19/06/14 (Afrique Inside)
Avec l'aide du Congo et de la communauté internationale, les autorités centrafricaines se mobilisent pour trouver le moyen de réintégrer le processus de Kimberley, l'organisation internationale de certification de diamants bruts dont le pays a été suspendu après la chute de l'ancien président François Bozizé. En proie au chaos et aux violences perpétrées par des groupes rebelles qui s'affrontent dans le pays, la Centrafrique envisage de réformer le secteur minier pour éviter que la manne diamantifère ne profite aux diverses factions rebelles.
Avant de sombrer dans le chaos et la violence, la Centrafrique tirait 40% de son produit intérieur brut du commerce de diamants pour une production annuelle estimée à 400.000 carats. Elle a été intégrée au Processus de Kimberley en janvier 2003 avant d’être suspendu en mai 2013 deux mois après la chute de l’ancien président François Bozizé et la prise de pouvoir de Michel Djotodia, l’ancien président le transition centrafricaine. Une suspension visant à éviter ainsi l’infiltration des diamants bruts dits de conflits dans le circuit officiel de la commercialisation. Le processus de Kimberley est un régime international de certification des diamants bruts, qui réunit gouvernements et industriels du diamant dont l’objectif est d’éviter de négocier sur le marché mondial l’achat des diamants présentés par des mouvements rebelles dans le but de financer leurs activités militaires. L’accord a été signé en 2000 à Kimberley en Afrique du Sud par le Canada, les Etats-Unis et l’Union Européenne. Il rassemble en tout 81 pays.
Malgré la crise et l’insécurité en RCA, les autorités du pays et la société civile mobilisent leurs efforts pour annuler la sanction et réintégrer l’organisation internationale de certification de diamants bruts. Pour y parvenir, elles souhaitent s’inspirer du modèle congolais en matière de gestion du secteur des mines. Au terme de consultations avec le ministère des Mines et de la Géologie, la Centrafrique envisagerait un dialogue inclusif avec toutes les parties centrafricaines impliquée en faveur d’une levée de sanction et de consulter la communauté internationale et ledit Processus de Kimberley ainsi que le Congo voisin pour réformer en profondeur le secteur minier même si dans le contexte de crise actuelle, la priorité en Centrafrique reste le désarmement et la sécurité.
« les diamants du pouvoir »
La question du diamant a toujours été au cœur de la gouvernance du régime Bokassa, Patassé et Bozizé. Arrivé au pouvoir le 15 mars 2003, François Bozizé s’est empressé d’annuler tous les permis de prospection et d’extraction, y compris la Colomba Mines, l’entreprise de son prédécesseur Ange-Félix Patassé qu’il a chassé du pouvoir avec l’aide de mercenaires. Il instaure alors un nouveau code minier en 2004 avec la volonté de l’aligner sur les normes internationales en vigueur. A la suite de quoi, la plupart des compagnies minières internationales auraient quitté le pays face aux exigences des autorités centrafricaines. Selon l’international Crisis Group, le niveau trop élevé de taxation a largement favorisé la contrebande. Profitant des faiblesses étatiques, de la criminalité et d’une extrême pauvreté, diverses factions rebelles ont mis à profit la manne diamantifère pour acheter des armes.
Du temps de Jean Bedel Bokassa, la folie du diamant semblait s’être emparée de la Centrafrique. L’ancien président n’hésitait pas à étaler la manne diamantifère à la face du monde entier en offrant des plaquettes entières à ses amis étrangers. Illustration avec l’affaire des diamants qui éclate en France en 1973, le Canard Enchaîné révèle que Valérie Giscard d’Estaing, alors Ministre des Finances, a lui-même reçu plusieurs plaquettes de diamants. La première étant estimé à 150000 euros. L’exploitation du diamant en Centrafrique a débuté en 1927 avec essentiellement des gisements alluvionnaires autour des rivières Mambere et Lobaye au Sud-Ouest ; autour de la rivière Kotto dans l’Est. D’après les statistiques du Bureau d’évaluation et de contrôle de diamant et d’or (BECDOR), la Centrafrique a exporté 311 784 carats en 2009. Ce qui est peu comparé au Botswana, le premier exportateur de diamants africain et deuxième exportateur mondial derrière la Russie, avec en moyenne 32 millions de carats chaque année. Mais il faut savoir que les statistiques concernant la RCA ne prennent pas en compte la contrebande.
Véronique Mansour