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18 janvier 2023 3 18 /01 /janvier /2023 13:17
RCA : Le problème des hydrocarbures s’invite dans les débats de la semaine de la jeunesse

 

Centrafrique : la question des hydrocarbures s’invite dans les débats de la semaine de la jeunesse

https://www.radiondekeluka.org/ mercredi 18 janvier 2023 11:58

La question d’augmentation du prix des hydrocarbures est toujours d’actualité en République centrafricaine. Elle a été abordée, ce mardi 17 janvier 2023,  par les jeunes dans une conférence-débat lors de la semaine de la jeunesse à Bangui.

Dans le cadre des activités prévues à l’occasion de la semaine de la jeunesse lancée depuis le 12 janvier, le ministre de l’Energie, Arthur Bertrand Piri, a expliqué les raisons de cette augmentation aux participants présents.

Dans son exposé sur « l’impact de l’augmentation du prix du carburant sur la vie de la population active », Arthur Bertrand Piri a présenté les intérêts du gouvernement à revoir en hausse les prix des hydrocarbures, mais aussi des moyens que le gouvernement prévoit mettre en place afin de soulager la population centrafricaine.

« Assumer les missions régaliennes »

"Lorsqu’un gouvernement prend une décision, c’est dans l’intérêt de son peuple. Nous avons pris cette décision parce que nous voulons avoir de l’argent pour continuer à assumer les missions régaliennes de l’Etat. Il faut payer les salaires, les bourses, les pensions. Il faut construire des routes, des hôpitaux. Alors, si nous ne les construisons pas, est-ce que c’est responsable pour un gouvernement ? Non !", a martelé Arthur Bertrand Piri, ministre de l’Energie.

- Lire aussi : Centrafrique : 43 ans après, que retenir de la répression du 18 janvier 1979

Plusieurs participants affirment n’avoir pas été convaincus des raisons avancées par M. Piri et souhaitent voir des actions concrètes.

Insatisfaction

"J’ai demandé au ministre est-ce que ces augmentations sur le plan tarifaire où nous payons les bus à 300 francs vont demeurer ? Il m’a dit non. Plus les choses avancent, plus ils vont changer les choses. A travers ses réponses, je ne suis pas tellement satisfait vu que nous sommes en train de souffrir. Nous ne pouvons pas nous réjouir de nos souffrances", a déploré Abdel Diguiss, un participant.

Alors que certains participants au débat expriment leur insatisfaction face aux arguments avancés par le ministre de l’Energie, d’autres, par contre, demandent au gouvernement  de mettre en place des moyens afin de soulager la population durant cette période.

« C’est difficile »

"Le ministre est venu donner des explications par rapport à ces différentes crises. Ce que nous attendons, c’est qu’il respecte ce qu’il vient de dire. Nous lui faisons confiance. C’est vrai que c’est difficile mais, nous attendons que cela se rétablisse le plus vite possible" a souhaité Brigitte Gonémbia, une participante.

Les activités autour de la semaine de la jeunesse édition 2023, se poursuivent jusqu’au 18 janvier. Plusieurs thématiques restent à débattre parmi lesquelles, l’implication des jeunes dans la vie démocratique, le cas du référendum constitutionnel et la place de la jeunesse dans la lutte contre la corruption.

 

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18 janvier 2023 3 18 /01 /janvier /2023 13:04
L'épiscopat centrafricain appelle au réveil des consciences

 

Lu pour vous

 

https://www.vaticannews.va/ 17 janvier 2023, 16:38  Marie-José Muando – Cité du Vatican

Les évêques de République centrafricaine ont tenu, du 4 au 16 janvier, leur assemblée plénière à Bimbo, dans l’archidiocèse de Bangui. Dans leur message conclusif, publié dimanche, ils expriment leur espérance pour l’année 2023; une année qui ne manquera pas de défis.

Dans un message de neuf pages, rendu public au terme des travaux de leur assemblée plénière, les évêques de la République centrafricaine proposent une analyse globale des défis auxquels la société est appelée à faire face en 2023: surmonter l’insécurité, renverser les courbes de l'économie, le redressement social, et la reconstruction de l’unité. Les évêques font part de leur inquiétude autour des tensions politiques et craignent que dans un contexte de crise mondiale, le pays ne se retrouve confronté à des conséquences néfastes.

Les évêques confiants de la marche du pays vers une bonne direction

Bien que le climat d'insécurité permanente ne laisse pas entrevoir une amélioration sociale dans l’immédiat, les évêques se disent confiants en un avenir moins tourmenté. Leur espérance trouve sa source dans les progrès enregistrés sur le plan de la situation sécuritaire par rapport aux années précédentes. Le président de la conférence des évêques de Centrafrique, Mgr Nestor Nongo Aziagbia, affiche un prudent optimisme: «les évêques sont confiants que la République Centrafricaine est en marche vers une bonne direction», mais beaucoup reste à faire.

Grande préoccupation pour la dilapidation des ressources

Parmi les principaux défis à relever, l’épiscopat centrafricain cite, en premier lieu, la dilapidation du patrimoine national, «bradé» aux capitaux étrangers. Il rappelle que le patrimoine national, les terres arables et les richesses appartiennent à tous les centrafricains. L’évêque de Bossangoa et président de la Conférence épiscopale invite les autorités à protéger les ressources d’une exploitation extérieure qui pourrait se révéler désastreuse pour la population. Il souhaite la révision de la loi foncière sans laquelle, souligne-t-il, «les centrafricains risquent de devenir des étrangers dans leur propre pays».

Centrafrique: l’épiscopat décline l'invitation à faire partie du comité chargé de réviser la constitution

La Conférence épiscopale centrafricaine a décliné l'invitation à faire partie du comité chargé de réviser la nouvelle constitution de la République centrafricaine, processus initié ...

La marche inclusive et le processus synodal vers le développement

L’épiscopat centrafricain s'engage pour aider leur pays à surmonter les divisions «amis-ennemis», qui constituent un frein au progrès social, pour rentrer dans un climat synodal de communion. Pour relever ce défi, Mgr Aziagbia invoque la Plateforme de confessions religieuses, «un terrain favorable à la recherche de l’unité en vue du développement de la société centrafricaine». Cette marche synodale en communion avec le peuple centrafricain est vécue au sein de l’Eglise catholique à travers l’écoute de la parole de tous ses membres. L’évêque de Bossangoa souligne que la porte vers le processus synodal reste ouverte également à d’autres confessions chrétiennes et dans une dynamique de dialogue avec la communauté musulmane.

RCA: catholiques, protestants et musulmans œuvrent ensemble pour la paix

Le père Mathieu Fabrice Evrard Bondobo est recteur de la cathédrale Notre-Dame de l’Immaculée Conception et vicaire général de l’archidiocèse de Bangui. Il invite les ...

La réceptivité du message exige un changement

Le message que les évêques adressent au terme de leur assemblée plénière est «très attendu et compris» aussi bien par les fidèles que par l’ensemble de la communauté centrafricaine, explique Mgr Aziagbia. Le Président des évêques souligne toutefois un nécessaire réveil des consciences pour une mise en œuvre concrète et réfléchie des éléments positifs qui puissent conduire à la construction d’une société centrafricaine unie et renouvelée.

 

 

Centrafrique : les évêques appellent le gouvernement à privilégier le dialogue social

https://www.radiondekeluka.org/ mercredi 18 janvier 2023 16:18

Les évêques de Centrafrique ont appelé, dimanche 15 janvier 2023, le gouvernement centrafricain à privilégier le dialogue comme mode de résolution des crises dans le pays. Appel lancé à la clôture de leur conférence tenue du 10 au 15 janvier à leur siège à Bangui.

Après une semaine de travaux au siège de la Conférence épiscopale à Bimbo, les évêques de Centrafrique ont clôturé leur rencontre par une messe dite en la Cathédrale Notre Dame de l’Immaculée conception de Bangui. Occasion pour eux d’adresser, comme à l’accoutumée, un message fort aux autorités et à toute la Nation centrafricaine.

Dans leur message, les prélats ont exprimé leurs vives préoccupations face à la situation sécuritaire, politique et la hausse de prix du carburant, source de la flambée des prix des produits alimentaires et de première nécessité sur les marchés.

Questionnements

"La pénurie du carburant et la flambée exponentielle des prix des denrées alimentaires et des produits de première nécessité constituent déjà le lot de souffrance du peuple centrafricain. Nous nous demandons toutefois, quelles conséquences pourraient avoir de telles décisions et mesures sur le faible tissu social et économique de notre pays, sur les émoluments des fonctionnaires de l’Etat et sur le faible panier de la ménagère", s’est demandé Abbé Cédric Kongbo Gbassinga, Secrétaire général de la Conférence épiscopale centrafricaine (CECA).

- Lire aussi : Centrafrique : inquiète, la CECA interpelle Félix Moloua sur la situation du pays

Un autre point saillant, abordé dans le message des responsables catholiques en Centrafrique, est l’accaparement des terres et la dilapidation du patrimoine foncier.

"La RCA a toujours été une terre accueillante et hospitalière. Contre toute forme de xénophobie, l’hospitalité et l’accueil de l’étranger sont inscrits au cœur de notre foi chrétienne et en lettres d’or au sommet de nos valeurs ancestrales et culturelles. C’est avec beaucoup de questionnements que nous assistons aujourd’hui à un véritable empressement et une ruée des ressortissants de la sous-région voire au-delà d’elle pour l’achat des terres…Nous n’avons rien contre l’injection de capitaux étrangers dans le faible tissu économique centrafricain, pourvu qu’ils créent des richesses et des emplois pour les filles et fils de ce pays. Cependant, de grandes parcelles arables de plusieurs hectares et des sites stratégiques, miniers et forestiers sont vendus à tour de bras", ont dénoncé les évêques.

Les évêques ont, par ailleurs, souligné l’importance du dialogue dans la résolution des crises en République centrafricaine.

 Impasse préjudiciable à la paix

"La radicalisation des prises de position sur fond d’un déficit de dialogue ne peut que conduire à une impasse socio-politique et économique gravement préjudiciable à notre peuple et à la paix. Il convient que chaque fille et fils du pays privilégie la recherche du dialogue constructif, du consensus et de compromis dans la vérité sans compromission", a lu Abbé Cédric Kongbo Gbassinga, Secrétaire général de la Conférence épiscopale centrafricaine (CECA).

Le ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation, Bruno Yapandé qui a représenté le gouvernement, a indiqué que le message des évêques a bien été entendu et que les recommandations seront examinées.

Améliorer les conditions de vie

"Ce message est beaucoup plus orienté vers la paix, la sécurité et les conditions économiques que vivent aujourd’hui les Centrafricains. Et, nous que Dieu a élevés à la tête de ce pays, nous nous battons toujours pour que toutes ces conditions soient réunies pour que notre pays aille de l’avant", a réagi Bruno Yapandé.

La conférence épiscopale, qui se dit disposée à aider le gouvernement pour une sortie définitive de crise en République centrafricaine, a formulé plusieurs recommandations visant à apporter des solutions aux crises socio-politiques du pays.

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18 janvier 2023 3 18 /01 /janvier /2023 13:02
Affaire Orion Oil : des agents de la PAF de l’aéroport du Bourget mis en cause pour corruption

Lu pour vous

 

Enquête Libé

Affaire Orion Oil : des agents de la PAF de l’aéroport du Bourget mis en cause pour corruption

https://www.liberation.fr/ par Jérôme Lefilliâtre et Ismaël Halissat publié le 17 janvier 2023 à 18h14

En enquêtant sur l’homme d’affaires canado-congolais Lucien Ebata, les enquêteurs ont découvert qu’il cultivait une proximité avec deux agents de la PAF de l’aéroport francilien où transitent les businessmen et leurs jets privés. Les policiers sont soupçonnés de l’avoir aidé, contre rétribution, à passer aisément les douanes avec du cash malgré ses deux fiches S.

Libération révèle les rouages de ce qui pourrait être l’un des principaux circuits de détournement des recettes du pétrole congolais, de Paris à Brazzaville en passant par la Suisse et Monaco. En cause, la société Orion Oil et son patron Lucien Ebata, proche du président Denis Sassou-Nguesso et aux multiples relations avec des personnalités économiques et politiques françaises.

L’entrevue du 12 juillet 2016 est aujourd’hui l’un des nombreux éléments déterminants qui pèsent sur ces deux policiers. L’enquête judiciaire, qui visait à l’origine les activités de Lucien Ebata, va mettre au jour des preuves de corruption des agents, soupçonnés d’avoir été payés par le chef d’entreprise pour lui permettre d’éviter les contrôles douaniers et faire entrer en France des valises pleines de millions d’euros. Après avoir retracé le fil de cette matinée, les enquêteurs sont convaincus qu’il s’agissait d’un passage de relais entre les deux agents pour servir les intérêts de Lucien Ebata. Francette S., 42 ans, qui fréquente l’homme d’affaires depuis quatre ans, va être mutée en Martinique où elle rejoint sa famille ; l’agent Valéry J., 45 ans, alors en poste au Bourget, est disponible pour prendre la suite. A la fin de l’année 2021, Lucien Ebata, Ted T., Francette S. et Valéry J. ont tous les quatre été mis en examen pour des faits de corruption. L’affaire que révèle Libération, nourrie par des écoutes judiciaires, de nombreuses auditions et des documents administratifs confidentiels, a également permis de déterrer les indices, ignorés par la plus haute hiérarchie, d’une corruption généralisée de ce service de la police aux frontières (PAF).

Au Bourget, «le passager est roi»

Un contrôle policier à l’aéroport du Bourget ne ressemble pas à l’expérience classique d’un passage de frontière. «Le Bourget n’est pas un aéroport comme les autres car on fait [c’est-à-dire, on contrôle, ndlr] des personnalités, il peut s’agir de passagers sensibles comme des hommes politiques, des hommes d’affaires qui prennent des jets assez régulièrement ou encore des personnes fortunées», résume dans une audition d’octobre 2021 le chef d’une brigade, Ahmed K. Au Bourget, les interminables files d’attente devant les guérites n’existent pas : la vérification des documents de voyage se fait dans les salons des compagnies aériennes, où les 37 agents de la PAF se déplacent. «C’est le policier qui vient aux passagers et pas le passager qui vient aux policiers, poursuit Ahmed K. Le passager est roi. Les compagnies nous mettent la pression pour accélérer les contrôles.» Plusieurs bénéficient même de passe-droits sur ordre hiérarchique. «Il y [en] a certains comme Bernard Arnault, et certaines personnalités importantes, [pour qui] nous recevons des télex nous demandant de faciliter le passage», ajoute le brigadier Sébastien S.

Comment les valises de Lucien Ebata, pleines de millions d’euros en liquide, ont-elles pu discrètement entrer en France ? Dans une conversation téléphonique le 10 juin 2017, captée par les douanes judiciaires, le Canado-Congolais explique à l’une de ses proches qu’une policière «l’attendait et le laissait passer parfois sans prévenir les autres», et ajoutait qu’elle «mangeait bien». Les détails livrés lors de cet échange et les investigations menées permettent aux enquêteurs d’établir que Lucien Ebata parle de versements d’argent à Francette S.

Cette policière a été en poste au Bourget de janvier 2012 à septembre 2016. L’Inspection générale de la police nationale (IGPN), saisie de cette partie de l’enquête, a retracé les dépôts d’espèces réalisés à cette période par Francette S. Ils ont pu retrouver 21 000 euros. A cela s’ajoute un transfert d’argent réalisé par Western Union, de 7 500 dollars, adressé par Ted T. à la policière. Une somme conséquente pour des fonctionnaires dont le salaire mensuel varie entre 2 000 et 3 000 euros. Mais, au-delà de cet aspect financier, la justice découvre également une relation de grande proximité entre Lucien Ebata et Francette S.

La rencontre a lieu le 12 juillet 2016, au matin, à l’hôtel Georges V. Ce rendez-vous, devant l’un des établissements les plus luxueux de Paris, tout proche des Champs-Elysées, rassemble un curieux attelage : Lucien Ebata, son bras droit, Ted T., et deux agents de la police aux frontières (PAF) de l’aéroport du Bourget, où transitent les jets privés de célébrités, businessmen et diplomates. Dans la foulée, les fonctionnaires, Francette S. et Valéry J, déposent chacun 1 000 euros en liquide sur leur compte en banque. Que font-ils, ce jour-là, avec Lucien Ebata, richissime et influent homme d’affaires canado-congolais ? Ce négociant est suspecté par la justice française de s’être enrichi à millions, en pillant l’argent public du Congo-Brazzaville à l’aide de sa société Orion Oil et d’un système complexe de détournement des recettes de la vente du pétrole. En 2012, il avait été arrêté à l’aéroport de Roissy avec une valise remplie de billets – 182 000 euros et 40 000 dollars non déclarés. Cet événement, et le soupçon d’une vaste opération de blanchiment d’argent, avait provoqué l’ouverture d’une enquête judiciaire et éveillé l’intérêt de deux services de renseignements français, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et la Direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP).

«Tu es mon frère de toute façon»

Les enquêteurs vont jusqu’à retracer les détails d’un séjour commun à New York, en décembre 2013. La policière est logée à l’hôtel cinq étoiles Four Seasons, au cœur de Manhattan. «Elle m’avait demandé de garder ses enfants quelques jours car elle partait rejoindre monsieur Ebata à New York. […] J’étais d’autant plus étonnée car ce dernier avait une fiche de recherche», relate en novembre 2021 la brigadière Christine D., une de ses anciennes collègues de la police aux frontières. Les enquêteurs n’ont pas retrouvé de dépenses de la policière en lien avec ce voyage, et suspectent donc que ce dernier a été réglé par Lucien Ebata. Trois jours après son retour, la policière dépose même 2 550 euros en liquide sur son compte. Ce qui pourrait être le «reliquat» d’espèces remises par Ebata à New York, analyse un rapport de synthèse de l’IGPN daté de mars 2022. Ce soupçon est étayé par les propos de la brigadière Christine D. «Dans la journée, je crois me souvenir qu’il avait mis à sa disposition un chauffeur ou un collaborateur qui lui remettait de l’argent tous les jours pour ses achats personnels. Je sais qu’elle avait fait l’acquisition d’un sac Vuitton qu’elle m’avait montré.»

Dans la conversation de juin 2017, déjà évoquée, où il était question de cette policière qui «mangeait bien», Lucien Ebata parle également d’un «homme, policier», qui lui avait envoyé un message pour le «rencontrer dans quinze minutes». Des recherches sur la ligne mobile de Valéry J., en poste au Bourget depuis 2011, ont permis d’étayer le scénario du «remplaçant» de Francette S. à partir de l’été 2016. L’étude de ses comptes bancaires révélera des dépôts d’espèces encore plus importants que pour la policière. De juillet 2016 à novembre 2019, plus de 4 400 euros sur un compte et 37 000 euros sur un autre. Près de 8 000 euros en liquide ont aussi été découverts à son domicile, le 5 octobre 2021.

Les nombreux textos échangés entre Lucien Ebata et Valéry J. permettent d’illustrer le lien particulier qu’ils entretenaient. Ou plutôt entre «Lulu» et «l’artiste peintre», tels qu’ils s’appelaient dans leurs répertoires respectifs. Dans plusieurs des messages retrouvés qu’il signe parfois lui-même «l’artiste», Valéry J. fait part de sa disponibilité pour Lucien Ebata, assure qu’il œuvre pour lui ou évoque à demi-mot ses besoins d’argent. Dans un style bien à lui.

«Si un jour les murs t’oppriment, il faut toujours croire et surtout choisir le plus impossible des rêves et se laisser porter par lui. Bonne journée. Amitiés fraternelles. Lucien», écrit Ebata à Valéry J. en septembre 2019. «Merci Bonne journée See u soon Take care L’artiste», lui répond le policier. Le 25 août 2020, l’agent de la PAF assure, dans des messages empreints de spiritualité, qu’il œuvre pour lui. «Tu es mon frère de toute façon donc me démener pour ta mission est un plaisir cela devient ma mission Joindre nos forces respectives fait certainement parti du plan divin», envoie le policier Valéry J. à Lucien Ebata. L’agent explique qu’il «œuvre drastiquement» pour que le Canado-Congolais obtienne son autorisation de décoller du Bourget. «Des [coups] de fil de partout… J’ai les oreilles qui sifflent lol», écrit-il aussi.

«Informer en temps réel Ebata de la présence des douanes»

Quelle est, concrètement, la contrepartie que pouvaient offrir Francette S. et Valéry J. à Lucien Ebata ? Les policiers étaient tenus, de 2013 à 2017, période pendant laquelle le Canado-Congolais était «fiché S» car susceptible d’appartenir à un réseau de «criminalité organisée», de prévenir immédiatement les services de renseignements à chacun de ses passages au Bourget. Or, dans une note datée de janvier 2022, Françoise Bilancini, à la tête de la DRPP, indique n’avoir jamais été informée ne serait-ce que d’un passage de Lucien Ebata au Bourget. Et à peine la moitié de ses allées et venues ont été signalées à la DGSI : sur 27 passages retrouvés de Lucien Ebata dans les archives de l’aéroport entre octobre 2014 et août 2016, 14 seulement ont fait l’objet d’une information au renseignement intérieur.

Au Bourget, ce voyageur qui aurait dû faire l’objet d’une surveillance particulière a-t-il pu compter sur l’intervention de Francette S. et Valéry J. pour passer plus facilement des valises de cash ? «C’est une hypothèse, mais les policiers pouvaient informer Ebata et son collaborateur des créneaux horaires sur lesquels ils avaient moins de risques de se faire contrôler par les douanes, avance dans une audition de novembre 2021 la commandante Marie-Claude S., à la tête des effectifs de l’aéroport à cette époque. Les policiers auraient aussi pu informer en temps réel Ebata de la présence des douanes.» Les enquêteurs notent d’ailleurs que, sur les 27 passages, seuls 2 ont fait l’objet d’un contrôle douanier. Une proportion qui ne «paraît pas normale» au commissaire général Patrice Bonhaume, l’ancien directeur de la PAF de Roissy, dont dépend le Bourget, qui l’a fait savoir dans un interrogatoire de mars 2022.

Une théorie encore plus grave est avancée par la commandante Marie-Claude S. : les agents auraient pu se charger de faire passer eux-mêmes les valises d’argent à la sortie de l’avion : «Il est aussi possible que les policiers aient pris l’argent pour le faire passer à côté des douanes pour le compte de monsieur Ebata en le lui rendant après.»

«Relation amoureuse»

En garde à vue, Lucien Ebata, Ted T., Francette S. et Valéry J. vont tenter de minorer la gravité des faits qui leur sont reprochés, sans totalement les nier. L’homme d’affaires explique à propos de Francette S. qu’elle faisait partie «des policiers qui s’occupent de [ses] formalités. Elle était sympathique à [son] égard». Concernant Valéry J., Lucien Ebata dit «qu’il était toujours bienveillant» et que l’homme d’affaires avait «dû lui donner [sa] carte et ce dernier a dû [lui] écrire». Leur abondante conversation serait le simple fait de la politesse d’Ebata«Par respect, je réponds aux personnes qui m’écrivent», tente-t-il. Le Canado-Congolais nie dans un premier temps toute remise d’argent aux agents, puis, confronté aux nombreux éléments découverts dans l’enquête, change de version : «C’est bien possible que Ted [le directeur financier d’Orion jusqu’à l’été 2021, ndlr] ait pu donner des espèces. II fait cela avec des fonds nommés frais d’approche ou frais divers. Ces fonds appartiennent à la société Orion.»

Interrogé spécifiquement sur le virement de 7 500 dollars réalisé depuis Dubaï sur le compte de Francette S., Lucien Ebata avance que c’est son «altruisme qui parle à ce moment-là». Il est «possible» que les dépôts d’espèces de la policière, qu’Ebata estime entre 20 000 et 30 000 euros, «correspondent aux sommes […] remises». Même discours de charité concernant l’argent versé à Valéry J. : «Nous avons été sollicités dans le cadre de son activité artistique et d’intérêts pour la musique. Nous avons eu des conversations à ce sujet. Il m’avait dit qu’il voulait voyager avec une amie, c’est la raison pour laquelle il voulait de l’argent.» Contacté par Libération par l’intermédiaire de son avocat, Antoine Vey, le patron d’Orion Oil n’a pas répondu sur les soupçons de corruption qui pèsent sur lui. Egalement sollicité, l’ancien directeur financier de l’entreprise, Ted T., n’a pas donné suite.

Dans leurs auditions, les deux policiers nient, malgré les échanges de messages à ce sujet, que la rencontre de juillet 2016 au George V ait eu comme objectif d’organiser un passage de relais entre eux, ainsi que d’avoir été présents au même moment au cours de la matinée. Pour expliquer sa proximité avec Lucien Ebata, Francette S. assure avoir eu une «relation amoureuse» avec lui, sans «aucun lien avec [son] travail», et qu’elle n’a «jamais passé le moindre accord ou fait le moindre arrangement avec lui». La policière affirme que les dépôts d’espèces sur son compte correspondent à des dons de ses anciens compagnons. Confrontée aux éléments de l’enquête, Francette S. a versé des documents attestant de plusieurs versements reçus en espèces pour des revenus locatifs mais a dû reconnaître quelques versements d’argent réalisés par Ted T. Soit à peu près la même ligne de défense que Valéry J., qui estime à seulement 5 000 euros l’argent qu’il a pu toucher de Lucien Ebata et explique les remises d’espèces sur son compte par des loyers perçus en liquide de plusieurs appartements. L’agent affirme, comme sa collègue, n’avoir jamais reçu d’argent en contrepartie d’un service. Sollicités par Libération, les avocats de Francette S. et Valéry J. n’ont pas donné suite. Pas plus que la direction générale de la police nationale.

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18 janvier 2023 3 18 /01 /janvier /2023 11:17
Combien y a-t-il de pays francophones dans le monde ?

 

Lu pour vous

 

https://www.caminteresse.fr/ Écrit par Marine Cestes  Le 17.01.2023 à 07h00 Modifié le 17.01.2023 à 7h00

Sixième langue la plus parlée au monde, le français est parlé dans de nombreux pays du monde. Cependant, il faut discerner les pays où notre langue maternelle est reconnue comme langue officielle et où son usage est uniquement répandu.

Avec près de 280 millions de personnes dans le monde qui utilisent cette langue au quotidien, le français s'est imposé comme une des langues les plus utilisées sur notre planète. Si elle reste très loin derrière l'anglais ou le mandarin, la langue de Molière est parlée quotidiennement et connaît même des déclinaisons régionales sous la forme des patois. En Europe, elle est même la deuxième langue la plus parlée. Néanmoins, le français est sujet à des cas particuliers. En effet, comme toutes les autres langues, elle peut être déclarée langue officielle du pays. Il existe aussi des États où le français est une langue parlée en grande majorité, mais où elle n'est pas reconnue comme langue officielle. Selon les critères pris en compte, le nombre de pays considérés comme francophones peut donc varier.

29 pays ayant adopté le français comme langue officielle

En plus de la France et de tous ses départements d'outre-mer, on compte 28 autres pays où le français est reconnu par l'État comme une langue officielle et maternelle. Ainsi en Europe, on trouve quatre nations francophones : la Belgique, le Luxembourg, la Suisse et Monaco. Parmi les pays du monde où le français est une langue officielle, on retrouve le Canada (notamment dans la province de Québec), Haïti et le Vanuatu. Cependant, c'est sur le continent africain que l'on trouve le plus de pays francophones avec 21 nations parlant français. Les pays concernés sont le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cameroun, les Comores, la République démocratique du Congo (RDC), le Congo, la Côte d’Ivoire, Djibouti, le Gabon, la Guinée, la Guinée équatoriale, Madagascar, le Mali, le Niger, la République centrafricaine, le Rwanda, le Sénégal, les Seychelles, le Tchad et le Togo.

7 pays où le français est parlé, mais n'est pas reconnu comme langue officielle de l'État

Hormis en Asie, le français est donc une langue officielle sur tous les continents. Cependant, quelques pays parlent également cette langue au quotidien. Elle n'a pas de statut officiel dans ces États, mais elle est tolérée en raison de son histoire ou de ses liens avec la France. Les pays concernés sont l'Algérie, Andorre, le Liban, le Maroc, Maurice, la Mauritanie et la Tunisie. En comptant ces nations comptant en moyenne 35 % de francophones, il y a donc 36 États où la langue française est utilisée couramment autant en langue maternelle qu'en langue secondaire.

Quel est le 1er pays francophone au monde ?

Avec plus de 78 millions d’habitants au mondela RDC est le premier pays francophone au monde. Derrière la RDC, viennent respectivement le Canada et le Cameroun. D’ailleurs, relativement à ce dernier pays, on estime même que la moitié de la population francophone vit en Afrique.

Quelles sont les 5 langues les plus parlées au monde ?

Les langues les plus parlées dans le monde sont notamment celles qui sont pour le plus commerciales et qui s’exportent plus facilement :

  1. Anglais avec une population mondiale de 1, 348 milliard
  2. Mandarin avec une population mondiale de 1, 120 milliard
  3. Hindi avec 600 millions
  4. Espagnol 543 millions
  5. Arabe avec 247 millions

Outre ces langues, celles qui suivent sont respectivement le Bengali avec 268 millions de personnes qui la parlent, le français avec plus de 267 millions de personnes qui la parlent et le Russe avec plus de 258 millions de personnes qui la parlent.

 

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17 janvier 2023 2 17 /01 /janvier /2023 00:24
"Un intermède centrafricain" - Rencontre avec l'ambassadeur Charles Malinas
"Un intermède centrafricain" - Rencontre avec l'ambassadeur Charles Malinas

 

Lu pour vous


https://lesfrancais.press/un-intermede-centrafricain-rencontre-avec-lambassadeur-charles-malinas/ par BORIS FAURE 12 JANVIER 2023 À 15H00

La Centrafrique

La France est le seul pays de l’Union européenne à avoir une ambassade à Bangui (où l’UE dispose aussi d’une délégation). Forte de sa relation ancienne et dense avec la RCA, elle continue de soutenir et d’accompagner la population centrafricaine dans le cadre d’un développement durable du pays. Plus de 700 Français, dont 455 binationaux, sont installés sur place.

Au sein de l’Union européenne, la France a été à l’origine, en juillet 2014, avec l’Allemagne, les Pays-Bas et la Commission européenne, de la création du premier fonds européen multi-bailleurs pour l’urgence et le développement, le fonds « Bêkou », qui a rapidement permis l’adoption et la mise en œuvre de projets dans les secteurs de la santé, de la sécurité alimentaire, des infrastructures urbaines et de la relance économique et sociale. Il est aujourd’hui alimenté à hauteur de plus de 250 millions EUR. Cependant, l’armée française a été invitée à quitter le territoire.

Charles Malinas

Charles Malinas est l’ambassadeur qui plonge dans cette Afrique centrale mosaïque, sans a priori, sans leçons à donner, toujours à l’écoute mais également ferme et déterminé à la tête d’une équipe soudée et engagée, en totale confiance avec le commandement de Sangaris et Paris. Ancien élève de l’ENA, Charles Malinas a effectué sa carrière au Quai d’Orsay où il a notamment occupé plusieurs postes dans différents cabinets ministériels. Il a également été ambassadeur à Prague.

Un Ambassadeur au cœur du tumulte centrafricain : un récit diplomatique de haut vol.

C’est un livre qui comptera dans les annales des récits diplomatiques. Parce que l’on parle d’un moment fort de la politique africaine de la France, à savoir l’intervention militaire en Centrafrique de 2013 suivie d’une action politique intense pour soutenir un processus de paix au départ très incertain. 

Ce livre doit tout à son auteur, Charles Malinas, qui tient la plume avec brio pour raconter ses deux années tumultueuses sur le terrain dans une « mission commando » qui le voit œuvrer aux côtés des militaires de la force Sangaris et animer une petite équipe de diplomates et coopérants au service de la paix et de la démocratie.

Avec ces hommes et femmes embarqués comme lui dans ce pays au cœur de l’Afrique, l’Ambassadeur Malinas imposera son atypisme lié à son franc-parler et sa personnalité forte dans un monde diplomatique où on préfère parfois les profils plus pasteurisés. Il va partout parler à tout le monde et noue des contacts qui seront durables avec les partenaires centrafricains qu’ils soient politiques, religieux, économiques ou associatifs. La force d’entraînement de l’Ambassadeur Malinas ce sont ses convictions, celles du dialogue, du respect de l’autre.

Son professionnalisme c’est de savoir travailler avec tous les acteurs politiques centrafricains sans exclusive, sans parti pris, et avec un regard à hauteur d’homme qui témoigne du profond humanisme de cet homme attachant qui nous offre un livre remarquable, enlevé et instructif.

Une mission à haut risque alors qu’un génocide se prépare

Boris Faure : Charles Malinas, vous êtes nommé en novembre 2013 Ambassadeur de France en Centrafrique au moment où se déploient les 1500 militaires de l’opération Sangaris. La force française, sur mandat du conseil de sécurité des Nations Unies, se voit confier une mission périlleuse :  faire cesser la guerre civile en cours alors que des risques de génocide existent.

Les défis qui vous attendent sont à haut risque : vous devrez faire le lien avec les militaires alors que la situation sur le terrain est inflammable entre milices chrétiennes et musulmanes. 

Vous allez devoir mener une action  politique subtile avec les partenaires internationaux tout en développant un lien de confiance fragile avec le président Michel Djotodia et son entourage. 

Ces derniers ont pris le pouvoir par la force en mars 2013, précipitant la chute du président Bozizé. La capitale, Bangui, est depuis paralysée et la population vit dans la peur. Vous avez jusque là un profil de diplomate europhile, spécialiste de la relation franco-germanique, un homme de Cabinet habitué à conseiller les ministres. Quand Alexandre Ziegler, directeur de cabinet de Laurent Fabius, vous propose ce poste, quelles sont vos premières pensées ?

Une mission à haut risque alors qu’un génocide se prépare. 

Boris Faure : Charles Malinas, vous êtes nommé en novembre 2013 Ambassadeur de France en Centrafrique au moment où se déploient les 1500 militaires de l’opération Sangaris. La force française, sur mandat du conseil de sécurité des Nations Unies, se voit confier une mission périlleuse :  faire cesser la guerre civile en cours alors que des risques de génocide existent.

Les défis qui vous attendent sont à haut risque : vous devrez faire le lien avec les militaires alors que la situation sur le terrain est inflammable entre milices chrétiennes et musulmanes. 

Vous allez devoir mener une action  politique subtile avec les partenaires internationaux tout en développant un lien de confiance fragile avec le président Michel Djotodia et son entourage. 

Ces derniers ont pris le pouvoir par la force en mars 2013, précipitant la chute du président Bozizé. La capitale, Bangui, est depuis paralysée et la population vit dans la peur. Vous avez jusque là un profil de diplomate europhile, spécialiste de la relation franco-germanique, un homme de Cabinet habitué à conseiller les ministres. Quand Alexandre Ziegler, directeur de cabinet de Laurent Fabius, vous propose ce poste, quelles sont vos premières pensées ?

Une mission d’exception confiée à un Ambassadeur adepte de l’action

Charles Malinas : Ma première pensée, ou plus exactement ma première réaction, c’est la surprise. J’avais refusé un très beau poste en Afrique et voilà que l’on m’en propose un autre, beaucoup moins « prestigieux ». D’abord je ne comprends pas. Mais lorsque Alexandre Ziegler me parle de l’envoi de la force, cela change tout. Il s’agit d’une mission d’exception, exception compte tenu de l’enjeu politique ou diplomatique, mais exception également parce qu’il s’agissait d’affirmer le rôle de la politique au sens de la diplomatie face à un dispositif militaire très important qui allait comporter de nombreux officiers, et par conséquent une force de réflexion tout à fait considérable, en comparaison avec une ambassade où nous serons beaucoup moins nombreux.

Si on me nomme là-bas c’est parce que l’ambassade doit exister et rester maîtresse de l’action politique de la France, en harmonie avec la force militaire, pas contre elle, mais pas en-dessous d’elle. Ce qui implique un peu de caractère, comme je l’écris dans mon livre, et grâce à cela la capacité de s’entendre avec un général – ce seront successivement trois généraux puis trois colonels – afin d’ avoir au total une mission unique, politico-militaire.

Dans ces conditions, il était évident pour moi que j’allais accepter : j’aime le risque, l’engagement, les situations inhabituelles, loin de la routine diplomatique.

Et l’entente avec les généraux puis les colonels sera totale, au profit de la mission ; à titre plus personnel il en restera de belles amitiés.

Concilier des positions très opposées, un rôle de dialogue avec  tous les Centrafricains. 

Boris Faure : Dans le livre se dessine le portrait d’un homme d’action. Vous vous donnez une méthode « aller partout, parler à tout le monde ». Il y a d’ailleurs en creux une critique contre l’Ambassadeur précédent, enfermé dans son Ambassade et coupé du terrain. Il y a des moments où la prise de risque physique se fait sentir. Quand vous prenez la parole au coeur du quartier musulman de Bangui, le Km5, face à une population animée par des sentiments antifrançais. 

Dans tout le livre on sentira d’ailleurs que la présence de la France, ex nation coloniale, est regardée, épiée, parfois instrumentalisée, entre ceux qui voudraient s’attirer les bonnes grâces de l’Ambassadeur et ceux qui utilisent la France comme bouc-émissaire et paravent aux prédations des édiles locaux. Mais vous avez le mérite de rester neutre et de garder un lien constant avec Paris à qui vous rendez compte en permanence. Comment êtes-vous devenu cet homme d’action à la fois humain, touché par l’horreur des massacres ou par la mort d’une jeune photographe française, mais qui reste courageux et ferme sur ses principes ?

Celui qui est surnommé le « gouverneur de Bangui » mise sur la parole et la création de confiance

Charles Malinas : Je crois que j’ai toujours été un homme d’action. Donc si j’aime la réflexion et l’analyse, la réflexion et l’analyse pour elles-mêmes ne m’intéressent pas. C’est leur traduction dans les faits qui me paraît importante.

Est-ce que j’ai été courageux ? Je n’en sais rien. Le courage, c’est je crois le fait de dominer sa peur ; à titre personnel je n’ai jamais vraiment eu peur tant j’étais protégé et tant je me sentais en confiance dans un pays qui avait accueilli la force française comme une force libératrice, une force de paix.

Il y a eu évidemment des moments tendus, et même très tendus, mais c’est normal. De même, j’ai été amené à entrer en contact avec des gens qui avaient des responsabilités très lourdes dans le désastre qu’avait vécu le pays, mais ça faisait partie de la mission.

Ce que je retiens au total, c’est que les Centrafricains, c’est-à-dire les autorités mais également toutes les personnes avec qui j’ai été amené à travailler, dans les partis, dans les associations, dans les groupements de toute nature de la société civile, m’ont accepté et de ce fait m’ont fait confiance. Il y a eu certes une ou deux exceptions de dirigeants, soit de groupes armés, soit politiques, qui ont refusé de travailler avec moi, mais c’était vraiment l’exception. Au moment de mon départ j’ai été reçu pour des rencontres d’adieu par des personnes avec qui j’avais été amené à travailler, mais aussi à m’affronter, parfois de manière très dure, mais qui reconnaissaient que l’action de la France que j’avais dirigée en étroite relation avec la force Sangaris avait été conduite dans un esprit de contribution, dans l’idée d’aider le pays et de ne pas se substituer à ses autorités.

La France aura aidé les autorités de la transition à faire leurs propres choix

Charles Malinas : Cela peut paraître surprenant car on m’a parfois attribué des sobriquets comme « le gouverneur de Bangui », « Malinas premier empereur », « le proconsul », mais la réalité était que nous avons aidé les autorités centrafricaines de la transition à réaliser leurs choix, leur politique dans un contexte extrêmement difficile. Et les partenaires de la France ont agi, je crois, dans le même esprit, qu’il s’agisse des Nations unies, de l’Union africaine, de la CEEAC, de la Banque Mondiale, du FMI, ou des partenaires bilatéraux comme en particulier les États-Unis, le Cameroun ou le Congo.

A l’heure des bilans : la conciliation entre les communautés comme acte fort 

Boris Faure : Il nous faut faire le bilan de votre action politique et diplomatique : le calme va peu à peu revenir à travers le processus de désarmement dit DDR et RRS et la préparation des élections. Vous pratiquez le dialogue interreligieux et vous appuyez sur des réunions de conciliation pour organiser la médiation entre les communautés qui jusque là se déchiraient. Les élections en février 2016 permettent l’élection d’un nouveau président et se déroulent de façon satisfaisante contre toute attente. Quel élément de votre bilan vous procure le plus de fierté ?

Charles Malinas : Ce qui me rend le plus fier, c’est sans doute ce pour quoi j’ai pris le plus de risques politiques, c’est-à-dire les actions de conciliation entre les communautés. Avant les événements de 2013, les communautés religieuses ne s’opposent pas en Centrafrique, elles cohabitent sans difficulté y compris au sein du gouvernement. C’est le lien entre la Séléka et les commerçants musulmans, lien opportuniste, qui va fausser les données et entraîner ces affrontements intercommunautaires. 

L’initiative que nous avons prise sur la demande de responsables musulmans et chrétiens pouvait paraître étrange. En tout cas très inhabituelle s’agissant d’une ambassade qui n’était pas là pour intervenir dans une affaire totalement interne au pays. Pour autant, cette intervention m’a paru nécessaire car les tensions étaient telles qu’elles empêchaient le retour d’une paix possible et la tenue des élections. Elle faisait donc bien partie de la mission. Et le gouvernement centrafricain de transition n’était à ce moment là absolument pas en mesure, bien qu’il ait rassemblé des musulmans et des chrétiens, d’engager une telle démarche. Et d’ailleurs, les dirigeants qui sont venus me trouver pour que je le fasse ne l’ont pas demandé à l’autorité politique. L’ambassade s’est donc engagée dans cette voie, en accord avec la Force et bien évidemment avec l’accord de Paris. Et je ne remercierai jamais assez Alexandre Ziegler et Guillaume Lacroix de m’avoir appuyé à un moment où ils auraient pu considérer que l’engagement allait trop loin.

Une satisfaction personnelle et pour la France : avoir aidé à surmonter les divisions.

C’est donc une satisfaction personnelle, je ne vais pas m’en cacher puisque j’ai joué un rôle actif dans cette affaire, mais une satisfaction pour la France d’avoir aidé les Centrafricains à trouver le chemin d’un accord leur permettant de surmonter leurs propres divisions, sans pour autant jamais entrer dans le contenu de l’accord passé entre les communautés : ainsi que je l’explique dans le livre, les réunions que j’ai organisées à la résidence après avoir tenu les meetings dans les quartiers, je me suis contenté de les arbitrer sur la forme. En rien sur le fond. Et c’est pour cela d’ailleurs que cela a fonctionné : les points d’accord ont été élaborés par les Centrafricains eux-mêmes. Et je suis persuadé que le succès du Forum de Bangui qui a suivi a bénéficié des résultats concrets de cette initiative. Lors du Forum, même si les partenaires internationaux étaient présents, ce sont les Centrafricains eux-mêmes qui ont défini les points sur lesquels il se mettaient d’accord, et comment il poursuivaient la tâche.

En finir avec la Françafrique.

C’est d’ailleurs je crois la clé de tout cela. En finir avec la Françafrique au sens de l’interventionnisme, agir en appui, en soutien, mais ne pas intervenir sur les choix au fond. Et rester modeste.

De ce point de vue, après le retrait de Sangaris, c’est un sentiment d’abandon qui a saisi les Centrafricains, sentiment que je comprends totalement – je me suis battu contre cette décision de retirer la Force même s’il fallait la réduire, la force de paix des Nations unies n’était absolument pas en mesure de tenir le terrain, et elle l’a malheureusement montré.

Aujourd’hui un sentiment d’abandon et l’arrivée de la Russie en Centrafrique. 

Charles Malinas : Ce sentiment d’abandon et l’arrivée de la Russie à qui nous avons ouvert la voie entraîne un rejet relatif de la France. Je dis relatif car il ne concerne pas tous les Centrafricains, mais un nombre important. Pour combattre ce sentiment, il faudrait continuer d’agir dans ce pays de manière responsable, au contraire de ce qui a été fait : en coupant les aides budgétaires, en adoptant une attitude de pays offensé, vexé, en refusant comme je le vois encore aujourd’hui dans la presse, d’accorder un visa à des personnalités centrafricaines de premier plan, on ferme le dialogue alors que, loin de là, il faut l’entretenir par tous les canaux dont nous disposons, et ils sont nombreux, et ne pas lâcher nos amis centrafricains qui sont attachés à notre lien séculaire et qui considèrent que la France a un rôle à jouer dans le redressement du pays, indépendamment de la présence de telle ou telle force étrangère. Je ne dis pas que c’est facile à faire, je dis qu’il faut être dans cet état d’esprit.

Des amitiés nouées qui survivent au départ de l’Ambassadeur du pays. 

Boris Faure : On sent que vous avez développé de solides amitiés parmi les personnalités centrafricaines côtoyées sur le terrain. L’athée revendiqué est devenu l’ami du cardinal Dieudonné Nzapalaianga que vous décrivez comme un saint tant il oeuvre pour s’interposer et prêcher le pardon même quand des chrétiens se font massacrer. En Afrique avez-vous trouvé, sinon la foi, au moins un supplément de spiritualité  intérieure face à la mort et l’horreur grâce à l’exemplarité et l’amitié de certaines grandes âmes qui vous ont inspiré ?

Charles Malinas : J’ai noué des amitiés fortes en Centrafrique. Des amitiés qui perdurent aujourd’hui. Au point que je peux dire que la Centrafrique reste mon second pays.

Quant à la spiritualité, je ne suis pas certain de pouvoir répondre à cette question…

J’ai en tout cas beaucoup d’admiration pour toutes les personnes qui ont pris des risques considérables pour ramener la paix, pour redresser le pays. Des risques personnels, sur leur vie.

Une affaire injuste, le reproche du laxisme supposé sur l’attribution de visas. 

Boris Faure : Il est difficile de ne pas évoquer l’affaire des visas, qui semble assez saugrenue aujourd’hui mais qui vous a conduit à être sanctionné pour un supposé laxisme dans l’attribution de ces titres de séjour aux Centrafricains. En tant que lecteur on ressent une grande injustice à découvrir que vous avez été débarqué de votre poste d’Ambassadeur à Prague, qui vous avez été proposé après la réussite de votre mission en Afrique. Vivez-vous cet épisode comme une blessure ? 

Charles Malinas : J’ai évoqué à la fin du livre la sanction qui a été prononcée contre moi pour avoir « conduit une politique laxiste des visas ». Comme je l’écris, j’avais autre chose à faire qu’à m’occuper des visas et je ressens comme profondément injuste la façon dont j’ai été traité. Mais la page est tournée, et ce que les Centrafricains vivent aujourd’hui est autrement plus grave que ce qui m’est arrivé.

J’ai été rappelé de Prague le 13 décembre 2016, sans pouvoir faire mes adieux à qui que ce soit, j’ai eu quelques heures pour quitter le pays. Ensuite j’ai vécu cinq années extrêmement difficiles.

Aujourd’hui, la page est heureusement tournée.

Le Quai aujourd’hui et la réforme du statut de diplomate. 

Boris Faure : Quel conseil pourriez-vous donner aux impétrants qui souhaitent embrasser la carrière diplomatique et qui s’intéressent à l’Afrique où la France est parfois malmenée ?

Charles Malinas : Je suis préoccupé par la manière dont la politique étrangère est envisagée depuis quelques années. La dernière évolution avec la suppression du corps diplomatique me renforce dans cette inquiétude.

Je suis un diplomate plutôt atypique, pour autant je ne pense pas que tous les diplomates doivent être atypiques.

La force du Quai d’Orsay, c’était sa réflexion, sa capacité d’analyse, et parfois (pas assez souvent à mon goût) la traduction dans l’action. Depuis quelques mandats présidentiels, la cellule diplomatique de l’Élysée a tendance à se substituer à cet appareil diplomatique, en l’utilisant à l’occasion mais pas forcément.

D’autres ministères, d’autres organismes développent une capacité de réflexion sur la politique étrangère, souvent de qualité. Cette dispersion dans l’appareil d’État ne me paraît pas être une bonne chose.

Le Quai a perdu en qualité de réflexion 

Charles Malinas : Le Quai d’Orsay a perdu en qualité de réflexion, il néglige également l’indispensable interaction entre les postes et le Département –dans le cas de ma mission en RCA, le fait que j’aie eu au téléphone pratiquement tous les jours un entretien avec le Quai a été un élément essentiel dans la réussite car les décisions ont été prises en prenant en compte à la fois les impératifs globaux et les circonstances de terrain.

Développer une diplomatie efficace, c’est donc avoir, à mon avis, une réflexion d’ensemble au service d’une vision du monde, et une mise en œuvre concertée entre Paris et le terrain – ce que les moyens actuels de communication permettent sans aucune difficulté.

Vision du monde : en avons nous une aujourd’hui ? Réflexion : même question. Interaction : même question également.

Ainsi, comment donner un conseil aux impétrants alors que je ne sais pas si, aujourd’hui, je choisirais encore le Quai à la sortie de l’ENA ?


Boris Faure

Boris Faure est l'ex 1er Secrétaire de la fédération des expatriés du Parti socialiste, mais c'est surtout un expert de la culture française à l'étranger. Il travaille depuis 20 ans dans le réseau des Instituts Français, et a été secrétaire général de celui de l'île Maurice, avant de travailler auprès des Instituts de Pologne et d'Ukraine. Il a été la plume d'une ministre de la Francophonie. Aujourd'hui, il collabore avec Sud Radio et Lesfrancais.press, tout en étant auteur et représentant syndical dans le réseau des Lycées français à l'étranger.

 

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16 janvier 2023 1 16 /01 /janvier /2023 23:39
Centrafrique : le 4e congrès du SOCAGO prend fin à Bangui

 

 

https://www.radiondekeluka.org/ dimanche 15 janvier 2023 13:35

Les assises du 4ème Congrès de la société centrafricaine de gynécologie et d’obstétrique (SOCAGO) ont pris fin le jeudi 13 janvier 2023 à Bangui. Durant 4 jours, plusieurs sujets importants liés à la santé de la femme, de la mère et de l’enfant ont été abordés.

Ouverts le mardi 10 janvier 2023, les échanges, qui ont duré 4 jours, ont traité des cancers gynécologiques et mammaires. Plusieurs sous-thèmes ont été développés. L’objectif, selon les prestataires de la santé, est d’améliorer la qualité des services en faveur de la mère et de l’enfant.

Ces moments d’échanges et de partage d’expérience ont mobilisé plus de 500 professionnels de santé de la République centrafricaine et de 19 autres pays africains. En plus du thème principal axé sur les cancers gynécologiques et mammaires, les hémorragies génitales, causes du décès de nombreuses femmes, la planification familiale et la prise en charge du nouveau-né en maternité, ont été les sujets les plus débattus. Un accent particulier a été aussi mis sur l’appropriation des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur les consultations prénatales.

Huit consultations au lieu de 4

"Nous avons de nouvelles méthodes qui nous permettent de dépister, pas avec de grands moyens, mais le plutôt possible, les cancers afin d’éviter les cas de décès chez les femmes. Dans nos communautés, nous pouvons amener les femmes à faire des prélèvements elles-mêmes au niveau du col de l’utérus pour les apporter dans les formations sanitaires. Avant, 4 consultations prénatales recentrées suffisaient avant l’accouchement mais, avec les nouvelles directives de l’OMS, il est maintenant question qu’une femme enceinte puisse avoir 8 contacts avec le personnel soignant avant l’accouchement", a apprécié Zoé Eulalie Deganaï, sage-femme à l’hôpital du district de Bossangoa.

- Lire aussi : Centrafrique : Dauphin Royal répond à la sollicitation du ministère de la santé

Le président de la Société des gynécologues et obstétriciens du Cameroun (SOGOC), se félicite de la tenue de ces échanges riches en contenu.

Partage d’expériences

"Nous avons des problématiques identiques dans nos différents pays notamment, la lutte contre le cancer gynéco-mammaire, c’est-à-dire le cancer du sein et le cancer du col. Et, ces problématiques sont mieux abordées lorsque nous partageons les expériences. De façon pratique, il y a des habitudes que nous développons et qui ont donné des résultats et que nous pourrons partager pour permettre à ce que les uns et les autres diminuent la mentalité liée à ces maladies dans nos différents pays", a proposé Pr Émile Télesphore Mboudou, président de la Société des gynécologues et obstétriciens du Cameroun.

A l’ouverture de ce 4ème congrès de la SOCAGO, le président de la République centrafricaine, Faustin Archange Touadéra, a mis l’accent sur les ressources humaines pour réduire le décès de la mère et de l’enfant. Il a promis de travailler sur les moyens afin de soutenir la lutte contre le décès de la mère et de l’enfant.

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16 janvier 2023 1 16 /01 /janvier /2023 23:24
RCA : LA COUR PENALE SPÉCIALE « DANS LES STARTING-BLOCKS »

Lu pour vous

 

CENTRAFRIQUE : LA COUR SPÉCIALE « DANS LES STARTING-BLOCKS » (1/2)

https://www.justiceinfo.net/ 16 JANVIER 2023 PAR FRANCK PETIT, ENVOYÉ SPÉCIAL À BANGUI

Le mandat de la Cour pénale spéciale (CPS) a été renouvelé pour cinq ans par l’Assemblée nationale de Centrafrique, le 28 décembre, malgré ses maigres résultats. Depuis sa création en 2015, ce tribunal hybride soutenu par l’Onu a mené un seul procès. Quelles leçons tirer de ce premier jugement, alors que plusieurs arrestations ont eu lieu récemment et que de nouveaux dossiers d’instruction seraient sur le point d’être bouclés ?

« Lutter contre l’impunité, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que nous voulons par cette cour remplacer les kalachnikovs, les roquettes et les obus par des articles du Traité de Rome pour que ce soit ces articles-là qui soient désormais nos obus, nos roquettes contre les gens qui ont fait du mal au peuple. Si l’on a des gens qui vont nous produire une décision trois ou quatre ans après, qui n’aura plus de relation avec les faits qui ont été commis et qui n’aura pas l’impression de soulager les victimes, ça ne vaut pas la peine. » Ainsi parlait Joseph Bindoumi, président de la Ligue centrafricaine des droits de l’homme, le 23 mai 2015 lors d’un débat sur Radio Ndeke Luka, principale radio privée de Centrafrique.

La création de la Cour pénale spéciale (CPS) venait d’être votée dans l’enthousiasme du Forum national de Bangui, organisé pour promouvoir la paix et tourner le dos aux années de chaos et de violences perpétrées, notamment, par les milices dites « anti-balaka » et celles de la Seleka, mouvement rebelle ayant renversé le président François Bozizé en mars 2013, avant d’être chassé du pouvoir un an plus tard. Mais déjà, certains acteurs de la société civile, très actifs au Forum de Bangui et témoins des lenteurs de la Cour pénale internationale (CPS) depuis l’ouverture de ses enquêtes en Centrafrique en 2007, s’interrogeaient sur le modèle de ce nouveau tribunal dit « hybride », composé de Centrafricains et de personnel international, et soutenu par l’Onu.

Sept ans et quelques mois plus tard, le premier jugement de la CPS a été rendu, le 31 octobre 2022, contre trois membres d’un groupe armé (Issa Sallet Adoum, Yaouba Ousman et Mahamat Tahir), reconnus coupables de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Pour des faits survenus en 2019, des années après la création de la cour, et ayant causé la mort d’au moins 32 civils dans des villages du nord-ouest du pays, non loin de Paoua. Les condamnés sont des ex-rebelles du puissant groupe « 3R » de Sidiki Abass, fondé à l’origine pour protéger la minorité peule des exactions des anti-balaka.

Leur chef ne sera pas jugé. Nommé conseiller militaire à la Primature après sa participation à l’accord de paix signé en avril 2019 à Khartoum, Abass a par la suite rejoint une nouvelle coalition rebelle qui a tenté de prendre la capitale Bangui, fin 2020. Blessé au combat, sa mort a été officiellement annoncée début 2021.

AMÉLIORER LA QUALITÉ DES JUGEMENTS

Ce premier procès, dont l’ouverture avait été annoncée pour le 19 avril 2022, a lui-même été marqué par un faux départ dû au boycott des avocats de la défense, insatisfaits de leur rémunération. Ayant en partie obtenu gain de cause (avec un forfait qu’ils veulent toujours renégocier), le procès a pu finalement démarrer le 16 mai. Si les Centrafricains ont pu le suivre via les radios locales, il a été peu visible à l’international du fait des difficultés de retransmission en streaming. En privé, des juristes proches de la Cour confient que la chambre d’assises n’a pas particulièrement brillé par la tenue de ses débats, ni par la qualité juridique de ses décisions. Sont notamment pointés du doigt le manque d’expérience des procès pour crimes internationaux et l’absence d’assistants pour les juges et les avocats.

« À la CPS, l’avocat est seul, sans assistant, confirme Me Célestin Nzala, chef du Corps spécial d’avocats désignés pour agir devant la CPS. Dans le procès, il y avait trois avocats de la défense, un par accusé, et deux avocats des parties civiles, la deuxième étant arrivée sur le tard, pour 51 parties civiles. Les bailleurs pressaient pour un procès. Les choses ont été faites à la va-vite et ils n’ont pas pu réunir assez de parties civiles. » Depuis, des conseillers juristes sont recrutés par la mission des Nations unies en Centrafrique (Minusca) et par le Pnud, deux organes de l’Onu qui appuient la CPS, pour « garantir des décisions de qualité (y compris pour améliorer les compétences rédactionnelles) » aux chambres et « pour garantir un procès équitable (y compris par des avocats internationaux en appui aux avocats nationaux) », selon une note externe adressée à leurs partenaires, datée du 10 novembre.

Cela doit notamment servir deux enjeux prioritaires : l’appel déposé par la défense et la demande en réparation des parties civiles – pour laquelle une audience est attendue fin janvier.

« DES ACCUSÉS SE SONT EXCUSÉS, C’EST PÉDAGOGIQUE »

Les voix critiques soulignent que ce procès en forme de ban-d’essai visait surtout à obtenir le renouvellement du mandat de la CPS, qui arrive à expiration en octobre 2023. « Ils se sont précipités pour organiser un procès, pour renouveler le mandat. Ils sont là pour faire durer. C’est comme tous ces projets des Nations unies, il ne faut pas en attendre grand-chose », cingle Maurice Dibert-Dollet, un ancien procureur général de Bangui, conseiller à la Cour de cassation. « En cinq ans, un seul dossier jugé, c’est zéro », avec un budget annuel « équivalent à celui de tout le ministère de la Justice, prison, tribunaux, tout compris », lâche un autre haut magistrat, ancien ministre de la Justice, qui souhaite garder l’anonymat. 

Pour d’autres, ce procès a eu le mérite d’exister et peut redonner espoir aux victimes. « C’est le tout premier procès, il peut y avoir des difficultés mais pour moi, il s’est bien déroulé. Les victimes attendent que la Cour commence à juger ceux qui ont commis les crimes les plus graves dans le pays. Selon les échos que nous avons des populations, c’est une satisfaction. Ceux qui ont ôté la vie se sont retrouvés en justice. Il y en a même qui se sont excusés. C’est un message fort, c’est pédagogique », estime le président de la CPS, Michel Landry Luanga.

« Le procès était édifiant, ajoute-t-il. Les accusés ont expliqué comment ils s’y prenaient. C’est très significatif. Par rapport à nos collègues [de la CPI] qui ont jugé Bemba [Jean-Pierre Bemba, homme politique et chef de guerre congolais, poursuivi pour des crimes commis en Centrafrique en 2002-2003 et acquitté par la CPI en 2018] et ont échoué. Alors que s’ils avaient mis la main sur des responsables de terrain pour qui les moyens de preuve sont suffisants, ils auraient eu des résultats. La population suit ces procès où les auteurs se confessent devant les victimes. »

« ON POURRAIT AVOIR SIX PROCÈS » DANS LES DEUX ANS

Le 28 décembre, la CPS a vu son mandat être renouvelé pour cinq ans. Après tant de retards, cette fois-ci la Cour est prête, assure-t-on de concert aux chambres, à l’instruction et au parquet, à sortir de ses starting-blocks pour enfin entrer dans la phase des procès. Chiffres à l’appui. Selon les données mises à jour fin décembre et communiquées à Justice Info, la CPS garde aujourd’hui sous les verrous 15 inculpés, plus les trois condamnés en première instance ; en plus des individus emprisonnés, trois autres sont sous contrôle judiciaire ; trois en liberté provisoire ; et un s’est « évadé ».

Sur un total de 19 dossiers à l’instruction, deux seraient près de la conclusion. Et selon le procureur spécial Toussaint Muntazini, si chacun des trois cabinets d’instruction clôture deux dossiers dans l’année, « on pourrait avoir six procès » dans les deux ans qui viennent.

 

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15 janvier 2023 7 15 /01 /janvier /2023 00:21
Passe d’armes sur Wagner entre les USA et la Russie à l’ONU
Passe d’armes sur Wagner entre les USA et la Russie à l’ONU

 

Lu pour vous

 

https://mondafrique.com/  par la rédaction de Mondafrique  14 janvier 2023

Le 10 janvier au Conseil de Sécurité, Américains et Russes se sont étripés au sujet de Wagner en Afrique.

Les premiers accusant les seconds de s’ingérer dans les affaires intérieures des pays africains et d’augmenter la probabilité que l’extrémisme violent se développe. La représentante de Moscou a jugé que ces assertions « étonnantes » manquaient « de bon sens » en rappelant que les USA font la même chose et en citant l’exemple libyen. Mais la Russie était bien seule.

Dans cette démarche, Washington a été soutenu par la France. Sa conseillère politique, Isis Jaraud-Darnault a dénoncé l’impact « néfaste » et « dévastateur » des mercenaires de Wagner, leurs violations des droits humains et le meurtre présumé de 30 civils au Mali.  Même tonalité du côté britannique qui a imputé à Moscou la détérioration de la sécurité au Mali, au Burkina Faso au Nigéria et dans le bassin du lac Tchad.

Il est vrai que les hommes de Wagner ne sont pas des enfants de chœur et que leur arrivée au Mali n’a pas amélioré la situation sécuritaire, néanmoins, leur faire porter le chapeau de tous les maux de la région alors qu’ils ne sont arrivés à Bamako qu’à la fin de 2021 relève de la très mauvaise foi.

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14 janvier 2023 6 14 /01 /janvier /2023 23:43
La Centrafrique veut "retisser les liens de confiance" avec Paris, selon son ambassadeur
La Centrafrique veut "retisser les liens de confiance" avec Paris, selon son ambassadeur
La Centrafrique veut "retisser les liens de confiance" avec Paris, selon son ambassadeur

 

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La Centrafrique veut "retisser les liens de confiance" avec Paris, selon son ambassadeur

13 janvier 2023 à 17h06 par AFP

La République centrafricaine veut "retisser les liens de confiance" avec la France, a indiqué vendredi à l'AFP son nouvel ambassadeur à Paris Flavien Mbata, alors que les relations diplomatiques se sont dégradées ces dernières années entre les deux pays.

Le poste était vacant depuis près d'un an. Le diplomate a pris ses fonctions vendredi. Paris dénonce des campagnes de désinformation, qui seraient alimentées depuis Moscou, et nourrissant dans le pays le sentiment antifrançais. La France déplore en particulier l'emprise croissante du groupe russe Wagner, accusé par l'ONU de graves violations des droits de l'Homme en RCA.

 "Au cours d'une cérémonie, j'ai remis ma lettre de créances au président français Emmanuel Macron qui l'a acceptée", a déclaré M. Mbata. "La quintessence du message, c'est la volonté du président centrafricain (Faustin-Archange) Touadéra de retisser les liens de confiance entre la France et la République centrafricaine dans le cadre de notre coopération bilatérale", a-t-il ajouté.

Il a précisé qu'il s'agissait de rendre cette relation "plus dynamique" et de "la diversifier" en l'étendant au-delà du secteur économique, au secteur culturel ou sportif par exemple. Magistrat, ancien directeur de cabinet du président de la Cour constitutionnelle et ancien ministre de la Justice, Flavien Mbata a assuré que tous les sujets seraient "sur la table", qu'il n'y aurait "pas de sujets tabous". Mi-décembre, les 47 derniers militaires français déployés en Centrafrique étaient partis.

Ce retrait avait été décidé par Paris à l'été 2021 précisément face au rôle grandissant du groupe paramilitaire russe Wagner dans ce pays en guerre civile depuis 2013. Ancienne puissance coloniale, la France avait déployé en 2013 plus d'un millier de soldats en Centrafrique dans le cadre de l'opération Sangaris, avec le feu vert de l'ONU, pour y faire cesser les violences intercommunautaires. Sangaris, qui a compté jusqu'à 1.600 hommes, a duré jusqu'en 2016.

A la faveur du vide créé par le départ du plus gros des troupes françaises, Moscou a dépêché dans le pays des "instructeurs militaires" en 2018, puis des centaines de paramilitaires en 2020 à la demande de Bangui, confrontée à une rébellion menaçante.

 

 

La Centrafrique, sous l'emprise de Moscou, veut replonger dans les bras de la France

2023/1/13 18:31 GMT

La République centrafricaine veut «retisser les liens de confiance» avec la France, a indiqué à l'AFP son nouvel ambassadeur à Paris Flavien Mbata, alors que les relations diplomatiques se sont dégradées ces dernières années entre les deux pays.

 Le poste était vacant depuis près d'un an. Le diplomate a pris ses fonctions vendredi.

Paris dénonce des campagnes de désinformation, qui seraient alimentées depuis Moscou, et nourrissant dans le pays le sentiment antifrançais. 

La France déplore en particulier l'emprise croissante du groupe russe Wagner, accusé par l'ONU de graves violations des droits de l'Homme en RCA. «Au cours d'une cérémonie, j'ai remis ma lettre de créances au président français Emmanuel Macron qui l'a acceptée», a déclaré Flavien Mbata.

Retisser les liens

«La quintessence du message, c'est la volonté du président centrafricain (Faustin-Archange) Touadéra de retisser les liens de confiance entre la France et la République centrafricaine dans le cadre de notre coopération bilatérale», a-t-il ajouté.

Il a précisé qu'il s'agissait de rendre cette relation «plus dynamique» et de «la diversifier» en l'étendant au-delà du secteur économique, au secteur culturel ou sportif par exemple.

Magistrat, ancien directeur de cabinet du président de la Cour constitutionnelle et ancien ministre de la Justice, Flavien Mbata a assuré que tous les sujets seraient «sur la table», qu'il n'y aurait «pas de sujets tabous».

Mi-décembre, les 47 derniers militaires français déployés en Centrafrique étaient partis.

Ce retrait avait été décidé par Paris à l'été 2021 précisément face au rôle grandissant du groupe paramilitaire russe Wagner dans ce pays en guerre civile depuis 2013.

 

 

La Centrafrique veut «retisser les liens de confiance» avec Paris, selon son ambassadeur

Par Le Figaro avec AFP

Publié , mis à jour 

La République centrafricaine veut «retisser les liens de confiance» avec la France, a indiqué vendredi à l'AFP son nouvel ambassadeur à Paris Flavien Mbata, alors que les relations diplomatiques se sont dégradées ces dernières années entre les deux pays. Le poste était vacant depuis près d'un an. Le diplomate a pris ses fonctions vendredi.

Paris dénonce des campagnes de désinformation, qui seraient alimentées depuis Moscou, et nourrissant dans le pays le sentiment antifrançais. La France déplore en particulier l'emprise croissante du groupe russe Wagner, accusé par l'ONU de graves violations des droits de l'Homme en RCA. «Au cours d'une cérémonie, j'ai remis ma lettre de créances au président français Emmanuel Macron qui l'a acceptée», a déclaré Flavien Mbata.

Retisser les liens

«La quintessence du message, c'est la volonté du président centrafricain (Faustin-Archange) Touadéra de retisser les liens de confiance entre la France et la République centrafricaine dans le cadre de notre coopération bilatérale», a-t-il ajouté.

Il a précisé qu'il s'agissait de rendre cette relation «plus dynamique» et de «la diversifier» en l'étendant au-delà du secteur économique, au secteur culturel ou sportif par exemple.

Magistrat, ancien directeur de cabinet du président de la Cour constitutionnelle et ancien ministre de la Justice, Flavien Mbata a assuré que tous les sujets seraient «sur la table», qu'il n'y aurait «pas de sujets tabous».

Mi-décembre, les 47 derniers militaires français déployés en Centrafrique étaient partis. Ce retrait avait été décidé par Paris à l'été 2021 précisément face au rôle grandissant du groupe paramilitaire russe Wagner dans ce pays en guerre civile depuis 2013.

Ancienne puissance coloniale, la France avait déployé en 2013 plus d'un millier de soldats en Centrafrique dans le cadre de l'opération Sangaris, avec le feu vert de l'ONU, pour y faire cesser les violences intercommunautaires. Sangaris, qui a compté jusqu'à 1.600 hommes, a duré jusqu'en 2016.

À la faveur du vide créé par le départ du plus gros des troupes françaises, Moscou a dépêché dans le pays des «instructeurs militaires» en 2018, puis des centaines de paramilitaires en 2020 à la demande de Bangui, confrontée à une rébellion menaçante.

 

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14 janvier 2023 6 14 /01 /janvier /2023 23:38
Moscou crée une "Organisation africaine pour la russophonie

 

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"Un gros instrument de lobbying" : Moscou crée une "Organisation africaine pour la russophonie" pour développer son influence sur le continent

https://www.francetvinfo.fr/ Publié le 14/01/2023 11:50 Jean-Sébastien Soldaïni - franceinfo Radio France Franceinfo

En même temps que la guerre en Ukraine, les Russes poursuivent leurs actions d'influence en Afrique. Depuis quelques semaines est apparue une nouvelle institution, l'Organisation africaine pour la russophonie, où il n’est pas seulement question de promouvoir la langue de Tolstoï.

L'Organisation africaine pour la russophonie a été discrètement créée il y a quelques semaines à Bangui, la capitale de la Centrafrique. Le site internet Russophonie Afrique la présente comme une simple association pour aider à étudier en Russie, obtenir des visas ou faire des affaires. Mais Frédéric Lejal, spécialiste de l'Afrique et ancien rédacteur en chef de La Lettre du Continent, considère que Moscou franchit là un nouveau seuil d'influence.

Et la langue n'est qu'un prétexte. "Ça va être un réseau d’hommes d’affaires, d’hommes politiques qui vont se rencontrer, qui vont échanger et ça va créer une sorte de toile pour que Moscou puisse étendre son influence dans le financement privé ou dans le financement public, prédit-il. Je vois ça comme un gros instrument de lobbying pour faire du business, pour approcher différents chefs d’État."

"Pour moi, c’est un centre névralgique de l’influence et du réseau de la Russie en Afrique."

Frédéric Lejal, ancien rédacteur en chef de "La Lettre du Continent" 

L'idée est aussi bien sûr de grignoter l'influence française dans la région. En juillet dernier, Emmanuel Macron avait fait une tournée africaine, simultanément à celle effectuée par le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. Entre la Russie et la France, il y a d'abord l'affrontement sur le terrain sécuritaire. Alors que la France retire peu à peu ses soldats du Mali, la Russie gagne, elle, du terrain. Elle a des coopérations militaires avec une vingtaine de pays sur le continent. Et avec le conflit en Ukraine, cette guerre d'influence se joue aussi sur le terrain commercial et alimentaire.

"À bas la France", "Vive Poutine et la Russie" : ces slogans qui se multiplient dans les pays du Sahel

Les Russes ont donc placé à la tête de l'organisation, Émile Parfait Simb. Qualifié de fleuron du "soft power russe" par le magazine Jeune Afrique, Émile Parfait Simb est un entrepreneur controversé, dont la société opère dans les cryptomonnaies ou dans l'aviation, et également conseiller du président de l’Assemblée nationale en Centrafrique. Il est suspecté d'escroquerie aux États-Unis, au Canada et au Cameroun. C’est un  proche du groupe Wagner et de toutes les personnalités africaines qui manifestent la moindre sympathie pour Moscou.

Sur le plan économique, la Russie pèse toujours deux fois moins que la France en Afrique. Un deuxième sommet Russie/Afrique doit se tenir cette année.

 

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