DECLARATION DU PRESIDENT DU MLPC LORS DE LA REUNION DU COMITE AFRIQUE DE
L'INTERNATIONALE SOCIALISTE A NIAMEY-NIGER- 17-18 MARS 2013
Le MLPC tient à réaffirmer son soutien politique total et sans réserve au peuple malien dans l'épreuve en cours, et salue
l'intervention des troupes françaises, appuyée par des forces africaines, pour permettre à ce pays frère d'échapper aussi bien à la balkanisation qu'à une recolonisation par des forces
criminelles et obscurantistes.
Ce qui est fait pour le Mali aujourd'hui grâce à la solidarité à la fois internationale et interafricaine est un motif
d'espoir pour tous les républicains et les démocrates africains. Cela nous rassure dans l'espoir que le pire n'est jamais sûr, si les femmes et les hommes de bonne volonté, décident de prendre
leurs responsabilités devant l'histoire.
Cependant, il est clair qu'il appartient aux forces politiques maliennes, et principalement à la grande famille des forces
politiques progressistes maliennes, de rendre irréversible, dans l'unité, le processus de refondation de l'Etat malien. J'ai pu vérifier sur le terrain, en toute humilité, qu'un très grand nombre
de démocrates et de républicains maliens œuvrent pour cet objectif. Le soutien de mon parti le MLPC, ainsi que mon modeste soutien leur sont acquis. Parce que soutenir le Mali aujourd'hui, c'est
nous soutenir nous -même, car il ya d'autres Mali qui s'ignorent en Afrique subsaharienne, et que l'opinion africaine et internationale oublie. C'est le cas de mon pays, la République
centrafricaine.
En effet, en décembre 2012, quatre mouvements de rébellion localisés dans le Nord-est de mon pays la République
centrafricaine, ont repris les hostilités contre le pouvoir central de Bangui, motifs pris du fait que les engagements pris par le gouvernement centrafricain dans le cadre des Accords de Paix de
Libreville de 2007 et 2008 n'étaient pas respectés.
En moins de deux semaines, les forces rebelles coalisées ont pris plus d'une dizaine de villes, occupant onze préfectures sur
les seize que compte le pays, et il a fallu l'interposition d'urgence des forces tchadiennes à moins de 100 kms de Bangui, pour empêcher la chute de la capitale. Aujourd'hui encore, ce sont ces
forces, appuyées par celles d'autres pays de la CEEAC dans le cadre de la MICOPAX, qui tentent de faire respecter l'accord de cessez-le-feu signé à Libreville le 11 janvier 2013, en même temps
qu'un Accord Politique.
Cet Accord Politique qui vise principalement à ramener la paix et la sécurité sur toute l'étendue d'un territoire national à
réunifier, afin de soulager les populations civiles en détresse, prévoit les principales dispositions suivantes:
- la désignation d'un Premier Ministre issu de l'opposition démocratique, et qui ne peut être démis pendant une période de
transition d'une année renouvelable;
- la composition d'un Gouvernement d'Union nationale composées des parties prenantes aux négociations de paix que sont: la
majorité présidentielle, l'opposition démocratique, la coalition rebelle SELEKA, la société civile, et les politico-militaires non combattants;
- l'organisation des élections législatives anticipées dans un délai d'un an;
- l'interdiction faite au Président actuel de la République, au Premier Ministre et aux membres du Gouvernement d'Union
nationale d'être candidats aux élections présidentielles de 2016.
Le Premier Ministre, issu de l'opposition démocratique dont il était le Coordonnateur, a été nommé en la personne de Maître
Nicolas TIANGAYE. Celui-ci a formé un Gouvernement d'Union Nationale composé des parties prenantes à la crise centrafricaine, mais déjà pour la formation de ce gouvernement, le Général Président
François BOZIZE a délibérément signé un décret officialisant un gouvernement en plusieurs points différents de la proposition faite par le Premier Ministre. Ceci fut la première violation de
l'Accord de Libreville, et sera suivie d'autres violations dont la liste suivante n'est pas exhaustive:
l'insécurité dans la ville de Bangui entretenue par des milices se réclamant ouvertement du pouvoir alors que les Accords de
Libreville ont formellement demandé aux parties signataires, dont la Majorité Présidentielle, de dissoudre toutes les milices;
la reprise d'une rhétorique de guerre totalement aux antipodes des termes et de l’esprit des Accords de Libreville et qui ne
peut que faire le lit de nouveaux affrontements armés ;
du blocage de toutes natures du fonctionnement de l'appareil d'Etat, tels que l'unilatéralisme des actes présidentiels
pris en dehors des conseils de Ministres et en tout cas non contresignés par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, le refus de certains agents de l'Etat d'obéir à leurs ministres,
l'interdiction "manu militari" faite au Ministre de la Communication d'accéder à la station de la Radio d'Etat qui est pourtant sous sa tutelle ; et enfin de la déperdition organisée des recettes
fiscales de l'Etat.
En fait, le Général Président François BOZIZE , par ses actes et ses déclarations diverses, a clairement pris l'option de
fragiliser le Gouvernement d'Union Nationale, dans le secret espoir de revenir au statu quo ante, c'est-à - dire à la situation antérieure aux Accords de Libreville
La situation s'est brusquement détérioré hier dimanche 17 mars 2013, avec le retrait des ministres membres de la Coalition
rebelle SELEKA qui ont quitté Bangui pour rejoindre leurs troupes stationnés à moins de deux cent kms de Bangui, et ont lancé un ultimatum de trois jours au pouvoir pour satisfaire leurs
revendications, faute de quoi cette Coalition rebelle marcherait sur Bangui.
La situation est à ce point grave que sans une intervention forte et immédiate des Chefs d'Etat de la Communauté Economique
des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC) et sans une impulsion robuste donnée par la Médiation, le processus de reconstruction de notre pays risque de s'enliser et de tourner court.
Le prix de cet échec sera d'abord bien sûr payé par le peuple centrafricain, qui a déjà trop souffert depuis près de
dix ans de troubles majeurs à sa sécurité. En cherchant de manière délibérée et orchestrée à faire échouer et à disqualifier l'issue politique patiemment élaborée par de bonnes volontés
nationales et internationales pour faire face à la grave crise que connait notre pays, les forces conservatrices à l'œuvre contre le Gouvernement d'Union Nationale prennent la très lourde
responsabilité de remettre à l'ordre du jour de nouveaux affrontements guerriers et une recrudescence de l'insécurité sur tout le territoire centrafricain.
Notre Parti le Mouvement de Libération du Peuple Centrafricain appelle solennellement et très respectueusement les partis frères de l'Internationale Socialiste, à user de leur influence pour
amener dès aujourd'hui les Chefs d'Etat et de Gouvernement de la CEEAC à se réinvestir en urgence dans le dossier centrafricain et à compléter l'accord obtenu grâce à eux le 11 janvier 2013 à
Libreville par une série de décisions qui permettraient d'obtenir les résultats suivants:
- la libération des prisonniers politiques;
- la dissolution effective de toutes les milices, notamment dans la capitale, et de redonner effectivement le monopole de la restauration de la loi et de l'ordre aux Forces de Défense et de
Sécurité, qui doivent rester sous le contrôle du pouvoir politique et non d'un parti politique ou d'un clan particulier;
- la récusation de tout oukase sur les nominations des responsables civils et militaires de l'Etat, et de réaffirmer le droit pour tous les membres du Gouvernement d'Union Nationale à choisir
leur cabinet en accord avec le Premier Ministre, Chef du gouvernement;
- le respect du principe républicain selon lequel les nominations au sein de l'appareil d'Etat doivent faire l'objet d'un
consensus entre le Président de la République chef de l'état et le Premier Ministre, Chef du gouvernement;
- le réaménagement technique du gouvernement pour faire justice aux différentes plaintes émanant des composantes du Gouvernement d'Union Nationale, et faciliter la poursuite de l'objectif
essentiel qui est la réalisation du cahier des charges défini par les Accords de Libreville ;
- la réitération des engagements de toutes les parties, notamment ceux portant sur une politique appropriée de développement du Nord-est de notre pays et un processus de Désarmement-
Démobilisation et Réinsertion(DDR) responsable et généreux;
- l'appui sans réserve au processus de
reconstruction de l'appareil d'Etat sur l'ensemble du territoire qui passe nécessairement par un travail interministériel intense coordonné par le Premier Ministre, Chef du gouvernement dont
l'autorité doit être reconnue par toutes les parties. Cet objectif ne peut être atteint dans une démarche délibérée et entretenue de division accrue et d'insubordination de l'appareil d'Etat.
La légitimité du Gouvernement d'Union Nationale étant issu des Accords de Libreville parrainés par la CEEAC, avec le soutien
politique constant de l'Union Africaine (UA), de l'Union Européenne(UE), de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et de l'Organisation des Nations-Unies (ONU), le MLPC
redit avec force que seule une implication urgente et renouvelée des chefs d'Etat de la CEEAC dont les initiatives heureuses de décembre 2012 et janvier 2013 ont évité à la République
centrafricaine de basculer dans le chaos, appuyée par la communauté internationale, permettra d'avancer dans cette voie de la réunification, de la pacification et de la stabilisation de notre
pays, et à terme de redonner la parole et sa fierté au peuple centrafricain meurtri, divisé et déboussolé.
Niamey, Niger
18 mars 2013