18 octobre 2017 (AFP)
Le conflit en Centrafrique est « une crise dramatique mais une crise oubliée », a affirmé mercredi dans un entretien à l’AFP et à RFI le patron de l’ONU, Antonio Guterres, en visite dans ce pays du 24 au 27 octobre.
« La Centrafrique est très loin des attentions de la communauté internationale. Le niveau de souffrances du peuple mais aussi les drames subis par les humanitaires et les forces de maintien de la paix méritent une solidarité et une attention accrues », estime le secrétaire général de l’Organisation.
Le début mardi de sa visite coïncidera avec La Journée des Nations unies, proclamée en 1947 et qui marque l’entrée en vigueur de la Charte des Nations unies. « C’est un peu un geste de solidarité, pour être ce jour-là avec les forces de maintien de la paix dans un des environnements les plus dangereux ».
La Centrafrique connaît depuis plusieurs mois une recrudescence d’affrontements entre groupes armés qui se disputent des ressources naturelles et des zones d’influence, en prétendant assurer la défense de populations et communautés locales. Les violences impliquent des milices anti-Balaka à majorité chrétienne et des groupes issus de l’ex-Séléka à dominante musulmane.
« Depuis le début de l’année, nous avons eu 12 travailleurs humanitaires et 12 soldats de la paix tués en Centrafrique. Ca démontre à quel point la situation s’est dégradée », note le chef de l’ONU qui, outre la capitale Bangui, compte aller à Bangassou (sud).
Interrogé sur de récents propos contradictoires à l’ONU sur l’existence ou non de « signes avant-coureurs de génocide » en Centrafrique, Antonio Guterres indique que « des opérations de nettoyage ethnique » se poursuivent « dans plusieurs endroits du pays ».
« Je fais appel aux leaders religieux, communautaires pour faire comprendre aux gens que la Centrafrique où chrétiens et musulmans ont toujours vécu ensemble doit rétablir les conditions d’un respect mutuel de compréhension, de dialogue pour que ces communautés puissent une fois de plus trouver un futur commun ». « Les religieux ont un rôle absolument irremplaçable pour rapprocher des communautés qui ont toujours vécu ensemble mais qui maintenant sont très divisées ».
– ‘Groupes armés’ –
Face au « problème sérieux de réconciliation », poursuit-il, il est nécessaire « que la communauté internationale s’engage en appuyant l’Union africaine » et en soutenant les « efforts du président (Faustin-Archange) Touadéra ».
« Il faut tout faire pour que les groupes armés puissent rendre leurs armes et que tout le monde puisse s’engager sérieusement dans la réconciliation et la paix », insiste-t-il, en regrettant « un manque de fonds préoccupant » apportés par la communauté internationale pour aider le pays. « Nous n’avons qu’à peu près 30% des fonds qui seraient nécessaires pour répondre avec le minimum d’efficacité aux besoins tragiques du peuple centrafricain ».
Selon lui, la recrudescence des violences n’est pas à mettre sur le compte du chef de l’Etat. « Je ne crois pas que ce soit le président Touadéra qui ait permis le renforcement des groupes armés. A un moment donné, il fallait une politique plus ouverte, un engagement élargi dans les contacts politiques et dans la création d’une mouvance capable de réunir des représentants des différentes forces politiques avec une vision commune », estime-t-il toutefois.
En 2017, la « dégradation de la situation sécuritaire » vient plutôt des « groupes armés qui ont eu, c’est évident aujourd’hui, des appuis venus de l’extérieur », précise Antonio Guterres, sans les identifier. « Il y a eu des discours où la haine est apparue dans les déclarations de beaucoup de leaders communautaires dans différentes régions du pays ». « On ne peut pas dire que nous sommes face à une désillusion mais il faut reconnaître qu’il y a un travail énormément important à faire et notamment qu’il faut améliorer la situation sécuritaire ».
Dans cet objectif, le secrétaire général a réclamé au Conseil de sécurité d’ajouter 900 militaires aux quelque 10.0000 Casques bleus de la mission de paix Minusca, à l’occasion du renouvellement de son mandat en novembre.
Sur les abus sexuels qui décrédibilisent la Minusca, il indique vouloir rencontrer des victimes et leurs familles. Jane Connors, nommée avocate des droits des victimes de l’ONU, sera du déplacement, a-t-il précisé, en rappelant que des unités de Casques bleus ont été renvoyées pour des abus sexuels commis en Centrafrique.
Le SG de l’ONU pour un renfort de 900 casques bleus en RCA
18/10/17 (APA)
APA-Bangui (Centrafrique) - Le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, attendu le 24 octobre prochain en Centrafrique pour une visite de quatre jours, a recommandé au Conseil de sécurité d’envoyer en RCA un renfort de neuf cents casques bleus, a annoncé, mercredi à Bangui, la MINUSCA.
Selon la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine qui donnait sa conférence de presse hebdomadaire, ce renfort est destiné à arrêter les violences qui sévissent dans le pays et que les éléments onusiens sur place n’arrivent pas à endiguer.
Lors de la 72ème assemblée générale des Nations Unies, le Président Touadéra avait demandé le renforcement de la mission onusienne en RCA pour aider à la protection des civils violentés par les groupes armés.
Le mandat de la MINUSCA qui arrive à terme le 15 novembre prochain sera également renouvelé, a promis le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, cité toujours par la MINUSCA.
Pour le moment, le nombre des casques bleus déployés par les Nations Unies en RCA sont estimés à 12 mille hommes. Ils sont composés de policiers et de militaires repartis dans les principales villes de Centrafrique.
RCA: un rapport de l'ONU pointe les exactions commises par deux groupes armés
Par RFI Publié le 18-10-2017 Modifié le 18-10-2017 à 01:56
La Minusca a publié mardi 17 octobre un rapport sur des exactions commises contre des civils il y a bientôt un an après des représailles entre deux factions anciennement rivales de la Seleka, dans deux régions du pays. En tout, au moins 133 civils auraient été tués, souvent sur des bases ethniques. Un rapport qui intervient une semaine avant la venue d'Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU, en Centrafrique.
« Ces actes peuvent être considérés comme des crimes de guerre », estime Musa Gassama, le responsable de la division des droits de l'homme de la Minusca.
Dans ce rapport sont répertoriés pas moins de 133 homicides dus à des combats entre l'UPC d'Ali Darass et le FPRC de Nourredine Adam, de novembre 2016 à février 2017. Ce même rapport suppose qu'au moins 293 autres personnes ont été victimes de cette lutte intestine. Depuis, les deux frères ennemis de la Seleka se sont réconciliés la semaine dernière en signant un accord de cessez-le-feu.
Dans ce rapport, la Minusca fait état d'attaques ciblées contre des civils en fonction de leur appartenance ethnique. C'est le cas notamment de la communauté peule, assimilée à l'UPC, qui a été la première victime lors de la bataille de Bria, et dont une quinzaine de membres, femmes et enfants y compris, ont été tués.
En réaction, et parce que le FPRC s'était allié aux anti-balaka, l'UPC serait à l'origine de la mort d'au moins 88 civils à Bakala, au nord de Bambari.
Dans les conclusions de ce document, qui est publié une semaine avant l'arrivée du secrétaire général des Nations unies en RCA, les rapporteurs pressent le gouvernement centrafricain d'être plus actif dans la lutte contre les massacres de civils alors que ce même Etat est totalement absent dans cette partie de la Centrafrique.