
Le Conseil des droits de l'homme adopte les résultats de l'Examen périodique de la République centrafricaine, de Monaco et du Bélize
Source: United Nations Human Rights Council
Conseil des droits de l'homme
MATIN 23 septembre 2009
Le Conseil des droits de l'homme a adopté ce matin les trois documents finals résultant de l'Examen périodique universel s'agissant de la République centrafricaine, de Monaco et du Belize.
Ces documents entérinent les rapports issus de l'Examen périodique universel auquel a procédé le Conseil, réuni en Groupe de travail en mai dernier, et auquel ont été soumis seize pays. Ces rapports sont disponibles sur le site Internet du Haut-Commissariat aux droits de l'homme.
La délégation de la République centrafricaine a notamment souligné que la mise en œuvre des instruments internationaux au niveau national butait sur la mobilisation des moyens nécessaires et à des dysfonctionnements au niveau du dépôt des instruments de ratification. La délégation a souligné que la question de l'abolition de la peine capitale était encore en discussion, la majorité s'y opposant en raison du taux élevé de criminalité, mais qu'aucune exécution n'avait eu lieu depuis 1981. Des mesures ont été prises pour lutter contre les exécutions extrajudiciaires qui témoignent de la volonté du Gouvernement d'y remédier.
L'Algérie, la Fédération de Russie, l'Égypte, la Libye, le Maroc, les États-Unis, Cuba, Djibouti, le Cameroun, la République démocratique du Congo, le Gabon et le Tchad ont pris la parole pour s'exprimer sur l'examen de la République centrafricaine, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes: Fédération internationale de l'ACAT - Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (FIACAT); Association lesbienne et gay internationale - Europe; Interfaith International; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); et Human Rights Watch.
Examen périodique universel
Les rapports du Groupe de travail chargé de l'Examen périodique universel sont disponibles sur la page Internet du Conseil à l'adresse suivante:
http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/12session/reports.htm
République centrafricaine
Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur l'Examen périodique universel concernant la République centrafricaine (A/HRC/12/2), qui s'est déroulé le 4 mai 2009. Les trois rapporteurs chargés de faciliter cet examen étaient la Bolivie, la Bosnie-Herzégovine et le Gabon.
M. LEOPOLD ISMAEL SAMBA (République centrafricaine) a indiqué d'emblée que les textes, conventions, protocoles et traités qui ne sont pas ratifiés, signés ou auxquels son pays n'aurait pas adhéré étaient «autant de préoccupations» pour lui. En effet, la République centrafricaine est entièrement disponible à ratifier tous les instruments juridiques internationaux qui lui semblent bien fondés, compte tenu de l'opportunité politique, économique, sociale et culturelle. Il convient de noter à cet égard que la mise en œuvre ou l'application de ces instruments au niveau national bute sur la mobilisation des moyens nécessaires, ainsi que sur le dysfonctionnement au niveau des dépôts de ces instruments de ratification qui n'est souvent pas fait dans les délais et selon les bons canaux.
Concernant l'abolition de la peine capitale, le représentant centrafricain a souligné qu'elle était «encore en discussion», les opinions à son sujet étant «très diverses et mitigées». Selon lui, la majorité s'oppose à cette abolition en raison du taux élevé de criminalité, celle-ci étant une conséquence directe de l'instabilité qu'a connu le pays. Il a toutefois rappelé que les dernières exécutions remontaient à 1981. S'agissant de la liberté d'information, M. Samba a souligné que les délits de presse sont entièrement dépénalisés. Concernant les crimes de guerre, une commission vérité et réconciliation, ainsi qu'un fonds d'indemnisation, ont été décidés lors du dialogue national qui s'est tenu l'an dernier, mais leur mise en œuvre est retardée à cause des difficultés financières de l'État, a déploré le représentant. M. Samba a par ailleurs assuré que l'indépendance de la justice était garantie par différents organes, au premier rang desquels le Conseil supérieur de la magistrature. S'agissant des exécutions sommaires et extrajudiciaires, celles-ci n'ont jamais été institutionnalisées par l'État, a-t-il assuré. Il a précisé qu'un certain nombre de mesures ont été prises pour lutter contre ce phénomène qui sont autant de preuves de la volonté du gouvernement de remédier à cet état de choses.
S'agissant de l'égalité hommes femmes et de la lutte contre les mutilations sexuelles, le représentant centrafricain a rappelé que son pays avait signé la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Le code de la famille est en cours de relecture en vue de sa mise en conformité avec les normes internationales. Concernant la sorcellerie, s'il s'agit d'une réalité centrafricaine, les difficultés au niveau de la définition des éléments constitutifs de l'infraction demeurent un défi à relever, a observé M. Samba. En ce qui concerne les forces de défense et de sécurité, il a énuméré les mesures prévues, dont l'adoption prochaine du code de justice militaire.
MME NADIA LAMRANI (Algérie) a souligné que la qualité des informations présentées par la République centrafricaine témoignait du sérieux avec lequel le pays appréhende ses responsabilités au titre de l'Examen périodique universel. Elle s'est félicitée de l'engagement du Gouvernement centrafricain en faveur de la consolidation de la paix et de la stabilité du pays, ainsi que des mesures prises par le pays pour protéger de manière effective les droits de l'homme. La représentante algérienne a en outre réitéré l'appel de son pays à la communauté internationale afin qu'elle fournisse à la République centrafricaine l'assistance technique et financière nécessaire. En conclusion, l'Algérie recommande l'adoption du rapport final concernant la République centrafricaine.
M. PAVEL CHERNIKOV (Fédération de Russie) s'est félicité de la présentation de la République centrafricaine, saluant l'attitude de ce pays qui a accepté les deux tiers des recommandations du groupe de travail. La Russie souhaite à la République centrafricaine tout le succès possible dans la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
MME JASMINE MOUSSA (Égypte) a estimé que la déclaration du représentant centrafricain témoignait de l'engagement de son pays en faveur des droits de l'homme, malgré des difficultés internes importantes rencontrées par le pays. Elle a indiqué que l'Égypte appréciait les réponses apportées tout en appelant la République centrafricaine à ne pas adopter des mesures qui ne seraient pas universellement agrées.
M. ADEL SHALTUT (Libye) a salué la déclaration de la République centrafricaine ce matin, se félicitant notamment des mesures prises par le pays en faveur de la réduction de la pauvreté et en faveur de la promotion des droits des femmes. Il est important d'assurer le soutien de la communauté internationale aux efforts déployés par la République centrafricaine, a-t-il ajouté. L'engagement volontaire de la République centrafricaine, dans le cadre de son examen périodique, revêt la plus haute importance et est d'une grande utilité pour favoriser l'amélioration des droits de l'homme dans ce pays, a conclu le représentant libyen.
M. MOHAMED ACHGALOU (Maroc) a félicité la délégation de la République centrafricaine de sa présentation, rappelant que le Groupe de travail avait pris acte de l'engagement de ce pays tel qu'il s'exprime par le nombre important de recommandations qu'il a acceptées. Le Maroc remercie la République centrafricaine d'avoir accepté sa recommandation portant sur le renforcement des capacités en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. La communauté des donateurs doit travailler avec la République centrafricaine pour trouver des moyens d'appuyer son action.
MME COURTNEY MUSSER (États-Unis) s'est félicitée des mesures prises par la République centrafricaine, notamment dans le domaine de la liberté de la presse. Toutefois, sa délégation demeure préoccupée par l'impunité dont jouissent les membres des forces de sécurité ayant perpétré des violations des droits de l'homme, y compris la garde présidentielle, en particulier à l'occasion d'exécutions sommaires dans le Nord commises de 2005 à 2007. Les États-Unis apprécient les efforts entrepris afin de réformer le système judiciaire, ainsi que ceux visant à prévenir l'enrôlement d'enfants.
MME MARÍA DEL CARMEN HERRERA CASEIRO (Cuba) a pris note des efforts déployés par la République centrafricaine pour appliquer les recommandations issues de l'Examen périodique universel de ce pays, au mois de mai dernier. Elle a salué les efforts immenses consentis par la République centrafricaine pour assurer les droits de l'homme de son peuple, en dépit des difficultés liées, en particulier, à un ordre international injuste. En dépit de ces obstacles, la République centrafricaine a pris des mesures et adopté des plans pour promouvoir les droits de l'homme dans le pays, en particulier en faveur des groupes les plus vulnérables, tels que les femmes, les enfants, les minorités ethniques et les personnes handicapées, ce qui témoigne de l'engagement et de la volonté politique du pays, a insisté la représentante cubaine. Ces efforts doivent toutefois être accompagnés d'un soutien de la communauté internationale, a-t-elle souligné.
M. AHMED MOHAMED ABRO (Djibouti) a félicité la République centrafricaine de sa décision de suivre la majorité des recommandations qui lui ont été faites, malgré sa situation difficile. Le représentant a demandé à la communauté internationale d'appuyer la République centrafricaine dans ses efforts.
M. MICHEL MAHOUVE (Cameroun) a noté que l'Examen périodique universel du Cameroun avait mis au jour les obstacles rencontrés par cette République sœur. Le Cameroun est disposé dans la limite de ses moyens humains et matériels à l'épauler dans sa quête en faveur des droits de l'homme. Il invite le Conseil à adopter le rapport concernant la République centrafricaine.
M. RICHARD LUKUNDA (République démocratique du Congo) a présenté ses encouragements à l'Ambassadeur de la République centrafricaine et a félicité ce pays pour avoir soumis son rapport national en vue de l'Examen périodique universel. Il l'a encouragé à poursuivre sa politique de réconciliation nationale. Il a en outre noté avec satisfaction les signes tangibles de la volonté de la République centrafricaine de réhabiliter la commission nationale des droits de l'homme. Il a enfin félicité ce pays de s'être volontairement engagé à élaborer un plan national d'action pour la promotion et la protection des droits de l'homme. En conclusion, la République démocratique du Congo demande au Conseil d'adopter le document final issu de l'Examen périodique universel de la République centrafricaine.
M. SAMUEL NANG NANG (Gabon) a dit sa satisfaction devant l'intérêt de la République centrafricaine et de sa détermination à promouvoir davantage de respect de la dignité humaine, et ce en dépit de difficultés financières et des nombreux soubresauts politiques qui freinent son ascension vers un développement harmonieux. Le représentant gabonais a en outre appelé la communauté internationale à apporter à la République centrafricaine l'appui économique nécessaire.
M. ANGUI AWADA (Tchad) a noté avec satisfaction que la République centrafricaine, pays frère et voisin, avait mis en place des institutions tendant à consolider la démocratie. Sa délégation note également que des efforts ont été entrepris pour assurer la promotion et la protection des droits de l'homme sur l'ensemble du territoire. Les moyens du pays étant toutefois limités, le Tchad suggère à la communauté internationale de l'assister dans cet effort.
MME NATHALIE JEANNIN (Fédération internationale de l'ACAT - Action des chrétiens pour l'abolition de la torture - FIACAT) a noté avec satisfaction les engagements pris par la République centrafricaine à l'issue de son Examen périodique universel mais reste très préoccupé par les nombreuses violations des droits de l'homme qui persistent dans ce pays et en particulier par la pratique récurrente de la torture et des mauvais traitements dans les prisons et les commissariats et par l'impunité qui y règne. Aussi, la FIACAT encourage-t-elle la République centrafricaine à adhérer à la Convention contre la torture et à abolir la peine capitale. Des mesures devraient également être prises pour remédier à la surpopulation carcérale.
M. ROWLAND MAC AULAY (Association lesbienne et gay internationale - Europe) a félicité la République centrafricaine de ses prises de position contre la discrimination motivée par l'orientation sexuelle. Il a appelé les autorités à réviser la loi pénale, en particulier l'article 195 du Code pénal, pour veiller à ce qu'elle n'opère pas de discrimination au motif de l'orientation sexuelle et à prendre des mesures pour reconnaître la santé sexuelle et protéger les droits des minorités sexuelles, conformément aux instruments internationaux.
M. BIRO DIAWARA (Interfaith International) a rappelé qu'après de nombreuses années de troubles, son organisation avait constaté plusieurs cas de tortures, disparitions forcées et crimes divers, le scrutin présidentiel du printemps 2005 ayant finalement ramené la paix. Après avoir cité un certain nombre de recommandations faites à la République centrafricaine dans le cadre de son examen périodique universel, Interfaith International estime que leur mise en œuvre «est liée à des réformes législatives internes qui restent lacunaires encore à ce jour».
MME JULIE GROMELLON (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) s'est félicitée des engagements pris par la République centrafricaine au titre de l'Examen périodique universel, qui reprennent largement les recommandations formulées par la FIDH au début de cet examen. Elle a ajouté que son organisation prend au mot les autorités centrafricaines lorsque celles-ci consentent à lutter fermement contre les exécutions arbitraires, à assurer la protection de la population civile et à promouvoir le retour des réfugiés et des personnes déplacées. Alors que le Gouvernement centrafricain s'était engagé à sanctionner les auteurs de violation des droits de l'homme, y compris celles commises par les forces de l'ordre, une loi d'amnistie générale a été promulguée en octobre 2008 par le Président de la République, démontrant une nouvelle fois le mépris des autorités centrafricaines à l'égard des victimes, a poursuivi la représentante de la FIDH. Elle a en outre déploré les menaces qui continuent de peser sur les défenseurs des droits de l'homme, particulièrement ceux qui luttent contre l'impunité pour les crimes les plus graves. Considérant le manque d'adéquation avérée entre les multiples engagements pris par les autorités centrafricaines sur le respect des droits de l'homme et la réalité catastrophique de la situation de ces droits, la FIDH ne peut qu'espérer que la République centrafricaine respecte enfin ses engagements pris au titre de l'Examen périodique universel et demande au Conseil et à ses procédures spéciales de contrôler étroitement le respect des engagements pris par la République centrafricaine.
M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) s'est félicité du rapport de la République centrafricaine et des mesures prises par ce pays pour mettre un terme aux abus commis par ses forces de sécurité. Cependant, le représentant s'est dit préoccupé par les exécutions sommaires qui sont le fait de groupes paramilitaires alliés du gouvernement, comme par exemple le mouvement UFDR, impliqué dans des attaques meurtrières contre des villages tels que Balembe, dans le nord-ouest du pays, en avril dernier. Le Gouvernement doit poursuivre les personnes responsables des tueries et devrait répondre de manière favorable aux recommandations formulées par les États-Unis et la Suède à cet égard. Le représentant a déploré qu'aucune action juridique n'ait été intentée contre les auteurs identifiés d'exécutions sommaires. Le fait que les attaques commises par des forces gouvernementales contre des civils ont fortement diminué témoigne de la capacité du gouvernement à prendre des mesures concrètes, a conclu le représentant.
M. SAMBA (République centrafricaine), dans ses remarques de conclusion, a estimé que son pays avait apporté la preuve de sa bonne foi s'agissant des recommandations de la communauté internationale. «Il y a des choses qu'il faut sentir dans sa chair pour les apprécier», a-t-il dit, au sujet des reproches faits quant aux insuffisances en matière de lutte contre les exécutions sommaires. Il a rappelé la différence entre la situation qui prévalait en 2003 et aujourd'hui. Ce que l'on ne dit pas c'est que l'est du pays est perturbé par les rebelles ougandais. Or, la communauté internationale connaît bien la situation financière et humaine de la République centrafricaine, a-t-il souligné. Il est inacceptable que l'on se voit accusé d'être une «république bananière», a-t-il dit, estimant que son pays commençait à voir la lumière au bout du tunnel. Concernant la loi d'amnistie, le représentant centrafricain a souligné qu'il fallait trouver des moyens légaux dans ce domaine au nom de la paix. Cela ne signifie pas pour autant que celle-ci doive renforcer l'impunité, a-t-il ajouté. Pour que la paix revienne, on se doit de prendre certaines mesures, telle est la conclusion du dialogue politique inclusif. Il a demandé davantage d'indulgence à l'égard de son pays. Il a évoqué la faiblesse des moyens de la République centrafricaine pour expliquer la situation dans les prisons et rappelé que le problème se posait même en Europe. Le pays est disposé à mettre en œuvre ce qui lui a été demandé dans le cadre de l'Examen périodique universel, mais il n'a pas les moyens de concrétiser toutes les recommandations. La République centrafricaine compte sur le Conseil et aimerait qu'il l'accompagne sur le chemin de la paix, a dit M. Samba, rappelant que sans la paix, rien n'était possible.