Par AFP, publié le 03/01/2013 à 08:32, mis à jour à 17:50
BANGUI - Le président centrafricain François Bozizé se préparait jeudi à aller aux négociations de paix à
Libreville mais celles-ci pourraient être compliquées par le caractère extrêmement hétéroclite de la rébellion, qui a suspendu sa progression vers Bangui.
Le Séléka a stoppé l'offensive qu'il avait lancée le 10 décembre dans l'attente des négociations, le gros de ses troupes
étant toujours positionné à Sibut, à 160 km de Bangui.
Le régime a commencé à fourbir ses arguments pour les pourparlers qui devraient s'ouvrir mardi prochain. Le ministre de
l'Administration territoriale Josué Binoua a ainsi accusé la rébellion d'être majoritairement composée d'étrangers des guerres du Tchad, du Soudan et de Libye, et de prêcher un
islam rigoriste.
"La grande partie de la troupe (de la rébellion) est constituée très largement des Toro Boro, les rebelles
soudanais du Darfour (...). Il y a les résidus des forces du (rebelle tchadien) Mahamat Nouri qui a été expulsé de Khartoum. Plus d'autres combattants de morphologie libyenne", a
déclaré M. Binoua.
Selon lui, "M. (Moussa Mohammed) Dhaffane et Nourredine (Younous Adim Birema), qui sont les deux principaux
responsables de cette rébellion, ont étudié en Arabie Saoudite, au Qatar. Ils prônent le wahhabisme à qui veut l'entendre. Ils le prêchent".
Le wahhabisme est une doctrine rigoriste sunnite de l'islam d'origine saoudienne, voisine du salafisme.
Le ministre s'est aussi interrogé sur les sources de financement des rebelles: "La rébellion Séléka met en
exergue son arsenal militaire, lequel a un coût. Qui leur a donné l'argent' Qui finance'"
Enfin, selon lui, les rebelles n'occupent pas "80% du territoire comme ils le disent" mais
seulement "six des seize préfectures du pays, soit 37% du territoire", habité par 19% de la population.
"Ce n'est pas suffisant pour demander le départ du président Bozizé", a affirmé M.
Binoua.
Les rebelles, qui ont pris les armes pour réclamer le respect de plusieurs accords de paix signés entre le gouvernement et
des rébellions et se sont facilement emparés de plusieurs villes du nord et du centre, demandent le départ de M. Bozizé.
Ce dernier s'est déclaré prêt à un dialogue sans condition en vue de la formation d'un gouvernement d'union nationale. Des
représentants du Séléka et de l'opposition ont accepté mercredi d'y assister.
La tenue des pourparlers pourrait cependant être compliquée par le caractère extrêmement hétéroclite de la rébellion qui ne
présente ni commandement militaire, ni direction politique unifiés, et où les rivalités personnelles n'ont pas tardé à éclater.
Le rôle du médiatique porte-parole Eric Massi est ainsi ouvertement contesté au sein du Séléka, où certains
l'accusent de "rouler pour lui-même", selon les termes de François Nelson Ndjadder, coordonnateur et délégué en Europe de la Convention patriotique pour
le salut du kodro (CPSK), une des composantes du mouvement.
La CPSK a déjà constitué sa propre délégation pour se rendre à Libreville, et d'autres mouvements, y compris de l'opposition
politique, demandent aussi à être associés aux négociations, ont indiqué plusieurs sources à l'AFP.
Ces derniers jours, les "porte-parole" ou "commandants" autoproclamés de
la rébellion se sont multipliés, le plus souvent issus des rangs de l'opposition en exil.
Jeudi soir, un Front républicain pour l'alternance et la paix (FRAP), une coalition d'opposants récemment créée à Paris, doit
tenir une assemblée générale dans la capitale française, en présence de "hautes personnalités centrafricaines", selon son porte-parole Guy Simplice
Kodégué.
Au plan interne, la décision du président Bozizé de limoger son propre fils Jean-Francis du
ministère de la Défense devrait lui permettre de reprendre la main en lançant un message de confiance aux militaires, selon une source sécuritaire. Jean-Francis a été
"sanctionné pour sa nonchalance", a-t-on ajouté de même source.
Pour le principal opposant, l'ancien Premier ministre Martin Ziguélé, le limogeage "est la
moindre des choses" après la débandade des Forces Armées centrafricaines.
Selon une source diplomatique, Paris estime que les négociations devraient être le plus ouvertes possible et réunir le
gouvernement centrafricain, les oppositions armées ainsi que l'opposition légale démocratique, notamment M. Ziguélé et Jean-Jacques Demafouth, tous deux
candidats malheureux à la dernière élection présidentielle de janvier 2011, remportée par François Bozizé.
NDLR : Personne n'est dupe de jeu de Bozizé. Tout le monde sait que son fils Francis n'était qu'une façade. Le
vrai ministre de la défense était le père car aucune décision importante ne pouvait être prise par le fiston sans l'avis préalable du père. Aujourd'hui la présence militaire massive à Bangui
et Damara des troupes françaises et des pays d'Afrique centrale a tiré Bozizé d'affaire pour le moment et ce dernier ne rêve plus que de se réorganiser pour lancer ses troupes de mercenaires
qu'il a fait venir nombreux à Bangui aux trousses des rebelles de SELEKA afin de les déloger des villes qu'ils occupent.
Le débat sur la comptabilité des villes occupées par les rebelles et celles qui ne le sont pas encore pour
justifier le maintien de Bozizé au pouvoir est quelque peu dérisoire. Bozizé on le sait, avait massivement triché aux dernières élections de janvier 2011 raison pour laquelle sa légitimité est
très contestée et tout le monde lui demande de dissoudre aussi son gouvernement et l'assemblée nationale, tous issus de ces élections frauduleuses. C'est cela le vrai motif du départ de Bozizé
que tout le monde réclame aujourd'hui, outre son incompétence criarde et sa mauvaise gouvernance légendaire.