
Lors du sommet extraordinaire des chefs d’Etat de la CEMAC tenu à Libreville le 30 janvier 2009, la décision fut prise par ces derniers et formulée dans un acte additionnel au traité révisé de la CEMAC, d’allouer à la République centrafricaine une assistance financière de huit (8) milliards de F CFA. Selon les termes de cet acte additionnel, cette assistance est accordée « en vue d’aider à la réalisation des opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion dans ce pays ». Plus loin, le document dit que cette aide « est supportée à raison d’un (1) milliard de F CFA par Etat membre, à titre de don et de trois (3) milliards de F CFA par la BEAC à titre d’avance ».
En principe, cet acte additionnel devrait être publié dans le bulletin de la CEMAC et également dans le journal officiel de chaque Etat membre. A Bangui où Bozizé est pourtant le président en exercice de la CEMAC, cet acte additionnel a été signé par lui même en date du 20 février 2009 mais n’a jusqu’ici fait l’objet d’une quelconque publication, comme s’il s’agissait d’un document classé « secret défense », on se demande bien pourquoi.
Depuis son adoption, Bozizé et sa clique ont entretenu à dessein, un flou artistique et une confusion totale autour de la nature de l’aide de la CEMAC. L’acte additionnel est pourtant d’une clarté déconcertante pour eux et on peut comprendre qu’ils n’aient pas eu envie que l’opinion en ait connaissance. Il rappelle en effet dans son article 21 que « son respect s’impose aux institutions de la Communauté ainsi qu’aux autorités des Etats membres ».
Il faut aussi rappeler que le 3 avril 2009, une convention de prêt sous forme d’avance exceptionnelle a été signée à Bata en Guinée équatoriale entre le Gouverneur de la BEAC et le ministre centrafricain des finances et du budget. Tout cela cadrait bien avec les termes du communiqué final rendu public à l’issue du sommet des chefs d’Etat. Bozizé lui-même avait dit au début que les huit milliards seraient bien affectés au programme DDR. Quelques mois après, il n'en est rien.
C’est bien après, lorsque son argentier Sylvain Ndoutingai s’est rendu courant avril dernier à la BEAC à Bangui pour retirer tout l’argent, qu’il a confié à un quidam qu’avec les milliards du DDR en question, ils allaient rembourser les emprunts qu’ils avaient contractés pour organiser les funérailles de la mère de Bozizé et avec le reste, ils allaient lui construire un mausolée. Sachant que cet argent a été détourné de sa destination initiale d’affectation, le Tchad est à présent réticent à verser sa part.
Aujourd’hui, une chose est sûre, cet argent s’est volatilisé et Bozizé et Ndoutingai éprouvent de réelles difficultés à le mettre à la disposition du comité de pilotage du DDR qui piaffe d’impatience parce que subissant une très forte pression de la part des ex combattants qui, si cela continue, redeviendront des combattants tout court. Ils se sont retournés vers le trésor national pour jongler avec un premier décaissement ridicule de cent soixante (160) millions de F CFA pour démarrer soi-disant le DDR mis cella a été jugé tellement insignifiant que les ex-combattants qui ont cru que c’était le PNUD qui devait les payer, ont cru devoir faire un sit-in lundi dernier devant les bureaux de l’agence des Nations unies avant de se diriger vers le ministère des affaires étrangères où ils ont été dispersés à coup de gaz lacrymogène.
Ce comportement irresponsable de Bozizé qui reflète son refus politique de s’avancer réellement sur le chemin de la paix - contrairement aux discours démagogiques pour endormir les Centrafricains et la communauté internationale – fait peser de réelles menaces sur le calendrier des élections qui devraient en principe se dérouler l’année prochaine dans le pays. En effet comment peut-on organiser sereinement des élections dans un territoire aussi vaste que celui de la République centrafricaine (622.000 Km2) dont une bonne partie échappe totalement au contrôle des autorités et où règne une insécurité endémique et délibérément entretenue !
C’est en faisant le constat de cette triste réalité que Bozizé a commencé à faire réfléchir ses partisans qui lancent vers l’opposition des ballons d’essai sur l’idée d’un éventuel report d’une ou deux années des élections. Il est question, selon ces stratèges de Bozizé, de faire voter par leur majorité parlementaire le moment venu, une loi prorogeant son mandat si l’actuel arrivait à expiration sans que son successeur soit connu.
Naturellement, disposant d’une confortable majorité de députés à l’assemblée, KNK et Bozizé voient midi à leur porte. Mais une situation comme celle qui sera créée par un vide juridique à l’expiration de son mandat actuel nécessite pour être réglée sans gros dégâts, soit un référendum populaire, soit un mode de gestion consensuellement arrêté avec l’opposition politique et les forces vives nationales. Bozizé et sa clique ne peuvent en décider tous seuls, cela doit être clair. Le plus dur pour eux et le pays est malheureusement à venir.