Jamais au grand jamais dans l’histoire de la RCA, nous n’avons connu pareille descente aux enfers. A l’aube du 15 Mars 2003, tous les centrafricains ont considéré que, Bozizé comme tout homme d’Etat de valeur maintiendrait sa stabilité, garantirait les libertés, toutes les libertés. Hélas, le général et ses champions dits « libérateurs », n’ont rien fait de mieux. On aura recensé les gaffes les plus insensées, les pets les plus outrageants. Cinq ans de délires, de bévues à répétition, orchestré et cautionné au sommet. Pis, l’insécurité a doublé, les exactions sont légions, on passe a tabac, on embastille à la SRI, les journalistes sont sur écoutes, les syndicalistes tenus en respect, les frontières sont filtrés, des cadavres sur le carreau, l’Armée divisée avec en sus la bérézina. Et, ils disent « renaissance », parbleu ! Plutôt l’enfer.
L’homme qui ne tient jamais ses promesses…
Lorsque, le 15 mars 2003, la rébellion de Bozizé fait son entrée triomphale à Bangui, les populations sont éblouies, c’est peut être le début d’une ère nouvelle. Mais il ne faut pas attendre longtemps pour se rendre compte de ce qu’on a chanté victoire trop tôt. A Peine a-t-il eu droit aux sirènes qu’il a renforcé ses galons. Bozizé se chausse lui-même trois étoiles. Le libérateur c’est lui. Et puis quoi d’autre, le trésorier payeur général, c’est encore lui. La République devient sa pâture. Les frères « Gbaya » se mettent à danser, les libérateurs se font monter la moutarde. On plante le jalon des pets, des boulettes, et donc des pets. Le ridicule discute avec l’ubuesque. En 2004, le président est au centre d’une malencontreuse aventure à Düsseldorf, en Allemagne avec lui, une mallette de diamants, de bien gros. « L’effort de guerre ». Le comble, c’est qu’à Bangui, personne, pas même le protocole d’Etat n’est au courant de ce voyage d’affaires. Allez-y savoir, un président de la République pris en flagrant délit de convoyage de pierres précieuses. Ridicule. La scène se passe de tout commentaire de Berlin à Paris.
Pendant ce temps, les Dogo, Yango Kapita, Gbangouma ? John Sallé et autres « pistoleros » empeste l’atmosphère et provoquent la psychose dans la ville : provocation, zèle, injustice…, Le bât blesse. Le général, pourtant chef des armées, ne met pas d’ordre. Au contraire, il soutient ses bull-dogs.
On a beau mis en garde contre cette virée monarchique, le clan au pouvoir a exhibé des oreilles bouchées. Les partenaires au développement, les ONG des droits de l’homme (pauvre Ngoungaye Wanfio), les pays frères, ont mis en garde, sans résultat. Aucun coup de rabot, le palais de la Renaissance n’a jamais répondu. Alors, pilotage à vue! Catastrophe ! Tristes résultats financiers, sobres réputations.
Alpha Oumar Konaré, alors président de la commission de l’Union Africaine tente de le persuader de tenir à sa promesse, d’éviter l’impasse, que nenni ! C’est plus fort que Bozizé qui ne veut plus lâcher le morceau. Il ne tient d’ailleurs compte de personne, pas même de sa propre parole. Il commence à se prendre pour « un vrai chef d’État », selon l’expression de Francis Laloupo.
Une famille au pouvoir…
Le père est président, Francis le fiston ainé, ministre délégué à la Défense, Aimé Vincent dit Papy Bozizé patron de la SRI, et depuis quelques temps Socrate Bozizé le cadet, est à la tête du centre d’émission des passeports. Un vrai déploiement. Vous leur dites, « s’en fait trop, ils vous répondent, rien de grave ». Ils se niquent eux-mêmes, quand le fan club est absent. Ils ont dit « kwa na kwa ». Alors, monsieur le président de la république, général d’armée est candidat à la députation, dans le quatrième arrondissement de Bangui, Monique la First Lady doit redemander le suffrage des ses électeurs, pendant que le grand fiston Francis, parachuté colonel et qui a maille à motiver la troupe, veut aussi arborer l’écharpe de député, à Sido, y compris le cadet, Socrate. Et une dernière maitresse, Madeleine Bafatoro. Sans oublier la sœur cadette du général cinq étoiles, Joséphine Kéléfio et l’autre frangin, Kocsis Ouilibona. Ils vont donc se retrouver à dix à l’Assemblée. Les Sassou, les Deby et Obiang Nguema, arrivent au pouvoir par des coups d’Etat n’ont pourtant jamais osé endosser, le fameux, « honorable député ». Mention spéciale donc pour le président Bozizé dans l’espace Cemac.
La RCA risée du monde…
Bozizé est pigeon voyageur, il voyage tout le temps. Plus souvent que nombre de ses pairs de la sous région. Mais l’image de la RCA ne semble toujours pas dépoussiérée. On dirait qu’il marque d’une croix les pays qu’il visite. Un challenge qui le tient à cœur. Alors même que dans le carré des grands et des pays qui ont de l’importance aux yeux de la France, nada ! Edith Lucie Bongo décède, Bozizé est plus consterné que le veuf et le père éploré. On le voit partout à Libreville, à Brazzaville et même à Oyo. Quand les autres présidents rentrent, lui reste. Omar Bongo décède, Bozizé remet ça. Il tient même à assister à des funérailles annoncées intimes, « l’orphelin ». Mais dites-vous, quand la mère de Bozizé passe de vie à trépas, aucun de ses pairs, ne fait le déplacement. Pire, Nicolas Sarkozy, élu à la tête de la France entame son tour d’Afrique. Mais la RCA n’est pas à l’honneur, jamais à l’honneur. De ses deux voyages historiques. Pourtant la trajectoire de tous les vols dès qu’on quitte la méditerranée passe par Moundou, puis Garoua. Et Bangui n’est qu’à vol d’oiseau, lorsqu’on pique droit. Vain espoir. Le président français aura séjourné à Libreville, à Brazzaville, à Kinshasa et à Ndjamena, mais pas à Bangui. Alors notre Bozizé national entame alors le tour de force de « banquer » pour être reçu à l’Elysée, quinze bonnes minutes pour un déplacement si cher. Mais on est content, même si le neveu, Sylvain ministre des mines y aura laissé des ailes, pour avoir été tancé par Sarko, du fait de ses sollicitations à Areva (droit d’entrées).
Une CEI de bras cassés, et de cerveaux en panne…
Devant l’échec presque crétine de l’équipe de la CEI, coachée par Bozizé, devant la ribambelle de reports qu’ils servent aux centrafricains, on ne sait décidément plus quoi dire, comment s’y prendre pour rétablir la confiance et la légalité. Non, ils sont aux abois, les gars de la CEI, le pasteur est éreinté, ses « ndougourou » même tire la sonnette d’alarme, pour corriger les erreurs. Ça part presque en quenouille. Or, trop de report exaspère, même Bozizé s’en est rendu compte. Il a misé sur des mouilleurs de première. Des crétins ! On leur dit, « attention, vous allez droit dans le mur, ils rétorquent, vous en faites pas, on tient la route ».
Au fond, c’était prévisible. Quand on prend des crétins, on fonce dans le trou. Des fois, on se dit que c’est fait à dessein, de faire perdurer les choses, de tourner en rond, pour épuiser le trésor de campagne des concurrents. On parle d’utilisation scabreuse des fonds alloués à la CEI, mais personne ne se penche vraiment sur ce désastre. Parce que cela arrangerait Bozizé.
Les spectres de Massi et de Ngoungaye Wanfio…
Il y a des crimes qui sont immuables à l’esprit. Charles Massi, grand commis de l’Etat, et maître Ngoungaye Wanfio étaient tellement voués aux problèmes de leur pays, que le pouvoir de Bangui les trouvait dérangeants. De ces deux disparitions, même les pense-bêtes ne sauraient gober les thèses invoquées : abondant de domicile pour Massi et accident pour Ngoungaye. Non, les Centrafricains ne sont pas dupes, loin s’en faut ! La machine du silence a été mise en branle. Et même le trépidant Procureur qui a hurlé du haut de son siège, est loin de convaincre. La vérité n’est pas loin, les langues ont commencé à se délier. Et tôt ou tard, justice sera rendue, en reconnaissance et honneur, à ces deux braves compatriotes, tombés fier de servir. On les a beau réduit au silence, il y aura toujours d’autres Massi et Ngoungaye. De Massi, les centrafricains gardent le souvenir d’un homme courtois, bien élevé qui savait entretenir ses relations, d’un homme de principe, qui savait dire « non » ! Et de Ngoungaye, un activiste des droits de l’homme qui a toujours agi aux yeux de tout le monde, au point de toujours braver les intimidations de la soldatesque de Bozizé et de sa cour de courtisans.
On comprend bien que c’est la haine qui domine le régime de Bozizé. Ngoupandé l’aura compris, tant et si bien qu’il a profité de sa maladie pour laisser le général se débrouiller et s’embrouiller tout seul. Massi l’aura imité. Pas plus qu’il n’a pas supporté les inepties de ce régime aux abois. D’autres encore dans le giron, certainement beaucoup, boudent, mais manquent de cran, pour tirer leurs grègues. Le navire va-à vau l’eau, à bâbord comme à tribord. Il va sombrer. A l’approche de la présidentielle, François Bozizé est hanté par le spectre de ces deux illustres disparus. Il s’agite, une séance d’exorcisme lui fera peut être du bien. Tous attendent son départ. En lui toute autre ambition s’épuise, et même toute autre perspective se fracasse. Il voit Massi partout, Ngoungaye aussi. Aidez-le !
Un nouveau mandat pour aller où, Et comment ?
Nom de Dieu ! Il faut arrêter le rififi. Et le théâtre en live. Comment diantre, l’homme coupable de la plongée au fond du trou de la République, peut-il avoir l’audace de vouloir rempiler ? Le système Bozizé est au bout du rouleau, accablé, la tempête est immense, l’arbre « Yangounvounda » va s’abattre. Il cogite, joue aux échecs, mais la méthode est quasi-nulle. Si l’opposition joue serré, collectif et fait preuve de vigilance, il ne réussira pas son tour de force. Même si ses petites mains sont à l’œuvre.
Bezambé, le nouveau « Ngaragba »…
Depuis l’avènement de Bozizé, la prison centrale de Ngaragba ne sert plus que pour les menus larcins. Bezambé a pris le relais, profitant de la super puissance de ses bull-dogs, il plante les banderilles. Ils sont nombreux, les prisonniers qui y croupissent, la plupart accusés « d’atteinte à la sûreté de l’Etat ». Il y a eu Larmassoum et compagnies, puis Sani Yalo et récemment d’autres. Bozizé garde une rancune tenace à tous ceux qui marchent sur ses plates-bandes. Un seul mot d’ordre, il faut griller les « entêtés » et les « enculés ». La police politique que dirige le fiston « Papy » ratisse large, gare aux malchanceux ! Il faut « mater » les gueulards. Les lâches ! Ceux qui connaissent Bozizé savent qu’il est rancunier et vindicatif. Et qu’il n’a qu’une ambition : s’éterniser au pouvoir. De gré ou de force. Il sait qu’à la loyale, jamais il ne gagnera, alors, peur sur le pays, aéroport sous haute surveillance. Bezambé pour ceux qui ont l’appétit du pouvoir. Ne fâcher surtout pas le général, il n’aime pas. Il faut d’ailleurs dire que Bendounga a eu beaucoup de chances. Pauvre Joe-Ben !
Rédaction L’Indépendant.