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24 octobre 2017 2 24 /10 /octobre /2017 00:18
Lu pour vous : Dossier Centrafrique dans Libération (suite et fin)
Lu pour vous : Dossier Centrafrique dans Libération (suite et fin)

 

 

 

ANALYSE

 

Centrafrique : une nation en perdition

 

Par Célian Macé, Libération  — 23 octobre 2017 à 19:56

 

Depuis le départ des Français de la force Sangaris, il y a un an, la République centrafricaine s’enfonce à nouveau dans la violence. De massacres en représailles, les groupes armés font régner leur loi et contrôlent 80% du pays. Le secrétaire général de l’ONU tire la sonnette d’alarme.

 

Tout en bas. Dans le dernier classement du Programme des Nations unies pour le développement, la Centrafrique est à la 188e place sur 188. Dernier pays de la planète pour l’indice de développement humain. Etat fantôme dont l’autorité ne dépasse guère la capitale, Bangui. Partout ailleurs, les groupes armés font la loi : depuis cet été, le niveau de violences intercommunautaires rappelle les pires heures de la crise centrafricaine, entre 2013 et 2014.

 

Coalition de mouvements rebelles, composés majoritairement de combattants musulmans (dont une partie venue du Tchad et du Soudan voisins), la Séléka s’empare à l’époque du pouvoir par la force. Ses abus déclenchent un élan de «résistance» parmi la population : les anti-balaka, des miliciens chrétiens et animistes, s’en prennent à tous les musulmans, accusés d’être complices de la Séléka. Celle-ci ordonne des expéditions punitives. Bangui s’enfonce dans un cycle de représailles de plus en plus meurtrières, des quartiers entiers sont rasés (lire ci-contre). Le 5 décembre 2013, le président Hollande déclenche l’opération «Sangaris» pour stopper les massacres, comme le prévoit la résolution 2127 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée à l’unanimité quelques heures plus tôt. Il s’agit de la septième intervention française depuis l’indépendance du pays, en 1960. Au total, jusqu’à 2 000 soldats français seront déployés sur le territoire.

 

«Une crise oubliée»

 

Depuis, la Séléka a été chassée de Bangui, les Casques bleus (12 500 aujourd’hui) ont construit des bases aux quatre coins du pays, un président, Faustin-Archange Touadéra, a été élu en février 2016, et «Sangaris» a pris officiellement fin le 31 octobre 2016. Sauf que les violences n’ont jamais cessé. La Séléka s’est fragmentée en plusieurs groupes armés qui s’affrontent désormais pour le contrôle des ressources (lire page 4). Car, ironie suprême, le sous-sol du pays le moins développé du monde regorge d’or et de diamants. La religion, ou l’ethnie, ne sont souvent que des prétextes pour enflammer la population et justifier des attaques contre un quartier ou un village. Mais à force de tirer sur la corde communautaire, certaines régions ont basculé dans une spirale sanglante de vengeances et de massacres que plus personne ne semble en mesure de pouvoir arrêter. C’est le cas dans le sud-est du pays, où les tueries se sont succédé cet été sans que la Mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca) ne parvienne à protéger les populations. Le secrétaire général adjoint pour les affaires humanitaires de l’ONU, Stephen O’Brien, a même évoqué des «signes avant-coureurs de génocide» (lire Libération du 28 août).

 

Ce mardi, c’est son patron, António Guterres, le secrétaire général des Nations unies, qui est attendu dans le pays pour alerter sur «une crise dramatique mais une crise oubliée» - seuls 30 % des fonds prévus pour répondre au désastre humanitaire ont été effectivement versés. Ce sera sa première visite à une mission de maintien de la paix depuis sa prise de fonctions, le 1er janvier. Le déplacement du numéro 1 de l’ONU intervient surtout à deux semaines du renouvellement du mandat de la Minusca : António Guterres demande l’envoi de 900 soldats supplémentaires, au moment où les Etats-Unis de Donald Trump rechignent à financer les opérations de maintien de la paix.

 

Mais 900 soldats de plus feraient-ils la différence ? «Les Casques bleus ont toutes les apparences d’une armée, mais ils ne sont pas une armée. Il n’y a pas une chaîne de commandement mais au moins deux (celle de l’ONU et celle de leur pays d’origine), et surtout combattre est parfois totalement exclu de leur mission, écrit Thierry Vircoulon, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (1). Cette différence entre l’apparence et la réalité des Casques bleus est au cœur de l’incompréhension entre l’ONU et les populations qui ne comprennent pas pourquoi des milliers d’hommes en uniforme déployés avec des moyens de combat ne combattent pas.»

 

Pire, dans certaines zones de Centrafrique, les hommes de la Minusca sont régulièrement pris pour cibles car perçus comme partiaux : le contingent marocain installé à Bangassou (sud-est du pays), par exemple, est accusé d’une trop grande proximité avec les déplacés musulmans de la ville, et harcelé par les anti-balaka : sept de leurs Casques bleus ont été tués par cette année par ces guerriers locaux qui s’autoproclament «groupe d’autodéfense».

 

Raid à huis clos

 

Mercredi dernier, les anti-balaka ont mené un raid contre la population musulmane du village de Pombolo, près de Bangassou. Selon l’Agence France-Presse, 26 personnes auraient été tuées. L’ONU a dépêché des soldats gabonais et marocains le lendemain : deux d’entre eux ont été blessés, et les affrontements ont repris dans la ville. Un hélicoptère de la Minusca a essayé de se poser, mais n’a pu le faire en raison des combats. «Une centaine» de civils blessés sont en attente de soins. Sans que ni l’Etat centrafricain, ni l’ONU, ni les ONG ne puissent y accéder.

 

 

(1) Extrait de «le Maintien de la paix, version ONU : radiographie d’une impuissance», publié sur le site The Conversation.

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Published by Centrafrique-Presse.com