Les Africains fustigent l’absence des pays riches au sommet de Rotterdam sur l’adaptation au changement climatique
https://www.lemonde.fr/ Par Laurence Caramel
A deux mois de la COP27 à Charm el-Cheikh, les dirigeants du continent souhaitaient profiter de ce rendez-vous pour mobiliser l’attention internationale.
Déçus et amers. L’un après l’autre, le dirigeant sénégalais Macky Sall, au nom de l’Union africaine (UA) dont il assure la présidence tournante, celui du Ghana, Nana Akufo-Addo, celui de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, la présidente de l’Ethiopie, Sahle-Work Zewde, et Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA, ont déploré l’absence des chefs d’Etat des pays industrialisés au sommet consacré à l’adaptation de l’Afrique au changement climatique, lundi 5 septembre à Rotterdam.
« Nous avons fait l’effort de quitter l’Afrique pour venir à Rotterdam et ils sont absents de cette salle alors qu’il était certainement plus facile pour eux de se déplacer, a fustigé le président sénégalais. Ils sont les principaux pollueurs et doivent financer l’adaptation » des pays qui ne sont pas responsables du dérèglement climatique.
A deux mois de la conférence des Nations unies sur le climat (COP27) de Charm el-Cheikh, en Egypte, les dirigeants africains souhaitaient profiter de ce rendez-vous organisé par le Centre mondial pour l’adaptation (GCA) pour mobiliser l’attention internationale sur l’une des priorités du continent alors que la pandémie de Covid-19 et le choc inflationniste lié à la crise ukrainienne amenuisent ses capacités financières.
Trente-trois Etats africains sur 54 font partie des pays les moins avancés. « Nos pays sont d’ores et déjà contraints de consacrer entre 2 % et 5 % de leur PIB pour faire face à un problème qu’ils n’ont pas créé. Ils reçoivent une part insignifiante de financements internationaux. C’est une des plus choquantes injustices à l’égard du continent », a critiqué Moussa Faki Mahamat.
« Les Africains ne sont pas en train de mendier »
Environ 50 milliards de dollars par an sont nécessaires pour mettre en œuvre les politiques d’adaptation élaborées par les gouvernements africains d’ici à 2030. Seule une partie peut être assurée sur des ressources intérieures. Le Rwanda a par exemple déjà averti qu’il n’était pas en mesure de couvrir plus de 40 % de ses besoins, le Ghana un tiers et le Kenya à peine plus de 10 %.
En 2019 et en 2020, les pays industrialisés ont contribué à hauteur de 11 milliards de dollars, selon les données publiées par le GCA : 97 % provenaient de financements publics et en particulier de banques multilatérales de développement, et plus de la moitié de ces financements étaient des prêts contribuant à alourdir l’endettement des pays.
La Banque africaine de développement (BAD) et le GCA ont lancé en 2021 un Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique, dont l’objectif est de réunir 25 milliards de dollars d’ici à 2025 pour soutenir par exemple des initiatives d’adaptation dans le domaine agricole ou construire des infrastructures capables de résister aux chocs climatiques. « Les Africains ne sont pas en train de mendier ni d’attendre. Ils mettent de l’argent sur la table », a souligné le président de la BAD, Akinwumi Adesina, en rappelant les pays industrialisés à leur devoir de solidarité.
Ce programme est composé de deux volets : un fonds d’amorçage de 250 millions de dollars qui doit permettre d’évaluer la faisabilité des projets, et, dans un second temps, un plan de financement. La BAD espère lever cette somme lors de la COP27. La France, qui était représentée à Rotterdam par sa secrétaire d’Etat chargée du développement, Chrysoula Zacharopoulou, a annoncé qu’elle verserait 10 millions d’euros pour soutenir des projets liés à la Grande Muraille verte et à l’initiative FARM (Food and Agriculture Resilience Mission), portée par Emmanuel Macron et Macky Sall.
Laurence Caramel
Des présidents africains dénoncent l’absence de dirigeants occidentaux à un sommet sur le climat
https://information.tv5monde.com/ 05 SEP 2022 Mise à jour 05.09.2022 à 17:37 par TV5MONDE avec AFP
Le président de l’Union africaine et d’autres dirigeants du continent sont aux Pays-Bas. Le 5 septembre, ils assistent à un sommet sur l’adaptation de l’Afrique au changement climatique à Rotterdam. À deux mois de la COP27 en Égypte, aucun dirigeant occidental n’a fait le déplacement, dénoncent les chefs d’État africains.
Plusieurs dirigeants africains ont dénoncé l'absence de chefs d'Etats industrialisés à un sommet à Rotterdam aux Pays-Bas. Organisé en soutien de l'adaptation de l'Afrique au changement climatique, les dirigeants du continent plaident notamment pour obtenir plus de fonds à deux mois de la COP27 en Égypte.
"Je ne peux manquer de noter avec amertume l'absence des dirigeants du monde industrialisé", a lancé Macky Sall, président en exercice de l'Union africaine et président du Sénégal, lors de l'ouverture du sommet. "Puisque ce sont les principaux pollueurs de cette planète, ce sont eux qui doivent financer l'adaptation", a poursuivi le dirigeant sénégalais. Ses propos ont été repris par plusieurs de ses homologues africains.
Puisque ce sont les principaux pollueurs de cette planète, ce sont eux qui doivent financer l'adaptation. Macky Sall, président du Sénégal et de l'Union africaine
"Le continent africain est celui qui a le moins d'impact sur le changement climatique”
Le sommet de lundi à Rotterdam réunissait notamment l'Union africaine, le Fonds monétaire international et le Centre mondial sur l'Adaptation en soutien de l'adaptation de l'Afrique au changement climatique. L'Afrique émet moins de 4% des émissions mondiales de CO2. Mais le continent paye le plus lourd tribut au réchauffement climatique.
"Je voudrais également déplorer l'absence des leaders des nations industrialisés ainsi que des représentants du secteur privé, qui sont, comme on le sait, les plus gros pollueurs", a déclaré Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo (RDC). "Le continent africain est celui qui a le moins d'impact sur le changement climatique, mais paradoxalement, subit la majorité des conséquences de ces fléaux", a affirmé le dirigeant congolais.
Il est temps d'investir pour l'adaptation en Afrique.
Ban Ki-moon, ancien secrétaire général de l'ONU
L’ONU rappelle le “devoir moral” d’aider l’Afrique
Plusieurs dirigeants africains ont récemment souligné l'échec de la communauté internationale à remplir les objectifs de la COP21 à Paris en 2015. C’est-à-dire contenir, d'ici à 2100, le réchauffement climatique bien en dessous des 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux de l'ère pré-industrielle, idéalement le limiter à 1,5 degrés. Mais selon l'Organisation météorologique mondiale, le réchauffement pourrait atteindre de 2,5 à 3 degrés.
"Ce n'est pas seulement le sort de l'Afrique qui est en jeu mais aussi le sort de l'humanité et l'avenir de la planète", a rappelé Macky Sall. "Nous avons un devoir moral" d'aider l'Afrique à faire face au changement climatique, a déclaré l'ancien secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon. "Il est temps d'investir pour l'adaptation en Afrique", a-t-il ajouté.