Après l'investiture du président de la République, ce dernier a pris un premier décret désignant son directeur de cabinet. Le second décret a été pris après la démission du gouvernement de transition et qui nomme son directeur de campagne à la primature. De sources sûres affirment que le deuxième décret a fait l'objet d'un vif mécontentement du collectif des alliés qui l'ont soutenu au second tour des présidentielles.
Pour jouer le pompier de service, le président de la République a organisé dans la foulée une rencontre au palais de la renaissance pour justifier le choix du premier ministre. La quintessence de cet article est de rappeler au président de la République ses prérogatives absolues et partagées définies par la constitution. Selon les termes de la loi fondamentale, la désignation du premier ministre incombe au seul président de la République et sa seule volonté.
Ce dernier dispose donc d'un pouvoir discrétionnaire, un pouvoir souverain c'est à dire non soumis à des conditions, ni consultation. Il est libre de porter une appréciation sur l'utilité et l'opportunité de sa décision. Ces décisions perdent le caractère discrétionnaire en cas de cohabitation, quand la majorité présidentielle est inférieure à la majorité parlementaire.
Dans ce cas, le chef de l'Etat se borne à nommer le candidat adopté par la majorité parlementaire. Il importe de rappeler au passage que le choix d'un premier ministre ne relève pas d'un consensus ( sauf en cas de crise ) ni d'un droit d'information comme le réclame l'ambassadeur de France en poste à Bangui. Le président dispose d'un pouvoir partagé avec le premier ministre dans la désignation des membres du gouvernement car il les nomme sur proposition du premier ministre.
Ensuite le chef du gouvernement doit solliciter un vote de confiance de l'assemblée nationale. En se justifiant devant ses alliés, le chef de l'Etat a affaibli la fonction, a montré des signes de faiblesse, a mis en danger l'autorité de l'Etat, a réduit le champ de ses droits et a montré sa méthode de travail : chaque décret fera l'objet d'une concertation et justification.
Va t-il encore se justifier quand le gouvernement sera mis en place ? Il est vrai que la coutume est une des sources du droit positif, mais l'habitude a toujours tendance à s'ériger en règle et la règle redevient l'exception. Ainsi le premier ministre actuel est-il un chef de gouvernement de transition en attendant la mise en place du parlement ? Si oui le gouvernement sera une exception à la légalité ?
Le chef de l'Etat a justifié le choix du premier ministre en alléguant qu'il a horreur du vide et de l'immobilisme du pays, cette courte transition était-elle utile ? Suite à un post du collègue Téophile Eka qui a mis en exergue ce vide juridique, on s'est préoccupé de la situation embarrassante. Pourquoi le gouvernement Kamoun n'a pas fait l'objet d'un prolongement ? La preuve, le pays est sans gouvernement depuis une semaine. Savez-vous que le premier ministre peut provoquer une crise politique et constitutionnelle au sommet de l'Etat s'il refuse de démissionner alors que le parlement est contrôlé en majorité par l'opposition ?
Nous espérons ne pas vivre ces genres de situation et comptons sur notre collègue le Directeur du cabinet présidentiel qui est un juriste et de surcroit publiciste pour éviter à l'avenir ces manquements. Nonobstant ce qui précède, nous continuons toujours d'espérer sur le bon discours d'investiture qui a marqué le ton de sa politique générale, qui a défini les critères et les conditions d'être membre du gouvernement. Pour une fois de notre histoire politique, les deux têtes de l'exécutif sont des docteurs.
Cela est bénéfique pour le pays mais débauche deux enseignants chevronnés à l'université de Bangui qui en manquait déjà. En tant qu'ancien recteur, le président de la République trouvera des solutions alternatives à la pénurie des enseignants. Continuons à encourager et à soutenir les actions du président de la République pour la reconstruction de notre chère patrie.
Paris le 09 avril 2016.
Bernard SELEMBY DOUDOU
Juriste, Administrateur des Elections