LIBREVILLE 26 oct (AFP) - L'insécurité ne peut pas empêcher les élections présidentielles et législatives prévues en 2011 en Centrafrique, confrontée à des attaques de groupes rebelles, a estimé son président, François Bozizé, refusant toute idée de report, dans un entretien à RFI diffusé mardi.
"Vous croyez que notre insécurité dépasse celle de l'Afghanistan? Au Congo démocratique (République démocratique du Congo, RDC), il y a eu insécurité et les élections se sont déroulées normalement", a affirmé M. Bozizé, interrogé par Radio France Internationale en marge du sommet sur la Francophonie tenu à Montreux (Suisse).
Il lui avait été demandé si les élections fixées au 23 janvier 2011 (avec le second tour au 20 mars) pourraient se tenir à échéance dans le contexte d'insécurité dans son pays, demeurant en proie à des attaques de mouvements rebelles centrafricains en dépit d'un processus de désarmement en cours depuis 2009 ainsi qu'à des exactions de la rébellion ougandaise de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA).
"Nous avons connu ce phénomène d'insécurité en 2005 (année de la dernière présidentielle, NDLR), tout s'est déroulé normalement", a ajouté M. Bozizé, arrivé au pouvoir en 2003 par un coup d'Etat, élu deux ans plus tard et candidat à sa succession.
François Bozizé a par ailleurs rejeté toute idée de report du scrutin et les accusations de l'opposition après sa décision d'instaurer un vote manuel à la place du vote informatisé pour des raisons d'économie.
"L'urgent, c'est de faire en sorte que les élections soient tenues le 23 janvier prochain. (...) Pourquoi changer cette date? Pourvu que la commission électorale se mette sérieusement au travail", a-t-il ajouté.
Le 23 octobre, le collectif regroupant l'opposition et les ex-rébellions avait réclamé un vote informatisé conforme, selon lui, aux dispositions du code électoral et à un accord sur les élections signé en août avec la majorité. Il avait menacé de se retirer du processus électoral en cas de refus.
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NDLR : La question de l’insécurité que Bozizé prend ici à la légère est un obstacle réel dont les conséquences se sont déjà fait sentir en grandeur nature lors de la récente opération du recensement électoral où l’accès à certaines zones et certains citoyens qui sont des électeurs potentiels n’a pas été possible aux agents recenseurs. Va-t-on faire des élections où seule une partie seulement des Centrafricains pourra voter ? Bozizé ne cesse de ces derniers temps de prendre pour référence les élections de 2005 qu’il a prétendument gagnées.
Tout le monde sait pourtant qu’il n’en était pas le vrai vainqueur car les langues qui ne se délient que maintenant sur les conditions de déroulement des scrutins de 2005reconnaissent qu’il s’était agi d’une grossière mascarade électorale. Bozizé et ses « libérateurs » avaient terrorisé la population et les citoyens avec leurs armes dans les bureaux. Ces élections n’étaient ni libres ni démocratiques, ni transparentes. Elles ne sauraient constituer un modèle de référence à rappeler en toutes circonstances.
Par ailleurs, les élections en Afghanistan ont aussi été une vaste et honteuse mascarade qui ne devrait pas être citée en exemple tant les conditions et le contexte sont loin de ressembler à ceux de la République centrafricaine. Au lieu de se préoccuper plutôt des conditions d’une préparation consensuelle des élections, Bozizé fait de la diversion. Il ne peut rejeter sur d’autres ses propres responsabilités dans le piétinement du processus électoral en cours. C’est lui qui refuse de signer le décret sur le découpage électoral en conformité avec la décision du Conseil d’Etat. C’est lui qui refuse, et pour cause, la publication du rapport d’audit sur la calamiteuse gestion de son homme de main Binguimalé de la CEI. C’est lui qui veut imposer un traitement manuel des élections, véritable porte ouverte à la fraude généralisée, à la place de l’informatisation des données.
Tout cela cache mal la peur de Bozizé de se prendre une déculottée aux élections car son bilan après sept années de gestion du pays est tellement désastreux que ces compatriotes se préparent à le sanctionner dans les urnes. D’où sa réelle appréhension que les élections se tiennent. Il joue la montre et fait tout pour multiplier les obstacles sur le chemin du processus, il ne faut pas un dessin pour s’en apercevoir.