(MFI / 24.08.10) Le chef de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA), Joseph Kony, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale pour crimes contre l'humanité, est toujours en fuite. Selon Human Rights Watch, il dirige même les rebelles ougandais qui effectuent actuellement une campagne d’enlèvements en RCA et en RD-Congo.
Au cours des dix-huit derniers mois, l'Armée de résistance du Seigneur (LRA), le groupe rebelle ougandais, a enlevé « au moins 697 adultes et enfants dans le cadre d'une campagne, peu documentée, menée en République centrafricaine et dans le district du Bas-Uélé voisin, dans le nord de la République démocratique du Congo », affirme un rapport publié le 12 août dernier par Human Rights Watch (HRW).
L’organisation américaine, qui effectuait une mission d’enquête depuis le 12 juillet dans ces deux régions précise que « près d'un tiers des personnes enlevées sont des enfants, dont beaucoup sont obligés de servir comme soldats ou sont utilisés comme esclaves sexuels par les combattants du groupe armé ».
La LRA reconstitue ses effectifs
Pour Anneke Van Woudenberg, chercheuse senior pour la division Afrique de l’ONG américaine, « la LRA poursuit son horrible campagne pour reconstituer ses effectifs en arrachant brutalement les enfants de leurs villages et en les forçant à combattre ». Le communiqué précise que les témoignages recueillis « désignent Joseph Kony, le chef de la LRA , comme l'instigateur de cette campagne atroce ».
L’enquête de HRW met au jour des « campagnes d'enlèvements de grande envergure », similaires dans les deux pays, et dont l’impact est dévastateur sur les communautés touchées. Meurtres d’adultes et d’enfants, « souvent en leur fracassant la tête à coups de gourdins », enfants en captivité forcés « à tuer d’autres enfants et adultes »…
Les rebelles chercheraient spécialement les enfants
Au sud-est de la RCA , la campagne démarrée le 21 juillet 2009 a permis à la LRA d’enlever 304 personnes dans les villages proches d'Obo puis dans l'ouest, aux alentours de Mboki. Et une campagne similaire est en cours au Congo dans le district reculé du Bas Uélé.
« Certaines des personnes enlevées qui ont réussi ensuite à s'échapper ont indiqué que la LRA les avait interrogées sur la localisation des écoles d'Ango, ce qui laisse penser que les rebelles ont pu chercher spécifiquement à enlever des enfants », rapporte HRW, qui a établi que la LRA avait été stoppée par des soldats congolais à moins de 15 kilomètres de cette localité.
Peu d'informations ont filtré sur ces crimes du fait que cette région est très reculée, que peu d'agences humanitaires sont sur place et que la présence des forces onusiennes est également très réduite. Pourtant, indique l’ONG, des « dizaines de milliers de personnes ont fui la zone » : entre 15 000 et 20 000 en RCA, « qui ont cherché refuge dans les grandes villes, laissant des villages entiers abandonnés ». La protection des civils est largement insuffisante, assurée depuis plus d’un an par l’armée ougandaise quelque appuyée par 200 soldats centrafricains. Mais les deux armées ne sont pas coordonnées et la situation ne cesse de se dégrader, avec en première ligne, des enfants qui continuent à être enrôlés de force.
Dans le Bas-Uélé, c’est 54 000 civils qui sont déplacés à l’intérieur du district ou réfugiés en RCA. Et là encore, le bataillon dépêché par l’armée congolaise, mal équipé et sans moyen de transport, ne suffit pas. Quant à la Mission de la paix de l’ONU au Congo, elle n’a déployé que 1 000 soldats dans la zone affectée sur les 19 000 dont elle dispose pour tout le pays. Mais aucun de ces soldats de maintien de la paix n’est basé dans le district concerné et pour cause : dans les deux derniers mois, la base de Dingila, dans le Bas-Uélé, a été fermée…
Antoinette Delafin