Centrafrique: les victimes des forces de Bemba vont recevoir l’aide du fonds de la CPI
RFI 4 mars 2020
Avec notre correspondante à Bangui, Charlotte Cosset
Près de 20 ans après les faits, l’aide effective du fonds au profit des victimes des forces de Jean-Pierre Bemba va débuter au printemps, avec un budget d’environ 1,2 million de dollars pour cette première année. Entretien avec Bertin Bishikwabo, chargé de programme du fonds de la CPI à Bangui.
En 2002-2003, les hommes de Jean-Pierre Bemba sévissent sur le territoire centrafricain. Ils pillent, tuent, et violent de nombreuses femmes. Poursuivi devant la CPI, Jean-Pierre Bemba a été acquitté en juin 2018. Malgré l’acquittement, des milliers de victimes des forces de Bemba sont présentes sur le territoire centrafricain, beaucoup ont besoin d’une assistance.
Le fonds au profit des victimes de la CPI devrait appuyer près de 3 000 personnes cette année. Mais depuis un an, la CPI aide déjà des victimes dans le plus grand besoin. Bertin Bishikwabo, chargé de programme du fond au profit des victimes de la CPI à Bangui, revient sur le processus
Bertin Bishikwabo : Le fonds au profit des victimes a fait une évaluation en 2011, ici en République centrafricaine. Fin 2012, alors que les contrats étaient prêts à être signés par le greffier, les hostilités ont éclaté en République centrafricaine. Nous étions donc dans l’impossibilité de pouvoir développer les programmes d’assistance dans ce contexte. Nous attendions que la situation s’améliore pour que nous puissions venir développer les programmes d’assistance.
En même temps, nous attendions que le procès de Jean-Pierre Bemba aboutisse pour que l’on puisse combiner les deux : la réparation et l’assistance. Mais malheureusement, Bemba a été acquitté. Et à l’acquittement de Bemba, le fonds a décidé d’accélérer la mise en place des programmes d’assistance ici, en République centrafricaine.
RFI : Presque 20 ans ont passé, ce n’est pas trop tard ?
Ce n’est pas trop tard parce qu’on va développer les activités qui vont adresser les conséquences du préjudice. C’était il y a 20 ans, mais les préjudices sont là, les conséquences sont là. Il y a beaucoup de victimes qui vivent des traumatismes, il y a des victimes qui ont des préjudices physiques. Il y en a qui se sont fait violer et qui ont maintenant des maladies sexuellement transmissibles. Ce sont donc des victimes qui sont dans une situation critique, et on va devoir les appuyer pour qu’elles puissent retrouver leur dignité.
Quel type d’aide apporte le fonds à ces victimes ?
Le fonds au profit des victimes intervient dans trois domaines dans le cadre de l’assistance. D’abord, la réhabilitation psychologique. Ensuite, la réhabilitation physique pour les victimes qui ont eu des préjudices physiques, ainsi qu’un soutien socio-économique, tout ce qui est développement d’activités économiques, et moyens de subsistance.
Vous vous êtes tournés vers les victimes de Bemba. Mais depuis, il y a eu d’autres conflits, il y a eu de nouvelles victimes. Le fonds va-t-il s’occuper de ces victimes-là ?
Oui, le fonds va s’occuper de toutes les victimes de la compétence de la Cour pénale internationale. Mais pour nous, sur le plan opérationnel, on a décidé de commencer d’abord par les victimes qui sont connues. Après, on pourra étendre aux victimes qui ne sont pas encore identifiées. Donc, pendant que les programmes seront en train d’être mis en œuvre, on devra identifier et inclure au fur et à mesure d’autres victimes, que l’on devra intégrer dans le programme.