(L'Observateur Paalga 26/12/2012)
Depuis quelque temps, François Bozizé doit être en train de lire et de relire la Bible sous toutes ses coutures. Le pasteur évangélique qu’il est, qui troque souvent son costume
de chef d’Etat contre celui de ministre du culte, doit sans doute retrouver le réconfort dont il a besoin.
Il doit bien se demander si cette mise en garde de Jésus à un de ses disciples dans l’évangile de Matthieu 26 v52 : «Remets ton épée à sa place; car tous ceux qui prendront l'épée périront par
l'épée» ne va pas s’appliquer à lui. En effet, le général va-t-il partir par les mêmes moyens que ceux par lesquels il est venu au pouvoir ? En rappel, c’est le 15 mars 2003 qu’il a pris le
pouvoir, par les armes, avec l’appui du président tchadien, Idriss Deby; malheureusement, il n’aura pas le temps de s’attaquer au vrai défi du développement, occupé qu’il est à gérer les
multiples rébellions et mutineries qui ont fini par ravager le tissu économique de ce pays aux immenses ressources naturelles.
Il y a de cela deux ans, les troupes tchadiennes ont dû déloger les rebelles de Birao (nord de la Centrafrique) pour sauver le tombeur de Patassé. Cette année encore, le voici confronté à la
coalition Séléka, qui regroupe plusieurs rébellions revendiquant notamment le «respect» des différents accords de paix signés entre 2007 et 2011, prévoyant un processus de désarmement et de
réinsertion des anciens combattants. Quelque deux (2) semaines d’hostilités ont suffi à inquiéter le régime de Bangui, qui a dû faire appel de nouveau à son voisin du Nord pour sauver les
meubles.
Face aux loyalistes, qui ne font visiblement pas le poids, les croquants ont fait une percée significative, provoquant ainsi un sommet des chefs d’Etats de la communauté des Etats d’Afrique
centrale (CEMAC) à N’Djamena vendredi dernier. Ceux-ci n’ont pas eu d’autres choix que de demander au pouvoir en difficulté d’engager des négociations avec les insurgés tout en demandant «le
retrait des rebelles à leur position de départ dans un délai n’excédant pas une semaine», comme le veut Bangui.
Qu’à cela ne tienne, les assaillants, qui avaient promis de geler leurs opérations pour favoriser les négociations, sont passés à l’offensive samedi en s’emparant en trois (3) jours de trois (3)
nouvelles villes. On a l’impression que l’histoire repasse les plats dans cette Centrafrique, car ce dont on accuse Bozizé, c’est ce qu’il reprochait à celui qu’il a déposé sans
coup férir. Une fois le pouvoir acquis, il s’est lancé dans son exercice solitaire, et il doit être de ceux qui pensent qu’il faut se scotcher au fauteuil.
Ceux qu’il faut plaindre, ce sont les civils pris entre deux feux avec le drame humanitaire qui pourrait s’en suivre si les hostilités devaient continuer. Bozizé ou ses adversaires du moment,
c’est blanc bonnet, bonnet blanc .L ‘expérience a montré que ceux qui aspirent au pouvoir deviennent allègrement de véritables fossoyeurs des idées qu’ils défendaient bec et ongles. Espérons que
le président pasteur fera sienne cette sagesse de Salomon dans Ecclésiaste 3, qui dit qu’il y a un temps pour toute chose sous le soleil, pour ne pas ramer à contre-courant de l’histoire au
détriment de son peuple.
Abdou Karim Sawadogo
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