par Juliette Abandokwé 27 juin 21:53
Monsieur Bambou se trouve toujours à la prison de
Ngaragba.
Il souffre d'une crise de paludisme, mais a réussi à se procurer les
médicaments nécessaires.
Il se trouve toujours en attente de son procès, en compagnie de Cyrus Sandy, directeur de Média Plus, qui doit normalement avoir lieu ce
mercredi 29 juin dès 9h. au Tribunal de Grande Instance de Bangui.
L'audience avait été renvoyée mercredi passé sur la demande de ses avocats, ayant constaté que le Président du Tribunal,
ainsi que le Procureur et l'Assesseur étaient représentés par des bras du pouvoir.
Donc ce mercredi, ils verront sur place comment sera composé la Présidence
du Tribunal avant de décider d'un éventuel nouveau renvoi de l'audience.
Des représentants des Nations Unies ainsi que de l'Union Européenne seront présents.
Monsieur Bambou avait également introduit auprès du Procureur une requête de liberté provisoire, sous surveillance, pour qu'il puisse effectuer quelques courses pour la famille ainsi que le
règlement de la scolarité de ses enfants. Jusqu'à ce jour, la demande n'a pas encore reçu de réponse.
Appuyé par ses trois avocats, Faustin Bambou demande à être purement et simplement relaxé, n'ayant commis aucun délit. En effet, il n'a fait que diffuser une information, vérifiable et
vérifiée, concernant le détournement de fonds par le fils Bozizé, également Ministre de la Défense, accordés par l'Union Européenne,
destinés à payer les retraites des fonctionnaires.
Il est également à rappeler que le délit de presse est dépénalisé par le Général François Bozizé depuis 2005.
RCA : les dessous politico-financiers du procès des deux journalistes
indépendants détenus à Ngaragba
Les choses commencent à se préciser concernant l’affaire des deux journalistes indépendants centrafricains arrêtés
contre toute forme de procédure et détenus dans l’inhumaine maison carcérale de Ngaragba de triste mémoire, cette prison où François Bozizé
et son maître de l’époque, l’Empereur Jean Bedel Bokassa, avaient plaisir à y faire séjourner, pour des raisons d’Etat, des soi-disant
ennemis de la nation, et les torturer jusqu’à ce que mort s’en suive, écoliers, élèves et étudiants, de janvier à septembre 1979, appelés depuis lors « les martyrs de Bokassa ».
De sources bien informées, le soi-disant colonel Jean Francis
Bozizé a décidé que dorénavant il « fera du mal » à tout journaliste qui écrirait ou
parlerait de l’affaire des milliards de Fcfa versés par l’Union Européenne pour assurer le départ à la retraite dans le calme de plus de 800 militaires et gendarmes ayant atteint l’âge
limite.
La raison en est simplement que ce ministricule chargé de la défense nationale a sans doute utilisé une bonne partie de
l’argent de l’Union Européenne pour financer les activités et opérations liées à l’élection frauduleuse de son papa de chef d’Etat et sa propre élection dans la circonscription de Kabo dont les
résultats ont été fort heureusement annulés par le Cour constitutionnelle ainsi que pour les achats d’armes de guerre pour lesquels il s’était absenté du pays pendant près de six semaines,
courant avril-mai dernier.
Pourquoi seulement Faustin Bambou et Cyrus Sandy doivent croupir en
prison alors que plus de 30 journaux et stations de radios privées de la place ont diffusé des reportages sur les manifestations des gendarmes et
militaires retraités qui ne réclamaient que leurs droits ?
Il ne s’agit que d’un règlement de compte politico-ethnique et d’une stratégie de bâillonnement de la presse privée
indépendante. Faustin Bambou, directeur de publication du bihebdomadaire Les collines de l’Oubangui, aurait le tort d’appartenir à l’ethnie yakoma et proche du parti RDC d’André
Kolingba. « Il est donc un opposant », affirme un proche du dossier au cabinet du
ministre de la défense. Quand à Cyrus Emmanuel Sandy, directeur de publication du quotidien Médias+, il aurait le péché naturel d’avoir été
ministre sous le régime Patassé et proche du MLPC, et « donc un opposant lui aussi ».
Quand bien même les deux journalistes n’ont aucune responsabilité officielle dans les partis politiques incriminés et
qu’ils font partie des rares journalistes du privé à faire preuve de courage et de professionnalisme dans leur métier et n’ont publié que de simples reportages classiques sur les manifestations
des retraités maltraités, le pouvoir illégitime et immoral de Bozizé aura toujours des prétextes à avancer pour leur créer des
problèmes.
Ledit pouvoir a d’ailleurs réussi à diviser la presse privée en récupérant les bras cassés du Groupement des éditeurs de
la presse privée indépendante de Centrafrique (GEPPIC) à coups d’argent pour créer un groupe parallèle piloté par des individus plus ou moins inféodés au pouvoir et adeptes d’alcool et d’argent
sale, donc faciles à manipuler pour ne pas faire du vrai journalisme.
Ce même pouvoir a réussi à dissoudre le bureau légitime du GEPPIC et à mettre en place un comité ad hoc transitoire
présidé par un militant du KNK qui n’était qu’un garçon de course et distributeur du journal croupion du pouvoir intitulé La Plume, un journal partisan et entièrement pris en charge par la
présidence de la République. Il fallait donc jeter en prison les bons et vrais journalistes indépendants. Mais le pouvoir ne s’arrête pas là.
Ayant perdu totalement la tête et les pédales depuis que les militaires et gendarmes retraités ont porté sur la voie
publique cette sale histoire, Bozizé père et fils se sont tournés vers la justice comme d’habitude pour étouffer l’affaire. C’est ainsi que
pour l’arrestation des journalistes indépendants Bambou et Sandy, la coquette somme
de 50 millions de F CFA (soit environ 76 180 euros) aurait été engagée par le pouvoir et que se seraient partagés certains magistrats, greffiers et autres gendarmes. Les circonstances de
l’arrestation des deux journalistes indépendants démontrent à émerveille l’instrumentation de la justice et le non-respect de la loi par le régime Bozizé :
Faustin Bambou a été littéralement enlevé à son bureau au
ministère des Travaux Publics le vendredi 27 mai 2011 par une équipe de gendarmes conduits par le tristement célèbre lieutenant Serge Kossi,
conduit à la SRI et auditionné sans aucune plainte. C’est après son audition et sur insistance de ses avocats qu’une plainte antidatée au 26 mai 2011 et signée des mains assassines de
Jean Francis Bozizé a été jointe à son dossier. En réalité, il a été arrêté sans plainte et même si plainte il y avait, il n’avait pas été
régulièrement convoqué.
Informé que des forces de défense et de sécurité le cherchaient activement pour l’arrêter, Cyrus-Emmanuel Sandy quant à lui, s’était mis à l’abri jusqu’à ce qu’il entende des éléments de la Garde
présidentielle qui ne le connaissaient pas dire à haute voix dans une pharmacie qu’ils vont prendre l’affaire en main pour l’arrêter, « même sans argent »(sic). « Pourvu que l’opération soit
considérée comme un acte de bravoure et augmente nos galons », ont-ils dit, ignorant que celui qui se trouvait devant eux et venu pour acheter des médicaments était le wanted en
question. Aussi fut-il contraint à la clandestinité jusqu’à ce qu’il reçoive l’ordonnance qui l’assigne en référé sur la même affaire pour laquelle Faustin Bambou a été arrêté. Sandy a comparu devant le juge du référé le vendredi 10 juin 2011,
face à l’avocat du ministre de la défense nationale. L’affaire a été reportée au 20 juin pour connaissance du dossier et échanges de pièces par les avocats des deux parties.
Le 15 juin, lorsque Sandy s’est rendu au tribunal pour remettre à
ses conseils un document essentiel qu’ils lui ont demandé (l’ordonnance n°05.002 du 22 février 2005 relative à la liberté de la communication en République centrafricaine), l’audience de
comparution de Bambou se tenait. Entre temps, Sandy se trouvait dehors à côté du
parking pour attendre ses avocats. Subitement, le 1er Substitut du Procureur, M. Abazene Djoubaye, quitte son siège en pleine audience et
sort, se dirige vers M. Sandy, le doigte et ordonne aux deux militaires affectés pour lui servir d’aides de camp, de conduire Sandy manu militari devant la barre, offrant ainsi le plus joli spectacle de l’année.
Toute la salle a crié au scandale et fustigé ce tristement célèbre bourreau de la liberté lorsque, répondant à la
question du président de la séance, Sandy a déclaré ne jamais avoir été convoqué ni par la fameuse SRI, ni par un service de gendarmerie, ni
par la police sur l’affaire en question. Sandy a été relaxé mais Abazene a réussi l’exploit de faire conduire Sandy à la SRI pour être arrêté le même jour.
Accusé d’incitation de militaires à la révolte dans un premier temps, le mandat de dépôt signé par M. Abazene le vendredi 17 juin mentionne le motif suivant : «
Diffusion de propagande à pousser les citoyens à la révolte contre les institutions » pour justifier l’injustifiable. Du coup, la messe de requiem de la loi sur la dépénalisation
des délits de presse est dite. Ainsi va la démocratie en Centrafrique des Bozizé.
La Rédaction C.A.P