Centrafrique : La démission du Premier Ministre réclamée par certains groupes armés à Addis Abeba
Par Sylvestre Sokambi le 19/03/2019
BANGUI, le 19 mars 2019 (RJDH)—Onze des quatorze groupes armés présents à Addis Abeba, ont posé le départ du Premier Ministre comme une de leurs conditions. Ils l’ont fait savoir dans un communiqué conjoint publié le 18 mars à l’entame des discussions censées mettre fin aux différends qui les opposent au pouvoir de Bangui.
Les 11 groupes armés (sauf le FPRC de Noureddine Adam, les deux tendances Anti-Balaka Mokom et Ngaissona), dans le communiqué conjoint, considèrent que le pouvoir de Bangui a failli dans la mise en œuvre de l’accord de Khartoum. Ils évoquent le manque de consensus dans le processus de la nomination du Premier Ministre et de son équipe ainsi que les retards dans la vulgarisation dudit accord.
Les groupes armés se gardent d’évoquer la caducité de l’accord même si entre les lignes, l’on peut percevoir leur tendance pour cette hypothèse. Comme pour placer la barre très haute, les 11 groupes armés posent comme condition, le départ de Firmin Ngrebada qui, à leurs yeux, « n’est plus crédible » et par conséquent ne saurait être leur interlocuteur.
Simple technique de négociations, selon un proche du Premier Ministre Firmin Ngrebada que le RJDH a pu joindre au téléphone mais un point d’honneur pour la survie de l’accord de Khartoum, d’après un leader de l’opposition qui estime que « le Premier Ministre Ngrebada est aujourd’hui plus un symbole de méfiance que de confiance et donc une menace pour l’accord de paix».
Difficile pour les groupes armés de décrocher le départ de Firmin Ngrebada à l’issue de cette rencontre de conciliation. Mais plusieurs des 21 proches rappelés au gouvernement, devront être lâchés par le chef de l’Etat pour conserver son Premier Ministre. De sources généralement bien introduites dans les milieux politiques et diplomatiques, les premiers échanges entre le Premier Ministre Firmin Ngrebada et les leaders des groupes armés, le 18 mars à Addis, ont été très tendus.
Centrafrique : Quelles solutions pour la distribution d’eau potable à Bangui ?
Par Fleury Agou le 19/03/2019
BANGUI, 19 mars 2019 (RJDH)–A Bangui, l’approvisionnement en eau potable de la Société de Distribution d’Eau en Centrafrique (SODECA) est un parcours de combattant en cette période de saison sèche. De longues files d’attentes sont visibles devant les bornes d’eau publiques, pourtant la République Centrafricaine est « un château d’eau ». Pourquoi cette pénurie ? et quelle est la solution pour remédier à cela ? Nous-nous sommes rapprochés du compatriote Macaire Siro, Docteur en géographie.
En cette saison sèche, l’unique station de pompage d’eau de la Société de Distribution d’Eau en Centrafrique (SODECA) éprouve des difficultés techniques et la baisse du niveau de l’Oubangui ne facilite pas la tâche à l’entreprise publique dont le matériel est vétuste.
A ces maux, le Docteur en géographie, Macaire Siro a ajouté que la capitale centrafricaine évolue dans un système de « pénurie urbaine » et de « l’inégalité sectorielle » en matière d’alimentation en eau potable. Il a fait remarquer que le vieillissement du réseau, le manque d’entretien, la défaillance de l’électricité, les fuites sur le réseau, les coupures d’eau, le manque de financement etc… « sont les difficultés qui enlisent la Société de Distribution d’eau en Centrafrique (SODECA) ».
Déplorant dans notre entretien que le secteur de l’approvisionnement en eau potable et de l’assainissement en Centrafrique, et singulièrement à Bangui ne bénéficie que de très peu de financement, « la proportion la plus élevée étant de 3,5% de l’aide totale décaissée en 2008 », a souligné notre invité. Cependant, il a noté que « le vrai problème s’articule sur le dysfonctionnement de la SODECA et le manque de moyens pour agir efficacement ».
Aussi, la distribution de l’eau est inégalement repartie entre les différents quartiers de Bangui qui a connu une explosion. « Une partie de la ville est couverte de réseau de distribution d’eau et l’autre est totalement exclue (les quartiers spontanés) », a-t-il expliqué. Face à cela, le réseau de distribution d’eau qui date des années 1970-1980 n’est plus en mesure de répondre de façon optimale et efficace au besoin des Banguissois.
Quelle solution pour améliorer l’accès à l’eau potable à Bangui ?
Alors pour remédier à cette pénurie d’eau potable, des solutions ont été proposées. Selon Macaire Siro, il s’agit d’abord de « revoir la cartographie du réseau de la ville avec des matériaux aux normes internationales » et de « réorganiser l’urbanisation de Bangui pour faciliter l’installation du réseau et de viabiliser les nouveaux lotissements avant toute installation par le réseau d’eau potable ». Ces mesures ne sont pas suffisantes car « le réseau de distribution devra être étendu au-delà de sa couverture actuelle ». Une autre solution est « la création de réseaux secondaires : forage micro système, forage manuel, etc… » dans certains quartiers. Un travail a été fait déjà, mais cela est infime compte tenu de la demande. A cet effet, l’on pourra « multiplier le nombre de KBF (Kiosque Borne Fontaine) dans les quartiers défavorisés à une distance de 100 à 150 m du lieu d’habitation », a mentionné le géographe.
Dans cette optique de répondre au besoin de plus en plus accru dans la capitale, il serait indispensable de « mettre en place une politique de Partenariat Public et Privé (PPP), afin de rendre plus dynamique le secteur d’approvisionnement en eau potable », a conseillé notre invité. Il s’agit là de disposition favorisant l’accès à l’eau potable à des familles démunies.
Par ailleurs, la SODECA devra initier des projets qui ont besoin de la contribution financière de l’Etat qui a aussi la responsabilité de « résoudre le problème d’électricité qui impacte sur la production de la SODECA », a conclu Macaire Siro.
Les mises en garde de l’ONU sur l’eau:
Dans son dernier rapport sur l’eau, ONU-Eau et l’Unesco ont prévenu que « la demande mondiale en eau devrait augmenter de 20 à 30% par rapport au niveau actuel d’ici 2050 ». Cela est la « conséquence de la croissance démographique, du développement économique et de l’évolution des modes de consommation », ajouté à ceux-ci « le changement climatique risque de compliquer l’accès à l’eau potable avec les sécheresses et les inondations ».
Ces agences onusiennes ont fait remarquer que le manque d’accès à une eau potable de qualité et le manque de services d’assainissement des eaux usées ont contribué au décès de « 780.000 » chaque année. Ces morts sont liés à « la dysenterie et le choléra ».
A titre illustratif, « en 2015, environ 844 millions de personnes n’avaient pas accès à un service d’eau potable sûr et seuls 39% de la population mondiale disposait de services d’assainissement sûrs », lit-on dans le rapport. Et se sont les personnes les plus démunies qui souffrent plus, a regretté Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco qui a fait de l’accès à l’eau potable une priorité : « L’accès à l’eau est un droit humain vital pour la dignité de chaque être humain. Pourtant, des milliards de personnes en sont toujours privées ».
Ainsi, l’ONU-Eau et l’Unesco ont encouragé les Etats et les acteurs privés à « investir massivement dans les infrastructures ».
Centrafrique : Guerre aux cailloux sur le campus universitaire de Bangui
Par Cyrille Wegue le 19/03/2019
BANGUI, LE 19 MARS 2019—(RJDH), Deux camps rivaux des étudiants se sont affrontés le lundi 18 mars dernier en fin d’après- midi sur le campus universitaire de l’université de Bangui. Armés de cailloux et des gourdins, les partisans des deux candidats à la Présidence de l’Association Nationale des Etudiants Centrafricains (ANECA) s’affrontent et s’en prennent aux édifices de l’établissement.
Aux environs de 16h bien que les affrontements avec des jets de cailloux aient cessé, la tension était encore palpable dans les parages de l’université. De part et d’autre de la grande voie séparant les bâtiments de l’université, des étudiants se regardaient en chiens de faïence.
Malgré la présence du Recteur de l’Université et celle de certains membres du corps rectoral qui tentaient de calmer la fouge des étudiants, ceux du côté jouxtant les bureaux de l’administration ne démordaient pas. Il a fallu l’intervention de la Police sur les lieux et qui ont pénétré dans l’aire de cet établissement pour que l’ambiance sereine revienne aux environs de 18h.
A croire le Recteur de l’Université, Syssa Magalé: «Ce sont deux camps appartenant aux deux candidats à la présidence de l’ANECA qui se sont affrontés. Il y en a qui lapidaient les édifices et c’est ça qui a causé ce désordre. Nous avons fait appel aux agents des forces de l’ordre pour rétablir l’ordre», a expliqué le Recteur Syssa Magalé.
Il a profité de l’occasion pour lancer un message aux parents, aux étudiants, à ceux qui le sont réellement, de tout faire que le calme revienne au sein de l’établissement.
« Suite à ce qui s’est passé je vais prendre une décision. La décision, c’est de suspendre la procédure des élections pour que le calme revienne. Pour éradiquer ce désordre on va donner mandat aux associations facultaires de pouvoir gérer, d’être l’interface entre les étudiants et le Rectorat. Donc, tout ce qui est du processus des élections est suspendu jusqu’à nouvel ordre », précise-t-il.
Outre cette mesure, « A l’attention de tous ceux qui vont tenter de provoquer du désordre au sein de l’université, je les informe que j’ai instruit les autorités policières et judiciaires afin qu’elles prennent les mesures nécessaires pour que désormais les contrevenants soient arrêtés et traduits en justice parce que ce n’est pas normal que des intellectuels, ceux qui sont appelés à nous succéder dans l’avenir puissent avoir ce type de comportement », conclut-il.
A en croire le Recteur Syssa Magalé, ce désordre s’est installé à cause de l’incompétence des membres de la commission en charge de l’organisation des élections de l’ANECA. Lequel bureau bien que reçu à plusieurs reprises par le Décanat pour des conseils n’est pas du tout impartial. «Tout ce qui se passe au sein de cette commission transpire et aussi il y a peut-être des partis pris», dit-il.
Centrafrique : Les récépissés des cartes d’identité, un système qui pèse sur le citoyen moyen
Par RJDH le 19/03/2019
BANGUI, le 19 mars 2019 (RJDH)—Face à l’absence des cartes d’identité, l’Etat centrafricain a trouvé un palliatif consistant à la délivrance par la police nationale de récépissés. Mais l’obtention de ce précieux document est un véritable parcours du combattant pour les demandeurs dont le revenu quotidien se chiffre à moins d’un dollar.
Depuis six ans les Centrafricains sont soumis au système de récépissés délivrés par la police judiciaire. C’est un document administratif délivré et ayant une validité de trois mois et qui coûte 2000 Fcfa à chaque échéance. Il faut donc réunir 8000 F par an pour prétendre obtenir ce fameux document contre jadis les 4500F que l’on payait pour se faire délivrer une carte d’identité ayant une validité de 10 ans.
Mais plusieurs habitués de ces récépissés ont confié au RJDH avoir dépensé plus de 2000 Fcfa pour se procurer un récépissé, « pour avoir ce document provisoire, il faut nécessairement graisser les pattes des policiers afin que l’obtention soit rapide ».
Dans ces conditions, les récépissés sont un fonds de commerce non seulement pour l’Etat mais aussi pour le service chargé de les délivrer. Selon des sources proches de la police judiciaire, plus d’un million de personnes sont chaque année depuis 2014, concernées par les opérations de délivrance des récépissés. Il est difficile de suivre la traçabilité des fonds générés par la délivrance de ces documents administratifs qui ne sont pas reconnus par quelques établissements bancaires de la place pour des opérations.
L’ancien Directeur de la police judiciaire a été relevé, selon nos informations, à cause du dossier relatif aux récépissés. Les fonds générés par la délivrance des récépissés n’ont commencé à garnir les caisses du Trésor public que depuis le limogeage de l’ancien directeur. Plusieurs millions ont alors échappé à l’Etat entre 2014 et juillet 2018.
Au Trésor public, on rassure de la mise à disposition au service de la police judiciaire de quittanciers afin juguler voire éradiquer cette hémorragie financière « le gouvernement a siégé sur le dossier et nous avons été instruits à prendre des mesures idoines. Alors depuis juillet, tout est rentré dans l’ordre.»
De sources autorisées, par mois et ce depuis juillet le Trésor public encaisse entre 8 et 10 millions de Fcfa dont une partie est reversée au service de la police judiciaire chargé de délivrer ces récépissés. Ainsi par année, pour la délivrance des récépissés des cartes d’identité, c’est plus de 100 millions de francs CFA que l’Etat encaisse sur le dos d’une population à très faible revenu puisque la RCA est l’avant dernier pays en indice de développement humain./RJDH
Centrafrique : L’accord de Khartoum accentue la division de l’opposition démocratique
Par Sylvestre Sokambi le 19/03/2019
BANGUI, 18 mars 2019 (RJDH)—Les relations entre les partis politiques de l’opposition se sont dégradées depuis la signature de l’accord de Khartoum et ses premiers pas. Une situation qui conforte la position du pouvoir en place.
Depuis trois mois, l’URCA, le MDREC, la CPRS, le RPR et le PATRIE ont amorcé un rapprochement entre partis de l’opposition, rapprochement consolidé par plusieurs actions communes. Les leaders de ces formations politiques se sont ensemble affichés en public, ont signé des communiqués conjoints et ont partagé et défendu des positions communes sur des sujets d’intérêt national. Mais, cette forme d’union de l’opposition n’a pas résisté au tsunami politique déclenché par le processus de dialogue initié par l’Union Africaine.
Lorsque la liste des participants au dialogue de Khartoum est publiée et que le PATRIE de Mboli Goumba et l’URCA de Dologuelé, ont eu des représentants, Tiangaye, Ngeundet et Bendounga, respectivement présidents de la CRPS, du RPR et du MDREC, ont crié à la cooptation des représentants de l’opposition démocratique. Les réunions de l’opposition entre temps régulières, se font rares, créant la distance entre les principaux leaders.
L’absence d’Anicet Georges Dologuelé, président de l’URCA et leaders de cette opposition en quête d’une configuration, complique la situation vu qu’entre Tiangaye, Nguendet et Bedounga, les relations sont fondées sur la méfiance tandis que depuis la transition présidée par Djotodia, la confiance est enterrée entre Tiangaye et Mboli Goumba, très proches au crépuscule du règne de Bozizé.
Visiblement, Dologuelé, Tiangaye, Bedounga et Mboli Goumba ne sont pas arrivés à surmonter les différends qui rongent leur volonté d’asseoir une opposition, unie, clairvoyante et ambitieuse dont la République Centrafricaine a besoin aujourd’hui face à un pouvoir désordonné qui fait du pilotage à vue avec un système de gouvernance encore opaque.
La solution trouvée par ces cinq leaders certes nantis d’expérience politique mais très carrés sur leurs intérêts, est de faire sauter la volonté qui les avait amenés, il y a quelques mois, à envisager la mise en place d’une opposition démocratique solide. L’URCA et le PATRIE trouvent un nouveau rapprochement avec le KNK, un des partis proches du pouvoir mais qui a retiré son représentant du gouvernement post-Khartoum et le RDC dont le soutien au pouvoir n’est pas assez clair.
La CRPS, le MDREC et le RPR s’engagent dans une autre dynamique de l’opposition. Après deux communiqués publiés par les deux parties, Joseph Bedounga accuse Dologuelé et ses alliés de fait, de faire du plagiat, histoire de dénigrer un groupe qui a commis la maladresse de reprendre certaines phrases utilisées par Tiangaye, Nguendet et Bedounga dans leur communiqué.
L’opposition en Centrafrique, s’est toujours cherchée et elle continue de se chercher. En 2013, lorsqu’il a fallu se rendre à Libreville, l’opposition a éclaté même si Ziguélé, leader de l’opposition de l’époque a su garder l’essentiel de l’équipe. Mais, cette opposition n’a pas montré des gages de l’unité lorsqu’elle a été appelée à participer à la gestion de l’Etat.
La vision de l’opposition qu’étaient en train de projeter Dologuelé, Tiangaye, Nguendet, Bendouga et Mboli Goumba n’a pas résisté au vent d’intérêt que les uns et les autres ont vu venir avec le dialogue de Khartoum qui a suscité appétit et ambitions. Mais, la division qu’entretiennent les principaux leaders de l’opposition actuelle est une aubaine pour le pouvoir de Touadera qui n’a de vision que les élections de 2021.