Depuis mai, le Fonds monétaire international (FMI) a
suspendu ses décaissements en faveur de la Communauté économique des Etats d’Afrique Centrale (Cemac), a écrit mardi Mutations. Selon le quotidien camerounais, le FMI
reproche à la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac), la banque centrale de la Cemac qui reçoit l’argent des écarts de gestion, notamment une absence de justificatifs pour des opérations
totalisant près de 5 milliards d’euros. Les conséquences de cette suspension pourraient être graves pour certains pays comme la République du Congo et la Centrafrique, grands clients du
FMI.
BEAC : Le
ménage continue
Jeune Afrique 16/06/2010 à 11h:37 Par
Jean-Michel Meyer
La récente crise de la Banque des États d'Afrique centrale a entraîné une profonde refonte de l'équipe de direction. Sur
les six dirigeants de l'établissement encore en place en janvier, il n'en reste aujourd'hui plus qu'un.
Conséquences des malversations du bureau parisien, rivalités de pouvoir entre États, conflits larvés entre les dirigeants de
l’institution… Les raisons ne manquent pas, depuis le début de l’année, pour faire valser les têtes à la Beac. Après les limogeages de Philibert
Andzembé, le gouverneur, et de Rigobert Roger Andély, le vice-gouverneur, lors du sommet des chefs d’État de la Cemac, à
Bangui, du 15 au 17 janvier 2010, la direction de la Banque centrale a de nouveau reçu un violent coup de torchon.
Le dénouement a eu lieu à Brazzaville, le 7 juin, dans le huis clos de la réunion extraordinaire des six chefs d’État de
la Cemac. Cette fois, ce sont le Tchadien Abbas Mahamat Tolli (secrétaire général), le Centrafricain Théodore Dabanga (directeur du contrôle général) et le Camerounais René Mbappou Edjenguele
(directeur des études, des finances et des relations internationales) qui sont remerciés.
Des six membres du gouvernement de la Beac en poste au début de l’année, il ne reste que l’Équato-Guinéen Lucas Abaga Nchama, ex-directeur général de l’exploitation nommé gouverneur à Bangui. « La
conférence [des chefs d’État, NDLR] a constaté la persistance du dysfonctionnement au sein de l’institution d’émission. Pour y remédier et sauvegarder le bon fonctionnement de la Banque, elle a
décidé des mesures individuelles », justifie le communiqué final. En clair, le ménage continue.
Une nouvelle équipe entoure le gouverneur au caractère bien trempé, dont la gestion ne fait pas l’unanimité. Priorité
aux hommes du sérail. Quatre des cinq personnes désignées sont « de la maison », même si elles ne gravitaient pas dans les allées du pouvoir. Le Tchadien Tahir Hamid Nguilin, désormais vice-gouverneur et bras droit de Lucas Abaga Nchama, est un cadre des
services généraux. Il ne figurait pas parmi les trente premiers dirigeants de la banque. Le Gabonais Joachim Lema Okili franchit un échelon
hiérarchique en accédant à la direction générale des études et des relations internationales. Le poste de secrétaire général, troisième personnage de la Beac, revient au Congolais Daniel Ngassiki, jusque-là second adjoint à la direction nationale à Brazzaville. Quant à Jean-Michel
Monayong Nkoumou, directeur général du contrôle, il dirigeait l’agence de Douala. « Le management
du gouverneur consiste à envoyer les cadres du siège dans les bureaux nationaux et à faire venir à Yaoundé des cadres des instances décentralisées », constate l’un d’eux, contraint
à l’expatriation.
Dans cette garde rapprochée taillée sur mesure pour le gouverneur, seul le Centrafricain Yvon Bertrand Songuet, le directeur général de l’exploitation, vient de l’extérieur. Et encore.
Chargé de mission au ministère des Finances et du Budget à Bangui, il est l’un des huit membres du comité d’audit mis en place en 2009 par la Beac pour faire la lumière sur les malversations de son bureau parisien. « C’est un jeune, intègre mais un peu inexpérimenté », juge l’un de ses collègues.
Ce grand coup de balai a surpris jusqu’à certains des administrateurs de la Banque. Un groupe de travail devait
présenter ses conclusions sur le mode de gouvernance de l’institution lors du prochain conseil d’administration de la Beac, le 24 juin. On devait y débattre d’un éventuel recours à une équipe
restreinte, indépendante des États, recrutée en fonction de ses compétences, à l’instar de ce qui se fait dans toutes les banques centrales du monde. Une évolution recommandée par la France et
par le FMI. Pas sûr que ces derniers apprécieront le tour de force du 7 juin, qui aboutit au maintien du système…
La Beac, ou
l'histoire d'une longue convalescence
08/06/2010 à 13h:03 rédaction web de Jeune
Afrique
Lors de leur sommet extraordinaire qui s’est ouvert à Brazzaville, lundi 7 juin, les chefs d’État de la Communauté
économique et monétaire de l’Afrique centrale ont procédé à de nouvelles nominations. Objectif : « remédier » aux dysfonctionnements de la Beac.
La Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), « poumon et souffle économique monétaire » de l’Afrique centrale, comme l’a appelé le président congolais Denis Sassou Nguesso, n’est pas encore sortie d’affaire. Réunis à Brazzaville depuis le 7 juin, les
six présidents des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), qui devaient faire le bilan des décisions prises à Bangui en janvier, ont à nouveau pointé
« des dysfonctionnements au sein de l’institution d’émission », à savoir la
Beac.
Conséquences : ils ont procédé à de nouvelles nominations, comme celles du Congolais Daniel Ngassiki, qui devient secrétaire général de l’institution. Les six présidents se sont aussi mis d’accord sur « l’uniformisation de la durée des mandats [à la tête des institutions de la Cemac, NDLR] à cinq ans, à l'exception
de la BEAC ».
L’intégration régionale au point mort
L’institution avait été ébranlée par le scandale des malversations opérées depuis le bureau parisien de la Banque centrale et
révélées par Jeune Afrique (25
millions d’euros entre 2004 et 2009, d’après un rapport publié fin octobre) et la découverte de placements hasardeux par ses dirigeants. Lors du sommet extraordinaire du mois de janvier, une
profonde réforme des statuts avait été actée, instituant le principe de rotation du poste de gouverneur entre les six États membres. Ce poste, auparavant dévolu à un Gabonais, était revenu à
l’Équato-Guinéen Lucas Abaga Nchama.
Outre les nouvelles nominations, la création d’un « passeport Cemac », qui devrait permettre la libre circulation des biens et des personnes au sein de la zone, était également à l’ordre du
jour. Le président congolais, hôte du sommet, a fait par de ses inquiétudes. « Il faut prendre des
mesures de sauvegarde, il ne faudrait pas que les criminels profitent de ce passeport », a-t-estimé.
C’est aussi Brazzaville qui, d’après Antoine Ntsimi, le président de la
Commission de la Cemac, devrait hériter du siège de la future compagnie aérienne Air Cemac. On s’attendait à une date pour le début de l’exploitation mais Ntsimi a simplement indiqué qu’un « contact » a été pris avec le « partenaire
stratégique South African Airways ».