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9 mai 2011 1 09 /05 /mai /2011 00:16

 

 

 

Adrien-Poussou.JPG

 

J’ai parfois été un journaliste connivent. La chose est, pour emprunter le premier paragraphe du dernier ouvrage (M. Le Président ; éditions Flammarion) de Franz-Olivier Giesbert, assez mal vue par une partie de ma profession qui pense que, pour bien connaître la classe politique, il vaut mieux ne pas la fréquenter : cette école, qui a ses fidèles, je cite toujours Giesbert, préfère éditorialiser en chambre plutôt que de se laisser corrompre ou même distraire par la réalité.

Le problème, c’est que les messes dites « politiques » de mes compatriotes auxquelles j’assiste me rendent souvent quelque chose que je ne saurais définir avec exactitude et qui oscillerait entre l’inconséquence notoire, la médiocrité avérée, l’impréparation démontrée et un « m’as-tuvisme » insupportable. Et alors ? me dites-vous.

Et alors, loin de moi l’idée de porter un quelconque jugement de valeur sur ces comportements souvent dictés par l’instinct grégaire. D’autant que, sur ce chapitre, je serais très mal placé pour donner des leçons comportementales, tout le désordre de ma propre vie est là pour le montrer.

Ce samedi 7 mai donc, nous étions conviés à une rencontre, une de plus, organisée par le… CAD, si c’est comme cela que ça s’écrit, qui avait pour ordre du jour (entre autre) la crise postélectorale dans notre pays, avec la participation d’un des candidats de la présidentielle du 23 janvier, membre du FARE-2011 (Front pour l’annulation et la reprise des élections de 2011).  Il s’agit bien sûr de Martin Ziguélé, président du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC).

Dans son propos liminaire, Martin Ziguélé a essayé d’apporter, autant que faire se peut, un début de réponse aux trois questions suivantes que se posent, à l’en croire, de nombreux Centrafricains :

Pourquoi, à la sortie du Dialogue Politique Inclusif (DPI), les recommandations relatives à la mise en place d’un gouvernement de consensus pour conduire un processus électoral consensuel n’a-t-il jamais été respecté ? Quelle est la responsabilité des uns et des autres ? 

Pourquoi l’opposition démocratique a-t-elle accepté d’aller aux urnes malgré tous les signes évidents annonciateurs d’un hold-up électoral ?

L’opposition désormais réunie dans le FARE 2011  pour réclamer essentiellement l’annulation et la reprise des élections présidentielle et législatives espère-t-elle obtenir gain de cause ?

Puis, c’était autour des participants de lui poser un certain nombre de questions. Beaucoup en ont profité pour faire le procès de l’opposition qui est en grande partie, soit dit en passant, responsable de la situation actuelle. D’ailleurs, c’est toujours le même cérémonial dans les réunions centrafricaines.

Or voilà le hic. Et comme on dit, le diable, lui, se loge dans les détails. Car, cette séquence de question/réponse montre la limite de l’exercice qui peut prêter à sourire. Pendant ces moments, apparaissent au grand jour, l’hypocrisie, l’impréparation de la réunion, le manque de sérieux des organisateurs qui peinent à tenir le même langage et l’incohérence de leur  propos.

On a pourtant glosé à l’infini sur ces errements insupportables, mais rien n’y fait. À preuve, l’exercice d’hier est un model du genre. Comme cette bonne dame, je tais son nom volontiers,  présentée comme la présidente du machin, cette nouvelle aberration, nommée CAD (Collectif pour une alternance démocratique en Centrafrique) qui ne s’est pas fait prier de déconstruire, l’autre dirait « détricoter » en cinq minutes chrono, tout le baratin que Martin Ziguélé a pris deux heures d’horloge pour délivrer à l’assistance. 

Généralement avec cette ancienne ministre de Bozizé, c’est du tartarin. J’exagère à peine. Sans conteste, l’humilité n’est pas son fort et après tout, on n’est jamais mieux congratulé que par soi-même. Pour un peu, elle écrirait ses propres hagiographies.   

Au début, comme la majorité des participants de la rencontre, je me suis demandé si je ne faisais pas un très mauvais rêve. Hélas, triple hélas, nous assistions à un mode de fonctionnement inspiré par une absolue désinvolture, une parfaite indifférence aux principes les plus banals. Avec cette dernière, tout ce qui compte, c’est le connu, le riche, le puissant, le célèbre. L’effervescence lui tient lieu de raisonnement. Pour ne rien arranger, elle a l’autoglorification aux lèvres. D’ailleurs, ne connaît-elle pas que l’auto-célébration ? Elle a habitué la Centrafrique entière avec ses discours vantard, fascinée qu’elle est par l’apparence. Son sport favori depuis le jour où j’ai fait sa connaissance, c’est de faire sa propre pub.

Cela dit, point n’est besoin de faire l’ÉNA pour cerner le fonctionnement basique d’une organisation fût-il un collectif hétéroclite. Au nom de quel principe doit-on mettre en place une organisation qui prône l’alternance démocratique en sachant que ses membres du bureau appartiennent pour la plupart aux organes de direction des partis politiques, dont l’objectif premier est, justement, la lutte pour une « alternance démocratique » ?  De ce point de vue et ce point de vue seulement, quel sera, au finish, le rôle du FARE-2011 si le CAD chasse sur son terreau ? N’a-t-on pas vu sa présidente tirer à boulets rouges sur le FARE-2011 qu’elle ose présenter comme une organisation partenaire ? De qui se moque-t-on ?

Disons-le tout net, le CAD contribue à brouiller le message et éparpiller l’énergie que devrait avoir l’opposition pour continuer la lutte. Pis, il participe du mépris et du mauvais procès que fait le régime de Bangui à l’opposition, présentée par lui, comme un groupuscule de « prostitués » à la recherche d’intérêts bassement égoïstes, incapables de durablement s’unir, dixit Bozizé qui avait promis à ses militants dans son discours dit d’investiture, qu’il allait faire crever, à coups de gourdins, j’imagine, « leur phare », oh pardon FARE-2011. Façon de dire qu’il entend profiter de l’inconséquence de ses adversaires pour les diviser !  

Jean-Paul Sartre, le philosophe écrivain, est l’auteur de l’une des plus justes formules que je connaisse : « un homme s’engage dans sa vie, dessine sa figure et en dehors de cette figure, il y a rien ». En vertu de cette formule, les états-majors des partis politiques se doivent de tirer les conclusions qui s’imposent au risque de voir la cohésion de leurs structures respectives volée en éclat. Car, si les cadres de leur formation qui participent à l’aventure du CAD entendaient « tuer le père » pour exister qu’ils ne se prendraient pas autrement. De deux choses l’une : soit ils quittent le CAD ou démissionnent de leurs partis. 

C’est cela, aussi, la cohérence qu’on demande à un homme politique, un vrai.   

 

Adrien Poussou.

 

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Published by Centrafrique-Presse.com - dans Opinion