L’investiture de Bozizé qu’il a choisi d’organiser le 15 mars est une véritable provocation car c’est une façon cavalière de commémorer sans trop en avoir l’air le huitième anniversaire de son putsch du 15 mars 2003. Comme message de division nationale il n’y a pas pire signal pour quelqu’un qui prétend en même temps être un rassembleur et le président de tous les Centrafricains. Chaque année depuis qu’il est à la tête de la RCA, Bozizé a toujours pris le malin plaisir de célébrer chaque 15 mars comme s’il était encore un chef de rébellion alors qu’il prétend aussi être chef de l’Etat centrafricain.
C’est une manière de signifier clairement que c’est par la force des canons qu’il est arrivé au pouvoir donc il doit le rappeler chaque année à cette date. C’est tout simplement inadmissible. Tous ceux, institution ou personnalité individuelle, qui accepteront d’y prendre part, consacreront en même temps leur reconnaissance de son coup d’Etat du 15 mars 2003, cela doit être sans ambiguïté.
Le Vatican qui a cru devoir dépêcher un émissaire non seulement avec un message de félicitation pour Bozizé mais aussi pour prendre part à cette investiture, fait fausse route car c’est clairement accorder une prime aux coups d’Etat et à l’usage des voies non constitutionnelle d’accès au pouvoir. Il y a de quoi s’interroger sur le rôle du Nigérian qui est nonce apostolique à Bangui ainsi que sur le sérieux des rapports et notes qu’il adresse au Vatican.
L’ambassadeur de France à Bangui, Jean-Pierre Vidon qui, au lieu de rester solidaire avec ses autres collègues de l’UE, tient malgré tout à participer aux festivités de cette investiture non pas comme ambassadeur de France mais prétendument en tant que doyen du corps diplomatique. Il se moque du monde. Il aurait dû prétexter que c’est en tant qu’ami personnel de Bozizé qu’il va le faire, cela serait plus cohérent avec son comportement de soutien à ce sinistre dictateur sanguinaire car s’il n’était pas ambassadeur de France, serait-t-il doyen du corps diplomatique ?
Il agit donc bien d’une violation d'un principe de l'UE qui ne célèbre aucune fête concernant la 1ère et 2ème guerre mondiale, notamment la signature de la capitulation de l'Allemagne nazie, le 11 novembre et le 18 juin. Ce comportement du diplomate français de Bangui rappelle celui de Mme Michèle Alliot Marie qui ne "savait pas ce qui se passait en Tunisie" et avait cru bon devoir proposer néanmoins au dictateur Ben Ali " le savoir-faire français en matière de maintien de l’ordre". Quel savoir-français pourrait proposer l'ambassadeur Vidon à Bozize ?
La décision de l’UE de boycotter l’investiture de Bozizé est très importante et lourde de signification. Outre le fait qu’elle veut clairement dire que l’UE ne reconnaît pas de ce fait la crédibilité des élections groupées qui ont eu lieu le 23 janvier dernier, elle veut dire aussi que le régime de Bozizé, suite aux violations répétées des éléments constitutifs essentiels de l'accord de Cotonou à savoir, les Droits de l'homme, la Constitution, les principes démocratiques et la bonne gestion des affaires publiques, l'UE devrait ouvrir un dialogue politique conformément à l'article 8 et 9 et voire ouvrir une consultation avec la RCA sur l'article 96 de l’Accord de Cotonou pour obliger Bozizé à corriger ces manquements. Le régime de Bozizé réunit toutes les conditions pour qu'il lui soit appliqué les dispositions de l'article 96 de l'accord de Cotonou ; violation du des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'état de droit.
En principe, selon nos informations, Bozizé est pleinement informé des mesures auxquelles il s’expose dans le cas où il s’entêterait à ne pas respecter ce que lui demande l’UE qui n’est point satisfaite du déroulement des dernières élections et exige leur annulation, du moins des législatives. La non-participation des ambassadeurs de l’UE à l’investiture de Bozizé est donc un véritable désaveu et un cinglant camouflet qui doit refroidir sérieusement son enthousiasme déplacé. A lui d’en bien méditer le sens…L'opposition qui a refusé jusqu'ici de reconnaître sa pseudo victoire et toujours exigé l'annulation de ces élections ne doit pas bouder son plaisir et savourer ce qu'il faut bien appeler une réelle victoire car sa lutte a quelque peu payé.
Rédaction C.A.P