Déclaration relative à la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays
Ni juger, ni pleurer mais comprendre*
L’inexorable et l’insoutenable décente aux enfers de la République centrafricaine se poursuit, plongeant à nouveau la population en plein désarroi. Et rien ne semble pouvoir soulager de si tôt les souffrances et la désolation du peuple centrafricain dont le désespoir est sans commune mesure.
En effet, devant l’impuissance et l’incapacité de l’État ou de ce qui en tient lieu actuellement, replié dans le confort douillet des bureaux de la seule ville de Bangui, des groupuscules de la mort n’ayant aucune revendication concrète si ce n’est la volonté de contrôler les zones minières, ont décidé d’étendre davantage leur primauté sur une bonne partie du territoire national.
C’est pourquoi, depuis une dizaine de jours, ces groupuscules armés clairement identifiés, dont certains entretiennent parfois des relations d’affaires étroites et privilégiées avec les tenants du régime en place, y compris avec d’éminentes personnalités de la Minusca, massacrent impunément les population de Niem, Alindao, Bangassou, Bakala, Bambari, Kaga-Bandoro, Rafaï et Zémio pour ne citer que ces localités.
Ces massacres de populations répondent-ils à une planification ? Un plan qui consisterait par exemple à inverser l'équilibre démographique et confessionnel dans les régions visées ? Il est permis de le penser!
Je déplore et condamne avec la dernière vigueur, une fois encore, l'utilisation de la violence gratuite et insensée comme mode de revendication et de règlement de conflit.
Le drame qui se déroule ces derniers jours dans les préfectures du Mbomou, mon terroir, du Haut-Mbomou, de la Basse-Kotto, la Haute-Kotto, de l’Ouham et de l’Ouham-Pende, est la conséquence de la fuite en avant, des fausses solutions, de l’inconséquence, du renoncement si ce n’est de la démission pure et simple du pouvoir en place.
D’ailleurs, comme à son habitude, la seule réponse apportée par le gouvernement face à cette situation dramatique est d’accuser les hommes politiques d’être des instigateurs et des commanditaires des groupes armés. Une argutie aussi fallacieuse que dangereuse.
D’un autre côté, l’approche des représentants des Nations-Unies à Bangui, qui disposent pourtant d’un mandat robuste pour imposer la paix, est assez surréaliste. Sinon, ils n’auraient pas permis au criminel nigérien Ali Darassa de quitter tranquillement Bambari pour aller poursuivre ses exactions dans une autre partie du territoire national.
En cette circonstance dramatique, j'exhorte le gouvernement de M. Sarandji à faire preuve d'esprit d'initiative. Étant donné que nous ne pourrions pas faire l'économie d'une confrontation armée, j'invite les plus hautes autorités de notre pays à demander l'aide militaire de certains pays frères telle que l’Angola, ayant le savoir-faire nécessaire, afin de reprendre le contrôle de l'ensemble du territoire souverain de notre pays et surtout de mettre hors d'état de nuire tous ces aventuriers qui mettent à rude épreuve la paix sociale. Il existe des précédents dans l’histoire récente de la sous-région.
Les plus hautes autorités de notre pays auraient tort de suivre, tels les moutons de Panurge, les vieilles recettes de la Minusca, dont les responsables semblent avoir du mal à modifier leurs logiciels pour les adapter aux réalités de la crise centrafricaine.
Privilégier le fameux programme DDRR ( qui est d'ailleurs loin d'être une panacée), c’est bien, prôner le dialogue, relève du simple bon sens mais c'est encore mieux d'avoir la maîtrise complète de l'agenda militaire. D'autant qu'il est toujours moins intéressant de négocier en position de faiblesse.
Confronté au déplaisir de l’inaction et à mon impuissance d’agir d’une manière ou d’une autre sur le cours des événements, j’ai une pensée très émue pour les victimes de cette folie meurtrière. Je veux, encore une fois, exprimer ma sympathie et ma solidarité à l’ensemble des familles endeuillées.
Georges Adrien Poussou
adrien_poussou@yahoo.fr
* Adapter de l’expression de Spinoza, « ni rire, ni pleurer mais comprendre ».
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Georges Adrien POUSSOU
Ancien Ministre