L’affaire Jean Jacques Demafouth est très embarrassante et une vraie épine dans le pied du pouvoir de Bozizé. La visite que lui ont rendue à la SRI certains diplomates de la place et en particulier la représentante du Secrétaire Général de l’ONU et responsable du Binuca (Bureau Intégré des Nations Unies en Centrafrique) Mme Margaret Vogt est, quoiqu’on puisse en penser, une manière de faire comprendre clairement à Bozizé qu’on désapprouve le sort fait au vice-président du Comité de pilotage du DDR.
Contrairement aux élucubrations apparemment rassurantes mais peu réalistes de Firmin Findiro tendant à faire croire que l’arrestation et la détention de Demafouth n’impacterait pas la poursuite du programme DDR, il n’est pas du tout sûr qu’on ne soit pas revenu à la case départ au sujet du désarmement.
C’est Mme Margaret Vogt du BINUCA qui doit avaler son chapeau, elle qui avait cru devoir aller plaider vigoureusement fin décembre dernier encore devant le Conseil de sécurité des Nations Unies à New York la nécessité de trouver d’urgence 3 millions de dollars pour le désarmement et 19 millions de dollars pour la phase de réintégration des ex-rebelles. Elle avait expliqué que le programme DDR n’avait concerné jusqu’ici que seuls 4800 ex-combattants, de l’Armée populaire pour la restauration de la République et la démocratie (APRD) qui ont été effectivement démobilisés. L’arrestation de Demafouth et du député de Birao est intervenue moins d’un mois après ce plaidoyer. Si ce n’est pas un sabotage du DDR, cela y ressemble beaucoup.
Que doit-t-on penser d’un régime pour lequel on se donne beaucoup de peine pour lui rechercher d’urgence des financements pour un programme de désarmement si vital pour la restauration de la paix et qui passe derrière saboter le travail ? Telle est la question qui se pose clairement et logiquement à propos des agissements du pouvoir de Bangui qui visiblement manque totalement de crédibilité aux yeux des observateurs du dossier centrafricain.
La communauté internationale, surtout l’Union Européenne qui, en finançant les élections du 23 janvier 2011 comme elle l’a fait croyait contribuer au renforcement du processus démocratique en Centrafrique s’est sentie flouée car elle a surtout permis à Bozizé de conserver le pouvoir, doit se poser quelques questions sur un tel régime qui visiblement n’a pas la volonté politique que les choses puissent réellement avancer dans le bon sens en Centrafrique.
Bozizé a géré seul et dans la plus grande opacité l’enveloppe de huit milliards de F CFA octroyée par les pays de la CEMAC pour le DDR centrafricain. Il a catégoriquement refusé de confier la gestion de cette manne au PNUD comme on le lui a demandé. Qu’a-t-il réellement fait de cet argent jusqu’à ce que dernièrement il vienne annoncer que l’argent du DDR était épuisé ? Comment peut-on sérieusement faire confiance à un tel individu dont on voit par ailleurs les désastreuses conséquences de la gestion qu’il prétend faire des finances publiques de son pays dont il s’est imposé tout seul comme ordonnateur des dépenses et comptable.
On ne peut que le regarder aller tout seul droit au mur avec toutes les décisions incohérentes et dictatoriales qu’il prend ces derniers temps pour dissoudre les conseils d’administration des entreprises d’Etat et offices publics et la domiciliation des recettes non plus dans les banques commerciales mais à la BEAC etc…
Aux Nations Unies Mme Vogt avait clairement déclaré que « les difficultés de mobilisation des ressources pour achever le processus du DDR pourraient conduire à un retour au conflit dans le pays ». Avec les entraves de toutes sortes que dresse le régime de Bozizé à la recherche des financements, (ndlr : arrestation et détention arbitraires de Demafouth et du député de Birao sans levée préalable de son immunité, interdiction faite à ses avocats de le voir, arrestation de Ferdinand Samba directeur de publication du quotidien « Le DEMOCRATE », et on ne voit pas comment le DDR pourrait se poursuivre.
Rédaction C.A.P