Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Sommaire

  • : centrafrique-presse
  • : informations générales sur la république centrafricaine et l'Afrique centrale
  • Contact

Recherche

Liens

27 mars 2013 3 27 /03 /mars /2013 06:16

 

 

 

MZ 4

 

 

RFI  mardi 26 mars 2013

 

Pourquoi les rebelles ont-ils gagné en Centrafrique ? Ont-ils été aidés par le Tchad et le Congo-Brazzaville ? Combien de temps vont-ils rester au pouvoir, et à quoi joue la France ? Autant de questions que Christophe Boisbouvier a posé à Martin Ziguélé, qui dirige le plus grand parti du pays, le Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC). En 2005, il avait réussi à mettre François Bozizé en ballottage. Aujourd'hui, il est de passage à Paris.

 

 

RFI : Ce coup d’Etat, c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle ?

 

Martin Ziguélé : Un coup d’Etat n’est jamais une bonne nouvelle, mais compte tenu de la situation de notre pays et des conflits, ce dénouement qui n’a pas entraîné beaucoup de pertes de vies humaines, nous ne pouvons qu’en prendre acte.

 

Le 11 janvier, les accords de Libreville semblaient équilibrés. Pourquoi cela n’a pas marché ?

 

Il faut dire les choses comme il faut. Ce n’est pas parce que le président Bozizé n’est plus au pouvoir, mais je crois qu'il avait une autre vision des choses. Il voulait un répit sur le front militaire, il voulait un répit sur le plan de la pression sur la Seleka pour essayer de revenir subrepticement au statu quo ante, c’est-à-dire à la situation antérieure à la crise. Et il a fait absolument preuve d’un autisme politique suicidaire, parce qu’il n’y a pas d’autres termes. Et c’est lui qui a créé cette situation.

Bien sûr, il ne faut pas sous estimer également le rôle de toute cette bande de courtisans, que vous retrouvez dans tous les régimes et qui lui ont dit : vous n'avez en face de vous que des rebelles et donc il ne faut rien céder. Il s’est employé sciemment à ridiculiser le Premier ministre Nicolas Tiangaye. Il a ainsi signé son décret de nomination après une séance qu’il a convoquée au palais de la Renaissance, où il a fait venir ses « applaudisseurs », comme on dit. Ceux-ci ont pendant trois heures injurié Nicolas Tiangaye avant qu’il ne signe le décret de sa nomination. Cela ne pouvait pas aller loin.

 

 

Est-ce qu’il a été lâché par ses amis Idriss Déby et Denis Sassou Nguesso ?

 

S’il y a véritablement un chef d’Etat en République centrafricaine qui a bénéficié du soutien des pays de la sous-région, avant son arrivée au pouvoir et pendant sa mandature, c’est bien le président François Bozizé.

 

Justement, est-ce qu’ils l’ont lâché ces derniers jours ?

 

Mais ils ne peuvent pas se substituer à lui. Cet arrangement politique qui a été mis en place à Libreville, c’était fondamentalement pour lui sauver la face. Mais comme le disait Boganda (le premier président de la République centrafricaine, ndlr) : « lorsque vous montrez une étoile à un demeuré, il voit votre doigt et il ne voit pas l'étoile ». Lui, il a pensé qu’il pouvait une fois de plus ruser, d’abord avec son peuple, et puis avec ses soutiens. Tout le monde était désespéré.

 

Est-ce qu’on peut imaginer un accord discret entre Ndjamena, Brazzaville et les rebelles de la Seleka ces derniers jours pour aider ceux-ci à prendre le pouvoir ?

 

Non, je ne fais pas de la politique fiction. Je ne peux pas parler des choses que je ne connais pas. Mais les chefs d’Etat ne pouvaient pas envoyer leurs armées à Bangui pour protéger quelqu’un qui manifestement n’était plus soutenu ni par son armée, ni par sa population !

 

 

Oui mais franchement, en décembre, Idriss Déby était prêt à bloquer l’avancée des rebelles et en mars, il n’a rien bloqué.

 

Mais il a bloqué l’avancée des rebelles en décembre pour permettre une issue politique à la crise. Et il y a eu les tests de Libreville en présence de plus de six chefs d’Etat. Et de retour à Bangui, des proches de lui, c’est-à-dire ses propres conseillers se relayaient sur les medias publics pour remettre en cause l’accord de Libreville, et pire encore, accuser les Etats qui l’ont sauvé de connivence avec la rébellion.

 

Ces derniers jours, vous saviez que Ndjamena et Brazzaville allaient laisser tomber François Bozizé ?

 

Je n’avais pas d’éléments factuels, mais je comprenais très bien qu’il avait lassé tout le monde, surtout lorsqu’on avait du mal à relancer la médiation, je comprenais que quelque part le mécanisme se grippait.

 

Cet appel à l’Afrique du Sud, est-ce que cela a précipité les choses ?

 

Je ne le pense pas. Quand vous comprenez le fonctionnement de Bozizé, il joue toujours un allié contre un autre pour toujours gagner du temps.

 

C’est un échec pour Jacob Zuma ?

 

Le président Jacob Zuma a été entraîné dans ce guêpier par son côté homme d’affaires sud-africain, intéressé naturellement par les activités minières en Centrafrique, qui l'ont vraiment entraîné dans un traquenard. Parce que l’Afrique du Sud se retrouvait en train de défendre quelqu’un de ce type-là ; et surtout, perdre des hommes pour une cause perdue d’avance. Cela fait qu’on se pose des questions. Les pays de la sous-région avaient une connaissance plus intime que l’Afrique du Sud des réalités politiques centrafricaines et des conditions d’une sortie réelle de la crise

 

Est-ce que François Hollande a eu raison de rester en retrait. Est-ce que Nicolas Sarkozy aurait fait la même chose s’il avait gagné l’année dernière en France ?

 

Je ne sais pas, je ne fais pas de la politique fiction mais la position du président Hollande est à saluer. Il a refusé d’intervenir, comme en 2006, comme en 2007.


C’est-à-dire qu’il a fait différemment de Jacques Chirac en 2006, 2007 ?


Il l’a fait différemment de ses prédécesseurs et c’est tout à son honneur. Parce que c’est cette pratique-là qui a infantilisé un peu les dirigeants. Ils se disaient : « Je fais ce que je veux et lorsque ça tourne mal, il y aura la France pour venir me sauver ». Et cela, vous comprenez très bien que ça ne pouvait pas durer éternellement.

 

 

Aujourd’hui Michel Djotodia s’autoproclame président. Est-ce que ce n’est pas mauvais signe pour la suite  ?

 

Vous savez la nature a horreur du vide. Mais ce qui est important, c’est qu’il a dit également qu’il reste dans l’esprit de l’accord de Libreville. Et là-dessus, nous serons vigilants.

Franchement, est-ce que vous ne risquez pas d’être à nouveau le dindon de la farce comme face à François Bozizé deux ans après son arrivée au pouvoir en 2005 ?

Il faut que ce gouvernement ait une feuille de route précise, que la durée de la transition soit bien claire et qu’il soit précisé également, comme cela est dit dans l’accord de Libreville, que ni le président de la transition, ni le Premier ministre de transition, ni les membres du gouvernement de transition, ne seront candidats aux prochaines élections présidentielles.

 

Rien ne vous dit que Michel Djotodia respectera cet accord ?

 

Je ne voudrais pas faire de procès d’intention. Aujourd’hui l’esprit de l’accord de Libreville doit demeurer, à savoir que les animateurs de la transition c’est-à-dire les responsables de la transition, ne doivent pas être candidat aux élections présidentielles.

 

Y compris Michel Djotodia ?

 

Y compris tous ceux qui auront à jouer ce rôle-là, qu'il s'agisse du président, du Premier ministre, ou des ministres. C’est l’esprit qu’il faut voir. Il faut garder cela à l’esprit, pour nous donner une chance de ne pas nous perddre dans des querelles de positionnements personnels.

Partager cet article
Repost0
Centrafrique-Presse.com - dans Interview