Voici un petit conte que je me fais le plaisir de partager avec vous : « Deux amis intimes s’en vont à la chasse au fin fond de la savane. Eclate alors une violente dispute entre les deux comparses. Le premier, plus leste, tue le second et l’enterre sous un flamboyant. Personne n’a été témoin de la scène. Seulement notre meurtrier est vite taraudé par le remord. Au point que, pour soulager sa conscience, il fait un trou dans la terre, y confie son lourd secret et le rebouche. Or, quelque temps plus tard, le vent l’harmattan se lève, balaie la motte de terre servant de sépulcre à la confession du parjure et la nouvelle se répand d’écho en écho dans toute la contrée : « A zo ti mbi oo, mbi Zaboulou la mbi fa Sénguézooo ‘’… ». Autrement dit, c’est moi Zaboulou le meurtrier de mon ami Sénguézo. Moralité, si Bozizé, Ndoutingaye, Findiro et toute leur bande de voleurs pensent que, comme ils ont définitivement confisqué le pouvoir à leur seul profit, au profit de leurs familles, au profit de leur clan et de leur région, ils auront beau se barricader à double tour dans leur forteresse de nouveaux riches, une minute après leurs funestes conciliabules, le monde entier en sera toujours informé. Ils le savent tous mais ils n’y peuvent rien.
L’escroc vous salue bien
Et pour commencer cette fois, un gag, un énorme gag. Une de ces plaisanteries de très bon goût dont la République centrafricaine est coutumière. La fédération centrafricaine de basketball a élu son nouveau président. Et le gagnant a été… François Joseph Bozizé alias «Djodjo ». La belle affaire ! Un autre François, Péhoua celui-là, a dû faire des culbutes dans sa tombe. Car faut-il que notre pays soit tombé bien bas pour oser porter à la tête de la fédération du sport qui fit son honneur dans les années 60 et 70, sous la présidence de François Alfred Wilfrid Péhoua justement, un redoutable escroc doublé d’un faussaire notoire comme Djodjo Bozizé ?
Passe encore que ce parfait illettré (à peine le niveau de la troisième comme tous les enfants de Bozizé d’ailleurs) ait corrompu à coups de billets de banque les représentants des ligues de province qui ont participé au vote. C’est toujours ça de pris pour ces pauvres hères. Passe toujours que Djodjo Bozizé, lorsque son club «Bê Africa » perd un match, fasse descendre la garde présidentielle sur le parquet et fermer le centre Martin Ngoko. Passe enfin que cet homme n’ait même pas présenté un programme structuré pouvant laisser espérer la renaissance du basketball. Tout cela, si j’ose dire, est dans l’ordre bozizéen des choses. On n’est plus à une médiocrité près. Mais comment va-t-il faire pour accompagner l’équipe des «Fauves du Bas-Oubangui» pour un éventuel stage en France par exemple, quand on sait que ce quidam y a fait de la prison avant d’en être expulsé ? A ce jour, il demeure interdit de séjour dans ce pays pour divers larcins, allant du vol de chéquiers à la falsification de signature, faux et usage de faux, escroquerie en bande organisée, abus de confiance. Bref, la totale ! Il est vrai qu’en face de Joseph Bozizé concourrait un autre artiste de la contrebande de produits pétroliers, Sani Yalo, autrement plus armé que Bozizé fils dans l’art de la délinquance financière. Dès lors, doit-on se réjouir que les délégués à cette élection aient décidé de choisir «le moindre mal», entre la peste et le choléra ? Mais si cela peut le consoler, je lui rappellerai simplement qu’il n’est pas le seul «wanted» en occident. Son cousin «Ndoutingaye» lui aussi est persona non grata aux Etats-Unis, ce qui constitue la pire des pieds de nez pour un ministre des Finances, interdit d’assister aux assemblées générales du FMI et de la Banque Mondiale. Pouvoir de famille, pouvoir de bandits traqués par toutes les polices.
Institutionnalisation de la gestion familiale du pouvoir.
Et quand je parle d’institutionnalisation de la gestion familiale du pouvoir, j’exagère à peine. Rien ne les arrête, même pas l’épouvantable deuil qui vient de frapper le Congo voisin. 3
Alors que plusieurs chefs d’état de la sous-région y ont délégué leur ministre des Affaires étrangères dont c’est le domaine, François Bozizé, lui, a choisi d’envoyer auprès de Denis Sassou Nguesso son propre fils Francis, ministère délégué à la Défense, flanqué d’un autre de ses fils, député. Visiblement, il a dû faire avec ce qu’il avait sous la main, la RCA manquant cruellement d’émissaires crédibles et le ministère des Affaires étrangères regorgeant d’incapables. Mais le meilleur reste à venir et comme d’habitude, je mets au défi les différents protagonistes de cette nouvelle affaire de démentir l’information que je suis en mesure de révéler aujourd’hui. Les deux frangins n’ont pas été désignés par hasard. Avant de faire le voyage de Brazzaville, une coquette somme, décaissée du trésor public leur a été octroyée. Cette somme devait être remise aux autorités congolaises à titre de contribution au deuil. Seulement voilà ! Un peu moins du 5e de cette somme a été déchargé et le reste empoché par l’aîné et le cadet des Bozizé. Ni vu ni connu. Au retour, ils auront à coeur de rincer la gorge de leur géniteur. Ecoeurant !
Main basse sur l’assemblée
La terre entière savait déjà que François Bozizé avait mis le paquet pour faire entrer toute sa famille à l’assemblée nationale: sa femme Monique, sa maîtresse favorite Renée Madeleine Bafatoro, son fils aîné Francis déjà cité, tout comme l’autre fils Socrate, membre du bureau de l’assemblée, sa soeur cadette Joséphine, son propre frère Roger Ouéfio, son neveu Sylvain Ndoutingaye, ministre des Finances mais en réalité le véritable maître du pays. Si on y ajoute les parents du village : l’escroc Patrice Ngaïssona etc…, on a une toute petite idée de la conception privative du pouvoir de Bozizé and co.
Mais cela ne suffisait pas ! La constitution du nouveau bureau de l’assemblée donne la pleine mesure du contrôle de cette institution. Ainsi en dehors du transparent retraité Célestin Gaombalet, président et du nécessiteux Laurent Ngon Baba à la première vice-présidence, lequel Ngon Baba, pour se cramponner au bord de la mangeoire, a passé par pertes et profits l’horrible assassinat de son ‘’parent’’ de Baboua Charles Massi, nous trouvons un certain Anatole Koué, ancien ‘’footeux’’ de son état, qui a cru malin de se faire élire sous la bannière ‘’indépendant’’. Sauf qu’aux dernières nouvelles, l’ex RDC Anatole Koué, deuxième vice-président, est aujourd’hui un membre éminent de l’écurie du vice-roi Sylvain Ndoutingaye. Mais ce n’est pas tout. Pour bien montrer aux inconscients qui douteraient encore de son pouvoir absolu, le même Ndoutingaye a installé à la 3e vice-présidence Marie-Solange Pagonendji. Or, lorsque l’on sait qu’ «Arôme Maggi », comme s’obstinent à l’appeler certaines mauvaises langues à Bangui (forcément des aigris), est l’une des innombrables maîtresses attitrées de Ndoutingaye, on comprend vite que la boucle est bouclée. En réalité, Koué et Pagonendji n’ont été placés là que pour marquer Gaombalet ‘’à la culotte’’ au cas, tout-à-fait improbable, où le retraité n’appliquerait pas à la lettre la consigne qu’il a reçue. Et cette consigne, je vous en parlais la dernière fois, c’est de veiller à faire sauter le verrou constitutionnel limitant à deux le mandat du président de la République. La ficelle est grosse, mais elle doit marcher. Cette opération chirurgicale doit intervenir à l’occasion du débat sur le projet de loi portant création de l’Agence nationale des élections (ANE). Seulement, ils ne sont pas bêtes. Ils savent tous que la communauté internationale, en particulier la France, tombera sur eux à bras raccourcis au moment de ce tripatouillage. Résultat, le projet de loi ne sera examiné qu’après le 6 mai 2012. En prolongeant de manière exceptionnelle la présente session au-delà du 30 avril. Bien joué ! A ce moment-là, la France aura d’autres chats à fouetter. En effet, après la présidentielle, elle sera en pleines élections législatives. Aussi, pour les naïfs, cette modification de la constitution devrait-elle passer comme une lettre à la poste.
Sauf que, (suivez bien ma démonstration car c’est là qu’intervient le ‘’génie’’ de Ndoutingaye) malgré toutes leurs précautions, ce coup d’état constitutionnel entraînera forcément une violente riposte du reste de la communauté internationale …et de la France, en cas d’accession de François Hollande à l’Elysée. La RCA sera au banc des nations. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle ne pourra pas résister bien longtemps aux pressions internationales. Du coup, François Bozizé sera contraint de terminer son mandat en 2016, à moins que la grande faucheuse... Dès lors, resteront à sauvegarder les énormes intérêts de sa famille, de son clan et de sa région qui trustent aujourd’hui tous les leviers du pouvoir. Et qui sera le mieux placé pour pérenniser ces intérêts ? Je vous le donne en mille, Sylvain Ndoutinagye. C’est ce qu’on appelle la stratégie du billard à quatre bandes. Faire croire à Bozizé que la combine de l’assemblée va marcher. «Or, si elle devait foirer, ce ne serait pas de ma faute. Mais l’essentiel pourra encore être sauvé», Ndoutingaye dixit. Je n’invente rien ! A Paris au mois d’octobre 2011, le vice-roi assurait déjà à Marie-Reine Hassen, une autre de ses innombrables maîtresses, que Bozizé l’avait officiellement désigné au cours d’une réunion secrète «comme le plus apte à garantir les intérêts de la famille en cas de… et ce, au détriment de Francis Bozizé, appelé élégamment ‘’c… molles’’ ».
Nettoyage à sec.
Dès lors, il convenait de verrouiller le bureau de l’assemblée. C’est fait. D’où également sa marche forcenée pour s’emparer de l’appareil du parti KNK. Elie Ouéfio en avait déjà fait les frais lorsqu’il a été brutalement éjecté du secrétariat général du parti au pouvoir. Et pour cause, Ouéfio s’opposait à l’OPA de Ndoutingaye sur le KNK. Mal lui en a pris.
Et la nomination de Louis Oguéré procède de la même analyse. Au demeurant, la dernière sortie du nouveau secrétaire général du KNK ne laisse aucune ambigüité. Pour ce militant de la 25e heure, il convient de «traquer les traîtres et autres infiltrés qui fourmillent au sein du parti». Rien que çà !
La feuille de route est donc claire et limpide. Tous ceux qui, au sein du régime ou au sein du parti, voudraient enrayer l’irrésistible ascension du vice-roi Ndoutingaye doivent être neutralisés. Mais surtout malheur à celui qui mange sans lui. Michel Koyt, Abdallah Kadr, Judes Alex Kétté et bien d’autres margoulins (sur lesquels le Centrafricain ne versera aucune larme) sont bien placés pour le savoir. Depuis deux semaines, ils dorment tous dans les geôles de Bangui. Pour l’affaire du fameux prêt indien d’un montant de 29,5 millions $ US, soit un peu moins de 14 milliards de FCFA. Ce ne sera ni le premier ni le dernier scandale dans ce pays de mafieux. Je reviendrai très bientôt et en détail sur cette affaire rocambolesque pour laquelle Bozizé lui-même mériterait mille fois d’être traduit en justice. En attendant, pour ceux qui s’étonnent que des ministres soient enfin jetés en prison, la grille de lecture est d’une limpidité aveuglante. Pour une fois, Ndoutingaye n’a pas ‘’croqué’’ dans l’affaire. Eh oui ! Ca arrive. C’est donc un motif suffisant pour que ceux qui ont cru devoir ‘’bouffer’’ sans mouiller la gorge du vice-roi soient punis. Sauf que le principal négociateur du prêt indien alors qu’il était encore ministre des Finances, Emmanuel Bizot, siège encore au gouvernement au portefeuille des Eaux et forêts car il a pour lui d’être le beau-frère de Bozizé. Mais il sait qu’il est en sursis tant la haine que lui voue Ndoutingaye n’est plus à démontrer.
Les voleurs ne sont pas ceux qu’on croit
Mais le vrai scandale n’est pas là. Le vrai scandale, c’est que François Bozizé et le dauphin Sylvain Ndoutingaye allument des contrefeux pour masquer que ce sont eux et personne d’autres qui ont mis ce pays à genoux. Car comment expliquer et accepter que ceux qui opèrent aujourd’hui au sein du fameux Comité spécial, à l’image de Maximilien de Robespierre en 1792 durant la grande terreur, soient en réalité les deux plus grands voleurs que ce pays n’ait jamais portés ?
Comment expliquer que celui (Ndoutingaye) qui a pillé sans vergogne les sociétés d’état comme la SODECA, l’ENERCA, la SOCAPS, l’ASRP, la COMIGEM etc…pendant des années, celui qui a détourné les 20 millions $ US de bonus d’AREVA/URAMIN, celui qui a englouti les 8 millions $ US d’AURAFRIC, celui qui a spolié sans scrupule les artisans miniers de Centrafrique en confisquant leurs diamants, comment ce délinquant peut se targuer d’être aujourd’hui le preux chevalier sans peur et sans reproche, ayant droit de vie et de mort au sein du fameux Comité spécial ? Juste une suggestion en passant au vice-roi Ndoutingaye. S’il est vraiment le nouveau chevalier Bayard qu’il prétend être, qu’il sorte et rende public le rapport de la Banque Mondiale (BM) sur l’ASRP qu’il planque soigneusement. Les voleurs ne sont pas toujours ceux qu’on croit. A défaut, je me ferai le plaisir et le devoir de citoyen de le faire à sa place et on va bien rigoler. Enfin, manière de parler si tant est que les Centrafricains aient encore le coeur à rire quand des truands analphabètes pillent leur pays à une échelle à donner le vertige. Et pour illustrer comment ils entendent tromper le petit peuple et amuser la galerie, un des directeurs généraux qui a subi les foudres de ce tribunal d’exception appelé Comité spécial a confié avoir entendu de ses oreilles François Bozizé affirmer sans rire que «c’est parce que les Centrafricains sont des voleurs que j’ai été obligé de mettre cette structure en place». Tel que ! Propos délirants qu’il faut mettre en perspective de ceux qu’il tient régulièrement devant les membres de son église d’illuminés et de nécessiteux ; «La main de Dieu frappera tous les traîtres qui pactisent avec les blancs (sic) pour me nuire. Massi a déjà payé. Demain d’autres paieront… ». Diantre ! De quoi préparer des cercueils et des messes de requiem à la pelle.
Le graal
Un autre directeur général de société parlant toujours de ce fameux comité croit lui revoir les sinistres comparutions de victimes souvent ensanglantés et agonisants devant les conseils des ministres de Bokassa à Bangui et Béréngo.
En effet, c’est à un véritable tribunal d’inquisition, composé d’authentiques bourreaux aux mines patibulaires, que doivent ainsi faire face tous ceux qui y sont convoqués. A côté de Bozizé trône le vice-roi Ndoutingaye avec, à sa gauche, le délinquant ministre de la Justice Firmin Findiro. Vient ensuite, présence surprenante à priori, Marylin Roosalem, ministre du Commerce par la grâce de Ndoutingaye dont elle est la énième maîtresse. Puis viennent l’inspecteur général d’état, les directeurs généraux de la gendarmerie et de la police. On y trouve encore le nouveau coordonnateur général aux entreprises et offices publics et son adjoint. Dans cet aréopage de tontons macoutes, Michel Gbézéra-Bria (dircab de Bozizé) détonne par son éternelle placidité. Visiblement, il doit se demander ce qu’il vient faire en cette galère. Ah, n’oublions pas le transparent et invisible Touadéra, Premier ministre de son état. Dernière figure de proue que seule la RCA généreuse peut engendrer, un certain Mahamat Tahir qui a visiblement trouvé son diplôme de doctorat en économie dans un paquet de lessive OMO. Un observateur avisé avait déjà laissé entendre que ce quidam avait dû soutenir sa thèse dans sa langue maternelle (haoussa ou arabe tchadien?) mais certainement pas en français. Il faut dire que ce truand mythomane a fait son trou en devenant trésorier du KNK dès 2005 et par le canal des innombrables marchés que Bozizé lui octroie, de gré à gré, dans le cadre de ses travaux de BTP. Depuis lors, il est de toutes les combines tant Bozizé adore s’acoquiner avec les délinquants. Il convient donc que les Centrafricains le sachent. C’est désormais en cette enceinte que les grandes décisions du pays se prennent, du moins dans leur aspect répressif.
Le saint des saints
Car il y’a une autre super structure, hyper fermée celle-là et peu connue du grand public. Pendant la campagne électorale et pour contourner les structures du KNK, Sylvain Ndoutingaye avait imaginé et mis en place une sorte de ‘’sanhédrin des tropiques’’ appelé Comité restreint. Y siégeaient et y siègent toujours Bozizé bien-sûr, le président de l’Assemblée nationale Célestin Gaombalet, le Premier ministre Faustin Touadéra, le vice-roi Ndoutingaye lui-même, la ministre du Commerce et amante du vice-roi Marylin Roosalem qui a vite pris du galon, le ministre délégué à la Défense et fils de son père Francis Bozizé. C’est donc dans ce cénacle que Ndoutingaye déploie toute sa science pour régler ses comptes avec ses adversaires, toujours soutenu par sa dulcinée Roosalem, Gaombalet et Touadéra, qui doivent se sentir à l’étroit car conscients qu’ils font juste de la figuration, prennent peu la parole et se contentent la plupart du temps d’abonder dans le sens du vice-roi. Aux toutes dernières nouvelles, Firmin Findiro vient d’y faire son entrée avec fracas comme juriste mais en réalité comme idéologue du pouvoir clanique et familial, à la demande expresse du vice-roi et de Bozizé en personne.
Ménage à trois
Enfin, troisième et dernier centre de décision, la ‘’Troïka’’, comme au bon vieux temps de l’Union soviétique. Ce dernier et ultime cercle (vous vous en doutez) est composé uniquement de Bozizé, de Ndoutingaye et de Findiro. Et même s’il demeure informel, c’est en son sein que Ndoutingaye et Findiro ‘’travaillent’’ Bozizé au corps, le conditionnent et le manipulent à satiété en vue des séances du conseil des ministres ou bien pour lui faire signer à la hâte moult décrets et instructions présidentielles toujours décriés. Car, il ne se passe plus rien en conseil des ministres, qualifié par Bozizé et Ndoutingaye ‘’de repère de traîtres, de voleurs et de suppôts des ennemis de la Nation’’ (lire France, l’Union européenne et les pays de la CEMAC).
Dès lors selon plusieurs sources, Ndoutingaye et Findiro ont du mal à cacher leur satisfaction lorsque Bozizé, dûment chapitré, agresse littéralement un ministre sur un dossier traité en amont par ces margoulins. La plupart des ministres du gouvernement sont devenus dépressifs du fait des propos injurieux et indignes que Bozizé débitent désormais lors des conseils des ministres et de diverses réunions. Et pour bien enfoncer dans le crâne des ignares qui ne voudraient toujours pas valider la prise du pouvoir effectif par le duo d’enfer, sur ‘’instructions’’ de Ndoutingaye, François Bozizé vient de nommer par décret Firmin Findiro au ministère chargé du secrétariat général du gouvernement, en remplacement du filou Michel Koyt, embastillé depuis deux semaines pour avoir asséché les caisses de la SONATU. Et qu’importe si l’intérim de ce ministère avait toujours été, semble-t-il, assuré par le ministre de la Fonction publique. Cela apprendra à Noël Ramadane de ne pas être né Gbaya. Conséquence immédiate de ce bras de fer, Abdou Karim Meckassoua, l’encore ministre des Télécommunications, désormais revenu de ses illusions primo-ministérielles, est totalement marginalisé quand il n’est pas dans le viseur de Ndoutingaye, qui le tient pour l’empêcheur ‘’de gouverner familialement en rond’’ et qui n’attend donc qu’un simple battement de paupières pour ‘’appuyer sur la gâchette’’. Il est en effet revenu aux oreilles du vice-roi que Meckassoua désapprouvait la célébration du coup d’état du 15 mars 2003 en général et surtout cette année à Ouandago, paisible bourgade du centre-est qui ne s’est jamais remise, 9 ans plus tard, des razzias des zagawas tchadiens accompagnant Bozizé dans son équipée. Selon une dernière confidence, revenant du Togo mais prenant les devants, Karim Meckassoua songerait très sérieusement à mettre la clé sous le paillasson à la première occasion. Les rats quittent le navire en perdition… 11
Un observateur attentif condamne d’ailleurs cette éternelle ‘’sanctification’’ d’un acte illégal (coup d’état) si on pense que Bozizé s’est déjà fait élire (certes frauduleusement) en 2005 et 2011. On sait également que rien ne va plus entre les libérateurs d’antan, Sylvain Ndoutingaye et Francis Bozizé se haïssant cordialement et le même Ndoutingaye rêvant d’accrocher le scalp de Parfait M’baye au bout d’une pique. Ambiance…
L’enfer, c’est les autres (Jean-Paul Sartre).
Je vous parlais récemment du climat de paranoïa et de haine ressassée par le clan au pouvoir. Vous n’avez aucune idée de la folie (il n’y a pas d’autre mot) qui irrigue les cerveaux de la petite caste recroquevillée autour de François Bozizé. Ils sont fous. Mais pour eux, l’enfer c’est les autres. Ce sont tous les étrangers, entendre non-Gbayas mais aussi et surtout, les pays de la CEMAC et la France. Devant tous ses visiteurs, Bozizé, sur les conseils de Ndoutingaye et Findiro, éructe, fulmine et postillonne : «Quand j’aurai mon pétrole, ils verront, quand j’aurai mon pétrole, ils verront… » répète-t-il en boucle. Ce pétrole, pour lequel il semble se réveiller un peu tard, devient une véritable fixation. Lorsque l’on sait qu’il a, dans un accord resté secret entre lui et Idriss Déby en 2002, laissé au Tchad l’exclusivité de l’exploitation du champ pétrolifère de Doba, dont la plus grande nappe se trouve pourtant en territoire centrafricain, on mesure aisément la tartufferie du personnage. Résultat, il jette aujourd’hui avec avidité son dévolu sur l’autre nappe plus au nord-est, vers Birao et la frontière soudanaise.
Bientôt la manne ?
Du reste, c’est essentiellement de pétrole que s’est entretenu Faustin Touadéra avec les autorités soudanaises, il y’a quelques semaines à Khartoum, à la tête d’une délégation pléthorique comprenant notamment Parfait M’baye, Jean Wilibyro Sacko, Antoine Gambi, l’inévitable Marylin Roosalem, Prosper Wodobodé, Francis Bozizé et toute une escouade de suiveurs… Il n’y a pas de petites dépenses.
Selon mes informations, il y a été acté que le pétrole de Bozizé, exploité par une société chinoise, sera écoulé vers le Soudan, par Port-Soudan, ville portuaire que la délégation a dûment visitée. Par ailleurs, il est également acté que si les chefs d’état de la CEMAC persistent à repousser avec dédain (ce qui enrage Bozizé) la candidature de Ndoutingaye à la présidence de la Commission de la CEMAC, le vice-roi reprendrait illico son ancien portefeuille des Mines, rebaptisé ‘’ministère des Mines et du Pétrole’’, qu’il cumulera de nouveau avec les Finances. Banco ! Si vous trouvez meilleur moyen de braquer le casino, vous m’écrivez… On comprend dès lors pourquoi, à son départ en avril dernier, ‘’après 8 longues années de mauvais et déloyaux services’’, ce ministère avait été prestement rattaché à la présidence de la République mais que c’est encore et toujours lui Ndoutingaye qui en est le véritable ministre. En effet, depuis la maladie (très opportune) de son ancien homme-lige Obed Namsio, entré imprudemment en dissidence contre le vice-roi, ‘’les choses sont rentrées dans l’ordre bozizéen’’. Ce dernier revenu des soins du Maroc n’a pas totalement retrouvé toutes ses facultés. On le voit, Bozizé n’entrevoit guère le surgissement du pétrole en terre centrafricaine comme un atout majeur de développement accéléré et durable, aux fins d’améliorer les infrastructures et les conditions de vie de ses compatriotes. Que nenni ! Il ne le conçoit qu’en termes de milliards à empocher et surtout comme un facteur de pied de nez à l’endroit de ses homologues de la sous-région qui, tous, exploitent déjà le précieux liquide en leurs contrées respectives : « Je serai plus riche qu’eux. Ils verront qui ira encore leur demander de l’argent… » Tel que… Il oublie donc très vite ou feint d’oublier tout ce qu’il doit à ses pairs de la sous-région, à commencer par Déby, Sassou Nguesso et Biya. Il est vrai que l’ingratitude est la vertu ( ?) des lilliputiens.
Autre information de première main, Jacques Vergès, le sulfureux avocat de Klaus Barbie et de… Laurent Gbagbo est passé à Bangui, à l’invitation de Bozizé, Ndoutingaye et Findiro. Il doit déposer une plainte en révision du contrat entre la RCA et AREVA, avec comme objectif de s’en mettre encore plein les poches au détriment du pauvre peuple centrafricain. Mais le plus important n’est pas là. Le vrai coup tordu, c’est que l’avocat de l’état centrafricain habituel, Me Emile Bizon, a été écarté, au profit de Vergès qui, pour cette opération, a perçu une avance de 100 millions FCFA dont l’avocat parisien s’est empressé de rétrocéder une partie au duo d’enfer. En réalité, le véritable avocat de l’état aujourd’hui, c’est Firmin Findiro. Circulez, il n’y a rien à voir. Instruction a été aussi donnée par Bozizé au vice-roi de traiter avec toute la rigueur qui se doit les entreprises françaises, « s’ils ne sont pas contents qu’ils partent nos amis chinois et indiens sont là ». Que Mocaf, Sucaf, Socatraf, Cfao, Areva et autres Bivac se le tiennent pour dit.
Chevalier de l’apocalypse
Enfin dire que Bozizé hait les chefs d’état de la CEMAC et les étrangers (sauf les chinois et les indiens) est un doux euphémisme. Et pour faire bonne mesure, son dernier leitmotiv obsessionnel, qu’il répète en boucle en écumant, les yeux révulsés : «Ces traîtres d’ambassadeurs, il faut les surveiller de près. Si leurs pays tentent quelque chose contre moi, il faut que tout le monde y reste. Personne n’en sortira vivant… ». Diantre ! Comme épitaphe, on peut faire mieux. Et pour vous donner une idée de la schizophrénie qui s’est emparé de Bozizé, instrumentalisé par Ndoutingaye et Findiro, le mercredi 21 mars 2012, Antoine Ntsimi vient d’être expulsé. Il arrivait à l’aéroport Bangui-Mpoko, en provenance de Douala. Alors, c’est vrai, l’encore président de la Commission de la CEMAC a poussé le bouchon un peu loin.
Si vous avez lu ma dernière contribution, vous savez donc je serai le premier à me réjouir que cet homme puisse retourner dans son Cameroun natal. Il est vrai que sa posture, faite de suffisance et d’arrogance, constituait une insulte pour le peuple centrafricain tout entier.
Je ne parle même pas de ses prédations, Antoine Ntsimi tapant allègrement dans la caisse de la CEMAC. Je l’ai dit et écrit, notamment pour stigmatiser l’article odieux rédigé, sur commande de Ntsimi, par un écrivaillon camerounais. C’est donc à ce titre que je m’autorise le droit de ne pas cautionner la manière avec laquelle cette affaire, qui a toutes les chances de dégénérer maintenant en conflit ouvert avec le Cameroun frère, vient d’être traitée. Le principe même de la rotation par ordre alphabétique à la présidence de la Commission ne saurait être remis en cause. C’est le tour de la RCA, point. Mais cela devrait être acquis sans déclencher une guerre, simplement parce que Ndoutingaye tient coûte que coûte à remplacer Antoine Ntsimi à la tête de la CEMAC. A quoi sert la diplomatie centrafricaine ? Les chancelleries de la sous-région sont averties. Celles des rares pays occidentaux ayant des représentations diplomatiques à Bangui devraient aussi le savoir. Un pogrom est en gestation. Le chevalier de l’apocalypse a enfourché sa monture démoniaque. Faut-il obliger les Centrafricains, peuple pacifique s’il en est, à tendre docilement le cou et attendre en silence d’être décapités ?
Michel Soupou
P.S : Je reviendrai très bientôt sur cette grave affaire de l’expulsion de Ntsimi ainsi que sur le scandale du prêt indien, ses ramifications et ses attendus. La place des voleurs est en prison et non dans leur lit douillet.