Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Sommaire

  • : centrafrique-presse
  • : informations générales sur la république centrafricaine et l'Afrique centrale
  • Contact

Recherche

Liens

28 juin 2012 4 28 /06 /juin /2012 14:53

 

 

 

football-en-RCA.jpg

 

(FIFA.com) Jeudi 28 juin 2012

 

A première vue, la République centrafricaine a le vent en poupe : revenus dans le Top 100 du Classement Mondial FIFA/Coca-Cola, les Fauves restent sur une victoire historique en Egypte en qualifications pour la CAN 2013. Pourtant, le quotidien des footballeurs locaux est encore loin d'être un confort. FIFA.com est allé sur place s'en rendre compte.

Sous les grands arbres de la forêt tropicale centrafricaine, dans les alentours de Mbaïki, à environ une heure de route de la capitale Bangui, se trouve un terrain de football. On nous dit que ce n’est pas juste un terrain. Ici, c’est un "stade". Un stade dont la surface est considérée comme étant de bonne qualité. Jugez plutôt : au beau milieu de la pelouse passe un chemin emprunté par le bétail et les habitants locaux. Toute une partie de l’aire de jeu est en terre ocre, le reste est parsemé d’une herbe inégale. Tant et si bien que tenter un contrôle sur cette surface relève du miracle.

Et pourtant, les joueurs des Vipères et des Finances opposés ce jour-là dans un match comptant pour la Ligue de la Lobaye - le championnat local -, vont réussir des contrôles orientés, des dribbles, des crochets, des feintes, les uns après les autres. Réagissant avec créativité aux inévitables faux rebonds, ces jeunes virtuoses de l'improvisation font vivre avec brio le football en République Centrafricaine.

"La Ligue de la Lobaye, ce sont sept équipes, sept arbitres dont quatre formés localement et trois formés par la FIFA", explique son président Jean Kongola. Cette compétition fait partie de la ligue régionale de Mbaïki qui compte ainsi 118 équipes réparties en sous-ligues. "On joue de février à juillet. On commence après la saison des pluies. Et il faut se dépêcher de finir car en juillet, les joueurs disparaissent." Pas de phénomène surnaturel derrière ces disparitions soudaines, bien au contraire. "C’est la chasse aux chenilles. Elles sortent à cette période, et tous les joueurs vont vivre dans la forêt pour faire la cueillette. C’est une source de vivres et de revenus ici", explique Kongola.

 La valeur d’une infrastructure

 "Si on fait un terrain ici, sans clôture, sans protection, il sera défoncé deux jours plus tard". Cette fois, ce n’est pas d’une ligue locale dont on parle, mais bien du centre technique national de la fédération de football centrafricaine, près de Bangui. "C’est là que je dois accueillir mes sélections nationales, qu’ils doivent se préparer", enchaîne le président de la fédération, Patrice Ngaïssona. "Tout y passe : les bœufs, les moutons, les gens… Une simple clôture, financée par la FIFA, ce n’est pas rien pour nous". Financée par la FIFA, car la fédération n’en a pas les moyens.

En dehors du programme d’assistance financière FIFA, le gouvernement est la seule source de revenus pour la fédération, "et ils ont évidemment d’autres priorités que le football ici", précise le président. "Nous n’avons pas de sponsor pour l’équipe nationale, même pas de partenariat avec un équipementier". Pour équiper les sélections, il doit acheter les maillots de sa poche. Il fait de même pour les principaux clubs, masculins et féminins. "Ici, le football n’est soutenu que par la FIFA, et des individus qui font ce qu’ils peuvent pour le faire progresser", note Jean-Marie Dickeis, membre du comité exécutif de la fédération et président de la commission du football féminin. "Nous avons d’anciennes joueuses qui veulent entraîner, mais elles doivent d’abord être formées. Et un entraîneur, ici, il veut entraîner, il est formé, mais il n’a pas de plots, pas de ballons, rien pour faire vivre son club. Il doit tout acheter lui-même".

 Même constat au siège de la fédération : "Dans certains bureaux, vous ne trouverez rien pour travailler. Pas d’ordinateurs, pas d’Internet, à peine de quoi travailler sur papier. Il n’y a pas d’eau dans ce bâtiment, parfois pas d’électricité, l’étanchéité pose problème", résume le président. Financé par la FIFA à travers son programme Goal et inauguré en 2005, le bâtiment souffre du temps, et des limites financières de la fédération, empêchée de consacrer des fonds à la maintenance des investissements passés d’anciens problèmes de dettes. "Le bonus de la FAP (Programme d'Assistance Financière de la FIFA) en 2010/2011 nous a fait du bien", sourit le président. "Mais on a privilégié les ligues régionales, avec des équipements notamment. On ne peut pas tout faire avec nos moyens, on doit faire des choix pour avancer. Avec le nouveau projet Goal, on pourra faire avancer les choses".

Aussi bien que Marta

Notamment le football féminin, qui occupe une place importante dans les préoccupations de la fédération. La division 1 est proprement organisée, avec un calendrier fixe, des équipements, des arbitres. Plusieurs arbitres femmes officient même lors des matchs des hommes. Mais là aussi, les moyens font défaut. Mais pas l’envie de progresser.

"J’ai commencé le football à 14 ans, avec les garçons. Les deux fils de mon père adoptif jouaient, et moi j’ai voulu faire comme eux, même si ma mère adoptive me disait que ce n’est pas le travail d’une femme !" raconte Tatiana Yangueko, vice-présidente de la commission du football féminin. "Avant, on jouait pieds nus, les équipes féminines étaient reléguées sur les espaces à la périphérie, sans organisation. Aujourd’hui, le championnat est organisé, on sait qui sont les équipes, où elles vont jouer". Journaliste sportive de métier, elle a à ce titre participé aux formations FIFA/AFP en 2010, dans le cadre du programme "Gagner en Afrique avec l’Afrique" de la FIFA.

"Nos filles n’ont rien à envier à Marta, mais ça personne ne le voit", glisse un membre de la fédération. D’ailleurs, sur un terrain stabilisé de Bangui, ou l’équipe des Colombes est opposée aux Amazones, l’un des entraîneurs s’adresse à sa milieu défensive en l’interpelant "Gattuso ! Gattuso !", et fait de même pour sa milieu offensive avec des "Cristiano"…

Non loin de là, les garçons de la 2ème division de la ligue de Bangui s’affrontent, cette fois sur le gazon synthétique du stade Barthélémy Boganda, financé par la FIFA et le programme "Gagner en Afrique avec l’Afrique". Le terrain est constamment utilisé, du mardi au dimanche, à raison de deux matchs par jour, par la ligue de Bangui et ses divisions. On joue partout en Centrafrique.

Le retour des héros…

La chaleur est étouffante à Bangui. Peu de voitures circulent, les routes de la ville ressemblent à des pistes forestières. La pauvreté est omniprésente. Rien de tout ça n’aura empêché la population locale de se retrouver à la sortie de l’aéroport international de Bangui, ce dimanche 17 juin, pour venir acclamer la sélection nationale. La RCA a réalisé l’exploit d’aller à Alexandrie remporter le match aller du premier tour qualificatif pour la CAN 2013face à l'Egypte. Le pays est fier voir ses couleurs représentées si haut par les "fauves". Pourtant, rien n’est fait, il reste encore un match retour à Bangui, le 30 juin, pour confirmer.

Qu’importe. Les hommes de l’entraîneur Hervé Loungoundji n’auraient même pas dû être dans cette position. "Pour les petits comme nous, c’est tellement plus difficile", résume Ngaïssona. Le président préfère rester réservé, peut-être par peur de la déception si le match retour ne devait pas être favorable. L’enjeu est de taille : jamais une équipe de la RCA ne s’est qualifiée pour une phase finale d’une grande compétition internationale.

Le groupe est jeune, et surtout très hétérogène. Certains jouent en deuxième et troisième division en France ou en Angleterre, d’autres ont rejoint des championnats africains plus relevés comme au Raja de Casablanca, et enfin quelques-uns font encore la richesse de la première division centrafricaine.

Cependant, à l’heure de la victoire, de la fierté, ces différences ne se font pas sentir. Les joueurs semblent profiter de ce moment de manière simple et naïve. Et à travers eux, c’est tout un pays qui se réjouit. À cet instant, ses Fauves viennent de lui offrir un cadeau immense : quelques scènes de bonheur venant cacher pour quelques temps les difficultés de la vie en République Centrafricaine.

Partager cet article
Repost0
Published by Centrafrique-Presse.com - dans Sports