Paix en Centrafrique, l’impuissance de la communauté internationale
Le général Abdoulaye Miskine , avant de jouer les rebelles, était le chef de la sécurité présidentielle d’Ange-Félix Patassé . Jusqu’en 2003, date de la chute de son président, il lutte âprement contre la rébellion conduite par François Bozizé , soutenu lui-même par le Tchad.
Après la victoire de ce dernier, en 2003, il se replie avec ses hommes dans l’ouest de la RCA, à la frontière camerounaise. Et fonde le FDPC. Il profite de la guerre froide entre le Tchad et la Libye pour recevoir l’appui de Mouammar Kadhafi et mène la résistance armée contre Bozizé.
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Un roitelet dans l’Ouest
En 2012, il rejoint la coalition issue du nord de la RCA, la Seleka, et participe à sa marche triomphale sur Bangui. Mais il se retire de la Seleka avant la prise de la capitale, en mars 2013. Le FDPC se replie dans son fief, à la frontière du Cameroun, où il contrôle l’axe Garoua- Bouar-Boulaï, la principale voie de ravitaillement du pays par le Cameroun.
Blessé dans des heurts avec la Seleka, arrêté au Cameroun, puis libéré, il est l’un des roitelets de l’ouest de la RCA dont les alliances sont floues. Contre la Seleka, il se serait rapproché de François Bozizé . Lié aux Saras, la grande communauté du sud du Tchad (il serait Ngama), on lui prête aussi des soutiens dans ce pays. C’est son groupe qui a enlevé le prêtre polonais Mateusz Dziedzic en 2014.
Un éphémère signataire de l’accord de paix
Le FDPC est l’un des 14 groupes armés à avoir signé l’accord de paix de Khartoum, en février 2019, avant de se rétracter le lendemain, au motif qu’il n’était pas représenté au sein du nouveau gouvernement.
Un siège de ministre a pourtant été offert à Abdoulaye Miskine , tandis que l’un de ses proches était nommé « conseiller spécial » à la Primature et l’autre préfet de la Nana-Mambéré (ouest). Mais le chef du FDPC a refusé cette main tendue.
Menace de renverser le président Touadéra
Son groupe armé se décentralise dans le nord-est du pays, du côté de la forêt d’Amdafock, près de la frontière soudanaise d’où, en juillet, il entre ouvertement en rébellion contre le président Touadéra , appelant à sa démission « immédiate » faute de quoi, il le renverserait.
Une menace prise au sérieux par Bangui d’autant que le FDPC forme une alliance de circonstance avec un nouveau groupe armé issu d’une scission au sein de la Seleka, le Parti du rassemblement de la nation centrafricaine (PRNC). La réaction de la capitale ne se fait pas attendre. Le 26 août 2019, elle lance un mandat d’arrêt contre lui, appuyée en cela par la communauté internationale.
Pris dans les filets d’Idriss Déby
La reprise du conflit entre deux branches de la Seleka dans le nord du pays, en septembre, le prend au piège. Il est contraint de se réfugier au Soudan avant de se rendre à N’Djamena, le 18 novembre, pour une raison qu’on ignore. Abdoulaye Miskine semblait aux abois. Il a sans doute été la victime du jeu trouble du Tchad en RCA.
En le faisant arrêter, le président Idriss Déby se débarrasse d’un vieil ennemi tout en faisant valoir sa bonne foi quand il dit vouloir aider le président Faustin-Archange Touadéra . En attendant, derrière cette vitrine, l’un des poulains du président tchadien dans la région, Ali Darassa , le chef de l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC), poursuit sa conquête du riche et isolé sud-est de la RCA.
Centrafrique : Bangui réclame l’extradition du chef de guerre Abdoulaye Miskine, arrêté au Tchad
20 novembre 2019 à 16h26 | Par Jeune Afrique avec AFP
Le chef de guerre Abdoulaye Miskine , leader du Front démocratique du peuple Centrafricain (FDPC), a été arrêté au Tchad, a annoncé mercredi le porte-parole du gouvernement centrafricain, qui a demandé son extradition aux autorités centrafricaines.
L’arrestation du leader et fondateur du Front Démocratique du peuple centrafricain (FDPC), de son vrai nom Martin Koumtamadji , a été confirmée par un haut responsable des services de sécurité tchadiens – qui a requis l’anonymat. « Abdoulaye Miskine a été arrêté au Tchad. Nous demandons son extradition » , a déclaré à la presse Ange Maxime Kazagui, le porte-parole du gouvernement centrafricain.
« Il a été arrêté à la frontière entre le Tchad et la Centrafrique, à Harare Mangueigne, et amené à N’Djamena où il a aussitôt été mis aux arrêts à l’Agence nationale de sécurité (ANS) », le service du contre-espionnage, a précisé un responsable tchadien de la sécurité. « Nous n’avons pas encore d’instructions quant à une possible extradition » , a-t-il ajouté.
Perte d’influence
Figure historique de la rébellion depuis la guerre civile qui a éclaté en Centrafrique en 2004, année au cours de laquelle il a créé le FDPC, Abdoulaye Miskine , de même que son groupe, a beaucoup perdu de son influence et de son pouvoir sur le terrain ces derniers temps, selon les observateurs du conflit.
Après avoir rejoint la Séléka, une coalition de groupes armés qui a renversé le régime du président François Bozizé en 2013, le « général » autoproclamé Miskine avait signé l’accord de paix de Khartoum du 6 février 2019 entre le gouvernement et 14 groupes armés, par lequel les signataires se partageaient notamment des postes au gouvernement. Il avait été nommé à un poste de conseiller dans le nouveau gouvernement centrafricain formé le 5 mars mais « n’a jamais pris ses fonctions », a précisé Maxime Kazagui.
Alors que la Centrafrique est ravagée depuis 2013, par les combats entre de nombreuses milices rebelles et les forces gouvernementales, mais aussi entre ces groupes armés eux-mêmes, depuis l’accord de Khartoum , les violences ont baissé dans le pays mais n’ont pas réellement cessé, notamment les combats entre groupes rebelles qui continuent de faire des victimes parmi les civils.