APA - Ouagadougou 2009-07-19 16:45:20 (Burkina Faso) - Cadres moyens et cadres supérieurs, des centaines de Centrafricains se sont retrouvés au Burkina, attirés non pas par une politique d’immigration choisie, mais par celle de l’immigration réussie qui leur a permis de travailler dans leur pays d’accueil.
« Je ne suis pas ailleurs, je suis dans mon pays », c’est ainsi que répond Francial Libéngué, nouveau titulaire d’un DEA en mathématique, lorsque APA lui a demandé comment il se sentait au Burkina Faso, depuis son arrivée en novembre 2007.
Il prépare un retour imminent dans son pays, afin de revoir ses parents, pour un bout de temps seulement.
Avec un autre compatriote, lui aussi titulaire du DEA, ils ont décroché un contrat au projet de Modélisation des pollutions des aquifères de Sourou, situé dans
le nord-ouest du Burkina.
La communauté centrafricaine au Burkina, estimée à quelques 300 personnes, est essentiellement constituée d’étudiants ou de cadres supérieurs formés dans les universités burkinabè.
On retrouve les étudiants aussi bien dans les universités publiques que privées, ainsi que dans les grandes écoles internationales.
Yankoïssé Sylvain, étudiant en Master II à l’Institut africain de professionnalisation en management (IAPM),
souhaite rester au Burkina, « s’il y a la possibilité de m’intégrer », dit-il.
Les Centrafricains s’adaptent assez bien au marché local de l’emploi, pourtant peu développé. Le président de cette communauté, Ange Mercier Ouakam,
assure le contrôle et la qualité interne et gère les appels d’offres au compte de l’Acae service international-Burkina Faso (ASI-BF), une entreprise d’hydraulique et de génie
civil.
Avant, il a travaillé au projet Ziga, le plus grand projet de barrage et d’adduction d’eau potable pour Ouagadougou. Diplômé de l’Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement (ex-EIER/ETSHER), il a été retenu dans ce projet avant même de terminer son stage d’un an au PC-BAT Burkina, un cabinet d’architecture.
Les multiples crises politiques à la tête de l’Etat centrafricain n’ont pas encouragé le retour des étudiants. Ils sont restés dans un pays qui ressemble fort au leur.
La République centrafricaine et le Burkina Faso sont tous les deux d’anciennes colonies françaises, indépendantes en 1960. Ils se ressemblent de par leurs cartes géographiques respectives. En outre, ils ont vécu de nombreux coups d’Etat.
Mais le Burkina n’a jamais connu de
guerre civile. Par contre, de nombreux troubles internes ont justifié la présence de la Mission des Nations unies (MINURCA) dans le pays.
« Avec la crise, quand nous sortons (des écoles), généralement, nous trouvons des stages ici et, après le stage,
nous trouvons du boulot », explique M. Ouakam, indiquant qu’ils sont « nombreux dans ce domaine par le
simple fait qu’il y a eu un moment où la Centrafrique envoyait des étudiants pour étudier à l’EIER, qui est une grande école d’ingénierie en eau potable et en génie civil
».
Il compte plus de dix Centrafricains
qui travaillent dans l’hydraulique et le génie civil. Il dénombre autant dans l’enseignement et bien d’autres dans la gestion et dans la comptabilité.
Quelque fois, on peut les retrouver dans le domaine de la technologie et de la culture, comme l’exemple de Bed Nganoféï, qui exerce comme monteur et
réalisateur.
Tous louent l’hospitalité de leur
pays d’accueil. « Cela fait 13 ans que je suis ici. Même pas une seule fois, on ne m’a demandé ma pièce
d’identité », se réjouit Ange Mercier Ouakam.
Le président de la communauté centrafricaine s’est tant intégré qu’il a obtenu aisément la double nationalité, après son mariage avec une Burkinabè qui lui a déjà donné une fille.
« Je ne me suis jamais confronté à un problème du fait que je suis étranger. Et aucun de mes compatriote ne m’a
fait cas de cela », note, pour sa part, l’étudiant Sylvain Yankoïssé.
Quand à Francial Libéngué, il a salué l’intégrité des Burkinabè. Un policier qui lui avait extorqué 10 mille FCFA à la frontière à son arrivée, le 30
novembre 2007, les lui ont remis en se « rappelant » qu’il y a un traité selon lequel, les Centrafricains n’ont pas besoin de visa d’entrée au Burkina et vice-versa.
A l’instar des autres étudiants
étrangers, Les Centrafricains doivent payer 16 fois plus que les burkinabè, dans les universités publiques, soit 250 mille FCFA contre 15 mille FCFA pour les nationaux.
Sur environ 200 étudiants recensés cette année, 49 seulement sont boursiers. Les autres dépendent de leurs parents, qui, quelque fois, sont à court d’argent. « Nos problèmes sont d’ordre académique », estime le président de cette communauté.
Pour y faire face, ils se sont réunis en association, reconnue par le ministère burkinabè des Affaires étrangères. Ce qui leur permet de s’entraider à la limite de leurs moyens. Ils se réunissent ainsi en session ordinaire une fois par trimestre et beaucoup plus fréquemment pour les membres du bureau de l’association.
Les Universités du Burkina
travaillent à harmonisation les frais d’inscription des nationaux et des autres. Mais cela ne concernera que les huit pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine (Côte d’Ivoire,
Bénin, Niger, Sénégal, Burkina Faso, Togo, Mali et Guinée Bissau).
En dépit de ces difficultés, les jeunes Centrafricains, qui réussissent à terminer leurs études, sont satisfaits des fruits récoltés. M. Ouakam et sa
famille sont logés par le service.
Son souhait « le plus cher » est la levée des barrières dans le monde. « Que tu sois Indien Centrafricain,
Ivoirien…une fois que tu vis au Burkina ou dans la sous région, on doit te considérer comme si tu étais chez toi. C’est un peu comme cela que moi je comprends la libre circulation des biens et
des personnes ».
En entendant, quelques jeunes Centrafricains se
sont offert un stand à l’Exposition des produits des communautés vivant au Burkina. Ils y ont présenté des statuettes et des tableaux en ébène, venant du pays, aux côtés de 16 autres communautés,
y compris celle des burkinabè.
Pour la 9ème fois, le Burkina a organisé des journées pour célébrer et promouvoir la cohabitation pacifique entre les différentes communautés qu'il abrite. Cette édition, démarrée vendredi et
devant prendre fin ce dimanche, se tient sous le thème « Paix et Intégration».