PARIS - Un retour en Guinée du président autoproclamé Moussa Dadis Camara pourrait provoquer une guerre civile, a estimé mardi à l'Assemblée nationale le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner.
"Je souhaite que M. Dadis Camara reste dans son lit au Maroc et non qu'il revienne" en Guinée "car il serait capable - rien que son retour - de déclencher une guerre civile et on n'en a pas besoin", a
déclaré le ministre français qui répondait à une question d'un député socialiste sur la politique de la France à l'égard de ce pays.
Après la publication du rapport d'une commission d'enquête de l'ONU sur les
massacres du 28 septembre à Conakry, "nous devons maintenant attendre que le Conseil de sécurité soit saisi,
peut-être mardi et il y aura des sanctions", a aussi dit Bernard Kouchner.
Le rapport de l'ONU "est effrayant". "Plus encore que ce qu'on croyait", a-t-il
ajouté. "La passivité de la France ne peut être mise en cause. Nous avons été à l'origine de ce rapport, nous
avons demandé au secrétaire général de l'ONU" d'ouvrir une enquête, a précisé le ministre.
Le document de l'ONU est accablant pour les plus hautes autorités guinéennes,
accusées de crimes contre l'humanité justifiant la saisine de la Cour pénale internationale (CPI). Le rapport onusien fait état d'au moins "156 personnes tuées ou disparues", mentionne de nombreuses atrocités et met directement en cause le chef de la junte militaire (CNDD), le capitaine
Dadis Camara.
Le président autoproclamé de Guinée a été blessé par balles à la tête le 3
décembre par son aide de camp, Aboubacar Sidiki Diakité, alias Toumba, et est soigné depuis au Maroc.
(©AFP / 22 décembre 2009 16h11)
Dadis Camara ne doit pas rentrer en Guinée, dit
Bernard Kouchner
Par Reuters, publié le 22/12/2009 à 18:31
PARIS - Le
président guinéen Moussa Dadis Camara, actuellement hospitalisé au Maroc, ne doit pas rentrer en Guinée, où son retour risque de provoquer une
"guerre civile", déclare Bernard Kouchner.
Le ministre français des Affaires étrangères s'exprimait à l'Assemblée nationale
au lendemain de la divulgation d'un rapport d'une commission de l'Onu qui qualifie de crime contre l'humanité le massacre de plus de 150 opposants par les forces de sécurité guinéennes fin
septembre dans un stade de Conakry.
Moussa Dadis Camara, qui nie toute implication dans le massacre, a été agressé le 3 décembre par un de ses
lieutenants qui a dit craindre d'être tenu pour responsable de ce bain de sang. Le président guinéen est depuis hospitalisé à Rabat et son état de santé demeure un secret d'Etat en
Guinée.
"Je souhaite que monsieur Dadis
Camara reste dans son lit au Maroc et non qu'il revienne car il serait capable, rien que son retour, de déclencher une guerre civile, et on n'en a pas besoin", a dit Bernard Kouchner lors de la séance de questions d'actualité à
l'Assemblée.
Lors d'une conférence de presse au ministère des Affaires étrangères en fin de
matinée, Bernard Kouchner avait déclaré que le président guinéen allait "pour le mieux du monde" mais n'avait "pas encore fini son traitement".
Le rapport des Nations unies, dont Reuters a pu consulter une copie lundi, a été
remis samedi dernier au Conseil de sécurité par une commission d'enquête de l'Onu.
Il pointe du doigt le président guinéen. "La commission considère qu'il existe des raisons suffisantes de présumer une responsabilité pénale directe du président Moussa Dadis Camara", lit-on
dans un extrait du rapport qui évoque "une forte suspicion de crime contre l'humanité".
"FORCE D'OBSERVATION"
Les trois rapporteurs décrivent non pas une journée d'affrontements politiques
qui aurait mal tourné, mais une série de tueries "systématiques", de viols et d'actes de torture "organisés" contre une partie de la
population.
"Ce rapport est accablant, les
détails de ce massacre dans le stade de Conakry sont très pénibles à lire", a déclaré Bernard
Kouchner lors de sa conférence de presse.
Après la publication de ce rapport, "les conséquences doivent être tirées au niveau bien sûr de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest-NDLR) et de l'Union
africaine", a-t-il fait valoir.
Le rapport mentionne la création d'une force d'observation, a précisé Bernard Kouchner, "qui permettrait, après une période transitoire, de conduire à des élections
générales".
"C'est le schéma que nous avons
tous souhaité voir adopté", a-t-il souligné. "Ce qu'on doit espérer, c'est que la population guinéenne, et en particulier les femmes, cessent d'être soumises à une oppression
quotidienne, que les armes rentrent dans les casernes d'où elles n'auraient jamais dû sortir".
Les responsables de l'enquête des Nations unies réclament la saisine de la Cour
pénale internationale.
Ils nomment plusieurs personnes de l'entourage direct de Moussa Dadis Camara comme présumées responsables, avec lui, de ces crimes commis pour intimider tous ceux qui contestaient l'intention du chef de la junte
militaire au pouvoir depuis 2008 de se présenter à l'élection présidentielle de 2010.
L'ONG américaine Human Rights Watch, qui a publié la semaine dernière les
résultats d'une enquête menée en octobre, assure que Moussa Dadis Camara est impliqué dans l'organisation de la tuerie du 28
septembre.
Des militaires avaient ouvert le feu sur la foule rassemblée dans le grand stade
de la capitale pour protester contre le régime au pouvoir, faisant 157 morts et un millier de blessés selon une association locale de défense des droits de l'homme.