«Lorsque toutes les parties impliquées dans ces élections, y compris la communauté internationale, seront prêtes, nous iront à ces élections». C’est un Bozizé complètement désabusé qui a laissé tomber cette phrase pour lever la réunion qu’il a convoquée au palais de la Renaissance afin de rendre sa décision sur le calendrier des élections. Cela prouve à suffisance la lassitude et l’agacement qui sont les siens au sujet du processus électoral pour lequel il a dû subir ces derniers temps des pressions de toutes provenances.
Contrairement à son habitude, il s’est retiré de la salle de réunion sans prendre la peine de serrer les mains des gens qu’il a conviés, traduisant ainsi son état d’âme fait de colère, de honte et de déception. Le poids de ces pressions a eu raison de lui. Son rêve que le pays aille aux urnes le 16 mai venait de s’envoler mais pouvait-t-il faire autrement que d’accepter un nouveau report sauf à ouvrir lui-même une ère de fortes turbulences dans son pays qui n’en a pas besoin. C’est donc une décision de sagesse et de bon sens.
En réalité Bozizé ne peut s’en prendre qu’à lui-même. C’est en diabolisant et en ignorant totalement l’opposition dont toutes les exigences étaient pourtant fondées et justifiées, en voulant faire de la question des élections son affaire à lui tout seul et en confiant la présidence de la CEI à un incapable qui ne pouvait être à la hauteur de l’enjeu, qu’il s’est retrouvé dans cette galère. C’est en effet très honteux pour lui de devoir reporter plusieurs fois la date des élections. C’est une humiliation suprême pour un chef d’Etat d’être désavoué par les partis politiques de sa propre majorité présidentielle et par ses propres collaborateurs qui lui ont ouvertement demandé le report des élections comme ce fut son cas. Enfermé dans sa tour d’ivoire, il n’écoutait plus que certains de ses parents et son homme de main Binguimalé pour l’entendre débiter ses mensonges.
Maintenant que les élections sont reportées, il faut travailler sereinement pour réunir toutes les conditions indispensables à la tenue d’élections transparentes et crédibles. Bozizé ne doit plus être seul maître du jeu. En clair, il faut maintenant exécuter la feuille de route dressée par le DPI que le gouvernement Touadéra 2 n’a pas voulu mettre en oeuvre. Cela doit être l’affaire de toutes les forces vives du pays. Il faut désarmer les rebelles en réussissant le DDR. Pour cela, Bozizé doit restituer l’enveloppe des huit milliards de la CEMAC destinée au financement de ce programme. Toutes les barrières illégales doivent disparaître. Il faut procéder à un recensement du corps électoral digne de ce nom.
A l’expiration du mandat de Bozizé le 11 juin prochain, l’actuel gouvernement Touadéra doit laisser place à un gouvernement de mission comme l’a préconisé l’opposition qui a eu l’élégance et le fair-play d’accepter que Bozizé demeure à son fauteuil jusqu’à l’élection du nouveau président de la République. Ce gouvernement doit immédiatement s’atteler à la préparation effective des élections. Le président actuel de la CEI doit également faire place à une personne plus capable et compétente, plus indépendante, afin de ramener de la sérénité au sein de cette structure pour que cesse le désordre et la vacuité.
C’est à ces conditions seulement et sans doute à d’autres plus techniques, que les bailleurs de fonds retrouveront goût et confiance pour œuvrer efficacement aux côtés de la CEI et du pays, et décaisseront les fonds que la communauté internationale s’est engagée à apporter pour le processus électoral, demeurés gelés jusqu’ici en raison des incessantes turpitudes du président de la CEI. Bozizé doit cesser avec ses intentions belliqueuses et la distribution d'armes à lquelle il s'adonne lui-même. C'est intolérable. L’expiration de son mandat actuel ne doit pas être synonyme de boucherie. Le sang des Centrafricains a assez coulé. C’est faute d’avoir travaillé concrètement à réconcilier les fils du pays que nous en sommes arrivés là. Les élections auront lieu lorsqu’un minimum de conditions de transparence et de tranquillité sera réuni. Il faut dès maintenant y travailler.