET EQUITABLE
Le 29 Mars 2013
Nous, intellectuels
Centrafricains et nos amis africains, soussignés, tenons à interpeller la Communauté Internationale, en particulier les gouvernements de la France, des Etats-Unis, le Conseil de Sécurité de
l’ONU, l’Union Européenne, l’Union Africaine, la CEEAC, au sujet de la crise actuelle en République Centrafricaine, en particulier des condamnations et sanctions prononcées par l’Union
Africaine et le Conseil de Sécurité de l’ONU.
Le 20 mars 2013 la
Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République centrafricaine, Margaret Vogt, a exposé aux membres du Conseil de sécurité la situation et ceux-ci ont fermement condamné les
attaques perpétrées par le Séléka, Le Conseil a également condamné les menaces que font peser les milices COCORA de Lévy Yakité un soutien de Bozizé et exhorté les parties prenantes, y compris
les médias, à s'abstenir de tout appel à la violence. Le Secrétaire général de l’ONU,
suivi des membres du Conseil de sécurité ont fermement condamné les attaques récentes et la prise de pouvoir par la force en République centrafricaine perpétrées le 24 mars dernier par la
coalition de la Séléka, ainsi que les violences et les pillages dont elles se sont accompagnées. Les membres du Conseil de sécurité ont ensuite réitèré leur soutien aux accords de Libreville
signés le 11 janvier 2013 sous les auspices de la Communauté Économique des États de l'Afrique Centrale (CEEAC).
Le coup de force du a été
condamné par l'ensemble de la communauté internationale.
A l’ONU le 25 mars
2013, le Secrétaire général Ban Ki-moon a condamné la prise de pouvoir par la coalition de la Séléka en République centrafricaine, dont les forces sont entrées dans la capitale Bangui samedi 24
mars. Le Conseil de sécurité a ensuite appellé au rétablissement de l’ordre constitutionnel et à l’application des accords de Libreville. Mais c’est une condamnation prudente qui ne
s’accompagne pas de sanctions.
L'Union africaine quant à
elle a annoncé le lundi 25 mars, avoir suspendu la Centrafrique de son organisation et gelé les avoirs de sept responsables de la Séléka, dont Michel Djotodia.
Alors que la communauté
internationale et les chefs d’États d’Afrique centrale ont, dans leur ensemble, pris acte sans grande difficulté du départ du président François Bozizé, le Conseil de Paix et Sécurité de l'Union
africaine (UA) a décidé de suspendre la participation de la Centrafrique à l'organisation et imposé des sanctions à sept responsables de la Séléka. Répétition à éviter.
« Le Conseil décide de
suspendre immédiatement la participation de la RCA (République centrafricaine) à toutes les activités de l'Union africaine ainsi que d'imposer des sanctions, à savoir des restrictions de voyage
et le gel des avoirs des dirigeants de la Séléka, dont son chef Michel Djotodia »
Le Conseil de l'UA demande «
la restauration immédiate de l'ordre constitutionnel dans le pays et dénonce la décision unilatérale et injustifiée de la Séléka d'agir en violation flagrante du cessez-le prévue par les Accords
de Libreville conclus entre la rébellion et M. Bozizé ».
« Le Conseil demande à tous
les États-membres de prendre les mesures requises pour isoler totalement les auteurs du changement anti-constitutionnel en République centrafricaine et de faciliter l'application de toute autre
mesure qui serait prise par l'Union africaine, y compris le jugement des auteurs de ce changement anticonstitutionnel de gouvernement », poursuit le communiqué.
L’UA exhorte également ses «
partenaires internationaux notamment le Conseil de sécurité de l'Onu et l'Union européenne à prendre des mesures fermes contre les putschistes ».
Au nom des exigences de la
rigueur et de l’honnêteté intellectuelle, de la justice et du droit, de la démocratie et de la paix, de la dignité de l’Afrique et des Africains, dont nous tenons à être des défenseurs, nous leur
disons :
1) Nos profonds regrets pour
la perte subie par le contingent Sud Africain dans son soutien à la protection de BOZIZE qui reste le seul responsable de ce carnage qui n’aurait jamais eu lieu si les accords de Libreville avait
été respecté à la lettre, en particulier par l’Afrique du Sud à qui ces accords demandaient de retirer sa troupe de la RCA le plus tôt possible. Nous regrettons que les autorités sud
africaines n'aient eu la clairvoyance de mesurer les conséquences de l’engagement de leur troupe dans la protection de Bozize au détriment du peuple Centrafricain.
En soutenant à la fois les
accords de Libreville et l’Afrique du Sud qui a violé ces accords, le Conseil de Sécurité de l’ONU étale à la face du monde ses propres contradictions, son manque de crédibilité, et sa
partialité au profit des plus forts et au détriment des plus faibles.
2) Le principe de
subsidiarité est un principe politique et social selon lequel la responsabilité d'une action publique, lorsqu'elle est nécessaire, doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre le
problème d'elle-même. Il va de pair avec le principe de suppléance, qui veut que quand les problèmes excèdent les capacités d'une petite entité, l'échelon supérieur a alors le devoir de la
soutenir, dans les limites du principe de subsidiarité (Voir Wikipédia).
Dans la grave crise malienne
qui mis en danger l’intégrité territoriale et la souveraineté d’un pays membre de l’Union Africaine où le silence de l’Union Africaine a été étourdissante , cette dernière s’est abritée derrière
le principe de subsidiarité dont jouit la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) pour ses décharger lâchement de ses responsabilité et laisser des petits pays comme le
Togo se débrouiller avec leurs moyens de bord pour acheminer leurs troupes pour défendre l’intégrité territoriale et la souveraineté du Mali.
Le fait que l’Union Africaine
et le Conseil de sécurité de l’ONU aient réitéré leur soutien aux accords de Libreville signés sous les auspices de la Communauté Économique des États de l'Afrique Centrale (CEEAC) cadre
parfaitement avec cette subsidiarité.
Par contre, malgré le
prestige qui a auréolé la CEMAC à la suite de ces accords de Libreville précédés de l’envoi de ses troupes en Centrafrique pour stopper l’occupation de la totalité du territoire
centrafricain par les forces de la Séleka, l’Union Africaine a violé ce principe de subsidiarité reconnu à la CEMAC et a voulu « l’enterrer vivante » en prenant et publiant
unilatéralement ses décisions quelques heures à peine après la prise de Bamako par les forces de la Séleka, signant ainsi une politique de « deux poids deux mesures » au sujet de la
CEDEAO et de la CEMAC.
A quel jeu joue l’Union
Africaine instrumentalisée par l’Afrique du Sud ? C’est la question à laquelle l’institution devra répondre pour gagner en crédibilité. Il faut rappeler que la politique extérieure de
l’Afrique du Sud n’a pour logique que de s'opposer aux pays colonisateur sans pour autant faire une analyse objective et non partisane de la situation qui prévalait en République Centrafricaine
sous le règne de Bozizé parvenu au pouvoir par coup d’Etat et qui fêtait chaque année cet anniversaire alors qu’il prônait avoir gagné les élections régulièrement. Un Président élu a-t-il encore
des raisons de fêter un coup d’Etat l’ayant porté au pouvoir? L’Union Africaine instrumentalisée par Les Autorités Sud Africaines avait fait le choix de défendre l’indéfendable en violant
sciemment le principe de subsidiarité.
3) Nous ne trouvons
« aucune base juridique recevable » aux différentes prises de position, de décisions, des sanctions et des menaces de la « Communauté Internationale » contre les
autorités autoproclamée, et nous trouvons plutôt que ces prises de position, de décisions, des sanctions et des menaces cachent des contradictions et une hypocrisie insoutenables.
En effet, nous estimons
notamment que la défense de la légalité constitutionnelle en RCA sous le Président Bozizé est dénuée de tout fondement puisque les dernières élections organisées avec le soutien de l’Union
Européen et autres partenaires de la RCA ont été qualifiées de « sujette à caution » dans un rapport de l’union européenne publié deux mois après la proclamation des résultats en
février 2011. Nous affirmons que conformément au droit, seules des élections organisées dans les transparences au minimum confèrent la légalité Constitutionnelle. Dans le cas d’espèce de la
République Centrafricaine, l’opposition, regroupée dans le collectif FARE, a longtemps bataillé seule pour une annulation de ces élections sans obtenir le soutien de l’Union Africaine, qui prône
aujourd’hui une légalité qu’elle n’a pas aidé à construire.
En effet, en République
Centrafricaine, l’opposition politique en tête le FARE-2011 (Front pour l’Annulation et la Reprise des Elections de 2011), structure regroupant les partis politiques d’opposition au lendemain des
élections de Janvier 2011 n’avait cessé d’attirer l’attention de tous les partenaires de la RCA sur dérives de Bozizé, convaincu que pour avoir financée ces élections, les contribuables
européens seraient à l’écoute pour solution apaisée à la crise postélectorale qui persistait en République Centrafricaine.
Ainsi les partisans du FARE
2011 établis en France et à travers le continent africain n’avaient cessé de rappeler qu’en 2010 à l’aube des préparatifs de ces élections, les partis d’opposition regroupés dans le CFC
(Collectif des Forces du Changement) avaient rendu publics ses réserves sur le mode d’organisation des élections par un monsieur entièrement à la solde du général
BOZIZE.
Les politiques et la société
civile n’avaient cessé de relever les incohérences dans la préparation et l’organisation de ces élections, de prévenir les partenaires au développement sur les risques d’échec du processus
démocratique en République Centrafricaine. Cet échec annoncé était orchestré sur la volonté du général BOZIZE de se maintenir au pouvoir à n’importe quel prix.
Les cris du FARE-2011 pour
informer l’Union Africaine de son souhait de voir s’installer une forme particulière de participation de l’opposition à un dialogue inter-centrafricain n’ont malheureusement eu aucun écho
favorable, ni à Prétoria auprès du gouvernement Sud Africain, ni à Addis Abéba auprès de l’Union Africaine, ni à Washington auprès du Conseil de Sécurité de l’ONU.
L’Union Africaine, sous
l’impulsion de l’Afrique du Sud, prétend vouloir contribuer au renforcement de la sécurité d’un pays qui était en difficulté institutionnelle. Pour renforcer la légalité
constitutionnelle, l’Union Africaine aurait dû aider la RCA en ce moment où tous les dirigeants Africains ont préféré soutenir leur pair
Vouloir défendre l’ordre
institutionnel en RCA sans aucune preuve de légitimité populaire sous le président Bozizé, c’est vouloir défendre l’indéfendable, comme prétendent le faire l’Afrique du Sud, l’Union Africaine et
le Conseil de Sécurité de l’ONU.
4) Enfin, nous trouvons
curieux, cynique et hypocrite que l’Union Africaine et le Conseil de Sécurité de l’ONU exigent le retour à l’ordre constitutionnel en République Centrafricaine après le prise du pouvoir par les
forces rebelles, alors que ces institutions ne l’ont pas exigé dans les trois pays de l’Afrique du Nord où l’ordre constitutionnel a été aboli durant le « printemps arabe », notamment
par la rébellion armée en Libye avec l’appui des forces de l’Otan, tout comme elles ne l’ont pas exigé en Côte d’Ivoire où l’ordre constitutionnel, incarné par le Président dont l’élection a été
proclamée par la Cour Constitutionnelle ivoirienne, a été renversé par une rébellion armée appuyée par les forces françaises et celles de l’ONU. Ces attitudes de l’Union Africaine et du Conseil
de Sécurité de l’ONU vis-à-vis de la RCA d’une part et des autres pays africains cités d’autre part relève donc indiscutablement de nouveau d’une politique condamnable de « deux poids deux
mesures ».
En conclusion, au vu des
points 1 à 4, nous affirmons à la face du monde, notamment des « plus puissants de ce monde », que les centrafricains par amour de la République Centrafricaine et de sa
souveraineté, souhaitent ardemment que les réactions soient en phase avec la réalité centrafricaine (du réalisme Centrafricaine à supprimer), suite aux manquements de la Communauté
Internationale, de l’Union africaine, des partis politiques centrafricains et de l’opinion publique centrafricaine.
Ce changement, ne serait pas
une troisième possibilité ou une solution de la dernière minute, mais un nouveau processus politique en Centrafrique qui inclut les acteurs impliqués dans la transition militaire associée
avec tous les partis politiques centrafricains pour permettre de décider de convoquer une Assise Nationale, par souci de la paix, du consensus et de la prospérité dans toute la République
Centrafricaine, conformément aux pouvoirs qu’ils se sont conférés à la faveur du dernier changement malgré les condamnations étrangères et du peuple centrafricain pour l’honneur de tous les
africains.
Le Manifeste Centrafricain
par
Le Collectif ToroToro
(Trop C’est Trop)
Tropctrop_rca@yahoo.fr