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Traitement du SARS-CoV-2: Un super anticorps contre le Covid sort des labos vaudois
La découverte ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques et préventives.
https://www.tdg.ch/ Tribune de Genève Marie Nicollier Publié: 12.10.2021, 16h59
Ça y est, ils ont trouvé. L’an dernier, le CHUV touchait un financement européen de 5 millions pour identifier des anticorps capables de «bloquer» le SARS-CoV-2. Des chercheurs du CHUV et de l’EPFL ont découvert un anticorps dit «monoclonal» très puissant ciblant la protéine Spike du virus. L’interaction entre cette protéine et son récepteur est bloquée; l’infection est supprimée. «Une étape décisive dans la lutte contre la pandémie», commentent les deux institutions.
Cet anticorps est d’autant plus intéressant qu’il neutralise tous les variants du virus, y compris le Delta. Techniquement, il bloque la liaison de la protéine Spike aux cellules exprimant les récepteurs dits «ACE2», qui sont la cible du virus pour entrer et infecter les cellules du poumon. Le fameux anticorps protecteur arrête le cycle de réplication virale et conduit à l’élimination du virus par le système immunitaire. C’est ce qui a été observé chez des hamsters, traités par l’anticorps et protégés de l’infection après avoir été exposés à une dose hautement infectieuse de virus. Un essai est en cours chez les singes.
«L’efficacité est remarquable.»
Professeur Giuseppe Pantaleo, chef du Service d’immunologie et d’allergologie du CHUV
«La neutralisation est extrêmement puissante; l’efficacité remarquable», se réjouit le professeur Giuseppe Pantaleo, chef du Service d’immunologie et d’allergologie du CHUV, qui a conduit l’étude avec le Dr Craig Fenwick et le Laboratoire de virologie et de génétique de l’EPFL (professeur Didier Trono et Dre Priscilla Turelli).
Injections préventives
L’anticorps neutralisant ouvre de nouvelles perspectives pour la prévention et la prise en charge du Covid. «Nous pensons qu’il sera probablement efficace en prévention pour les populations vulnérables, notamment les personnes immunodéprimées qui répondent mal ou pas du tout à la vaccination», explique le professeur Pantaleo.
Bonus: il a été modifié par les chercheurs pour avoir une durée de vie plus longue; quatre à six mois contre deux ou trois semaines en temps normal. «Nous avons prolongé sa vie pour éviter de devoir réinjecter une dose aux patients toutes les trois semaines, explique Giuseppe Pantaleo. Notre objectif est deux ou trois injections par an. Normalement, l’anticorps est administré par voie veineuse. Nous sommes en train de développer une stratégie pour pouvoir l’injecter par voie intramusculaire.»
Les chercheurs évoquent aussi son usage dans le cadre de thérapie combinée pour réduire la sévérité de la maladie chez les personnes infectées. «L’utilité de ce traitement est surtout de prévenir des formes graves de la maladie, indique le professeur Pantaleo. Pour avoir un effet, ce type de traitement doit être administré dans une phase très précoce de l’infection.»
Le médecin insiste sur le fait que cette découverte «est importante pour les gens qui ne répondent pas au vaccin mais n’a pas vocation à remplacer la vaccination, qui reste le moyen le plus efficace de se protéger contre l’infection».
Le CHUV et l’EPFL collaborent avec une start-up en vue de produire le nouveau traitement. Les essais chez l’homme doivent démarrer fin 2022. «La clé de ce succès est cette collaboration, cette mise en commun de savoirs entre le CHUV et l’EPFL», relève le professeur Pantaleo.
Les travaux ont été publiés dans la revue scientifique «Cell Reports».
Publié: 12.10.2021, 16h59