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4 avril 2008 5 04 /04 /avril /2008 15:12

 

 

LE MONDE | 04.04.08 | 14h15  •  Mis à jour le 04.04.08 | 14h15

La rue africaine ne parle que de cela : les prix des denrées quotidiennes sont devenus fous. En quelques mois, la conjonction des hausses du blé, du riz, de l'huile sur les marchés mondiaux, de médiocres récoltes locales et l'absence de contrôle des prix, a accru les tensions sociales et compromis la stabilité politique.

Spectaculaire dans les villes africaines mais prégnante aussi en Asie, la flambée des prix a confirmé les propos de Jacques Diouf, le directeur général de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) prophétisant, dès octobre 2007, des "émeutes de la faim" alors que le prix moyen d'un repas de base a augmenté de 40 % en une année."Beaucoup de gens ne mangent plus qu'un plat par jour", entend-on à Dakar. "Avec 1 500 francs CFA (2,25 euros) pour nourrir ma famille, je ne sais plus quoi faire", dit une ménagère sur un marché de Bamako, au Mali.

De Douala (Cameroun) à Abidjan (Côte d'Ivoire) et du Caire (Egypte) à Dakar (Sénégal), les manifestations de rues secouent les capitales africaines et contraignent les gouvernants à prendre des mesures pour contrôler les prix.

"Gbagbo, marché est cher", "Gbagbo, on a faim", clamaient lundi 31 mars des femmes d'Abdidjan à l'adresse du président ivoirien. Des affrontements avec la police ont causé la mort d'au moins deux personnes. De fait, le prix du kilogramme de riz est passé de 250 à 650 francs CFA (de 0,22 à 0,97 euro) au cours de l'année ; celui de l'huile a augmenté de plus de 40 %. Le savon, le lait, la viande ont suivi, ce dont ne rendent pas compte les chiffres officiels (8 % d'inflation en 2007 pour l'ensemble du continent noir). "Dans les pays de la zone CFA, la hausse serait encore plus importante si le franc CFA n'était pas accroché à l'euro, une devise forte. Le coût des importations en est diminué d'autant. Les pays dont la monnaie est accrochée au dollar souffrent davantage", assure un économiste de l'Agence française de développement (AFD).

Suppression des droits de douane et baisse de la TVA : le chef de l'Etat ivoirien, comme ses homologues camerounais, sénégalais ou égyptien confrontés eux aussi à la rue, s'est engagé à faire baisser les prix en jouant sur les rares leviers que l'Etat maîtrise encore. La recette n'est pas de celles que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale préconisent car elle pèse sur les finances publiques.

Seule la gravité de la situation a amené les institutions financières à se montrer plus accommodantes vis-à-vis des pays en développement. Le gouvernement égyptien a ajouté une mesure plus radicale : l'interdiction temporaire d'exporter le riz produit localement.

Aucun pays n'est à l'abri de troubles. A Dakar, une manifestation interdite "contre la vie chère" a dérapé dimanche 30 mars, trois mois après l'annonce de mesures pour contenir l'inflation : suppression de taxes sur le riz, création de "magasins témoin" exemplaires par la modération de leurs prix, diminution du traitement des ministres et même du chef de l'Etat. Les mesures n'ont pas produit l'effet escompté. "Les commerçants n'ont pas joué le jeu et l'Etat n'a plus les moyens de contrôler", constate Mamadou Barry, de l'ONG sénégalaise Enda.

Au Maroc, secoué lui aussi par des manifestations "contre la vie chère", des rassemblements sont prévus en avril. La marge de manoeuvre du gouvernement est réduite. Cas rare en Afrique, une "caisse de compensation", prend partiellement en charge, au Maroc, la hausse des produits de première nécessité mais son enveloppe, augmentée dans le budget 2008, sera épuisée cet été.

En Mauritanie où l'autosuffisance alimentaire ne dépasse pas 30 %, la situation est encore plus dramatique. Incapable de financer l'importation de denrées agricoles, le pays va connaître "une crise alimentaire sérieuse en 2008", a prévenu le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies 

Au Burkina Faso, une commission parlementaire "contre la vie chère" a été installée après les manifestations de la mi-mars dans plusieurs villes . Les syndicats appellent à une "grève générale" les 8 et 9 avril pour réclamer des augmentations de salaires, le contrôle des prix et la réduction des taxes sur les carburants.

Conseiller pour l'Afrique au Fonds monétaire international (FMI), Eugène Nyambal estime que la situation est le résultat des politiques prônées par les institutions financières internationales. Depuis des décennies elles ont encouragé les cultures d'exportation comme le coton, au détriment des cultures vivrières qu'il était plus avantageux d'acquérir, à bas prix, sur le marché international. Elles ont aussi poussé au démantèlement des structures de contrôle des prix. "La plupart de ces pays attendent des solutions de la Banque mondiale ou du FMI qui sont eux-mêmes dépassés par les évolutions récentes", ajoute-t-il, insistant sur les conséquences des troubles actuels sur les régimes en place qui n'ont pas développé de politique de soutien à l'agriculture locale. Jeudi soir, à l'occasion de la fête de l'indépendance, le président sénégalais Abdoulaye Wade a ainsi annoncé la relance d'un "programme national d'autosuffisance" agricole.

La Banque mondiale a fait amende honorable dans son dernier rapport annuel et mis l'accent sur la renaissance des cultures vivrières. Il faudra des années pour modifier le modèle de développement.

Philippe Bernard et Jean-Pierre Tuquoi


Article paru dans l'édition du 05.04.08

 

Matières premières agricoles : des hausses de prix explosives

 

LE MONDE | 04.04.08 | 14h14  •  Mis à jour le 04.04.08 | 14h14




Un mort à Abidjan, en Côte d'Ivoire, mardi 1er avril, plusieurs dizaines de manifestants incarcérés au Sénégal lundi 31 mars, ainsi qu'au Burkina Faso, et au Cameroun dans les jours précédents : la liste s'allonge de protestations plus ou moins pacifiques "contre la vie chère". En 2007, c'était au Mexique et au Maroc.


Car "la vie chère", c'est l'explosion des prix alimentaires sous l'effet de la hausse générale des matières premières agricoles : selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), ils ont augmenté de près de 40 % en 2007 au niveau mondial. Le blé (au plus haut depuis vingt-huit ans), le maïs, le riz, le soja, le colza ou l'huile de palme ont vu doubler, voire tripler, en deux ans leurs cours au grand dam des populations pauvres dont les revenus ne progressaient pas autant.

Par la voix de son président, Robert Zoellick, la Banque mondiale a décrété, mercredi 2 avril, qu'il fallait de toute urgence lancer un "new deal" alimentaire pour éviter que 33 pays connaissent des troubles politiques et sociaux.

Des causes multiples.  Ces hausses sont dues à une demande accrue des pays émergents suscitée par la poussée démographique, mais aussi par une hausse du niveau de vie en Asie. Le monde agricole n'a pas pu suivre cette poussée de la demande, car les terres se raréfient en raison de l'urbanisation accélérée, en Chine comme en Inde, et à cause d'une productivité agricole toujours insuffisante dans les pays en développement. Le réchauffement climatique contribue à aggraver les phénomènes de sécheresse ou d'inondation qui détruisent les récoltes. La hausse des prix de l'énergie a provoqué celle des intrants (semences, pesticides, engrais).


L'utilisation des céréales, de la canne à sucre et des oléagineux pour la fabrication d'agrocarburants a encore aggravé la situation. La spéculation a profité de ces tensions pour jouer les prix agricoles à la hausse et placer des capitaux sur ces marchés devenus un refuge contre les fluctuations du dollar ou contre l'inflation renaissante.

Le riz, dont le prix a augmenté de 30 % en deux semaines - "du jamais-vu", selon Patricio Mendez del Villar, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) -, est un cas d'école : ce petit marché subit les aléas climatiques de l'Australie et les réactions protectionnistes de la Thaïlande, du Vietnam, de l'Inde, de l'Egypte, etc. Les fonds d'investissement en ont donc fait un "véhicule" spéculatif de choix depuis trois mois. Aux Philippines, à Madagascar, au Sénégal, la colère populaire enfle.

Des populations particulièrement fragiles. Contrairement aux pays occidentaux où la part de l'alimentation dans les revenus des ménages atteint 10 % à 20 %, elle est de 60 % à 90 % dans les pays pauvres. L'augmentation des cours des céréales y est par conséquent plus sensible, surtout pour les urbains, qui ne produisent pas de denrées.


Les pays eux-mêmes sont plus ou moins fragilisés, selon leurs dépenses pour les importations de blé, de riz ou de maïs, bases de l'alimentation mondiale. Parmi eux, ceux que la FAO appelle les pays à faible revenu et déficit vivrier (PFRVD), souvent situés en Afrique, sont dans des situations très difficiles. Si le volume de leurs importations pourrait légèrement diminuer en 2008, du fait de bonnes récoltes, l'envolée des céréales et du fret devrait tout de même alourdir leur facture de 35 %, pour la deuxième année consécutive. Et de 50 % en Afrique, notamment au Maroc, au Lesotho et au Swaziland.

Des remèdes à double tranchant. Pour sécuriser leurs approvisionnements en denrées à prix accessibles aux consommateurs, les Etats, quand ils en ont les moyens, ont pris différents types de mesures, en jouant sur la production, les exportations ou les importations. Mais les marchés agricoles étant très petits (seulement 17,2 % des volumes totaux de blé sont échangés sur le marché mondial, 12,5 % du maïs, 7 % du riz), chaque décision crée, par ricochet, davantage de tensions ailleurs.


La FAO s'alarme de telles initiatives. "Ce n'est pas avec des décisions unilatérales que le problème se réglera", déclarait son directeur général, Jacques Diouf, fin janvier dans Le Monde, appelant les Etats à prendre des décisions stratégiques en matière d'alimentation mondiale, mais collectivement.

Où produire plus ? Sachant que, dans les pays développés, la productivité et les surfaces sont à leur plus haut niveau, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et la FAO ont appelé, mi-mars, les pays d'Europe de l'Est et de la Communauté des Etats indépendants - Russie, Ukraine et Kazakhstan particulièrement -, à doper leur production. Leur potentiel est important : près de 23 millions d'hectares de terres arables n'y sont plus utilisés pour l'agriculture depuis quelques années, et 13 millions pourraient être récupérés sans "coût environnemental majeur". Mais tout est question d'investissement des secteurs publics et privés.


L'Amérique du Sud est l'autre réservoir foncier potentiel et pour toutes les cultures ; par exemple, on estime à quelque 20 millions d'hectares les superficies qui pourraient être mises en culture au Mato Grosso brésilien. Cette extension ne pourrait se faire qu'au détriment de la forêt amazonienne et devrait donner lieu à des débats sur les équilibres écologiques.

Laetitia Clavreul et Alain Faujas

Des stocks toujours plus bas

Même si la production de céréales a augmenté en 2007, et devrait, selon la FAO, encore progresser en 2008, elle ne permet pas de satisfaire la demande mondiale, en forte hausse. Par conséquent, d'une année sur l'autre, les stocks mondiaux s'amenuisent.

A la fin de la campagne 2008, ces stocks devraient avoir perdu encore 5 %, et leur volume devrait être le plus faible depuis 1982. La diminution des stocks de blé devrait être particulièrement importante, estime la FAO. Ce qui explique que la tension sur les prix devrait continuer.

 

Article paru dans l'édition du 05.04.08

 

 

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4 avril 2008 5 04 /04 /avril /2008 15:05

 

 

News Press 04/04/2008 10:13

 

Lors de son déplacement en Afrique, du 3 au 7 avril, le président de la Croix-Rouge française, Jean-François Mattei, inaugurera le centre de santé Henry Dunant situé à Bangui (Centrafrique) et visitera l'hôpital de Sibut (Centrafrique). Ces deux programmes rentrent dans le cadre de l'initiative santé, projet mené conjointement par la Croix-Rouge française et la Croix-Rouge centrafricaine.


En Afrique, des systèmes de santé défaillants

Le projet "initiative santé" a vu le jour en 2005, suite à un constat alarmant : dans beaucoup de pays africains, le système de santé est défaillant et ne couvre pas les besoins des populations locales, notamment ceux des plus vulnérables.

Or, la santé est un élément moteur du développement durable. La Croix-Rouge a tout naturellement sa place dans ce champ, qu'elle se doit de réinvestir. Forte de son expérience, la Croix-Rouge française épaule ses sociétés soeurs africaines pour améliorer la réponse sanitaire dans leurs pays respectifs, à travers le projet "initiative santé".

Celui-ci comporte deux objectifs : renforcer l'accessibilité aux soins, et améliorer la qualité de ceux-ci. Cette initiative passe par le renforcement des capacités des sociétés nationales de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge à participer à l'amélioration du système sanitaire de leur pays.


Renforcer l'accessibilité aux soins

Après un recensement des établissements de santé dans le pays, la Croix-Rouge française propose à sa société soeur un appui, notamment financier, pour remettre à niveau les structures existantes.

Dans la plupart des cas, il s'agit de réhabiliter des centres de santé, de fournir l'équipement médical, de permettre l'approvisionnement régulier en médicaments et consommables, et d'appuyer la formation du personnel aussi bien sur les actes médicaux que dans la gestion du centre.

Pour ces projets, la Croix-Rouge française implique son réseau, en faisant activement participer ses délégations départementales à la gestion financière, à la logistique...


Améliorer la qualité des soins

Parallèlement, la Croix-Rouge française agit sur le volet de la formation du personnel paramédical (infirmiers, sages-femmes...). En France, la Croix-Rouge forme chaque année 10% du personnel dans le secteur sanitaire et social. Elle peut donc faire profiter ses sociétés soeurs de ce savoir-faire reconnu.

Les activités menées dans le cadre du projet "initiative santé" sont diverses : rédéfinir le curriculum des filières de formation, développer la formation des formateurs, réhabiliter les lieux de stage et les infrastructures des écoles, fournir du matériel pédagogique...

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4 avril 2008 5 04 /04 /avril /2008 15:00


BANGUI, 2 avril 2008 (IRIN) - Connus sous le nom de coupeurs de route, de Zaraguinas ou tout simplement de bandits, les gangs de criminels qui tuent, procèdent à des enlèvements contre rançon, pillent et incendient les maisons constituent actuellement la plus grande menace qui pèse sur les populations civiles du nord de la République centrafricaine (RCA).

Leurs agressions ont contraint des dizaines de milliers de personnes à fuir leurs villages pour trouver refuge dans la brousse, où elles vivent dans des conditions précaires. Ces violences ont également limité l'accès des populations aux champs et aux marchés, réduit les importations de produits sur les principales routes commerciales provenant notamment du Cameroun, et retardé le rapatriement des réfugiés centrafricains vivant au Tchad voisin.

« Ces criminels constituent la principale menace à la sécurité du pays », a expliqué à IRIN Jean-Sébastien Munie, responsable du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) en RCA.

Ces groupes sont bien organisés, bien informés et en grande partie composés de ressortissants étrangers, qui traversent les frontières poreuses du Tchad et du Cameroun, et viennent même parfois de pays aussi lointains que le Nigeria ou le Niger.
Rien ne résiste à ces groupes de criminels. En RCA, pays dont la superficie est à peu près égale à celle de la France et où les infrastructures de l'Etat sont quasi inexistantes, en dehors de la capitale, l'armée nationale, connue sous le nom de FACA, ne compte que 5 000 hommes, dont seule la moitié serait en service actif.

Pendant des années, la RCA et le Tchad voisin ont été ravagés par de nombreuses guerres civiles, rébellions et mutineries qui ont conduit à une prolifération des armes et à une confusion entre les bandits et les rebelles. Bien que la RCA soit le principal sujet de cet article, le banditisme et les enlèvements ont pendant longtemps constitué un problème transnational dans cette région, une situation favorisée par des frontières peu hermétiques entre les deux Etats et alimentée par un sous-développement et un chômage chroniques et endémiques.

Aggravation des conditions de sécurité

Le coup d'Etat militaire, qui a porté au pouvoir le général François Bozizé en 2003, a aggravé les conditions de sécurité dans le nord de la RCA. Bon nombre de ceux qui ont aidé l'ancien chef d'Etat-major des armées à prendre le pouvoir à Bangui, notamment les mercenaires tchadiens, se sont depuis reconvertis eux aussi dans le banditisme, considérant que M. Bozizé n'avait pas tenu les promesses de récompense qu'il leur aurait faites.

L'aggravation des conditions de sécurité dans le nord-ouest du pays était l'une des raisons invoquées pour justifier la formation de l'Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), un mouvement rebelle constitué en partie de groupes d'autodéfense, mis sur pied pour protéger les villages contre les agressions des Zaraguinas. Pourtant, l'ARPD elle-même a été accusée à maintes reprises de violations des droits humains, notamment d'enlèvements et de pillages.

Selon l'International Crisis Group, entre autres sources, des Zaraguinas feraient partie de l'APRD.

« Beaucoup de personnes sont rebelles le jour, et Zaraguinas la nuit », a indiqué un représentant d'une organisation humanitaire présente à Bangui.

Mais depuis quelques mois, les agressions des Zaraguinas en RCA sont « mieux organisées, plus brutales et violentes, et sont perpétrées par des groupes plus importants de 10 à 15 personnes », selon Annie Raykov, porte-parole du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

« Désormais, le problème touche presque tout le pays », a indiqué Olivier Bercault, chercheur à Human Rights Watch, à l'issue d'une tournée en RCA.

« La chaîne de commandement de l'APRD est en déliquescence et certains rebelles en profitent peut-être pour empocher des revenus supplémentaires ; ce sont certainement des rebelles tchadiens qui, battant en retraite, cherchent à gagner de l'argent avant de retourner au Tchad, ou des déserteurs de l'armée tchadienne qui se livrent à la même activité ; c'est sûrement aussi la politique répressive que mènent les autorités camerounaises contre les Zarguinas qui a poussé bon nombre de ces bandits à opérer en RCA », a-t-il poursuivi.

Un pays sans loi, ni justice

Selon plusieurs rapports sur la RCA et les entretiens réalisés par IRIN, parce qu'il n'y a pas de réelle autorité dans le pays depuis plusieurs décennies, celui-ci attire toutes sortes de criminels armés.

Les bandits prolifèrent dans un « environnement extrêmement pauvre, où il n'y a ni loi, ni justice, et où règne l'impunité », a expliqué M. Munie d'OCHA.

Au début, ces bandits étaient essentiellement des braconniers. S'il est vrai qu'il y avait quelques affrontements avec les forces de sécurité, les civils étaient généralement épargnés et recevaient même de la nourriture, des produits ménagers et des fusils de chasse en échange de leur silence.

Plus tard, le butin prisé par ces bandits n'était plus les animaux sauvages braconnés, mais les marchandises importées en RCA, pays enclavé, à partir des Etats voisins. Au petit matin, des bandits de grand chemin bien armés tendaient des embuscades aux convois de marchandises ou attaquaient les villes commerciales des zones frontalières. Le meurtre, au passage, de quelques civils permettait de décourager toute velléité de résistance.

Le gouvernement a réagi en fournissant une escorte armée aux convois, occasionnant ainsi des affrontements fréquents et violents avec des groupes de Zaraguinas. Le climat de peur et d'insécurité qui s'est alors installé dans le nord de la RCA a considérablement réduit le flux des convois de marchandises et poussé les bandits à reprendre les vols de bétail - une activité qui était devenue très courante dans toute la région lorsque les puissances coloniales avaient mis fin à la pratique endémique de l'esclavage local.

Les M'bororos, une ethnie qui considère le bétail comme un élément déterminant du statut social et de l'identité de l'individu, ont particulièrement été ciblés, au point que bon nombre d'entre eux ont abandonné leur mode de vie traditionnel, fondé sur le nomadisme.
Lorsqu'un éleveur de bétail ne donnait pas le nombre de têtes demandé par les Zaraguinas, l'enlèvement d'un de ses enfants ou de sa femme était une pratique courante pour l'obliger à fournir le nombre exigé.

Agressions fréquentes

Aujourd'hui, le versement d'une rançon en espèces, dont le montant se chiffre parfois à plusieurs milliers de dollars, est devenu la norme.

Confrontés à la perspective de devoir cultiver la terre pendant de nombreuses années avant de pouvoir reconstituer leur cheptel, bon nombre de ces éleveurs sans ressources se seraient eux-mêmes reconvertis dans le banditisme.
Plus récemment, les criminels s'en prennent de plus en plus aux agriculteurs sédentaires, notamment à ceux des préfectures d'Ouaham et d'Ouaham-Pende, des régions qui, historiquement, font partie des plus grandes zones productrices de coton, de manioc, d'arachide et de sorgho. Ces agressions deviennent plus fréquentes pendant la période de soudure, d'octobre à mai, et se traduisent souvent par le pillage de toutes les réserves alimentaires et de tous les outils agricoles des villages.

Pour les acteurs humanitaires, répondre à des besoins aussi vitaux pose un réel problème. « La distribution des vivres peut occasionner des risques supplémentaires car elle pourrait attirer des rebelles ou des coupeurs dans les zones de distribution et les pousser à extorquer [l'aide] alimentaire aux populations bénéficiaires », selon un rapport conjoint du Programme alimentaire mondial (PAM) et du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), publié en octobre 2007.

Les Zaraguinas « font ce qu'ils veulent parce qu'ils savent que les forces de l'ordre ne sont pas assez nombreuses pour assurer la sécurité dans tout le pays », a dit Antoine Gambi, président du comité préparatoire du séminaire sur la réforme du secteur de la sécurité.

« Ils jouissent de la complicité des notables de certaines localités, qui sont à leur solde. Et parmi ces bandits, on retrouve des déserteurs des armées de pays voisins », a-t-il poursuivi.

« Les bandits portent réellement atteinte à l'économie de bon nombre de régions [.] Ils pillent la nourriture de sorte que les populations n'ont plus rien à manger et qu'elles ne peuvent pas toujours aller dans la brousse pour cultiver leurs champs », a indiqué à IRIN Thomas Orungai, responsable de la Croix-Rouge centrafricaine dans la localité de Bossangoa (nord de la RCA).

Depuis la fuite des villageois des localités voisines, en janvier 2008, la population de Bossangoa a augmenté de plus de 1 000 habitants, a poursuivi M. Orunga.

Des villages abandonnés

A deux reprises, les Zaraguinas ont attaqué la localité de Boudigui-Boyange, environ 25 kilomètres à l'ouest de Bossangoa, dans la préfecture d'Ouaham. La première fois, en juillet 2007, ils ont pris tout ce qu'ils pouvaient emporter. Tous les villageois s'étaient enfuis pour se réfugier dans la brousse toute proche.

Un autre groupe de bandits a attaqué le village en octobre ; ils ont tué deux villageois et ont systématiquement incendié toutes les maisons et leur contenu, promettant de revenir pour refaire la même chose si le village était reconstruit.

Bravant cette menace, la plupart des habitants ont quitté la brousse et sont revenus au village pour reconstruire leurs maisons. « Nous savons que les autorités ne peuvent rien faire pour nous protéger », a dit Noël, un habitant du village. « Le gouvernement a envoyé trois soldats dans une ville voisine, mais ils sont partis au bout de quelques jours ».

Sur les recommandations des autorités locales, 22 jeunes gens de Boudigui-Boyange ont créé un groupe d'autodéfense, mais leur arsenal, composé de 16 fusils de chasse vétustes, d'une seule boîte de munitions et d'une variété d'armes traditionnelles, ne peut pas égaler la puissance des fusils AK-47 que les Zaraguinas utilisent généralement.

« Ils sont partout, près de nos champs, de nos terrains de chasse, si bien que nous avons peur de nous y rendre », a expliqué un villageois.

À la recherche d'un sanctuaire

Sur un tronçon de route, à quelque 200 kilomètres au nord-est de Bossangoa, près de la frontière tchadienne, les risques d'agression sont si grands que même la brousse est considérée comme trop dangereuse.

Plus de 1 000 personnes, parmi celles qui ont fui des villages de cette région, vivent actuellement dans un camp pour personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays (PDIP) - le seul camp du pays - ouvert dans la ville de Kabo avec l'aide de Solidarités, une organisation non-gouvernementale française. Ce camp comprend quelques centaines d'habitations de fortune construites par les résidents eux-mêmes. Certaines sont recouvertes de bâches, d'autres de paille, mais aucune de ces habitations ne résistera aux fortes pluies qui s'abattront sur la région dans les prochaines semaines.

« Je ne peux pas retourner dans mon village », a affirmé à IRIN Hubert, 42 ans, père de huit enfants. « Les Zaraguinas ont tué 13 personnes, lorsqu'une trentaine d'entre eux, des Tchadiens pour la plupart, nous ont attaqué en novembre dernier [.] Ils continuent de sévir sur la route [du village] où nous vivons. S'il n'y a pas de sécurité, comment pouvons-nous retourner chez nous ? »

Lorsque le camp a été ouvert à la fin de l'année 2007, ce n'était qu'un camp de transit provisoire pour les personnes déplacées victimes d'agressions périodiques, commises par les rebelles. Aujourd'hui, alors qu'aucune solution n'est envisagée pour mettre fin au banditisme et que les premières pluies ne tarderont pas à tomber, il semble nécessaire de construire un camp permanent pour ces déplacés, coupés de leurs maisons.

C'est un aspect sensible de la stratégie humanitaire. En effet, en transformant le site de Kabo en camp permanent, on risque de prolonger indûment l'absence des agriculteurs de leurs champs et de créer des tensions avec les résidents permanents de la ville, qui pourraient se sentir moins bien traités que les PDIP.
Etapes suivantes ?

« Il est très difficile de lutter contre le banditisme », a expliqué à IRIN Toby Lanzer, le Coordinateur humanitaire des Nations Unies en RCA. « Il faut donner les moyens nécessaires à la police, à la gendarmerie et à l'armée, ainsi qu'au système judiciaire, pour que le pays puisse être dirigé conformément à la loi ».

Ce renforcement de capacités - et la fin de l'impunité - sont précisément l'objectif de la réforme de l'ensemble du secteur de la sécurité. Mais ce processus n'est pas encore tout à fait engagé et il faudra bien des années pour le mener à bien. En outre, sa réussite dépendra en partie de la conclusion d'un accord de paix global avec deux groupes rebelles et des progrès réalisés dans le cadre du dialogue politique national.

Parallèlement, les FACA, peut-être piquées au vif par les accusations faisant état de leur inaction face au banditisme, et par l'ampleur relativement faible du banditisme dans certaines régions contrôlées par les rebelles, ont lancé une série d'opérations. Ainsi, début 2008, l'armée a mené plusieurs attaques contre les nombreuses bases des Zaraguinas, mais pour la plupart, ces opérations n'ont servi qu'à disperser les criminels. Lors d'une de ces opérations, l'armée a fait plusieurs prisonniers, et selon une source bien informée, 10 d'entre eux ont été exécutés.

Le général Gambi, président du comité préparatoire du séminaire sur la réforme du secteur de la sécurité, a expliqué à IRIN que les opérations des FACA pourraient être plus efficaces si l'armée disposait d'hélicoptères pour acheminer les troupes dans les zones où sévissent les Zaraguinas. « Mais nous n'avons pas les moyens de mener de telles opérations. Nous avons besoin d'hélicoptères ».


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Centrafrique-Presse.com - dans Nation
3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 21:59
 
 

APA-Yaoundé 03-04-2008 (Cameroun) Le ciment de grande consommation est devenu invisible depuis une semaine dans les quincailleries de la capitale camerounaise, Yaoundé, a constaté APA sur place.

A l’entrée sud de la ville, des revendeurs en pick-up se postent dès les premières heures de la journée, attendant d’intercepter d’éventuels camions de marchandise en provenance de l’usine des Cimenteries du Cameroun (CIMENCAM), située à quelque 250 kilomètres de la métropole économique, Douala.

Les rares gros porteurs entrant dans la ville sont aussitôt pris en chasse, jusqu’aux lieux de déchargement où la cargaison s’envole aussitôt.

Ce ciment est alors revendu au prix fort, dépassant parfois les 10.000 FCFA le sac, contre 5500 FCFA (4900 FCFA précédemment), selon les nouveaux tarifs entrés en vigueur depuis le 28 mars dernier.

Cette pénurie intervient alors que CIMENCAM, filière du groupe français Lafarge, a engagé un bras de fer avec le gouvernement à la suite desdites augmentations de prix qui, en réalité, avaient été différées à la suite des émeutes contre la vie chère de février dernier.

Dans une correspondance adressée le 26 mai dernier au directeur général de CIMENCAM, qui détient le monopole de ce matériau au Cameroun et dans la sous-région, le secrétaire général des services du Premier ministre, Jules Doret Ndongo, jugeait «cette décision inopportune et incompréhensible».

Il estimait cette mesure «en contradiction avec les récentes mesures prises par le Chef de l’Etat dans le sens de la baisse des prix des produits de première nécessité et de l’amélioration substantielle du pouvoir d’achat des ménages».

A l’appui de son argumentaire M. Ndongo invoque l’ordonnance du 7 mars dernier du chef de l’Etat, Paul Biya, qui entre autre baisse de 10 à 5 pour cent les droits de douane sur l’importation du clinker, composant réactif du ciment.

Nullement démontés, les responsables de CIMENCAM justifient la hausse des prix du ciment par l’«inflation du prix du pétrole, l’augmentation des coûts des matières et la croissance vertigineuse des prix du fret à des niveaux jamais atteints, depuis plus de 24 mois, mais aussi un renchérissement accéléré des principaux coûts de production».

De plus, l’opérateur annonce des besoins financiers de l’ordre de 26 milliards FCFA, en terme de nouveaux investissements destinés à satisfaire la demande en forte croissance.

 
 
 
 
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Centrafrique-Presse.com - dans AFRIQUE
3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 21:54

 

APA – Douala 03-04-2008 - (Cameroun) Le dispositif sécuritaire sera renforcé au sein de l’armée camerounaise avec le recrutement annoncé d’un millier de commandos entre les mois d’avril et de juillet 2008, a annoncé jeudi, le ministre camerounais de la Défense Remy Ze Meka.

Le recrutement de 1000 commandos qui intervient deux après le recrutement de 600 commandos a pour objectif de lutter contre le grand banditisme notamment dans les grandes villes de Douala et de Yaoundé ainsi que dans les zones frontalières de la Centrafrique, du Nigeria et du Tchad.

Selon des sources sécuritaires, les actions des mouvements rebelles en Centrafrique et au Tchad en l’occurrence, nécessitent le renforcement des mesures de sécurité à la frontière.

«Pour ce qui est des villes de Douala et de Yaoundé, il est question de prêter main forte au dispositif existant en multipliant le cas échéant, les actions mixtes et concertées de contrôle entre la police, la gendarmerie et l’armée », a précisé une source militaire.

D’après certaines indiscrétions, la vague de contestation populaire qu’a connu le Cameroun entre le 23 et le 28 février 2008 où la population s’était massivement élevée contre la vie chère serait à l’origine de ce recrutement.

Dans une ville de Douala qui était de loin, le centre de la contestation populaire, l’Etat a dû déployer les gros moyens de sécurité pour ramener de l’ordre, avec le renforcement en hommes et en matériels des forces de première, deuxième et troisième catégories.

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3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 21:29



Hausse des prix fulgurante

3 avril 2008. - Les prix de la plupart des produits de première nécessité ont augmenté récemment de 50% voire 100% en Centrafrique où les fonctionnaires sont déjà en situation difficile en raison de retards de plusieurs mois du versement des salaries. La boîte d'allumettes est passée de 25 à 35 francs CFA.

Le sachet de lait proposé à 100 FCFA coûte désormais 225 FCFA. La boîte de lait en poudre est passée de 2.250 à 2.800 FCFA voire 3.500 FCFA. La boite de lait concentré passe de 650 F à 900 FCFA. Le paquet de sucre est lui passé de 900 à 1.100 francs. Le sac de ciment a lui doublé passant de 8.500 FCFA à 16.500 FCFA ou 17.000 FCFA.

Un euro vaut environ 6,56 francs CFA

"Si le gouvernement ne fait rien pour que les prix chutent, on avisera. Déjà nous ne sommes pas payés régulièrement, donc nous ne pouvons pas nous imposer d'autres souffrances", a déclaré à l'AFP Pierre-Lebrun Siovène, dirigeant syndicaliste.

"Mon chantier est bloqué depuis le mois de novembre dernier, quand les prix du ciment ont commencé à augmenter. Pour l'instant je ne peux pas payer un seul sac", explique Jean-Simon, 54 ans, cadre de banque.

"Comment juguler la hausse des prix?. Les consommateurs ont l'impression que les autorités laissent faire et ils croulent sous les poids des prix", écrivait le quotidien Le Confident le 2 avril 2008.

Les commerçants justifient cette flambée par la TVA qui a légèrement augmenté passant de 18% à 19% mais un haut cadre du ministère des Finances a assure que "la majorité des commerçants ne sont pas en règle vis-à-vis du fisc. Ils ne déclarent pas exactement ce qu'ils perçoivent".

Hausse des prix: Embarras à Bangui

Bangui - 03/04/2008 (PANA) - La ministre centrafricaine du Commerce, Mme Béatrice Emilie Epaye, qui s’adressait mercredi aux députés lors d’une séance d’interpellation consacrée à la flambée des prix, a déclaré que le gouvernement ne prendra de mesures "qu’au prorata de ses moyens".

"Pour prendre des mesures, il faut avoir les moyens", a affirmé Mme Epaye, précisant que "les taxes votées dans la loi de Finances ont déjà été comptabilisées" et ne sauraient être supprimées ou réduites en l’absence de ressources de substitution.

Ce genre de solutions proposées par certains élus n’est envisageable que pour les pays enregistrant des excédants budgétaires, à l’instar des pays voisins de la République centrafricaine producteurs de pétrole, a-t-elle encore indiqué.

Se faisant l’écho de l’émoi suscité dans l’opinion par la hausse des prix, les parlementaires ont notamment proposé au gouvernement une réduction de la TVA et la mise en place d’une structure de contrôle des prix ayant pour mission de traquer les spéculateurs.

Ces mesures pourraient concerner les denrées alimentaires telles que le lait, le sucre, l’huile et la farine de blé et les matériaux de construction tels que le ciment et la tôle ondulée.

A titre indicatif, le prix du lait en poudre est passé de 2.250 francs CFA à 3.500 FCFA en l’espace de 2 mois, tandis que celui du bidon d’huile est passé de 800 FCFA à 1.500 F CFA et celui du sac de ciment de 10.000 à 19.000 FCFA.

Déjà en juillet 2007, le ministère du Commerce avait décidé de rationner le ciment et d’en bloquer le prix à 10.015 FCFA le sac alors qu’il se vendait déjà autour de 15.000 FCFA en raison de la rareté de ce produit dont la consommation moyenne en République centrafricaine est estimée à 3.000 tonnes par mois.

Les importateurs justifient la tendance à la hausse des prix par la répercussion des taxes instaurées par l'Etat et par les nombreuses tracasseries auxquelles ils sont confrontées sur l'axe routier Douala-Bangui, principal voie de ravitaillement de la République centrafricaine, pays dépourvu de façade maritime.
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3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 18:49

 


jeudi 3 avril 2008.

 

L’accord de paix signé par les présidents tchadien et soudanais à Dakar, en marge du sommet de l’OCI, n’a été qu’une grosse farce. Un de ces moments où les deux voisins se parent du manteau d’hommes de paix et de dialogue pour distraire l’opinion. Mais ces accolades ne peuvent plus tromper car pendant ce temps, Idriss Déby Itno et Omar Hassan El-Béchir ont camouflé chacun une arme dans le dos , prêts à se poignarder à la moindre occasion.

 

Les dernières accusations tchadiennes contre le pouvoir soudanais viennent nous rappeler ce jeu malsain auquel se livrent N’Djaména et Khartoum. Les deux régimes ont un atout qui fait leur force et leur permet d’entretenir de façon durable un climat de belligérance : le pétrole.

Grâce à l’or noir, ils ont les moyens de lever des armées parallèles pour se déstabiliser mutuellement. Grâce au pétrole aussi, ils bénéficient d’amitiés indéfectibles. Déby a ses Français et El-Béchir ses Chinois. Cependant, le président soudanais semble plus serein depuis que le foyer de la rébellion sudiste s’est éteint en même temps que son leader charismatique John Garang. Aujourd’hui, le pays connaît un boom économique à telle enseigne que certaines de ses entreprises ont une dimension panafricaine, notamment dans le domaine des télécommunications. Tant et si bien qu’en dépit de la campagne internationale sur les atrocités commises au Darfour, le Soudan n’a jamais été vraiment inquiété. Le régime soudanais a réussi à isoler, à marginaliser et à réduire ce problème dans une enclave, loin de Khartoum et de ses lumières.

Ce n’est pas le cas de Déby dont la fébrilité trahit une certaine fragilité face aux hordes rebelles toujours prêtes à fondre sur N’Djaména. Autant le régime soudanais, sous la pression américaine, a consenti à partager le pouvoir avec les Sudistes, autant Déby s’échine à rester seul maître à bord. Pour se maintenir dans un équilibre aussi fragile, il n’a donc d’autre option que de brandir en permanence l’épouvantail de l’agression extérieure. Or, au-delà de la rivalité entre les deux pays, il y a un problème purement interne au Tchad que le pouvoir refuse de reconnaître. Le Soudan alimente certes la rébellion tchadienne, mais Déby ne fait rien pour enlever tout argument à ses opposants armés, de continuer la guerre. Il se refuse à la mise en oeuvre d’un train de mesures devant conduire à l’avènement d’un véritable Etat de droit. Déby, c’est l’art de la diversion permanente. Et la technique paie, puisqu’elle lui a permis de se maintenir au pouvoir, contre vents et marées, depuis 1990.

 

Le climat de guerre permet ainsi au régime de s’exonérer d’une politique axée sur la bonne gouvernance, avec des élections libres pouvant mener à l’alternance. Médias muselés, opposants embastillés, institutions verrouillées, ressources du pétrole gaspillées, le Tchad offre l’image d’un pays aux antipodes de la démocratie. Dans ces conditions, il ne faut pas rêver d’un avenir apaisé proche pour le Tchad. Déby, surnommé à une certaine époque le "Napoléon africain", tient donc son pays sous sa férule et par les armes, sans qu’aucune perspective d’ouverture démocratique pointe à l’horizon. Le président ne semble d’ailleurs pas le seul à profiter de cet état d’exception. Marchands d’armes, sociétés pétrolières, conseillers occultes et affairistes de tous ordres en profitent pour exercer une prédation sur le pays, sous le contrôle bien sûr du chef de l’Etat et de son clan.

Le soutien de la France est aussi essentiel à la survie politique du régime tchadien. Il rend Déby myope et orgueilleux, assuré qu’il est de pouvoir toujours bénéficier de la protection d’une des premières armées au monde, tant qu’il préservera les intérêts de Paris. D’où la propension du maître de N’Djamena à préférer la mitrailleuse à l’urne. Il s’exempte ainsi de regarder son peuple en face, dont les aspirations sont connues : paix, démocratie et développement. Avec les ressources pétrolières, les Tchadiens devaient enfin connaître le bonheur d’une sécurité socio-économique pleinement garantie, avec l’amélioration de leurs conditions de vie. La Guinée équatoriale est un exemple frappant de ce que le pétrole peut être une chance pour le développement, si les dirigeants le veulent. Mais certains hommes politiques refusent obstinément de supporter le regard de leur peuple, les yeux dans les yeux. Cela reviendrait à assumer les responsabilités qui sont celles dévolues à un dirigeant digne de ce nom. Déby a fait le choix de fuir le regard de son peuple, en dilapidant la manne pétrolière dans une stratégie de la diversion.

 

"Le Pays"

 

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3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 18:43

 



Source: Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires - Integrated Regional Information Networks


Date: 01 2008

 
BOSSANGOA, 1er avril 2008 (IRIN) – L’Association Monam qui regroupe les victimes de viols dans la ville septentrionale de Bossangoa en République centrafricaine (RCA) fait ce qu'elle peut pour continuer de fonctionner, mais le moral est bas et de l'argent manque.
«Nous avons été abandonnés à nous-mêmes. Nous recevons peu d'aide de l'extérieur. Plusieurs de nos membres ont perdu la vie", a déclaré à IRIN / PlusNews la présidente du groupe, Pélagie Ndokoyanga,.

 
Monam, qui signifie "bien commun" dans la langue sango, a été créé en 2006 2001 2002 au milieu des nombreux carnages menant au plus récent de coup d'État qui a conduit François Bozizé au pouvoir en mars 2003.


En plus d’être un forum de solidarité et de procurer des revenus et du bien-être pour les femmes qui ont souffert de la violence sexuelle (VS), Monam vise aussi à lutter contre de tels abus, d'identifier ses auteurs et de lutter contre la stigmatisation des femmes en général et des victimes de viol en particulier. Selon Ndokoyanga, plusieurs membres du groupe ont été abandonnés par leur mari après avoir été violées.


Quand un dépistage du VIH et de conseil a été créé en 2005 à Bossangoa, plusieurs des premiers cas de VIH-positifs sont le fruit d'un viol.


Parmi eux se trouve Ndokoyanga, qui travaille également avec le Bossangoa Association des Personnes vivant avec le VIH.

 
"Il est normal de dire à la famille lorsque l'on est infecté, ce n'est pas un péché», a t-elle dit lorsque plusieurs dizaines de membres de l'association se sont réunis IRIN / PlusNews. "Mais ils sont les premiers à répandre la nouvelle."


«Personne n'a un emploi ici. J'ai tous mes certificats mais je n'ai jamais trouvé un emploi parce que les gens savent que je suis séropositive», a t-elle ajouté.
Les deux organisations souhaiteraient améliorer leurs activités génératrices de revenus tels que la vente d’articles sur le marché mais le manque de capitaux nécessaires, rend difficile la réalisation de tels projets sur le terrain.


Avec l'ONU SIDA, l'estimation de la prévalence du VIH/SIDA en RCA est de 10 pour cent, avec seulement trois pour cent des adultes séropositifs qui parviennent à prolonger leur vie par la thérapie anti-rétrovirale ; il y a donc un besoin clair et urgent d'intensifier l'éducation sur le VIH/SIDA, le dépistage et le traitement, mais la persistance du conflit armé et l'insécurité cela difficile dans de nombreuses régions du pays.


Beaucoup de viols, peu de données

 

Des statistiques détaillées et précises sur le nombre de femmes qui souffrent VEF en RCA ne sont pas disponibles. Cela tient en partie à cause de la stigmatisation qui s'attache à de telles attaques, mais aussi parce que le gouvernement peine fonctions en dehors de la capitale et les institutions humanitaires internationales n'ont que récemment commencé à travailler dans le pays en grand nombre.


À la fin de février 2007, le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a signalé que «sexuels et de violence sexuelle et des grèves de plus de 15 pour cent des femmes et des filles», dans le nord de la Centrafrique.
Ces attaques se sont multipliées pendant la période pré-coup d’état durant laquelle les troubles et les rebelles au début des affrontements en 2006 et au début de 2007.


L'un des principaux domaines de l'enquête ouverte en mai 2007 par la Cour pénale internationale (CPI) à la suite d'une demande formulée par le gouvernement centrafricain, les "nombreuses allégations de viol et d'autres aspects de violence sexuelle perpétrée contre des centaines de victimes signalées ... Lors d'un sommet en 2002/03 de la violence ", selon une déclaration de la CPI.


Le procureur du tribunal suit également de près les cas signalés de violence sexuelle commis après 2005, date à laquelle émergé deux rébellions dans le nord.

 
 « A la suite d'une tentative manquée de coup à la fin de 2002 émerge un schéma de viols massifs et de violences sexuelles perpétrés par des individus armés. La violence sexuelle semble avoir été un élément central du conflit», la déclaration CPI dit en outre qu'au moins 600 Victimes de violence sexuelle ont été identifiés au cours des cinq mois.


Celles-ci comprenaient des femmes âgées, des jeunes filles et des hommes, la CCI a indiqué.
«Il y avait souvent des aspects de cruauté aggravée tels que des viols commis par de multiples auteurs, face à des tierces personnes, parfois avec des parents contraints d’y assister", selon le communiqué, notant que l'impact social de ces crimes "apparaît dévastateur".


Programmes pour descendre lentement le terrain


Pour l'instant, il y a peu d'aide extérieure pour ceux qui sont directement touchés par la violence sexuelle. Les membres de l'Organisation pour la compassion et le développement des familles en détresse (OCODEFAD), une ONG nationale, ont témoigné au sujet des agressions sexuelles contre eux à Bangui auprès du bureau du procureur de la CPI.


OCODEFAD a été fondée par Bernadette Sayo, professeur dans une école secondaire dont le mari a été tué sous ses yeux en 2002 par les rebelles de la RDC alliés du président Ange-Félix Patassé d’alors lors d'une tentative de coup d'Etat. Les hommes armés ont ensuite commis des viols.


OCODEFAD a enregistré des centaines de femmes et des dizaines d'hommes, ainsi que les jeunes enfants et les personnes âgées, victimes de sévices sexuels au cours de cette période de troubles. C'est en grande partie grâce aux pressions exercées par cette organisation nationale et de groupes de défense des droits de l’homme que le gouvernement de Bangui a demandé à la CPI d'ouvrir son enquête.


En termes d'aide étrangère, une ONG, International Rescue Committee (IRC), a mis en place un programme contre la violence sexuelle dans la ville septentrionale de Kaga-Bandoro en mai 2007, en fournissant gratuitement des soins médicaux et un soutien psychosocial pour ses membres, en faisant mieux connaître la violence sexuelle dans les communautés et la tenue de discussions avec les différents groupes militaires.


La langue, ainsi que la stigmatisation, est un obstacle au début. "Il nous a fallu un mois pour avoir une définition du viol. Il n'y a pas de mots pour le dire en sango," Catherine Poulton, coordonnatrice en RCA pour IRC, a dit à IRIN / PlusNews.


Depuis qu'elle a commencé, le programme - qui couvre les ménages le long d'un tronçon de la route 50 km - a traité 1040 cas de violence sexuelle, qui traite des problèmes associés tels que les maladies sexuellement transmissibles, les traumatismes et le rejet par les familles.
Sept autres programmes sont en préparation pour 2008, impliquant des organismes tels que l'ONU Organisation mondiale de la Santé, l'UNICEF, le Fonds des Nations Unies pour la  population et Comité d'Aide Médicale.


Dans le cas de la République centrafricaine, où les données sont encore limitées, les donateurs peuvent avoir besoin de rompre avec la tradition des évaluations détaillées de la recherche d'un problème avant de signer leur chèque. Selon certains analystes, il faut admettre la prévalence généralisée, et l'expérience de IRC, les données issues du programme, plutôt que l'inverse.


Crier pour se faire entendre


Marie Noudjougoto, une activiste communautaire qui a contribué à organiser des centaines de femmes en associations en fonction de leurs villages d'origine, la profession ou la foi religieuse, a profité de la grande Journée internationale de la femme (8 mars) pour défiler  dans la ville septentrionale de Paoua et mettre en lumière comment les femmes ont le plus souffert de la violence en RCA et à promouvoir le rôle que les femmes doivent jouer alors que le pays commence à se reconstruire.


"Ce que nous voulons, c'est la sécurité ... laissez nos maudites sœurs qui ont été violées, brutalisées, traumatisées et endeuillées ont la tranquillité d'esprit et l'espoir d'être des femmes, des mères et des grands-mères», a déclaré Noujougoto après quelque 1500 femmes, regroupées dans leurs différents Associations, ont défilé sur la rue principale de Paoua.
Certaines ont procédé à l’impression d’affiches et banderoles  de leur association, d'autres de simples tableaux noirs avec des inscriptions à la craie telles que "Karé Simbal Association de Lutte contre la Pauvreté».


Beaucoup de femmes portaient le fruit de leurs affaires - des céréales, les légumes et même des briques - sur leurs têtes comme elles ont marché au rythme de trois tambours.
"Nous voulons que les femmes avec un grand" F "soient écoutées, à la maison, sur les marchés, dans les bureaux, même dans les églises et les mosquées ... nous voulons vivre en paix avec l'espoir d'avoir A, par le biais de cette journée, au nom des femmes, un espoir pour la vie, le pardon et la réconciliation », a ajouté Noudjougoto.


Beaucoup de ceux qui ont pris part, comme Bertille, une enseignante, avait marché pendant une journée entière de leurs villages pour assister à la cérémonie. "Nous sommes venus pour montrer que nous sommes des gens qui souffrent», a-t-elle dit à IRIN / PlusNews.
Bertille a raconté comment un dimanche de janvier 2007, une fusillade a éclaté dans son village, situé dans le territoire contrôlé par les rebelles.


«L'armée est arrivée et a mis le feu à 80 maisons et nos champs d'arachide, ainsi que notre stock de semences. Ils ont dit, nous avons soutenu les rebelles», a t-elle dit.
"Après nous sommes restés en brousse sans abri pendant trois mois. Nous avons survécu en mangeant de feuilles sauvages de manioc. Même à l'heure actuelle, il n'est pas facile de trouver de la nourriture", a-t-elle ajouté, en expliquant que l'insécurité et la peur empêchent encore beaucoup de femmes de se rendre à leurs champs, de crainte de l'attaque par des bandits.

 



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3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 12:35

 

 

Légende photo: Ce PC-9 aux couleurs tchadiennes n'a pas seulement servi à l'entraînement. (Keystone)

L'armée tchadienne a bel et bien utilisé un avion d'entraînement suisse Pilatus PC-9 pour des missions de combat. Le gouvernement suisse l'a confirmé pour la première fois vendredi.

Le Tchad a ainsi violé l'accord passé avec la Suisse. Berne envisage d'éventuelles sanctions économiques et politiques contre N'Djamena.

Des éléments «concrets» confirment que le Tchad a utilisé le PC-9 livré par l'entreprise Pilatus (sise dans le canton de Nidwald) en 2006 à des fins militaires, a indiqué vendredi le ministère suisse de l'Economie (DFE).

Lors de sa séance de mercredi, le gouvernement avait chargé le DFE et le ministère des Affaires étrangères (DFAE) «d'étudier s'il y a lieu de prendre des sanctions contre le Tchad». Les services des deux ministères doivent rendre leurs conclusions «dans les prochaines semaines», selon un communiqué du DFE.

Confirmation

Dans ce communiqué, le DFE confirme que le Tchad a utilisé l'avion d'entraînement PC-9 à des fins militaires. En janvier déjà, le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) avait indiqué que l'avion livré au Tchad par Pilatus avait été équipé du système d'accrochage nécessaire à son armement et que l'appareil avait été «probablement» armé.

Le SECO réagissait alors à des informations de médias selon lesquelles l'appareil de la société Pilatus avait été engagé lors de combats dans la région soudanaise du Darfour.

Selon le communiqué diffusé vendredi, «divers indices donnent à penser que l'appareil incriminé a été régulièrement impliqué dans des combats livrés le long de la frontière entre le Tchad et le Soudan». Le Tchad a nié jusqu'ici l'armement et l'utilisation du PC-9 à des fins militaires.



«Violation flagrante»

«L'utilisation de cet avion à des fins militaires est une violation flagrante de la déclaration de destination finale signée par le Tchad» au moment de l'achat, explique le DFE. N'Djamena avait assuré à l'époque que l'avion ne serait utilisé qu'à des fins d'entraînement et qu'il ne serait pas réexporté.

L'appareil de type PC-9 livré en 2006 par l'entreprise Pilatus de Stans n'était pas armé et était destiné uniquement à l'entraînement, rappelle le DFE qui ajoute dans la foulée qu'il va étudier la question d'une adaptation des critères d'autorisation pour l'exportation des avions d'entraînement militaire.

Violents combats

La situation s'est dégradée à la fin janvier au Tchad, une ancienne colonie française. Les rebelles ont tenté de renverser le président Idriss Deby. Des combats violents ont eu lieu à N'Djamena entre les forces gouvernementales et les rebelles au début février.

L'Union européenne (UE) fait actuellement pression pour que N'Djamena négocie avec les groupes rebelles. Bruxelles souligne que l'instabilité nuit aux efforts internationaux visant à venir en aide dans l'Est tchadien au demi-million de réfugiés du Darfour et de Tchadiens déplacés par les troubles.

swissinfo et les agences


 
La Suisse ne devrait plus livrer aussi facilement ses Pilatus à l'étranger. La loi sera revue

03.04.2008 11:56

La Suisse ne devrait plus livrer aussi facilement ses Pilatus à l'étranger à l'avenir. Après l'affaire du PC-9 tchadien, le CF veut durcir les conditions d'exportations d'avions de ce type. Le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de l'économie de préparer une modification de la loi sur le contrôle des biens, a noté jeudi le DFE.

Actuellement, la vente n'est refusée qu'en cas d'embargo international contre le pays acquéreur. Le CF veut qu'il y ait également un refus quand l'Etat destinataire est en proie à un conflit armé ou en cas de risque d'utilisation des avions contre la population civile.

 (SWISS TXT)

Tour de vis aux exportations d'avions

 Après la polémique autour de la vente de Pilatus au Tchad, qui a armé cet avion, le gouvernement décide fixer des conditions plus strictes aux exportations d'avions d'entraînement militaires.

Concrètement, ces exportations ne devraient plus être autorisées si l'Etat destinataire est en proie à un conflit armé interne ou international. L'interdiction s'imposerait aussi lorsque le risque existe que les avions soient utilisés contre la population civile.

Actuellement, la loi ne prévoit un refus de vente qu'en cas d'embargo international contre le pays destinataire ou si une décision similaire a été prise dans le cadre de mesures internationales de contrôle des exportations.

Il revient maintenant au Département fédéral de l'économie (DFE) de préparer une modification de la loi sur le contrôle des biens.

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2 avril 2008 3 02 /04 /avril /2008 13:38

 

Par Damien Jayat | Vulgarisateur scientifique | 02/04/2008 | 12H01

 

Ils ont leurs partisans et leurs détracteurs, mais personne ne sait au juste ce qu'ils sont. Les OGM font débat depuis les campagnes d'arrachage des écologistes, mais saviez-vous que ce ne sont pas forcément des plantes et que vous en utilisez déjà beaucoup et depuis longtemps?

 

Un OGM n’est pas forcément une plante

 

A force d’entendre parler de maïs arraché et de Monsanto qui ruine les agriculteurs à coups de RoundUp, on a tendance à croire qu’un OGM est une plante dans laquelle on a inséré des gènes qui ne lui appartiennent pas. Mais un OGM n’est pas forcément une plante. D’après la définition la plus courante, un OGM désigne tout être vivant dont le patrimoine génétique a été modifié par la main et l’éprouvette de l’homme.

Lorsque Fred Griffith découvre en 1928 que deux souches de pneumocoques peuvent échanger du matériel génétique, il met le doigt sur le mécanisme qui permet de fabriquer des OGM. En 1944, Oswald Avery utilise ce même mécanisme pour montrer que l’ADN est bien le support de l’information génétique. Les premiers OGM furent donc des bactéries, dont on exploita les capacités d’échanges d’ADN pour établir des découvertes scientifiques majeures. Depuis cette époque, des milliards de bactéries modifiées ont été concoctées dans tous les labos du monde. Pour le bien de la science et de la médecine.

Les premiers OGM au sens moderne, c’est-à-dire porteurs d’un intérêt médical ou industriel, datent des années 1970, et ce sont encore des petites bêtes: bactéries, levures et champignons filamenteux (du genre moisissures, ce ne sont pas des cèpes tout de même). Les chercheurs entamèrent de grandes parties de Lego, piquant un gène de celui-ci pour le mettre dans celui-là et cultiver celui-là, qui pousse plus vite que celui-ci, afin d’en tirer un profit maximum. Et qui en tira profit? Les labos, les industriels, mais aussi le peuple: la majorité des médicaments sont aujourd’hui produits dans des bactéries, des levures ou des champignons faits exprès. Des OGM, pour ne pas citer le mot.

 

Les plantes, des OGM qu’on digère (mal)

 

Depuis trente ans, les chercheurs sont parvenus à modifier tous les types d’êtres vivants. Des microorganismes d’abord, puis des plantes à usage alimentaire (tabac, tomate, maïs…) ou industriel (peuplier pour la papeterie) ou encore des animaux de laboratoire (souris, rats et on n’oublie pas Dolly).
Quand on se jette un comprimé d’antibiotique derrière la cravate, ce n’est pas la bactérie productrice du médicament qu’on ingère mais seulement le composé actif. Celui-ci a été si bien purifié, enrobé et empaqueté que le consommateur n’a aucun contact avec l’OGM initial. Lorsqu’on écrit un billet doux à son collègue ou à son contrôleur fiscal, peu nous chaut que le papier que l’on couvre d’encre soit produit à partir de peuplier naturel ou non.

Dans le cas des plantes alimentaires, la situation est différente. Car l’OGM passe directement du producteur au consommateur, qui remplit sa fourchette avec des gènes dont la tête ne lui revient pas. Or d’un point de vue sociologique, philosophique, psychologique, médical, et tout ce que vous aurez envie d’ajouter, le rapport qu’entretient l’être humain avec sa nourriture est fondamental. C’est une question de survie! Alors on ne rigole plus, et les plantes OGM soulèvent des colères grosses comme les Andes.

Conséquence, le projet de loi discuté cette semaine porte avant tout sur les plantes génétiquement modifiées (PGM). Il se propose d’encadrer les conditions techniques, administratives et de transparence pour leur culture en plein air, appelée "dissémination volontaire 1" et donc toujours autorisée ( premier sujet fâcheux, et je dirais même faucheux). Le texte étudie aussi les cas où des champs de PGM contamineraient des cultures classiques, rappelant ainsi qu’une telle contamination est possible (deuxième levée de boucliers).

 

Pour éviter la dissémination vers les autres plantations, on propose d’isoler les champs de PGM. Car le soja, le maïs ou le colza se reproduisent par sexualité, avec un élément mâle (le pollen) qui permet de féconder une cellule femelle (l’oosphère, enfermée dans le pistil). Deux possibilités s’offrent à ces plantes: soit le pollen d’une fleur féconde l’oosphère de la même fleur, auquel cas le risque de fécondation par du pollen venant d’autres fleurs et porté par le vent ou des insectes est faible. C’est le cas du soja par exemple. Le maïs et le colza adoptent un autre mode de reproduction, ou cette fois les pollens sont échangés d’une fleur à l’autre. La dissémination est alors un risque non négligeable. C’est une des raisons pour lesquelles la culture du colza transgénique a été interdite en Europe.

Pour isoler les champs de PGM, on peut donc les placer à une distance suffisante des autres champs. Cela limite le risque de dissémination mais ne l’élimine pas totalement. Or il suffit que le risque existe pour que le feu des colères se ranime. On peut aussi décaler les périodes de culture des plantes modifiées et classiques: si les fleurs n’apparaissent pas en même temps dans les deux champs, le risque de dissémination devient quasi nul.

 

Une loi sur TOUS les OGM

 

Les cultures en plein champ ne concernent pas que les plantes alimentaires. Les chercheurs ont parfois besoin de tester des PGM en plein air, car les expériences en labo ne suffisent pas. Pensons au peuplier, qui pousse difficilement dans les bureaux ou les appartements. Pensons aussi aux projets de décontamination des sols industriels par des plantes et des arbres génétiquement modifiés pour pomper un maximum de métaux lourds. Comment vérifier l’efficacité du procédé si on ne peut pas le tester dans un environnement réel? La loi doit aussi encadrer ces situations.

Et ce n’est pas tout. Le texte doit parler des plantes mais aussi des bactéries ou des souris de labos, dont il faut encadrer l’utilisation sans freiner la recherche scientifique française, déjà bien ralentie par son administration à la vivacité légendaire. Il doit parler encore de l’industrie, consommatrice d’OGM qui, comme ceux des labos, ne rentrent pas dans la chaîne alimentaire. Du moins pas encore…

Les OGM scientifiques et industriels doivent donc être traités à part mais au sein d’un même projet de loi. Le casse-tête des parlementaires en devient si intense qu’ils en oublient de nous parler des bestiaux nourris au maïs et au soja transgéniques et qui arrivent finalement dans notre assiette. Ou des mammifères dans le lait desquels on envisage de produire des médicaments. Ni des bactéries transgéniques que les labos ont sous le coude pour modifier les processus industriels de fabrication des yaourts ou des fromages.

Quant au problème social fondamental, il reste en suspend: pourquoi autoriser ces fichues PGM? La première génération, résistante aux pesticides et insecticides, ne profite qu’aux industriels. Tout le monde est d’accord. La deuxième génération, elle, pourrait voir émerger des plantes résistant au stress, à la chaleur, au sel, ou moins gourmandes en eau. Elles nous sont vendues comme capables de pousser dans les pays où on meurt de faim ou de résister aux changements climatiques qui nous attendent. Est-ce une bonne ou une mauvaise raison? On saute sur la question pour débattre encore, à l’occasion de ce nouveau projet de loi qui ne fermera pas la plaie ouverte dans nos consciences. Peut-être même qu’en remuant le couteau à l’intérieur, il retarde un peu plus sa cicatrisation...

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