LIBREVILLE AFP / 16 mars 2013 00h13
- L'opposant centrafricain Jean-Jacques Demafouth, qui avait fui
la Centrafrique pour le Tchad mercredi en moto, se trouve actuellement à Goré, à la frontière entre les deux pays, et doit être expulsé samedi matin manu militari,
a-t-il déclaré vendredi à l'AFP.
« Je suis enfermé dans une pièce à Goré et on doit
m'expulser demain à 06h00 (05h00 GMT, ndlr). Manu militari », a affirmé à l'AFP l'ancien ministre de la Défense et candidat à l'élection
présidentielle.
M. Demafouth a indiqué avoir alerté le
Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) et l'ambassade de France (il dispose de la double nationalité).
Il ne faut pas qu'ils m'expulsent. Les gens ne comprennent
pas ce que je risque. J'ai fui la Centrafrique parce que j'ai reçu des menaces du ministre de la sécurité publique (du gouvernement d'union nationale) Josué Binoua
(ancien ministre de l'Administration -Intérieur- du régime de François
Bozizé), a déclaré M. Demafouth.
Agé de 53 ans, l'ancien ministre, qui avait conduit le désarmement
d'une des principales rébellions l'Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), est toujours vice-président du Comité de pilotage du programme Désarmement, Démobilisation et
Réinsertion (DDR).
« J'ai fui en moto à partir de Paoua » (nord
Centrafrique) où il était en mission en tant que
vice-président du DDR) « et j'ai traversé la frontière en me déclarant aux autorités tchadiennes. J'ai le cachet sur mon passeport. Mais j'ai ensuite été intercepté plus loin.
J'ai demandé l'asile politique », a-t-il poursuivi.
On m'a fait attendre et puis au gouvernorat on m'a signifié
mon expulsion. J'attends. Je suis dans de mauvais draps, a-t-il ajouté.
Accusé de vouloir reformer une rébellion, M.
Demafouth avait été arrêté pendant près de trois mois début 2012 avant d'être relâché. Il avait toujours crié son innocence.
De source diplomatique, l'ambassade de France est au courant de la
situation de M. Demafouth.
Joint au téléphone depuis Libreville, M. Binoua a nié toute menace envers M. Demafouth.
« Le menacer de quoi? Il n'y a aucune menace contre M. Demafouth, ni verbale ni légale. Il n'y a aucune procédure contre lui. Il peut revenir à la
maison. »
« C'est un mythomane. Il fait du théâtre pour se faire remarquer. Il a refusé de remplir les formalités à
Paoua. Je l'ai eu au téléphone et je lui ai même souhaité +Bon voyage+ », a ajouté M. Binoua.
A la mi-décembre, les rebelles de la coalition Séléka avaient pris les armes contre le régime du président François
Bozizé, menaçant la capitale Bangui mais leur avance avait été stoppée par une intervention régionale. Un accord de paix a été signé, le 11 janvier à Libreville, au Gabon, débouchant sur
la formation d'un gouvernement d'union nationale auquel participe la rébellion.
M. Demafouth qui ne fait pas partie du Séléka s'était rendu à Libreville lors des pourparlers de
paix.
(©)
Tchad : L'opposant Jean-Jacques Demafouth s'exile au Tchad
PAR LAURENT CORREAU, RFI
14 MARS 2013
L'opposant centrafricain Jean-Jacques Demafouth, ancien ministre et ancien chef rebelle, a franchi ce
mercredi 12 mars dans la matinée la frontière tchado-centrafricaine.
Dans une interview accordée à RFI, il dit avoir fait le pas pour échapper aux menaces d'arrestation qui pèsent contre lui.
Les autorités centrafricaines démentent ces affirmations et rappellent qu'il était dans le nord-ouest de la Centrafrique pour distribuer des primes aux ex-combattants de son mouvement, l'Armée
populaire pour la restauration de la démocratie (APRD).
Jean-Jacques Demafouth a affirmé à RFI que les premiers signaux lui ont été envoyés lundi 11 mars, alors
qu'il était sur le point de partir par avion à Paoua, dans le nord-ouest du pays aux côtés d'experts et de techniciens de l'ONU.
« Au moment de notre embarquement, affirme l'opposant, j'ai été interpellé par téléphone par le ministre de la
Sécurité, qui m'a fait comprendre qu'il y avait eu des déclarations publiques faisant de moi le soutien de mouvements rebelles, et notamment de la Seleka, surtout un de leurs leaders, Noureddine
Adam, et qu'à ce titre ma place était en prison. »
Débarqué un moment - dit-il -, avec d'autres membres de la mission, l'ex-rebelle déclare avoir reçu un autre appel du
ministre au moment de remonter dans l'avion. « Au moment de partir, il me rappelle pour me faire comprendre que je disposerais de fonds qui m'ont été donnés par le président du Tchad
pour entretenir cette rébellion, et qu'à ce titre, à mon retour, il faut que je vienne répondre à une convocation chez lui. »
Traversée en
moto
Selon Jean-Jacques Demafouth, une nouvelle alerte arrive le lendemain, alors qu'il est en mission dans le
nord-ouest : « Mardi dans la soirée, j'ai reçu des renseignements de source fiable, selon lesquels le président de la République avait convoqué les éléments de sa sécurité. Il leur
avait donné des instructions pour qu'ils m'attendent à l'aéroport et m'interpellent quand mon avion allait revenir de Paoua. »
« Face à cela, dit l'opposant, je ne pouvais pas rester parce que j'ai déjà subi la même chose l'année dernière.
J'avais été interpellé pour rien. J'ai fait 3 mois et 15 jours de prison et j'ai été libéré sans aucune explication. » Jean-Jacques Demafouth dit avoir traversé la
frontière ce mercredi 12 mars dans la matinée sur une simple moto.
Démenti
Les autorités centrafricaines, elles, démentent les raisons avancées par l'ancien ministre et ancien chef rebelle :
« Le gouvernement se déclare tout à fait surpris par ces allégations sans fondement, parce que nous ne sommes pas au courant de l'existence d'une quelconque procédure judiciaire à
l'encontre de M. Demafouth » a indiqué à RFI le porte-parole du gouvernement d'union nationale, Crépin Mboli Goumba.
« Renseignement pris, poursuit ce porte-parole, M. Demafouth s'était rendu à Paoua dans le cadre de son activité
de vice-président du comité de suivi du programme Désarmement démobilisation réinsertion (DDR) pour distribuer des primes aux ex-combattants dans le cadre du processus de désarmement. L'avion qui
a été dépêché par les Nations unies pour le ramener à Bangui est revenu vide. » Crépin Mboli Goumba qualifie la sortie de l'opposant de « quête effrénée
des feux de la rampe ».
Centrafrique: L'offensive de la Séléka continue
Deutsche Welle (Bonn)
PAR RAMATA SORÉ, 14 MARS 2013
Alors que Jean-Jacques Demafouth, ancien Ministre centrafricain, est réfugié au Tchad depuis mardi, les
soldats de la rébellion centrafricaine occupent certaines villes dans l'est de la République.
Cette offensive de la Séléka risque de rendre l'accord de sortie de crise signé en janvier dernier à Libreville, au Gabon,
caduc. On se souvient que la Séléka, l'opposition, et le gouvernement de Bangui avaient signé cet accord pour le retour de la paix. Mais apparemment, cela n'a rien résolu. Selon Eric
Massi, porte-parole de la Séléka, le président François Bozizé a été le premier à violer les directives de l'accord de paix.
De son côté, l'ancien ministre centrafricain, Jean-Jacques Demafouth a demandé protection depuis mercredi au
Tchad. Selon Demafouth, on l'accuse de soutenir la rébellion de la Séléka. A ce propos, Eric Massi affirme que Demafouth n'a jamais, ni de près
ni de loin, soutenu le mouvement.
Mais pourquoi Demafouth a-t-il choisi le Tchad comme pays de refuge ? Claude Dalembei,
sociologue-politique à l'Université catholique d'Afrique centrale de Yaoundé au Cameroun pense que les raisons de ce choix sont claires. Ce pays, dit-il, veut avoir un rôle de leadership dans la
sous-région et dans la résolution de la crise centrafricaine.