Afrik.com SAMEDI 15 JUIN 2013 / PAR FRED KROCK
Le président de la transition en République centrafricaine, M. Michel Djotodia a reçu, jeudi 13 juin dans sa résidence du Camp de Roux, l’ambassadeur de l’Union européenne (UE) à Bangui, M. Guy Samzun. Au menu de leur rencontre, la santé des relations entre l’UE et la Centrafrique. Entre autres résolutions, l’épineuse question de la dissolution du bureau du Conseil national de la transition (Cnt).
(De notre correspondant)
De nouvelles polémiques autour du Conseil national de la transition (Cnt), en particulier, le bureau qui a été élu le 15 avril 2013. Le principal bailleur de fonds de la République centrafricaine, notamment l’Union européenne (UE) vient de poser un problème fondamental pour cette institution. Elle demande à ce que le bureau soit indiscutablement dissout et revoté. Parce que, 30 nouveaux membres viennent de l’intégrer soit 25% d’augmentation de ses membres, conformément aux résolutions du 4ème sommet extraordinaire de la Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique centrale (Ceeac) qui s’est tenu le 18 avril à N’Djamena au Tchad. Alors qu’une première vague de contestation a eu lieu au sujet du mode de désignation des représentants des entités parties-prenantes.
La frappe de Guy Samzun
En effet, dans le cadre des activités du Comité de suivi des accords de Libreville, au Gabon, le représentant du médiateur, M. Essongo et l’ambassadeur de l’UE ont été reçus le 2 juin dernier par M. Michel Djotodia, président de la transition en République centrafricaine. Lors de cette rencontre, le point de la dissolution du bureau du Cnt a été d’ores et déjà soulevé. Le lendemain, lors de la deuxième rencontre exclusive du président avec l’ambassadeur de l’Union européenne, ce dernier a indiqué que « … le CNT a été élargi, nous pensons qu’il faut revoter le bureau, étant donné que le nombre des conseillers a augmenté à plus de 25% ». Et de poursuivre « le chef de l’Etat a été élu par acclamation, donc, même si vous y ajoutez 30 conseillers aux 105, il aurait toujours la majorité absolue. Ce qui n’a pas été le cas pour le bureau où il y a eu malheureusement des éléments qui n’ont pas été respectés de la règle démocratique d’une élection. Au-delà de ça, par contre, oui !, le bureau n’est pas légitime avec 25% de conseillers en plus ».
La finalité, c’est qu’il faudra laisser le jeu démocratique se jouer à la tête du Cnt, à travers le revote du bureau comprenant cette fois-ci les voies de tous les 135 conseillers nationaux. Alors que cette prise de position a été très mal gobée par les membres du bureau et certains conseillers nationaux, du moins le président en exercice M. Ferdinand Alexandre Nguendet, qui ont déclenché une campagne-riposte.
Panique et mécanismes de survie au sein du bureau
La position de l’Union européenne qui tombe raide comme un couperet a semé la panique au sein du bureau du Cnt. Son président, M. Ferdinand Alexandre Nguendet active immédiatement sa machine. Ses deux directeurs de cabinet, nomment M. Savonarole Maléyombo et son adjoint, M. Firmin Grébada ont animé une conférence de presse, le 14 juin, dans la salle de conférence de l’Assemblée nationale. A bâton rompu avec les journalistes, les deux personnalités ont tout fait pour convaincre sur le non-intérêt de la réélection du bureau du Cnt. « … la demande de reprise de l’élection du bureau du Conseil national de transition est inopportune et revient à remettre implicitement en cause l’élection du chef de l’Etat de la transition qui a été élu dans les mêmes conditions que ledit bureau », a martelé M. Maléyombo. Est-ce à ce sujet que le président Djotodia a offert un diner exclusif jeudi 13 juin, à l’hôtel Ledger aux membres du Cnt, où les journalistes ont été renvoyés de la salle ? Néanmoins, l’ambassadeur de l’UE n’a pas fortuitement négligé le revote du président Djotodia parce qu’à en croire ses propos, même s’il y a 30 voies supplémentaires qui doivent revoter cela ne changera pas la donne quand on sait que le président Djotodia a été voté par les 105 conseillers par acclamation. Par conséquent, il n’est pas concerné par la réélection.
Ce n’est que partie remise, car dans les heures qui suivent, l’« Organisation nationale de la jeunesse » animera une autre conférence de presse sur le même sujet, histoire pour le bureau actuel du Cnt de contourner la réélection proclamée par Guy Samzun.
Bataille de l’œuf et le caillou
En s’agitant ainsi, l’actuel bureau du Cnt cache mal son intention à s’en prendre à l’ambassadeur européen. D’ailleurs, lors de la conférence de presse des Directeurs de cabinet, M. Maleyombo a souligné que l’élection du bureau du Cnt a été faite sur la base du règlement intérieur et la loi organique de l’ancienne Assemblée nationale dont l’article 4 prévoit que « les membres du bureau sont élus au scrutin secret uninominal à un seul tour ». C’est-à-dire que l’élection a été déjà légale et n’a enregistré aucune contestation. C’est pourquoi, selon ce dernier, lorsque Guy Samzun pose le problème de sa dissolution, c’est qu’il serait en train de jouer le jeu d’un tiers au détriment des réelles préoccupations du peuple centrafricain, notamment les salaires, la sécurité, la reprise effective du travail. Or, dans cette bataille, le président du Cnt a déjà heurté le Premier ministre, Me Nicolas Tiangaye, quand il a profité de la « préséance » qui lui a été délibérément octroyée par les chefs d’Etat de la Ceeac, avant de s’en prendre encore à l’ambassadeur européen.
Les membres du bureau du Cnt oublient que l’Union européen reste jusqu’aujourd’hui le principal bailleur de la RCA, et que Guy Samzun a remporté la victoire dans un bras-de-fer entre lui et le pasteur Josué Binoua, ministre de l’administration du territoire sous le régime de François Bozizé. Le bal est ouvert et seul l’avenir nous dira qui triomphera.
Pour l'UE, «beaucoup reste à faire» pour assurer la transition en Centrafrique
Agence France-Presse BANGUI 5 juin 2013 à 18h22
Le délégué de l'Union Européenne en Centrafrique, Guy Samzun, a déclaré que «beaucoup de choses restent à faire» pour assurer la transition en Centrafrique après la prise du pouvoir par la rébellion Séléka fin mars, notamment revoter le bureau du Conseil national de transition (CNT).
L'instauration d'un CNT, parlement transitoire en Centrafrique, était l'une des recommandations du sommet des chefs d'État d'Afrique centrale réunis à N'Djamena le 3 avril pour normaliser la situation institutionnelle après la victoire militaire de la coalition rebelle Séléka.
«Il y a encore beaucoup de choses qui restent à faire pour que les bases et les fondements de la transition soient posés» avant la fin de la période de transition qui doit durer 18 mois, a déclaré le délégué de l'Union européenne en Centrafrique, Guy Samzung, à l'issue de l'audience que lui a accordée le président Michel Djotodia mercredi.
«Aujourd'hui, tous ces fondements ne sont pas encore là. Le CNT (organe législatif de la transition) a été élargi, c'est clair, mais nous considérons qu'il faut revoter le bureau», a déclaré le délégué de l'UE.
«Parce que quand on augmente de 25% le nombre de conseillers, je pense que ces conseillers doivent aussi élire un bureau», a-t-il précisé.»
Mi-mai, le CNT s'était élargi à 135 membres (contre 105 auparavant), parmi lesquels d'anciens proches du président déchu François Bozizé. Il était composé au départ de représentants du Séléka, de l'ancienne opposition à Bozizé, de partisans de l'ancien régime, ainsi que d'anciens rebelles et personnalités de la société civile.
Le CNT n'a pas tardé à réagir: «le bureau du CNT a été mis en place par un vote libre, à l'unanimité des conseillers, et il n'y a eu aucune contestation», a déclaré vendredi Thierry Savonarole Maléyombo, directeur de cabinet du président du CNT.
«La question de la composition du bureau du CNT relève de la souveraineté de l'État centrafricain. Les relations entre la Centrafrique et l'Union Européenne, doivent placer au-dessus de tous les intérêts du peuple centrafricain » a ajouté un membre du CNT sous couvert de l'anonymat.
Le bureau du CNT, composé de six membres, est présidé par Alexandre-Ferdinand Nguendet, jugé très proche de Michel Djotodia par certains observateurs.
Le conseil doit notamment élaborer la Charte de la transition et adopter le projet d'ordonnance du Code électoral de la République centrafricaine.
«En ce qui concerne la sécurisation du pays, a poursuivi Guy Samzung, l'Union Européenne pourrait s'engager pour aider la RCA à sortir de l'état malheureux dans lequel elle se trouve. On est très conscient des difficultés et des enjeux que ça représente».
«On a une grosse mission qui va venir la semaine prochaine, et qui va analyser les aspects politiques, les aspects développement et stabilisation, et également les aspects militaires et sécurité», a-t-il ajouté.