Centrafrique : le scrutin terminé dans le calme, le dépouillement
poursuit
Bangui, lundi 24 janvier 2011 (Xinhua) - Les premiers résultats provisoires des élections présidentielle et législatives
du 23 janvier 2011 en République centrafricaine (RCA) ont commencé à être enregistrés à Bangui, la capitale du pays, immédiatement après la fermeture des bureaux de vote dont certains sont restés
ouverts au-delà de l’heure officielle de 16h00 (17h00 GMT) à cause des retards au départ.
"Il est 17h21, je déclare clos le
vote et je transforme la salle en salle de dépouillement", a déclaré solennellement face aux représentants des partis politiques et des observateurs nationaux et internationaux le
responsable du bureau de vote de l’Hôtel de Ville de Bangui, face au palais présidentiel, où les premiers électeurs rencontrés dimanche matin étaient des militaires.
Mais, jusqu’à 19h30 locales (20h30 GMT), le dépouillement se poursuivait encore, à cause d’un manque de formation
manifeste des agents électoraux déployés dans ce bureau de vote.
Dans les trois bureaux de vote du Bureau d’affrètement routier centrafricain (BARC) en revanche, le décompte, manuel
dans l’ensemble du processus, n’a pas tardé aussitôt le scrutin clôturé.
Ainsi à 18h00 (19h00 GMT), les premiers résultats provisoires étaient disponibles concernant l’élection présidentielle
sur ce site, qui a également été marqué par un vote quasi-totalement militaire aux premières heures de la journée, avec une grande affluence.
Au bureau de vote no. 1, sur 470 votants, 358 voix ont été déclarées en faveur du président François Bozizé, 34 pour Martin Ziguélé, contre 29 pour Ange-Félix Patassé, 22 pour Emile Nakombo et 17 pour Jean-Jacques Démafouth.
C’était la même tendance dans les deux bureaux de vote du BARC où, respectivement sur 399 et 403 votants, Bozizé l’a emporté par 321 et 325 voix.
A l’école Centre filles et garçons, il a également dominé par 178 bulletins de vote favorables sur un total de 235
votants, a constaté l’envoyé spécial de Xinhua.
Le scrutin, caractérisé par un vote massif dans de nombreux bureaux de vote de Bangui, s’est déroulé dans le calme, sans
incidents majeurs, dans l’ensemble, malgré une certaine tension due à des problèmes d’ordre logistique.
Selon les dispositions du Code électoral, la Commission électorale indépendante (CEI) a un délai de 15 jours pour
publier les résultats provisoires, la coordination nationale de cette institution annoncé pouvoir livrer le verdict des urnes en moins de 5 jours.
Il restera alors par la suite à la Cour constitutionnelle de prendre le relais pour proclamer les résultats définitifs.
Au cas où aucun des candidats à la présidentielle n’arrivait à obtenir une majorité absolue, un second tour aura lieu le 20 mars.
RCA- Elections 2011 : des irrégularités signalées dans certains
bureaux de vote
Ai- Rca- Dimanche, 23 Janvier 2011 19:25 - Le bureau de vote de Batalimo 3 dans la
sous-préfecture de Bimbo, la préfecture la plus proche de Bangui la Capitale a démarré le vote avec quelques difficultés.
Certains électeurs étaient en possession de leurs cartes mais curieusement leurs noms ne figuraient pas sur la liste
électorale.
L'agence Ai s'est rapprochée du Sous-préfet de Bimbo, Lena
Germain et en même temps du Président du bureau local de la Commission Electorale Indépendante (CEI) pour en savoir davantage sur ces irrégularités.
"J'ai été informé par mes collaborateurs qu'il y a des problèmes dans
le centre de vote de Bimbo. Et je m’y suis déporté pour toucher du doigt la réalité" a-t-il déclaré confirmant qu’effectivement, "il y a des électeurs qui se sont fait enregistrer pendant le recensement électoral et ont bien reçu leurs cartes d'électeur. Mais seulement sur la liste
électorale, leurs noms ne figurent nulle part et cela pose énormément de problèmes pour la crédibilité de ces élections".
Pour le sous-préfet, ce sont des aléas électoraux. Il a d’ailleurs promis de se rapprocher de la coordination de la CEI
à Bangui afin de faire éditer une liste additive pour permettre à ceux qui ont leurs cartes d'électeur de pouvoir accomplir leur devoir civique.
"Dans le bureau de vote de secteur Batalimo 3, quelques
problèmes ont été signalés du fait que des électeurs étaient en possession de leurs cartes portant chacune un numéro. Mais dans le bureau de vote et sur la
liste électorale, ils ont constaté le même numéro avec un nom autre", a explicité Bongolo Bonaventure, Chef de
quartier de Batalimo 3.
Selon lui, le président de ce bureau de vote a fait savoir à une longue file d'électeurs qui attendaient
qu'ils n'avaient pas droit au vote parce que leurs noms ne figuraient pas sur la liste électorale.
A suivre
Kabongo, Ai Bangui.
Jeune Afrique 24/01/2011 à 09h:22 Par Marianne Meunier, à Bangui
Deux fois reportées, les élections générales centrafricaines se sont tenues le 23 janvier. Avec quelques approximations…
Reportage de notre envoyée spéciale.
PK 12, à 12 km du centre de Bangui. Bassines remplies de baguettes de pain en équilibre sur la tête, les vendeurs
ambulants se frayent un passage entre les pousseurs de chariots et leurs cargaisons de bois. D'un pas pressé, les familles endimanchées se dirigent vers l’église. Des femmes patientent à la
borne-fontaine avec leurs bidons jaunes. Il est 6 h 30 et ce dimanche qui commence ressemble à tous les autres dans un quartier densément peuplé des abords de Bangui. Mais ceux qui le
souhaitent pourront ajouter une activité inhabituelle à leur emploi du temps : voter.
Nous sommes le 23 janvier, 1,8 million d’électeurs centrafricains (pour 4,8 millions d’habitants) sont appelés aux urnes pour choisir un président parmi 5 candidats et élire 105 députés. Dans un pays grand comme la France et la Belgique réunies, où le budget 2011 de l'État s’élève à 320 millions d’euros, organiser des
élections générales est un défi. Deux fois reporté - il était prévu en avril puis en mai 2010 -, le scrutin s’annonce chaotique.
Il n’est pas 7 heures et devant les bureaux de Begoua 1 - une école de PK 12 transformée en centre de vote -, les files
d’attente sont déjà longues. Ici, les portes se sont ouvertes à 6 heures comme prévu. Mais dans la salle de classe qu’éclaire à peine la lumière du jour, il manque un des deux assesseurs.
« On ne sait pas où il est, on n’a pas son numéro de portable », explique le
président du bureau. Tant pis, les opérations ont démarré sans lui. « On ne pouvait pas attendre, il y
avait déjà beaucoup de monde », poursuit le président.
En attendant l'assesseur
Carte d’électrice en main, une petite dame bossue entre dans la pièce, foulard assorti à son boubou noué dans les
cheveux. L’unique assesseur vérifie son nom sur le registre, un épais cahier dont chaque page est barrée des lettres RCA / CEI (République centrafricaine, Commission électorale indépendante). La
petite dame est bien inscrite et peut voter. En guise de signature, elle laisse un gribouillis maladroit sur le registre. Elle glisse ses deux bulletins dans les urnes - l’une porte la
lettre « P » pour présidentielle, l’autre, la lettre « L » pour législatives -, puis trempe son doigt dans un pot d’encre.
L’assesseur n’est toujours pas arrivé. Les observateurs qui travaillent pour le compte des candidats s’en plaignent. Ils sont deux.
L’un représente Martin Ziguélé, candidat du Mouvement pour la libération du peuple centrafricain (MPLC), l’autre, François Bozizé, le président
sortant, candidat à sa propre succession. Père de 8 enfants, « gérant au chômage », l’homme de Ziguélé
dit travailler sans contrepartie. Étudiant, 23 ans, celui de Bozizé dit recevoir 5 000 francs CFA pour la journée.
Un homme râblé, au costume beige constellé de taches, entre dans le bureau de vote. Il n’a pas de carte d’électeur, et
tend à l’assesseur - toujours unique - un petit bout de papier. En lettres manuscrites (au stylo bille), son identité est déclinée sur le document intitulé « récépissé ». Il porte le
numéro 139. Le président du bureau le considère comme valable. Mais le registre comporte deux numéros 139. L’électeur pourra néanmoins voter, puisque son nom figure face à l’un des deux
139...
Sur le pas de la porte restée ouverte, la foule jusqu’alors disciplinée se met soudain à crier, en sango (langue
véhiculaire en Centrafrique). Une clameur monte. C’est que l’assesseur absent vient d’arriver ! Les électeurs ont eu le temps de préparer son accueil. « Pourquoi tu es venu en retard ? » « Tu traînais avec ta femme ? » lance un
votant. Éclats de rire de tous, sauf de l’assesseur. Il ne bronche pas et se met immédiatement au travail.
Dépouillement à la bougie
Au Centre de santé urbaine Bédé Combattants, dans le 8e arrondissement de Bangui, les électeurs auraient bien aimé
connaître de si menus tracas. Ici, le vote a commencé à 8 heures au lieu de 6 heures. Les listes manuscrites censées permettre aux électeurs de trouver le numéro de leur bureau de vote ne sont
pas affichées. D’après la CEI, le scrutin devait prendre fin à 16 h 00. Mais à 16 h 40, une foule bruyante remplit encore la cour. On joue des coudes et on crie pour se faire une place dans la
file d’attente. « Les listes ne sont pas affichées, vous trouvez ça normal
Madame ? » hurle un jeune électeur à l’haleine alcoolisée.
Dans le 5e arrondissement, au centre de vote Vara, les listes sont bien affichées. Mais comme ce fut souvent le cas
durant la journée, deux voisins venus pour « faire leur devoir » cherchent encore
leur nom. Il est 17 h 30, le jour décline et ils n’ont toujours pas voté.
Ici, les salles de classe étant trop « exiguës », selon l’un des présidents, on a dressé des tentes dans deux
coins de la cour. Elles abritent quatre bureaux. Les observateurs des candidats sont assis sur des chaises basses en bois, cahiers sur les genoux. Certains ont préparé des bougies car le
dépouillement se déroulera dans l’obscurité.
Encore y aura-t-il ici des urnes à dépouiller. Selon un témoin, dans la commune de Ouanda, dans la moitié sud de la
province de la Vakaga (Nord), « le matériel n’a pas été déployé ». Pas de vote, donc, pour les quelque 30 000 habitants de la commune...
Mais la désorganisation n’est pas l’apanage des « petits » électeurs. Annoncé à 7 heures à la mairie de
Bangui, le vote du chef de l'État s’est finalement déroulé vers 12 h 30 dans un lycée du 4e arrondissement.