02/07/14 (AFP)
Les groupes armés font la loi en Centrafrique, ont dénoncé mercredi les évêques centrafricains dans un message publié à Bangui, évoquant notamment l'ex-rébellion Séléka et les milices anti-balaka.
"La loi appartient aux détenteurs illégaux d'armes et aux groupes armés, en l'occurrence les ex-Séléka, les anti-balaka, des groupes d'autodéfense, des archers (peuls) de la commune d'élevage d'Ourou Djafoun de Bambari (centre), des Mbararas (nomades tchadiens) et l'armée de résistance du seigneur LRA (guérilla ougandaise)", affirment-ils.
"Les tueries de masse ont certes diminué à Bangui, mais la République Centrafricaine est loin de retrouver sa quiétude d'antan. L'insécurité a encore droit de cité", poursuivent les évêques qui décrivent leur pays comme "une grande prison à ciel ouvert" où les groupes armés "écument la campagne en semant la mort".
La Centrafrique est plongée depuis plus d'un an dans des violences inter-communautaires meurtrières, opposant principalement l'ex-rébellion Séléka, majoritairement musulmane - au pouvoir de mars 2013 à janvier 2014 - aux milices majoritairement chrétiennes anti-balaka.
"Tuer, incendier des maisons voire des villages entiers, traquer des gens en brousse deviennent désormais des actes anodins et sans poursuite judiciaire. La vie humaine ne semble plus avoir de prix", disent les évêques.
Ce message est publié le jour où trois personnes ont été tuées et une blessée au cours d'une attaque lancée dans la matinée par des ex-Séléka contre le village de Ngakobo, situé près de Bambari (centre), faisant fuir la population en brousse, selon une source de la force africaine de paix déployée en Centrafrique (Misca).
Joint par l'AFP, Ahmad Nejad, porte-parole de l'état-major Séléka, a déclaré que des "éléments sont allés à Ngakobo pour protéger la population, après avoir été informés d'une attaque d'anti-balaka contre des civils. Mais ce n'était pas pour tuer des habitants".
A chaque attaque menée contre les civils, les Séléka comme les anti-balaka démentent être responsables.
Les évêques notent que "face à la recrudescence des actes abominables et criminels, la déliquescence de l'Etat consacre un régime fondé sur l'impunité et compromet la garantie des droits fondamentaux inhérents à chaque citoyen".
Ils dénoncent les "innombrables attaques" contre les religieux en plusieurs points du pays notamment "les tortures et la tentative d'assassinat de l'évêque de Bossangoa (ouest) en compagnie de trois de ses prêtres, l'abominable et cruel assassinat de l'abbé Christ Foreman Wilibona du diocèse de Bossangoa, la torture psychologique imposée aux prêtres et aux religieux de Dékoa (centre)".
Ils citent également "le récent massacre perpétré contre les déplacés du site de la paroisse Notre Dame de Fatima à Bangui (17 morts le 28 mai) durant lequel l'abbé Paul-Emile Nzalé a été abattu" et "les crimes odieux contre les pasteurs de l'association des églises évangéliques en Centrafrique".
La Centrafrique, ravagée, connaît une partition de fait, de nombreux musulmans ayant été contraints de fuir des régions entières face aux violences des anti-balaka dans le Sud et l'Ouest, tandis que dans l'Est et le Nord, les populations chrétiennes restent sous la coupe de combattants Séléka. Quant à Bangui, elle se vide de ses derniers musulmans, traqués quotidiennement par les anti-balaka. Nombre d'entre eux y ont été tués.
Malgré les efforts des 2.000 militaires français de l'opération Sangaris, déployés aux côtés de quelque 5.000 soldats de la Misca, les exactions des groupes armés contre les civils continuent.