http://www.lyoncapitale.fr Par Déborah Berthier 04/01/2013
à 10:28
ENTRETIEN - Depuis le 10 décembre, de nombreuses villes au nord et à l'est de la République Centrafricaine (RCA) ont été
prises par les rebelles du Séléka, qui réclament le départ du Président François Bozizé. L'association lyonnaise Triangle Génération Humanitaire, présente dans le pays depuis
2007, a dû être rapatriée vers Bangui, la capitale, suite à l'avancée des rebelles. Le chef de mission, Rémi Orsier, de retour à Lyon, espère que la crise politique actuelle
permettra d'attirer l'attention sur ce pays à "la situation humanitaire déjà alarmante".
Lyon Capitale : Vous êtes de retour en France depuis peu, pensez-vous d'ores et déjà à retourner à Bangui
?
Rémi Orsier : Initialement, je devais repartir en Centrafrique le 25 décembre dernier mais mon avion a
fait demi-tour au-dessus du Sahara à cause des manifestations anti-Français à Bangui, réclamant l'intervention de la France (qui a mobilisé depuis 600 soldats). Air France a jugé qu'il n'était
pas sûr de se poser dans de telles conditions. Depuis, tous les vols de la compagnie ont été annulés. Peut-être les pourparlers annoncés hier vont-ils débloquer la situation.
Il y a trois semaines, vous avez été rapatriés sur Bangui à l'arrivée des rebelles. La population a-t-elle fuit
elle aussi ?
Il y a eu un mouvement préventif de fuite vers la brousse. Mais les gens reviennent progressivement dans les villages car il
semblerait que les rebelles ne s'attaquent pas à la population. A Bangui (qui est située à la frontière de la République Démocratique du Congo) les mouvements de population vers la RDC sont
restés mineurs. Nous n'avons pas noté de recrudescence de violence, ce qui est rassurant, mais on peut tout de même s'attendre à une augmentation du banditisme.
Quelles sont les conséquences directes de l'occupation des rebelles pour la population?
Il est difficile d'avoir des informations sur la situation en province car la majorité des lignes téléphoniques a été coupée
par les rebelles. Mais le problème premier semble être la flambée des prix des denrées alimentaires. A Bangui, la nourriture arrive toujours du Cameroun, mais en province, les transporteurs du
Tchad ou du Soudan ne viennent plus. La population vie sur ses réserves ce qui entraîne une forte montée des prix. La situation ne sera pas tenable plus de quelques semaines.
Cette crise politique peut-elle déboucher sur une crise humanitaire?
La crise est sécuritaire avant d'être humanitaire. Les tensions sont accrues, les barrages de militaires se sont multipliés.
Et les militaires ne rassurent pas forcément la population car souvent, plus de militaires signifie plus d'exactions.
Mais même si la crise n'est pas humanitaire, l'indice de développement humain en Centrafrique est déjà proche des seuils
d'urgence en temps normal. Il y a très peu d'infrastructures, peu d'hôpitaux, qui ont peu de moyens, l'état des routes est déplorable, ce qui ne favorise pas les échanges commerciaux. Peut-être
que les évènements actuels auront tout de même une conséquence positive, celle de faire davantage parler de ce pays souvent oublié à l'international. La RCA est un pays peu financé par les
bailleurs de fonds. Espérons que cette crise leur ouvrira les yeux.
Centrafrique : toujours plus d'enfants soldats dans les milices rebelles et gouvernementales
Le Monde.fr avec
AFP | 04.01.2013 à 14h47
Un nombre croissant d'enfants sont recrutés par les rebelles mais aussi par les milices progouvernementales
en Centrafrique, a
indiqué l'Unicef (Fonds des Nations unies pour l'enfance), vendredi 4 janvier à Genève. "L'Unicef appelle à la cessation immédiate du recrutement
d'enfants par tous les groupes armés en République centrafricaine", a déclaré une porte-parole de l'organisation.
Selon l'Unicef, environ 2 500 enfants – filles et garçons – se retrouvaient déjà dans des groupes armés, y
compris des groupes d'autodéfense, en Centrafrique avant même que le conflit n'éclate en décembre. Depuis lors, cette pratique, qui constitue "une grave violation
des droits des enfants", a pris de l'ampleur. Mais l'organisation ne parvient pas encore à la chiffrer.
Ces jeunes, notamment ceux séparés de leurs familles, peuvent être obligés de combattre, de transporter des
fournitures ou risquent d'être abusés sexuellement, déplore le représentant de l'Unicef en Centrafrique, Souleymane Diabate. "Un certain
nombre de groupes rebelles et plusieurs milices pro gouvernement sont devenus plus actifs ces dernières semaines dans la capitale Bangui et à travers le pays. Des sources fiables nous ont
informés que des enfants sont nouvellement recrutés dans leurs rangs", a-t-il expliqué.
PLUS D'UN MILLION DE PERSONNES CONCERNÉES
Pour l'Unicef, plus de 300 000 enfants ont déjà été affectés par les violences, ce qui les rend plus vulnérables aux
enrôlements comme soldats. En raison de l'insécurité en Centrafrique, l'Unicef a évacué 14 membres de son personnel international et local la semaine dernière et a transféré son centre opérationnel au Cameroun.
Quelque 316 000 personnes vivent dans les régions touchées par les violences, et environ 700 000 autres à Bangui
risquent de se voir affectées par une escalade des combats, indique d'autre part le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA).
Des informations font aussi état de la fuite de personnes qui se réfugient au Cameroun et en République démocratique du Congo
(RDC), a indiqué un porte-parole de l'OCHA, Jens Lenke. Sur le terrain, la coalition rebelle Séléka a arrêté son offensive lancée le 10 décembre dans l'attente de négociations à
Libreville, à une date encore incertaine.
La rébellion "pas au courant" de négociations imminentes
Le porte-parole de la rébellion centrafricaine, Eric Massi, a déclaré vendredi depuis Paris à l'AFP ne pas
être "au courant" de négociations imminentes à Libreville, en affirmant ne pas encore avoir été contacté par la Communauté économique des Etats
d'Afrique centrale (Ceeac). Vendredi, une source de la Ceeac a affirmé à l'AFP qu'une délégation de la Séléka était attendue dimanche à Libreville pour des négociations.