Centrafrique: tensions au Nord-Ouest du pays à l’approche des élections
https://www.rfi.fr/ De notre envoyée spéciale à Bangui, Florence Morice
Le climat sécuritaire se tend en Centrafrique à neuf jours des élections du 27 décembre. Des descentes d’hommes en armes et des tirs ont été signalés dans plusieurs villes du Nord-Ouest du pays depuis ce matin. Une situation qui préoccupe à Bangui où la sécurité a été renforcée.
C’est très tôt ce matin, que la situation s’est dégradée dans plusieurs localités du Nord-Ouest. À Bozoum, des témoins rapportent avoir vu arriver des dizaines d’hommes en armes à bord de motos et véhicules 4x4, puis rester quelques heures en ville avant de poursuivre leur route vers Yaloke où des tirs ont été signalés. Ainsi qu’à Bossembele où des témoins parlent de « crépitements d’armes lourdes » en ville.
En fin de journée, ils se faisaient plus lointains. L’identité de ces hommes armés est incertaine. Le curé de Bossembele parle d’un « rassemblement hétéroclite » d’hommes parlant pour certains le français, d’autres le sango et d’autres l’arabe. Il explique aussi qu’ils sont venus dans sa paroisse pour essayer de s’y installer et demander du ravitaillement avant de renoncer à la vue d’hélicoptère de la Minusca survolant la zone.
Pas de communication des autorités
Ce soir, plusieurs témoins assurent qu’une partie de ces hommes en armes est toujours en ville, visible, tandis qu’un second groupe a repris la route de Boali plus au sud. Selon nos informations, ils ne s’en prennent pas à la population. Les autorités centrafricaines n’ont fait aucune communication sur la situation.
Des actions diplomatiques régionales et internationales sont en cours pour tenter d’apaiser la situation tandis qu’à Bangui, la capitale, la sécurité a été renforcée en plusieurs points stratégiques de la ville.
Centrafrique: le défi de l'acheminement du matériel électoral dans les zones reculées
https://www.rfi.fr/ 18/12/2020 - 03:48 Avec notre correspondante à Bangassou et Yongofongo, Charlotte Cosset
En Centrafrique, c’est la dernière ligne droite avant les élections groupées – présidentielle et législatives – qui doivent se tenir le 27 décembre prochain. Le matériel électoral, qui représente plusieurs tonnes, est en cours de déploiement jusque dans les zones les plus reculées du pays. Un véritable défi logistique. C'est la Minusca qui achemine le matériel dans les préfectures, comme dans celle de Bangassou, où l’équipe sous-préfectorale, aidée de la mission onusienne, s’organise.
Le matériel électoral est stocké à la mairie de Bangassou. Toutes les équipes sont dans l’effervescence. Il s’agit désormais de bien s’organiser pour déployer le matériel. Théodore Motry est le rapporteur général de l’autorité sous-préfectoralé de Bangassou. Il explique :
« Présentement, nous sommes dans un atelier d'échanges avec tous les démembrements du Mbomou pour voir comment évolue le processus électoral. Nous devons être au même diapason. Il reste moins de deux semaines. A partir du 19 décembre, nous allons commencer à distribuer les cartes aux électeurs. »
Des motos pour rallier les bureaux les plus difficilement accessibles
Sous escorte, les camions de la Minusca distribuent les urnes, les isoloirs et les cartes d’électeurs jusque dans les sièges de démembrement, comme à Yongofongo. Mais là, encore ce n’est pas terminé, explique José Simplice Monguiaga, le président de démembrement de l’autorité locale des élections :
« C'est maintenant à notre tour d'acheminer ce matériel dans les centres et les bureaux de vote. C'est le travail le plus dur, très sensible. Il faut acheminer ce matériel à temps pour le déroulement de ces élections. C'est une course. Les bureaux les plus éloignés sont à 130 kilomètres, 125 kilomètres... Mais la route est très difficile. On va utiliser des motos. »
Pour les bureaux de vote les plus reculés, il faudra encore faire au moins quatre heures de moto sur les pistes accidentées.
Centrafrique: des groupes armés réclament des concertations sur l’accord de Khartoum
https://www.rfi.fr/ 18/12/2020 - 14:28 Avec notre envoyée spéciale à Bangui, Florence Morice
Plusieurs groupes armés anti-balaka et ex-Séleka s’unissent, dans un communiqué commun daté du mercredi 16 décembre, pour dénoncer l’accord de Khartoum, insuffisamment appliqué selon eux. Ils menacent d’utiliser « tous les moyens » si le gouvernement ne consent pas à organiser des concertations à ce sujet avant l’organisation de la présidentielle et des législatives, prévues le 27 décembre. En cause : l’incapacité, selon eux, du gouvernement centrafricain à faire appliquer l’accord signé en février 2019 et censé ramener la paix dans le pays.
Le communiqué de deux pages est paraphé par six leaders de groupes armés ou de leurs représentants. Parmi les plus influents signataires de l’accord de Khartoum : UPC, MPC, FPRC, 3R, et deux groupes anti-balaka. Jeudi soir, la moitié avait confirmé à RFI l’authenticité du document, signé mercredi 16 décembre à Kamba Kota, dans la préfecture de l’Ouham, dans le nord-ouest du pays.
Les auteurs y dénoncent l’« incapacité », selon eux, du gouvernement à faire appliquer l’accord de Khartoum... qu’ils sont eux-mêmes régulièrement accusés de violer. Ils placent le pouvoir de Bangui face une alternative : soit accepter d’organiser une « large concertation nationale » avant la tenue des élections, soit s’obstiner à « manipuler », disent-ils, l’organisation du scrutin en vue d’un « hold-up » électoral, et s’exposer à ce que ces groupes armés utilisent « tous les autres moyens de coercition » pour obtenir gain de cause.
L'ONU s'inquiète de possibles perturbations autour des élections
Cette déclaration menaçante intervient alors que depuis plusieurs jours, d’importants mouvements de troupes sont signalés dans le nord-ouest du pays. La Minusca (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine) y a renforcé ses barrières de contrôle et ses patrouilles, sur l’axe Bossangoa Bangui notamment. L’ONU s’est plusieurs fois inquiétée, ces derniers jours, d’un risque de perturbations du processus électoral par des groupes armés, et a appelé les acteurs politiques, notamment l’ex-président François Bozizé, à s’abstenir de toute tentative d’alliance avec eux.
Plusieurs sources, sécuritaires et au sein des groupes armés font état de la présence du candidat invalidé François Bozizé lors de la signature de ce texte, ce que dément son porte-parole Christian Guénbem. Il assure que l'ancien chef d'État est, au contraire, engagé dans une « dynamique politique », comme en témoigne selon lui l'alliance nouée au même moment mercredi entre son parti, le KNK, et Anicet Georges Dologuélé pour la présidentielle.
Par ailleurs, ce vendredi matin, des incidents sécuritaires ont signalés à Bossembélé, mais aussi Bozoum et Yaloké, trois localités du nord-ouest de la Centrafrique. Ni l’ampleur de ces incidents, le bilan ou l’identité des hommes en armes impliqués ne sont encore confirmés. La Minusca est en train de suivre la situation, son porte-parole assure qu’elle va agir, sans plus de précision pour le moment, la sécurité a également été renforcée à Bangui, la capitale où la situation est calme.
Centrafrique: François Bozizé soutient Anicet-Georges Dologuélé pour la présidentielle
https://www.rfi.fr/ Avec notre envoyée spéciale à Bangui, Florence Morice
François Bozizé annonce son soutien à l’ex-Premier ministre centrafricain Anicet-Georges Dologuélé à la présidentielle, 10 jours après l’invalidation de sa candidature par la cour constitutionnelle. Les deux hommes l’ont annoncé, ce mercredi à Bossangoa, où Anicet Georges Dologuélé est venu trouver l'ancien président, pour finaliser leur alliance.
Leur possible alliance faisait l’objet de discussions intenses depuis quelques jours. Elle est désormais officielle. Et c’est François Bozizé qui l’a annoncé mercredi à la presse dans son fief de Bossangoa à l’issue une rencontre entre les deux hommes : « Le parti Kwa na Kwa soutient la candidature du président Dologuélé. Nous sommes tombés d’accord, c’est une décision du bureau politique Kwa na Kwa. Et nous ne faisons que l’exécuter maintenant. »
Pas de candidature unique en vue pour l'opposition
En plus de son soutien politique, François Bozizé promet donc de mettre à la disposition d’Anicet-Georges Dologuélé les cadres du parti et son infrastructure. Cette annonce, l’ex-Premier ministre l'a accueilli avec « joie » et fierté : « Avoir le soutien du président Bozizé et du parti Kwa na Kwa, c’est vraiment… J’ai envie de dire que c’est deux gros soutiens. Nous essayerons moi et mon parti de mériter cette confiance que le Kwa na Kwa et le président Bozizé ont décidé de placer en nous. »
Aucun détail supplémentaire sur les termes de cette alliance n’a filtré. Il y a quelques semaines encore, François Bozizé apparaissait comme le principal concurrent du président sortant dans cette présidentielle avant que sa candidature ne soit invalidée par la Cour constitutionnelle. Il est en effet sous le coup d'un mandat d’arrêt et de sanctions des Nations unies. En revanche, l'appel lancé mardi par François Bozizé à l’ensemble des leaders de la coalition de l’opposition à s’entendre sur une candidature unique est restée sans suite pour le moment.
La pression s'accentue sur Bozizé
Dans le même temps, autorités centrafricaines et Minusca multiplient les messages à son encontre pour prévenir toute éventuelle tentative de « déstabilisation » du processus électoral. La mission des Nations unies s’est adressé à l’ex-président Bozizé au cours de son point presse mercredi pour l’appeler à « éviter de mener des actions de nature à déstabiliser ou perturber le processus électoral ». Vladimir Monteiro, porte-parole de la Minusca, insiste : « Ses activités à l’intérieur du pays et ses contacts pris avec les groupes armés ne sont pas de nature à contribuer à un processus électoral pacifique que nous souhaitons tous et pour lequel nous travaillons. »
La veille c’est le procureur général de la cour d’Appel de Bangui, Éric Didier Tambo, qui s’est livré à une mise en garde, visant explicitement François Bozizé. Il a brandi la menace de poursuites judiciaires contre quiconque tenterait de « semer la zizanie » avant et pendant le scrutin.
Le week-end dernier, l’ex-président Bozizé s’est justifié au sujet de ses récentes rencontres avec des responsables de groupes armés. Il a affirmé qu’il s’agissait simplement de venir les saluer dans le cadre des déplacements de campagne qu’il mène pour soutenir ses candidats aux législatives.