Par Didier Samson RFI 25 février 2011
La compagnie Afriqiyah Airways qui dessert une dizaine de capitales d’Afrique sub-sahariennes subit les conséquences directes des soulèvements populaires contre le régime de Mouammar Kadhafi. Tous les vols en direction de l’Afrique noire sont suspendus, théoriquement jusqu’au 28 février. Selon l’évolution de la situation, la direction de la compagnie se réserve le droit de proroger cette mesure.
Il a fallu plusieurs années pour que la compagnie aérienne Afriqiyah Airways se bâtisse une réputation de compagnie fréquentable. Ce crédit vient d’être balayé par les événements que vit actuellement la Libye. Avec un peu de courage les voyageurs se faisaient encore une raison de voyager par cette compagnie. Les tarifs les plus bas, slogan publicitaire partout affiché par Afriqiyah Airways, correspondent effectivement à une réalité. Le choix des dirigeants libyens a été d’emblée de proposer sur un marché africain déserté par Air Afrique (la compagnie africaine) des tarifs « charter » sur des vols réguliers. Ainsi le porte-monnaie a-t-il eu raison de la sulfureuse réputation du colonel Kadhafi.
Depuis le début des manifestations en Libye, l’aéroport de Tripoli, contrairement à celui de Benghazi, n’a pas subi de dégradations. Le personnel aéroportuaire a toujours assuré son service. Mais la présumée participation de mercenaires négro-africains à la répression des manifestations, puis le discours menaçant de Kadhafi à la télévision, le 22 février, ont effrayé les Africains qui se disaient encore « en dehors de tout ça ». Cette intervention du Guide de la révolution libyenne a mis un coup d’arrêt net au trafic d’Afriqiyah Airways vers l’Afrique sub-saharienne.
Toutes les réservations sont annulées
Au départ de Paris Charles-de-Gaulle et de Lyon Saint-Exupéry, les voyageurs peuvent toujours faire le voyage de Tripoli. Vols maintenus mais horaires décalés. Toutefois les correspondances vers les capitales africaines sont suspendues. Par ailleurs, des capitales africaines et dans tous les aérogares, les vols Afriqiyah sont annulés. Cependant des remboursements sont mis en place par la compagnie : 100% du billet ou 50% selon le trajet restant à faire. Les voyageurs bloqués quelque part, qui ne sont pas arrivés à destination et tous ceux qui doivent impérativement effectuer leur voyage, sont remis sur d’autres compagnies. Pour ceux-là, Afriqiyah s’adresse tout simplement à la concurrence, Brussels Airlines, Royal Air Maroc (RAM) ou encore Ethiopian Airlines. C’est la solution mise en place par les Libyens pour satisfaire les nombreux voyageurs, par exemple, les festivaliers du FESPACO (Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou) qui démarre le 26 février dans la capitale du Burkina Faso. Les vols de la compagnie entre capitales européennes pour la destination Tripoli sont encore maintenus mais « les choses peuvent évoluer », dit-on dans les agences du groupe.
Afriqiyah Arways a été lancée en décembre 2001 et son implantation en Europe s’est faite progressivement : Paris en juin 2002, Bruxelles en mai 2003, Genève et Londres en 2004 et Amsterdam en 2006. Au moins quatre vols par semaine, emmènent d’Europe vers l’Afrique via Tripoli. Les capitales desservies sont : Abidjan, Accra, Bamako, Bangui, Cotonou, Douala, Johannesburg, Kano, Khartoum, Lagos, Le Caire, Lomé, Niamey, Ndjamena, Ouagadougou. Le succès grandissant de la compagnie, inconnue des Libyens, a conduit les autorités à lui réserver un important comptoir dans l’aménagement du nouvel aéroport en construction à Tripoli.
Afriqiyah qui veut dire en arabe Air Afrique a été voulu par le colonel Kadhafi qui réagissait à l’enterrement, par les Africains eux-mêmes, de la compagnie Air Afrique. Afriqiyah Airways est détenu à 100% par le gouvernement libyen. Et, pour marquer la mission africaine de cette compagnie, Kadhafi a joué des symboles. Le vert, le rouge et le jaune dans le sigle de la compagnie rappellent les couleurs dominantes des drapeaux africains, puis le noir pour « le continent noir ». Enfin le sigle qui se décompose en 9.9.99 évoque la conférence de Syrte en Libye où la décision de créer l’Union africaine a été prise et signée par tous les chefs d’Etat africains le 9 septembre 1999 : 9 / 9 / 99