https://www.rfi.fr/f Publié le 19/10/2022 - 22:10
La polémique enfle en Centrafrique, après que le gouvernement a décidé de mettre à la retraite, dès le 31 décembre prochain, la présidente de la Cour constitutionnelle, Danièle Darlan.
La présidente de la Cour constitutionnelle ne compte pas se laisser faire, après avoir été informée que le gouvernement voulait qu'elle prenne sa retraite le 31 décembre prochain. Dans une lettre adressée aux autorités ce mercredi, elle affirme qu'elle poursuivra bien son mandat jusqu'à son terme, en mars 2024.
Pour se défendre, Danièle Darlan s'appuie sur plusieurs articles de la Constitution du 30 mars 2016. Sur cette base, elle rappelle d'abord que « la durée du mandat des juges constitutionnels est de sept ans », comme stipulé dans l'article 99.2 de la Constitution. Elle met également en avant que, selon l'article 102, « les membres de la Cour constitutionnelle sont inamovibles pendant la durée de leur mandat » et qu'ils « ne peuvent être ni poursuivis, ni arrêtés, sans autorisation » de la plus haute juridiction du pays.
De plus, elle évoque par ailleurs que dans l'article 100, qui « précise les cas ou un juge peut être remplacé », la mise à la retraite n'est pas un motif.
Dans sa lettre, à l'attention de Maxime Balalou, le ministre chargé du Secrétariat général du gouvernement et des Relations avec les institutions de la République, la présidente de la Cour constitutionnelle conclut donc par ces mots : « Ni vous, ni le ministre de l'Enseignement supérieur, n'avez le pouvoir de destituer un juge constitutionnel de ses fonctions, ni d'écourter son mandat. Le mandat des juges constitutionnels a commencé à courir le 24 mars 2017. Il s'achèvera le 24 mars 2024. »
« Une démarche de vengeance pure et simple »
Cette annonce a provoqué une levée de bouclier du bloc républicain pour la défense de la Constitution. Selon le porte-parole de la plateforme, l’opposant et député Martin Ziguélé, « c’est une démarche de vengeance pure et simple », car Mme Darlan a retoqué le projet d’écriture d’une nouvelle Constitution, après avoir raboté celui de la cryptomonnaie nationale, le Sangocoin.
Selon lui, cette mise à la retraite a surtout un objectif : « Mettre à la tête de la Cour constitutionnelle quelqu’un d’acquis au pouvoir pour débloquer le verrou fixé par le verdict de la Cour constitutionnelle par rapport à la mise en place de ce comité de rédaction de la Constitution. »
Il dénonce un acte « irresponsable » de la part du président de la République « de se livrer aujourd’hui à une guerre contre les gardiens de la Constitution, contre une pauvre dame, courageuse présidente de cette institution ».
Réunion des juges de la Cour
De son côté, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement centrafricain, Serge Ghislain Djorie, estime que cette mise à la retraite n’a absolument rien à voir avec la modification, ou non, de la Constitution. Le problème, dit-il, c'est que ces fonctionnaires continuent d'exercer leurs fonctions au-delà des 65 ans imposés par la loi.
« Elle sait qu’elle doit partir en retraite, tout simplement », explique-t-il, mettant en avant son âge. Et d’ajouter : « Comment la jeunesse va travailler ? Il y a des gens qui ont été formés et qui prétendent à travailler pour la fonction publique. C’est comme cela qu’on doit penser. Je pense que lorsqu’il y a un délai prescrit par les textes réglementaires, ce délai dépassé, je dois le saisir pour me reposer et me concentrer sur autre chose. »
Si, en effet, la présidente de la Cour constitutionnelle, Danièle Darlan, est aujourd'hui âgée de 70 ans, son mandat à la tête de la plus haute juridiction du pays court normalement jusqu'en mars 2024. Et selon plusieurs juristes contactés par RFI, les juges de la Cour constitutionnelle sont « inamovibles » et ne peuvent donc pas être démis de leurs fonctions.
Les juges de la Cour constitutionnelle doivent se réunir ce jeudi autour de Danièle Darlan à ce sujet.
Lu pour vous
Centrafrique-La patronne de la cour constitutionnelle poussée à la retraite parce que refusant un 3è mandat de Touadera
https://icilome.com/ By Adjogblé HAKA October 20, 2022
Danièle Darlan, la présidente de la Cour constitutionnelle, la haute institution qui refuse la modification de la loi fondamentale pour un troisième mandat à Touadera, est poussée à la retraite. Ce qui risque de créer une crise politique majeure en République centrafricaine (RCA).
Faustin-Archange Touadéra, le président centrafricain, est décidé à faire un troisième mandat, en modifiant la Constitution. Dans un premier temps, un projet de réécriture d’une nouvelle Loi fondamentale est retoquée par la Cour constitutionnelle, présidée par Danièle Darlan.
Celle-ci est devenue alors la cible privilégiée de la majorité au pouvoir qui multiplie les manœuvres pour lui faire changer d’avis. En vain. C’est alors que le gouvernement lui signifie qu’elle doit prendre sa retraite au plus grand tard le 31 décembre 2022.
Mme Darlan, s’appuyant sur les textes, assure qu’elle restera à son poste jusqu’en mars 2024, la date de la fin de la mandature. En effet, elle rappelle que « la durée du mandat des juges constitutionnels est de sept ans », conformément à l’article 99.2 de la Constitution, ajoutant que « les membres de la Cour constitutionnelle sont inamovibles pendant la durée de leur mandat », stipule l’article 102. Elle botte donc en touche toute initiative de sa mise en retraite forcée.
L’opposition au régime, elle, soutient la présidente de la Cour constitutionnelle, critiquant Faustin-Archange Touadéra et ses courtisans de s’inscrire dans « une démarche de vengeance pure et simple ». En tout cas, c’est l’avis de Martin Ziguélé, le porte-parole de la plateforme de l’opposition.
Selon lui, le chef de l’Etat veut « mettre à la tête de la Cour constitutionnelle quelqu’un d’acquis au pouvoir pour débloquer le verrou fixé par le verdict de la Cour constitutionnelle par rapport à la mise en place de ce comité de rédaction de la Constitution ».