http://www.20minutes.fr/ 17/06/2014 à 17h19 -- Mis à jour le 17/06/2014 à 18h22
REPORTAGE - Certains enfants arrivent seuls en provenance de République de Centrafrique. Le but des centres d’accueil qui leur sont dédiés dans les camps: retrouver leurs parents, ou à défaut un membre de leur famille pour les prendre en charge…
De notre envoyée spéciale à Sarh (Tchad)
Dairou a 3 ans. Dans le camp de Doyaba, près de Sarh dans le sud du Tchad, les animateurs du centre de regroupement des enfants non accompagnés le connaissent bien. Avec sa sœur, Oumoul, 4 ans, ils sont en effet arrivés seuls en provenance de République de Centrafrique (RCA), sans parents ni famille. Les frères et soeurs ont bénéficié du dispositif spécifique mis en place pour les «enfants non accompagnés» (ENA) grâce auquel ils ont pu retrouver la trace de leurs parents.
«Nous assurons la protection des enfants arrivés sans leur famille, et nous leur proposons des activités récréatives et psychosociales», explique Hassan Youssouf Fachir, superviseur des activités psychosociales au centre de regroupement des enfants non accompagnés de Doyaba.
Recherches pour réunir les familles
Dans la journée, les ENA sont invités à participer à diverses activités. Objectif: les divertir, mais surtout les amener à oublier ce qu’ils ont vécu. «Ils sont en situation de trauma, indique Hassan Youssouf Fachir. Certains enfants ont vu mourir leurs parents, certains venaient avec des machettes pour se protéger… Les premières semaines après leur arrivée, cela a été très difficile. Ils pleuraient beaucoup, ne mangeaient pas, ne jouaient pas… Il leur a fallu du temps pour intégrer les activités».
Chaque jour, des animateurs s’occupent de ces enfants seuls, particulièrement vulnérables. Ils sont nourris, habillés, envoyés à l’école (quand le camp le permet, comme ici à Doyaba), et soignés. La nuit, les enfants sont répartis par tente de huit. Les tout petits, eux, dorment dans une chambre avec une animatrice qui passe la nuit avec eux. A son arrivée, Dairou, qui était malade, a été pris en charge par le centre de santé mis en place par l’Unicef et ses partenaires locaux.
Le travail du centre de regroupement des enfants non accompagnés et de l’action sociale tchadienne ne s’arrête pas là. Il diligente aussi des recherches pour réunir les ENA et leur famille. «Nous prenons des photos des enfants, qui sont envoyées à tous les autres camps au Tchad, pour que les familles puissent les reconnaître», détaille Hassan Youssouf Fachir, qui précise que même lorsque les parents sont décédés, «une famille peut être composée des oncles, des tantes, de la famille élargie». «Nous conduisons des entretiens avec les enfants pour recueillir des informations à leur sujet, savoir s’ils ont des nouvelles de leur famille, s’ils savent où pourraient se trouver leurs parents ou au moins un membre de leur famille…».
«Je pensais que je ne les retrouverais jamais»
Dairou et Oumoul font ainsi partie des 173 ENA de Doyaba sur 400 qui ont retrouvé leur famille. Leur mère, Habsatou Abdoulaye, raconte: «Nous avons été séparés au moment de monter dans le convoi militaire. Il y avait une foule importante. Tous les gens voulaient monter en même temps. Moi j’ai pu monter dans le véhicule et j’attendais que mon mari m’amène les enfants, mais le véhicule a démarré, et ils n’ont pas pu monter.» La jeune femme ne sait pas vraiment comment ses enfants sont arrivés jusqu’à Doyaba, probablement dans un autre convoi militaire. «Je pensais que je ne les retrouverais jamais. Je n’espérais pas vraiment, je pensais qu’ils étaient perdus à jamais, ou même morts.»
Mais, à sa grande surprise, elle a vu les photos de ses enfants dans le camp où elle se trouvait, et elle a pu être transférée à Doyaba pour les retrouver, il y a un peu plus de deux mois. «Quand on réussit à réunir des familles, c’est une grande émotion», commente Hassan Youssouf Fachir, un sanglot dans la voix.