Il y a dix jours que le Général Bozizé a pris un décret mettant en place le Comité national des marchés publics. Ce décret aurait pu passer inaperçu, n’eût été la présence parmi les membres nommés d’un personnage sulfureux, haut en couleurs et que la république n’arrive pas à dompter. Il s’agit de M. Aurel Abdraman, actuel directeur général adjoint de la Banque Sahélo-saharienne pour l’Investissement et le Commerce (BSIC).
Pour mémoire, il faut retenir que M. Aurel est celui qui a été à l’origine de l’expulsion manu militari de l’ex-dg de la BSIC, M. Barry Gaoussou de nationalité malienne ; il est également celui contre lequel pèserait de graves présomptions d’empoisonnement de M. Jonathan Kpidou* et enfin celui par la faute duquel le successeur de M. Gaoussou, le tchadien Doutoum Atteib a été injustement sanctionné et traduit comme lui-même devant le conseil de discipline de Direction Générale de la BSIC à Dakar.
Contre toute attente et malgré la levée de sa sanction par le dernier Conseil d’administration, l’ex-dg tchadien a refusé de reprendre du service et est reparti chez lui où il est depuis lors devenu Ministre Conseiller Economique à la Présidence de la République. M. Aurel Abdraman est resté, lui, curieusement au même poste de DGA et un autre dg a été désigné en la personne du Béninois M. Wallis Zoumarou.
On est pour le moins surpris du silence du gouvernement centrafricain devant l’instabilité occasionnée à la tête d’une institution bancaire qui n’en a pas vraiment besoin par un individu de la trempe d’Aurel Abdraman.
Cet acolyte notoire de Ndoutingaï qui traine toujours avec lui un pistolet automatique sur lui, déclare à qui veut l’entendre que rien ne lui arrivera et que le personnel n’a pas à se fatiguer. Son « atout majeur » serait le fait pour lui d’avoir en 2003, hébergé le Général Bozizé chez lui, à Berbérati quand il dirigeait, pour le malheur de la Banque Internationale pour la Centrafrique (BICA) sa succursale dans cette localité d’origine du trublion.
Cette agence a frôlé la faillite, ce qui lui a valu son licenciement dare-dare, en partie pour malversation, en partie pour incompétence notoire. Abrité sous le parapluie de l’ex demi-dieu Ndoutingaï, alors que tous les indicateurs n’étaient pas en sa faveur, il sera néanmoins désigné comme DGA de la BSIC/Centrafrique, à la création de celle-ci en 2008.
Comme si toutes les charges qui pèsent contre lui ne suffisent pas, Bozizé a trouvé le moyen de le nommer comme membre du Comité des marchés publics – véritable pied de nez et défi à la bonne gouvernance, à la décence et au bon sens.
Ce Comité, véritable coquille vide, ne présente d’intérêt que pour son auteur pour autant qu’il donne l’illusion aux bailleurs et à la communauté financière internationale qu’il existe un cadre institutionnel transparent pour l’attribution des marchés publics. Il n’en est rien en réalité et l’attribution de gros marchés publics continuera à se faire de gré à gré, entre le ministre des finances et les entreprises de la bozizie qui ont pignon sur rue et pour noms : SOGETRAC, LA SEMENCE, ING-CONSTRUCT, MGF, etc.
Comme son homologue chargé de la lutte contre la corruption mais qui depuis 2008 n’a même pas réussi à faire épingler une figure emblématique du gouvernement – qui n’en manque pas – le comité des marchés publics est voué au même destin : donner l’illusion à la communauté internationale d’agir dans la transparence. L’adjudication des marchés publics en dehors de ce cadre a beaux jours devant elle. Pauvre Centrafrique !
Rédaction CAP
* Depuis la mort plus que suspecte de ce haut cadre fin mars à Bangui, aucune réaction du Parquet n’est enregistrée à ce jour.