La période des coups d’état à répétition a été longue en Afrique. Et là où il n’y avait pas de coups d’état, des régimes autoritaires ou monarchiques étaient maintenus sous prétexte de stabilité politique mais surtout pour des intérêts économiques et des considérations géopolitiques. Vers la fin du XXè siècle, les dirigeants africains ont été invités par le cours de l’Histoire à revoir leur pratique politique. Nous avons tous le souvenir du discours de la Baule de François Mitterrand.
Cependant, au lieu de comprendre la nécessité d’un changement profond et indispensable pour l’intérêt de leurs concitoyens, ces dirigeants africains ont rusé avec l’histoire en organisant des parodies d’élections démocratiques. Ce refus d’évoluer dans le sens du temps est surtout motivé par la volonté pour ces dirigeants de maintenir des privilèges et de ne favoriser que leur clan ou une minorité de personnes, vivant ainsi sur le dos des contribuables. Cette situation devient de plus en plus insupportable pour les populations en général mais pour la jeunesse en particulier.
L’Afrique, pour peu qu’elle pratiquerait la transparence pourrait multiplier des éléments de croissance. Il y a une
main-d’œuvre compétente et la tranche de la population « active » est très importante. La volonté de se maintenir au pouvoir de certains dirigeants africains - c’est le cas de la plupart - en
truquant les élections, refusant ainsi l’alternance démocratique crée des frustrations profondes. Les violences qui se multiplient en Afrique puisent généralement leurs sources soit dans la
mauvaise gestion des biens publics soit dans des contentieux électoraux.
Ces derniers temps, des élections ont été tenues en Afrique dont les témoignages ne sont pas toujours reluisants sur le plan de la crédibilité. En Centrafrique, après le coup d’état du général Bozizé, on peut se rendre compte que la leçon de démocratie que ce dernier a présentée à travers l’organisation des élections dans son pays n’est pas un bon exemple. M. Bozizé prône aujourd’hui l’apaisement et la réconciliation après avoir chassé du pouvoir Ange-Félix Patassé. Nous avons eu également le cas du Tchad, où le dictateur Déby reste dans une logique d’autisme exacerbé. Le cas de la RDC - qui a eu le satisfecit de la Communauté internationale en terme de réussite des élections - fait couler beaucoup d’encre.
Au mois de février dernier 2007, les élections présidentielles ont eu lieu au Sénégal. Le collectif de l’opposition a contesté les résultats. Au centre de ce contentieux, se trouve la crédibilité des élections et l’image que l’Afrique donne ainsi au monde sur la question de la conquête et de l’exercice du pouvoir. Mais le fait d’avoir eu dans ces élections présidentielles un manque de cohérence et de véritable stratégie du côté de l’opposition a laissé les observateurs perplexes. En fait, l’opposition sénégalaise se serait donnée plus de chance en cultivant au départ une stratégie de rassemblement. Car même si l’expression de la pluralité est conseillée, il n’en demeure pas moins que la multiplication de candidatures devant Me Wade, Président sortant, était mal venue. Maintenant, il reste au Président Wade d’impulser une véritable dynamique de réconciliation et de susciter la mise sur pied d’instruments fiables pour que la démocratie prenne l’oxygène dont elle a besoin. Mais ironie du sort, M. Wade a tout oublié de cette époque et compte aujourd’hui parmi ceux qui donnent des leçons de démocratie à Mugabe.
Comme exemple de démocratie de ces dernières années, on peut dire que celui des élections en Mauritanie est
encourageant. La catastrophe qui est venue assombrir ce message d’espoir sont les élections calamiteuses au Nigeria. Ce « grand » pays aurait pu donner le bon exemple de
démocratie.
Il n’y pas longtemps, on a eu un type d’élections - plus que calamiteuses au Kenya. Et tout récemment, le cas du
Zimbabwe. Le message que les dirigeants africains envoient ainsi à l’opinion, à travers la manipulation des élections ne fait qu’enfoncer encore plus l’Afrique. Ce continent dont l’image est déjà
beaucoup ternie par les guerres (très meurtrières pour certaines) qui y sévissent. Chaque Africain (gouvernant comme gouverné) doit réfléchir sur lui-même, revisiter son attitude, pour proposer
un chemin d’épanouissement collectif. Car il y a beaucoup trop d’affrontements inutiles.
© afriqueliberté : Claude Koudou
Paru le 30-06-2008 00:19:40