Beaucoup seront surpris, qui se demanderont certainement pourquoi nous posons une telle question à l'heure même où les priorités sont ailleurs. A l'heure où les éléments de la
SELEKA continuent de faire des ravages au sein des populations centrafricaines qui n'ont
plus le sommeil depuis quelques mois déjà. Que ceux qui nous lisent ne soient pas
fatigués de ce que nous mettons à l'appréciation de leur propre analyse, de leurs interrogations et parfois même par anticipation, des réflexions et des sentiments que nous pouvons partager ensemble. Au vu des événements qui ont fait et qui continuent de
faire le lot quotidien des centrafricains, à savoir le problème de leadership et degouvernance dans ce pays, nul ne peut se voiler la face pour ne pas reconnaître qu'une grande part des tourments centrafricains vient de la transparence des chefs qui se sont succédé jusqu'à présent à la tête de l’État. Transparence qui se traduit par une
gouvernance simpliste, sans épaisseur, sans vision, sans projet, sans réalisations pouvant résister à l'épreuve du temps. Aussi, force est de constater qu'en cinquante ans d'indépendance, si l'on faisait le bilan de chacun des hommes qui ont eu à prendre en
main la destinée de ce pays, le bilan de chacun d'eux sera « globalement négatif », si
l'on peut prêter le terme à un homme célèbre de la vie politique française, aujourd'hui
disparu. On se demandera alors quel héritage palpable et reconnaissable par les générations à venir, a laissé à son passage le Président Bokassa ? Qu'a laissé Dacko ?
De quoi les jeunes d'aujourd'hui et de demain peuvent-ils se revendiquer de Kolingba ? De Patassé et enfin de Bozizé ? Nous ne parlons pas d'idées laissées par les uns et par les autres, mais de choses concrètes dont les centrafricains peuvent être fiers. Les réponses appartiennent à chacun de nous.
Ce qui nous pousse à poser la question de la Présidence de la République de demain, c'est l'actualité même du pays.
La SELEKA est arrivée à BANGUI avec à sa tête un homme qui s'est aussitôt proclamé
Président de la République. Et en cinq mois d'exercice du pouvoir depuis les accords de
Libreville, tous les signaux que ce dernier a envoyés au peuple centrafricain après
s'être autoproclamé Président de la République, ne sont que des avertisseurs de mauvais
augure. En effet si le premier geste consistait à aller d'abord à la plus grande mosquée
de BANGUI pour se payer un bain de foule, il appartient à la majorité des centrafricains
d'interpréter un tel message. Le 24 mars n'était pas loin du 29 mars que l'homme fort de
BANGUI n'a pas hésité à occulter. Et quand on sait ce que cette date signifie pour le
pays et pour l'homme qui s'est battu pour que ceux-là mêmes qui lui ont succédé aient la
possibilité d'être appelés un jour Président de la République, il y a tout de même une certaine tenue que ceux-ci devaient avoir. En n'ayant pas l'autorité nécessaire pour mettre très rapidement fin au supplice que les centrafricains vivent à travers les exactions de la SELEKA qui apparemment aurait en son sein des éléments incontrôlables, l'on se demande quel intérêt un homme en pleine possession de ses moyens, peut avoir pour
s'imposer Président dans de telles circonstances. Aller ensuite au TCHAD pour prendre
conseil auprès d'un Président qui ne doit son fauteuil que grâce à la bienveillance de la
FRANCE, tout simplement parce qu'il vous a aidé à vous couvrir du manteau Présidentiel,
n'est pas du tout quelque chose d'honorable, aussi bien pour le démarcheur que pour le
pays dont il veut assumer la charge. Et le comble, c'est d'aller à DJAMENA et revenir à
BANGUI, pour faire croire aux centrafricains qu'on a dégoté un gros contrat pour le pays,
à travers l'échange de bois contre le pétrole. Nous ne trouvons rien à dire que de croire
que nous avons là une plaisanterie de très mauvais goût, mais alors une plaisanterie
assassine. Sans opposer les actions du Premier Ministre à ceux de son Chef, dans un cas,
En ne ramenant rien au pays, les centrafricains savent qu'ils n'ont rien à devoir à
quiconque, alors que dans l'autre cas, l'on peut deviner clairement que l'abattage du
bois centrafricain au bénéfice du TCHAD ne sera qu'une partie du payement de la dette
contractée pour la prise du pouvoir. Le Président du TCHAD pourra alors faire descendre
dans son pays les milliers de billes de bois qu'il voudra, sans se donner la peine d'enfoncer la main dans la poche pour savoir combien cela lui coûte, quand bien même il
vendrait toujours son pétrole au pauvre CENTRAFRIQUE. Entre temps, ce sera aussi la
savane qui prendra la place de la forêt centrafricaine. Tant pis pour les mangeurs de
chenilles, d'escargots, de koko et de champignons de bois. Le prix du pouvoir ne se sera
pas arrêté là, car il faudra aussi penser au projet des eaux de l'Oubangui qui serviront
de perfusion au lac TCHAD. Et que dire d'élévations et de nominations pompeuses d'obscurs officiers dans les forces armées ?
Au vu de ce démarrage en trombe d'une gouvernance chargée de transformer de fond en
comble la République CENTRAFRICAINE, l'on s'étonne de voir le silence assourdissant des
partis politiques, qui ne trouvent rien à redire quant à la politique qui est menée à
l'heure actuelle. Il ne suffit pas de se lever pour prendre un micro et déclamer les
exactions de la SELEKA, il faut mener des actions vraiment politiques, en vue de
réveiller le peuple et lui montrer la voie dans laquelle on projette de l'amener. Cela
passe par des conférences, des prises de position par rapport aux grands enjeux dans
lesquels le CENTRAFRIQUE est impliqué, des réunions publiques pour aider le peuple à
comprendre les problèmes en vue de faire son choix, ses choix. Il est vrai que
l'insécurité ambiante de CENTRAFRIQUE n'offre certainement pas le cadre idéal pour rêver de ces actions et de ces activités, mais c'est bien à l'homme politique de se battre pour mettre une pression sur le pouvoir afin qu'il exerce son autorité. A attendre tout du
pouvoir, on ne sera pas fatigué d'enregistrer le nombre d'innocents qui perdront leur vie
juste à cause des caprices des autres. Cette attitude faite de silence de la part des
politiques qui demain feront le sprint pour être enregistrés comme candidats à l'élection
présidentielle, nous fait croire qu'ils ont oublié qu'ils étaient dans une période de
transition et une période de transition amorcée déjà depuis Décembre 2012. Et à l'allure
où vont les choses, nous espérons qu'ils ne seront pas les premiers à reconnaître qu'il
manque du temps et que le temps de la transition nécessite une prolongation.
Le CENTRAFRIQUE ne peut pas continuer à avancer à tâtons à cause des dirigeants qui
arrivent au pouvoir par surprise. En une cinquantaine d'années le pays n'a pas avancé
comme il aurait dû tout simplement parce que la politique, la vraie dans le sens large du
terme n'a jamais habité les responsables « politiques » du pays. Quand on gouverne un
pays sans programme, sans vision et sans ambition pour le pays même, on a les résultats
que procure le marasme politique. Et pour sortir de cet état de chose, le CENTRAFRIQUE a
besoin d'un homme qui rêve pour lui, qui ne rêve pas pour rêver, mais qui rêve pour faire
que ce rêve sorte de l'imaginaire pour servir de remède aux problèmes du peuple et du
pays.
Pour ce faire, il est temps que les hommes politiques se mettent résolument sur le chemin
de la politique vraie, celle de la gouvernance de la cité et de la bonne organisation de
la société, afin d'indiquer au peuple ce qu'ils proposent de faire demain s'ils ont la
charge du pays, et de pouvoir être jugés par rapport aux promesses faites et aux
réalisations accomplies.
Il faut en finir avec la politique de peur qui encourage la médiocratie, pour valoriser
les ressources qui n'attendent qu'à être exploitées.
THE RIGHT MAN IN THE RIGHT PLACE ; L'HOMME QU'IL FAUT A LA PLACE QU'IL FAUT.
Adolphe PAKOUA