Guy Samzun
S’achemine-t-on vers l’alternative extrême, notamment celle de voir M. Guy Samzun, Représentant de l’Union européenne en poste à Bangui déclaré persona non grata en République centrafricaine ? Indubitablement oui si l’on s’en tient à la farouche détermination des autorités de l’administration du territoire à ne pas tronquer un seul poil de la mission régalienne qui est la leur dans le cadre de cet acte de souveraineté qu’est la question de la loi électorale. Mais, nous n’en sommes pas encore là. Le moins qu’on puisse dire est que le ver est dans le fruit.
Le point névralgique de cette tension n’est rien d’autre que les modalités de relance du dialogue politique à travers la révision du code électoral. Le 8 août 2012, M. Guy Samzun, « ambassadeur », chef de délégation de l’UE a fait parvenir un courrier aux partis politiques et à la société civile. En objet, une proposition de « modalités de relance du dialogue politique à travers la réforme du processus électoral ». C’est la « synthèse des discussions que nous avons eues avec l’ensemble des partis politiques concernés par ce dialogue ainsi que la société civile. Cette synthèse comporte également un schéma en annexe » précise la lettre du diplomate bruxellois.
Cependant, dans les coulisses du ministère de l’administration du territoire, Samzun a appuyé sur le bouton rouge, car il s’agit, ni plus ni moins, pour les garants constitutionnels d’une question aussi souveraine que le code électoral, d’un crime de lèse-majesté. Un cadre qui a requis l’anonymat a quant à lui parlé de « provocation ». « Samzun a outrepassé les limites de sa mission » a confié un autre.
A postériori, les voix qui s’élèvent pour protester contre la démarche de Guy Samzun, la mettent sans équivoque, sur le compte de l’initiative personnelle de ce diplomate dont on dit « difficile à vivre ». Pour illustration, on ressasse la volonté de Samzun d’empêcher la tenue de la table ronde des bailleurs de fonds de la République centrafricaine le 17 juin 2011 à Bruxelles qui a finalement eu lieu. Il y a lieu de se demander si après son désir qui s’est fracassé, de voir ses amis de l’opposition accéder coûte que coûte au pouvoir lors des Elections Générales de janvier 2011, Monsieur le chef de la délégation ne caresse pas le rêve d’imposer ses protégés lors des futures échéances électorales à venir, au mépris de la souveraineté du pays et du suffrage des centrafricains.
Preuve que cet homme fait passer son humeur pour règle en lieu et place des conventions et des pratiques positives en matière de diplomatie et de relations internationales, ceci avec le risque d’aller à l’encontre de la position de Bruxelles et de certaines grandes capitales de l’union.
Sa légitimité en tant que chef de délégation, estime-t-on, le limiterait davantage à un rôle de liaison à la différence des ambassadeurs accrédités. D’où un excès de zèle de la part de ce diplomate.
Là où le bât blesse, à en croire les indiscrétions du cercle du pouvoir, est que le ministre de l’administration du territoire qui légalement assure le leadership du processus de la révision du code électoral n’est même pas destinataire du document de synthèse. En cela, on ne s’empêche pas de tirer la conclusion selon laquelle ce diplomate serait en train de rouler pour l’opposition, ce qui n’est malheureusement pas son rôle.
D’un autre point de vue, dans le cercle du département de tutelle, on a eu l’impression que Samzun a volontairement ou non, confondu le dialogue politique renforcé qui s’inscrit dans le cadre de l’article 8 de l’Accord de Cotonou qui lie l’UE avec les pays ACP et le dialogue inter centrafricain annoncé par le président de la République lui-même surtout que cela inclut la révision du code électoral qui, jusqu’à preuve du contraire demeure un problème de souveraineté.
Bref, à la faveur de cet argumentaire, le ministère de l’administration du territoire s’insurge contre la velléité d’imposer un schéma soit-il élitiste, à un Etat souverain. Il est fort probable qu’une réaction officielle puisse être imminente. Dans tous les cas, les autorités centrafricaines semblent prendre toutes les précautions utiles pour séparer les relations entre la RCA en tant qu’Etat souverain et l’UE d’avec la personne de Samzun qui, pour des raisons connues que de lui seul, s’inscrit dans la posture de quelqu’un qui tient coute que coute à provoquer le crash.
Tout compte fait, c’est un bras de fer somme toute saugrenu qui s’engage ainsi entre le gouvernement et M. Samzun. Et, dans cette bataille, seule chose qui puisse tirer le diplomate d’affaire est que sa démarche soit effectivement approuvée par Bruxelles. Mais, le cas échéant, s’il s’agit de ses propres caprices comme l’entendent les autorités de Bangui, on s’achemine alors vers le cas Esmieu, le prédécesseur de Samzun dont les relations avec le gouvernement étaient devenues exécrables à un moment donné et avaient failli déboucher sur le pire, peu avant la fin de sa mission en Centrafrique.
Souma DEPOT
Ancien Diplomate
Consultant International
Résident à Bangui
Mises au point du Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation, Josué BINOUA à la suite de la sortie du sieur SAMZUN
Je voudrais exprimer mon étonnement face à la dernière sortie du sieur Guy SAMZUN en ce 08/08/2012, et pour parer à tout malentendu diplomatique, j’entends faire les mises au point suivantes :
Par rapport à l’objet du 3° atelier :
1/ J’avais pris soin, lors de la rencontre du 24/07/2012 en mon bureau, d’informer le Représentant du Sieur SAMZUN (car ce dernier évite volontairement de me rencontrer) que l‘objet du 3° atelier du comité de concertation n’est autre que de s’entendre sur l’organe de gestion des élections dans notre pays.
Or, quel ne fut mon étonnement de lire sous la plume du sieur SAMZUN que l’objet en serait de relancer le Dialogue Politique initié par Mr le Président de la République en date du 15/05/2012 ! Non, non, ne nous laissons pas confondre : le Dialogue Politique initié par le Président de la République en date du 15/05/2012 est géré directement et exclusivement par lui. C’est en effet le Président de la République lui-même qui en définit la forme, qui en détermine le rythme, qui reçoit les nombreux protagonistes et qui en fixe l’objet. Tout cela n’ayant que de vagues et lointaines accointances avec le processus de révision du Code Electoral qui est avant tout, une activité technique.
Par rapport au rôle des observateurs à l’atelier :
2/ Où donc le sieur SAMZUN est-il allé trouver que pour « l’élaboration ( ?) d’une méthode consensuelle ( ?) qui devrait permettre de sortir les travaux d’élaborations ( ?) du Code Electoral de l’impasse ( ?) dans laquelle ils se trouvent, les Autorités centrafricaines ont sollicité l’assistance de l’Union Européenne et du BINUCA ? »
Je voudrais ici apporter le démenti le plus formel à toutes ces assertions.
Aucune autorité centrafricaine n’a sollicité d’assistance pour l’élaboration de quelque méthode que ce soit en matière de révision de Code Electoral. Certes le BINUCA avait bien avant l’accord donné par le Président de la République offert de financer la tenue des travaux du 3° atelier éventuel et de ci-de là, quelques suggestions d’appui technique nous ont été faites, mais comme j’ai eu à le dire à mes interlocuteurs, le Gouvernement est en mesure de financer sur fonds propre la tenue de ces assises s’il y a lieu ; et en matière d’appui technique, le Gouvernement entend se prononcer le moment venu… Alors pour quel besoin le sieur SAMZUN a-t-il eu besoin d’agir ainsi ? 2
Par rapport à la Présidence de l’atelier :
3/ Lors des différentes rencontres que j’ai organisées avec les parties prenantes au 3° atelier prévu, j’ai souligné à mes différents interlocuteurs que si la majorité des participants à ces assises se prononçait pour un modérateur en son sein, je n’y verrais pour ma part pas d’inconvénient. Mais par respect des convenances administratives et politiques, je transmettrais la proposition au Gouvernement qui en tout état de cause aviserait.
Par rapport aux autres élucubrations :
4/ Le comportement qui se reflète à travers ce papier du sieur SAMZUN outrepasse de loin ses attributions et l’expose à l’indignation légitime des centrafricains.
En voilà un qui non content d’usurper impunément le titre flatteur d’Ambassadeur (comme si l’on pouvait être accrédité par une autorité autre qu’un Chef d’Etat !) voudrait à présent se passer pour un Proconsul. Oubliant que si un certain Léopold avait un temps considéré tout un pays africain comme sa propriété privée, il ne peut en être de même aujourd’hui ; et le sieur SAMZUN n’est pas de taille et n’a pas la taille pour se mesurer au Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation !
Que cherche-t-il ? Court-circuiter le Gouvernement pour arracher le leadership de l’organisation du Code Electoral ? Là encore c’est peine perdue, car son statut d’observateur, il l’a volontairement abandonné.
Que cherche-t-il enfin ? Diviser les centrafricains qui veulent se concerter entre eux ?
Je dis non ! Cela n’arrivera pas, cela n’aura pas lieu. Car après la réception de son courrier condescendant et infantilisant, la société civile et les partis politiques responsables et amoureux de leur beau pays la République Centrafricaine, sont décidés à faire réussir ce 3° atelier.
Au nom du Gouvernement, je remercie tous les partenaires respectueux de la souveraineté de notre pays, qui nous prodiguent des conseils précieux et nous font des propositions pertinentes sans se positionner en donneur de leçons, à savoir : la Francophonie, la France, les Etats-Unis, l’Union Africaine, l’Union Européenne en tant qu’institution, le BINUCA à sa tête Mme VOGT la Représentante du Secrétaire Général des Nations Unies pour sa démarche constructive et sincère.
Que Dieu exorcise le démon du mal qui tire notre pays constamment vers le bas.
TROP c’est TROP ! Il y a des limites où le peuple centrafricain signe : A NE PAS DEPASSER !