Ayant tenté pendant 18 mois une expérience de réinsertion au pays natal, j’ai choisi
la sincérité plutôt la langue de bois pour partager avec mes compatriotes centrafricaétindjiins où
qu’ils soient, mon constat personnel afin qu’ensemble nous prenions conscience de nos propres échecs et prendre en main le destin de notre peuple.
Né à la veille des indépendances africaines, je peux me permettre
d’avouer que dans ma jeunesse,
je n’ai pas vécu les conditions d’existence des milliers de Centrafricaines et centrafricains aujourd’hui, pris dans l’engrenage de la misère et de la désespérance.
La République Centrafricaine s’est vraiment laissée entrainer depuis des décennies
dans une logique d’autodestruction dans tous les domaines. La division qui s’est glissée dans le tissu social national exige une mobilisation de tous les fils et filles du pays pour sortir de
cette situation.
La diaspora centrafricaine quoi qu’on dise, qui est désormais incontournable doit se
montrer plus responsable et plus active pour constituer une force avec laquelle le pays peut compter afin de renaître de ses cendres.
Le constat de l’état de notre pays est
révélateur des crises à répétition. Nous Centrafricains, n’arrivons pas à nous accrocher du train de développement. Est-ce notre culture qui
est incompatible avec le développement ou notre incapacité à nous adapter au changement ?
En effet, le vrai problème de notre pays est probablement d’ordre économique. Certes,
il n’est pas ici question de méconnaître le rôle principal de la politique qui constitue l’organe de direction du pays mais, l’économie reste
inéluctablement la machine de guerre contre le sous développement.
Or, les centrafricains n’ont pas le contrôle de leur économie qui a toujours été l’apanage des étrangers.
La République Centrafricaine est un
pays où l’Etat constitue le plus grand employeur. Et un pays où l’Etat est le plus grand employeur ne peut que cultiver la misère. En Centrafrique, il y a peu d’entreprises centrafricaines qui
créent la richesse. Les quelques initiatives économiques sont étouffées par les tracasseries de toutes sortes. Il n’y a sur le terrain aucun impact
de politique sociale souvent décriée à coup de discours politique à la radio nationale et dans les séminaires à répétition.
Cependant , tout près de chez nous , le Cameroun par exemple , s’octroie et d’ailleurs à raison , le leadership économique sous-régional
parce que , dans ce pays le secteur privé est non seulement important mais aussi , les capitaux nationaux ne sont pas négligeables .Des Camerounais de souche , avec des capitaux nationaux contrôlent très bien les rouages de l’économie de leur pays(banques, le commerce ,les prestations de service, les PME/PMI ,les BTP etc.…).Cette
situation constitue une base solide pour un meilleur partenariat avec l’extérieur.
La fameuse phrase de l’ex Président Américain Bill Clinton prononcé à Nairobi lors de
sa visite d’Etat au Kenya en 1999(Trade not Aid) est une
philosophie qui tend aujourd’hui à devenir universelle. Mais elle ne peut être appliquée en République Centrafricaine que si les partenaires locaux
sont eux même crédibles.
L’idée de continuer à jouer le rôle de vache à lait pour les pays du Sud ne semble
plus trouver d’enthousiasme dans l’esprit des pays du Nord qui sont eux même confrontés à la crise financière.
Lorsqu’une personne physique ou morale va vers une institution financière quelconque
pour négocier le financement d’un projet, le sérieux et le crédit de cette personne ne transparaissent qu’à travers ce qu’il met déjà dans le panier avant la recherche dudit financement.
Le Centrafricain en tant que personne physique ou personne morale ne peut être considéré comme un partenaire crédible parce qu’il va toujours vers ses partenaires les mains vides
.Il n’est assimilé ni plus ni moins qu’à un mendiant. C’est d’ailleurs la cause réelle de nos problèmes au niveau national. Nous devrons désormais nous investir pour corriger cette faiblesse en
nous impliquant concrètement dans le système économique de notre pays.
L’union fait la force dit-on. Ce que je
n’ai pas réussi à faire tout seul, à plusieurs, nous devrons pouvoir y parvenir.
Certainement, bien de gens parmi nous ont déjà essuyé la triste expérience des
entreprises de transport comme nous avons l’habitude de faire. Envoyer au pays un ou deux véhicules
d’occasion pour être exploité comme taxi ou mini bus sous la responsabilité d’un parent quelconque est
une entreprise vouée d’office à l’échec. Cette situation est due à notre mentalité et de nos tares en matière d’application des règles élémentaires du commerce .Mais si plusieurs individus réunissent leurs efforts pour faire la même
chose, en y mettant la méthode et la forme c’est-à-dire :
un statut, un plan comptable, un petit conseil d’administration, cette
entreprise à de meilleures chances de tenir la route. C’est pour cette raison que nous devrons commencer à repenser notre manière de pratiquer le
commerce .Un vieux dicton stipule que : « ce sont les ruisseaux qui font les rivières et, celles-ci les fleuves à leurs tours », le peu que chacun de nous mettra dans le panier, peut constituer la cagnotte qui sera notre trésor qui peut nous permettre de mieux ficeler
des projets qui serviront de base de discussion avec d’éventuels partenaires.
Les pays riches disent pouvoir aider les pays pauvres à sortir de la misère, du moins
c’est ce qu’ils annoncent publiquement .Mais d’autre part, ils se méfient des filières gouvernementales qui les ont souvent déçu par la manière avec laquelle les fonds mis à leur s dispositions
ont été dilapidés.
Pour contourner le problème, ils ont
encouragé les ONG de leurs pays à aller œuvrer dans les pays du sud avec les résultats que nous connaissons bien et qui ne sont pas toujours ceux
escomptés. Confrontés aujourd’hui aux épineux problèmes du chômage et de l’émigration, ils sont plus que jamais déterminés à trouver des solutions
fiables, c'est-à-dire celles qui puissent fixer les populations dans leurs propres pays .Ils attendent sûrement des initiatives nationales avec des
suggestions matures pour les déterminer à agir. Une organisation comme celle que beaucoup souhaitent de leurs vœux, peut être un répondant idéale et un partenaire potentiel pour peu que nous
puissions initier des projets bancables .Des projets ambitieux comme certains qui sont inscrits dans le chapitre investissements générateurs de richesses qui sont susceptibles de créer de
l’emploi au niveau local, peut trouver une oreille attentive.
Alors Chers compatriotes de la Diaspora et ceux restés au pays, levons –nous et
réapprenons à construire entre nous une culture de confiance pour que la rencontre sur le terrain du progrès soit sereine et féconde .Le
développement est compromis dans une société où il n’est pas possible de communiquer librement. Qu’on se jette à l’eau, nous n’allons pas forcement nous noyer car il s’agit d’une espérance
collective.
Jean-Pierre BETINDJI
Théologien-Philosophe- Agriculteur
e.mail :betindji@gmail.com