
LIBREVILLE (AFP) — A la veille de la première réunion du "groupe de contact" chargé de superviser les nombreux accords de paix jamais appliqués par le Soudan et le Tchad, N'Djamena tente par tous les moyens de prouver que Khartoum prépare une nouvelle attaque par rebelles interposés, tout en se rapprochant de l'opposition politique.
Le président tchadien Idriss Deby Itno a reçu mardi la principale coalition de l'opposition, pour la première fois depuis le raid rebelle raté de début février à N'Djamena, afin de lui demander de renouer le dialogue avec le pouvoir, ont affirmé mercredi des opposants.
"Le chef de l'Etat nous a rencontrés pour nous faire part d'un certain nombre de préoccupations, pour faire avancer le processus démocratique à travers l'accord du 13 août 2007 (entre opposition et pouvoir)", a déclaré un membre de la Coordination des partis politique pour la défense de la Constitution (CPDC).
"Nous lui avons également fait part de nos préoccupations, notamment les préalables quant à notre participation au comité de suivi (de cet accord)", a-t-il ajouté sous couvert de l'anonymat, précisant qu'une nouvelle rencontre aurait lieu "prochainement" pour tenter de "régler tous les problèmes".
Le gouvernement tchadien a par ailleurs accusé le Soudan d'armer des rebelles, à la veille de la rencontre du "groupe de contact", présenté comme la grande innovation du dernier accord en date entre les deux pays, signé le 13 mars à Dakar.
Le groupe doit réunir jeudi à Libreville les ministres des Affaires étrangères des deux pays concernés, ainsi que des médiateurs, la Libye, le Sénégal, le Congo, le Gabon et l'Erythrée.
Des représentants des Nations unies, de l'Union européenne (UE), de l'Union africaine (UA), des Etats-Unis et de la France sont aussi attendus.
Le premier rendez-vous mensuel de cette instance coprésidée par Tripoli et Brazzaville s'annonce chargé: N'Djamena a intensifié ses accusations contre Khartoum.
Le ministre tchadien de la Défense Mahamat Ali Abdallah a ainsi "interpellé" mercredi la communauté internationale au sujet d'une "imminente attaque en préparation", ourdie selon lui par le président soudanais Omar el-Béchir "en violation flagrante de tous les accords de paix".
"Une fois encore, le régime d'Omar el-Béchir (...) est en train de rassembler, d'entraîner et de surarmer des milliers de ses mercenaires à la frontière Est du Tchad en vue de lancer dans les tout prochains jours des attaques", dénonce-t-il.
Petit appel du pied à la "guerre contre le terrorisme" menée par Washington, le ministre assure que Khartoum veut "déstabiliser" l'ensemble de "l'Afrique centrale qui est visée par cet expansionnisme islamique qui ne dit pas son nom".
Le pouvoir du président tchadien Idriss Deby Itno a vacillé les 2 et 3 février quand des rebelles partis de leurs bases arrières au Soudan ont pris d'assaut N'Djamena et failli le renverser.
L'accord de Dakar, le sixième du genre, est censé mettre un terme au conflit larvé, par rebelles interposés, que se livrent les deux voisins. Tchad et Soudan s'y engagent une fois de plus à ne pas soutenir des groupes armés hostiles au pays voisin.
Mais depuis, N'Djamena n'a eu de cesse d'accuser Khartoum de violer le texte, notamment lors de nouveaux combats entre armée et rebelles tchadiens il y a une semaine dans l'est du Tchad. Le Soudan a démenti, dénonçant à son tour des frappes tchadiennes sur son sol.
Les autorités tchadiennes assurent néanmoins disposer de "preuves irréfutables" des menaces soudanaises, et commencent à les distiller, sans qu'il soit possible de faire le tri entre vérité et propagande.
Ainsi, la présidence tchadienne a publié sur son site internet des textes présentés comme des "transcriptions" de "conversations téléphoniques" entre le chef des services de renseignement soudanais Salah Gosh et le principal chef rebelle tchadien, Mahamat Nouri.
Dans ces échanges non authentifiés des 19 et 20 mars, le Soudanais appelle le Tchadien à "bouger" rapidement contre le président Deby. "Attaquez vite. Faites vite, vite", lance Salah Gosh. "Bien entendu", répond le général Nouri, qui n'était pas joignable dans l'immédiat.
Dans la même veine, la télévision publique tchadienne a diffusé mardi soir les images d'un homme présenté comme un officier ayant déserté l'armée soudanaise pour se réfugier au Tchad.
Le militaire affirme, selon la télévision, que "le Soudan utilise abusivement l'argent du peuple pour massacrer la population du Darfour et déstabiliser le Tchad".
Sur les images, on voit ce "capitaine" avec deux mallettes débordant de liasses de dinars soudanais, pour un montant d'un milliard de
francs CFA (1,5 milliard d'euros) destinés, disent les médias officiels, à "financer" les rebelles tchadiens.
L’opposant tchadien Lol Mahamat Choua exprime sa "gratitude" à Sarkozy

PARIS - AP - Mercredi 9 avril, 11h33 - L'opposant tchadien Lol Mahamat Choua exprime "toute (sa) gratitude" à Nicolas Sarkozy pour "avoir contribué de façon décisive à (s)a libération", dans une lettre rendue publique mercredi par l'Elysée.
Il appelle les Tchadiens "à un dialogue sincère en vue d'une paix juste et globale fondée sur l'instauration d'un Etat de droit et d'une démocratie véritables, ce qui requiert la contribution active de la communauté internationale, en particulier de la France".
Dans ce courrier, l'ancien président tchadien remercie le chef de l'Etat d'avoir "plaidé efficacement la cause des trois malheureux opposants 'disparus' durant les affrontements" des 2 et 3 février à N'Djamena. "Nous avons été très sensibles aux messages amicaux mais fermes que vous avez adressés au président (Idriss) Déby", écrit-il.
"Je n'oublierai jamais que c'est grâce à votre prompte et énergique intervention personnelle auprès du président Déby, lors de votre passage au Tchad en route pour l'Afrique du Sud (le 27 février, NDLR), que j'ai retrouvé ma liberté".
Lol Mahamat Choua lui demande "d'user de (son) influence auprès du pouvoir tchadien pour que toute la lumière soit faite sur le sort
de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh", toujours porté disparu, et "pour que de telles dérives à l'encontre des droits humains et politiques les plus élémentaires ne se reproduisent plus jamais".
AP