DISCOURS D’OUVERTURE DE LA SESSION ORDINAIRE DU CONSEIL POLITIQUE NATIONAL DU MLPC
BANGUI 16 et 17 JUIN 2011
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations internationales accréditées en République Centrafricaine,
Mesdames et Messieurs les Représentants des Partis Politiques,
Distingués Invités,
Camarades Conseillers Politiques Nationaux,
Camarades membres du Bureau Politique,
Militantes et militants,
Chers Sympathisants.
Avant de commencer, je vous invite tous à vous lever et à observer une minute de silence à la mémoire du camarade Ange-Félix PATASSE, ancien Président de la République centrafricaine et longtemps Président de notre parti, membre éminent du Front pour l’Annulation et la Reprise des Elections du 23 janvier 2011 (FARE- 2011) rappelé à Dieu en ce triste jour du 5 avril 2011 à Douala au Cameroun, ainsi que pour la mémoire de notre aîné le Général Timothée MALENDOMA, Président du Forum Civique (FC) et du Collectif des Forces du Changement (CFC) qui nous a quittés le 12 décembre 2010, et enfin, pour celle de notre ami et frère Ferdinand DAGO, Président de l’association politique LONDO, Chargé de liaison du FARE 2011, décédé le 17 avril 2011et dont nous gardons tous le souvenir de la chaleur humaine et de l’engagement à nos côtés.
Merci.
Comme vous le savez tous, après plusieurs interdictions de sortie du territoire national qui ont été imposées au Président Patassé comme à tous les responsables du FARE 2011, à la suite de nombreuses interventions nationales et étrangères devant ce cas humanitaire, il avait enfin pu quitter Bangui le samedi 2 avril 2011 pour se rendre à Malabo afin de recevoir des soins médicaux que son état de santé nécessitait. Malheureusement comme vous le savez, la maladie n’a pas attendu le dénouement des intrigues nées de la paranoïa politico-sécuritaire du régime, et tout ce temps perdu lui fut fatal, avant même qu’il n’arrive en Guinée-Equatoriale où l’attendait son généreux hôte le Président Teodoro Obiang Nguéma Mbasogo, fidèle dans l’amitié qui les liait, et que nous saluons.
De même, nous saluons Son Excellence Paul BIYA, Président de la République sœur du Cameroun, qui s’est personnellement occupé des soins du défunt Président Patassé, puis de toutes les contraintes préalables au retour de la dépouille mortelle en terre centrafricaine.
u nom du Bureau Politique et en mon nom propre, je voudrais adresser mes souhaits de bienvenue et mes remerciements à tous nos invités qui ont bien voulu faire le déplacement pour être ici présents ce matin à l’ouverture de nos travaux.
Mes remerciements vont plus particulièrement à nos frères et sœurs des partis réunis au sein du FARE-2011, avec qui nous menons tous les jours sur le terrain cette lutte âpre, difficile, périlleuse mais enthousiasmante, contre cette autocratie rampante qui tente par la terreur, l’arbitraire et les dénis de droit, de nous ramener aux heures sombres du monopartisme , de la loi de la jungle et de l’obscurantisme.
Le MLPC qui est justement né en février 1979 dans la lutte contre la dictature, voudrait par ma voix, très solennellement, réaffirmer notre totale disponibilité pour renforcer notre unité d’action, pour le plus grand bénéfice de notre démocratie et de notre peuple.
J’adresse mes salutations militantes à tous les camarades membres de notre Conseil Politique National venus de nos seize fédérations réparties sur tout le territoire national. Le Bureau Politique, à travers ma voix, est sensible à votre engagement jamais démenti pour notre Parti.
Camarades,
Mesdames et Messieurs,
Honorables invités,
La présente session ordinaire de notre Conseil Politique National est essentiellement consacrée à trois points, à savoir :
- l’examen du rapport politique, moral et financier
- la prorogation du mandat des organes du Parti
- l’examen des sanctions contre certains camarades
Le premier point concerne l’examen du rapport faisant état du travail accompli par le Bureau Politique, sous ma direction, sur le triple plan politique, moral et financier depuis notre Conseil Politique National extraordinaire du 19 juin 2010. Cette période couvrant également l’ensemble du processus électoral, il s’agira pour nous de procéder à une analyse sans complaisance aucune du dispositif électoral et de notre participation à ce processus, afin que le Parti affine sa démarche politique par rapport à l’environnement national et international.
Le second point concerne la prorogation du mandat des différents organes du Parti jusqu’au prochain congrès. Lors de la session extraordinaire du Conseil Politique National du 19 juin 2010, vous aviez déjà décidé par votre Résolution N°1 de renvoyer en juin 2011 notre IVème Congrès ordinaire prévu pour juin 2010. Dans l’intérêt du Parti, je vous demanderai une fois de plus de proroger le mandat des différents organes de direction du Parti jusqu’au prochain congrès ordinaire, que nous devons cependant tenir impérativement courant 2012.
Enfin, le troisième point avant les divers, concerne l’examen des sanctions que le bureau politique a prononcées à l’encontre de certains camarades conformément à nos statuts et à notre règlement intérieur. Les dossiers des camarades sanctionnés ont été régulièrement transmis à la Commission de Contrôle et d’Arbitrage (CCA), qui vous soumettra ses conclusions pour votre décision finale, dans l’intérêt bien compris du Parti et de nos militantes et militants.
Eu égard à la période où se tient notre assise, je voudrais procéder à une rapide analyse de la situation politique, sécuritaire, économique et sociale de notre pays depuis le dernier Conseil Politique National du 19 juin 2010.
1 Sur le plan politique
Camarades, je vous disais dans mon discours à l’ouverture du CPN du 19 juin 2010, en citant Nelson Mandela, que l’arme absolue du peuple contre toute dictature active ou rampante, ce sont les élections. C’est pourquoi si vous avez du mal à définir la nature d’un régime politique, regardez seulement comment il organise des élections.
En d’autres termes « dis-moi comment tu organises des élections, et je dirai qui tu es ».
Camarades, depuis l’élection de Barthélémy BOGANDA au Grand Conseil de l’Afrique Equatoriale Française(AEF) jusqu’à nos jours, nous n’avons jamais connu des élections comme celles du 23 janvier 2011.
D’ailleurs, si les colonisateurs avaient été comme nos dirigeants d’aujourd’hui, ils n’auraient certainement pas permis à BOGANDA de faire campagne et d’être élu.
Après la mort de Boganda, les Centrafricains ont connu des élections multipartites globalement sincères sous Dacko 1 et 2, ensuite sous Kolingba en 1993, puis sous Patassé en 1998 et 1999, et même dans une certaine mesure en 2005 sous le régime actuel. Mais jamais, de mémoire de Centrafricain, nous n’avons connu des « élections » aussi chaotiques, problématiques et décriées que celles du 23 janvier 2011
En effet, tous les Centrafricains, et tous les observateurs sérieux de la vie politique centrafricaine s’accordent à reconnaître, à dire et à écrire que les prétendues élections de 2011 sont une véritable injure au peuple centrafricain, car cette mascarade électorale a ramené notre pays au rang des « Etats à la démocratie douteuse ».
Nous avons tout vu lors de ce processus électoral, comme lors des scrutins eux-mêmes :
- des listes électorales manuscrites non affichées et non corrigées ;
- la mise en circulation de deux types de cartes d’électeurs différents ;
-les pressions multiformes de l’administration territoriale, civile et militaire sur les électeurs ;
- les fausses cartes d’électeurs mises en circulation en milliers d’exemplaires ;
- le non-respect du vote des forces de défense et de sécurité 48 heures avant le scrutin ;
- l’interdiction faite par le Président de la CEI lui-même, par communiqué radiodiffusé, aux Présidents de bureaux de vote de remettre aux représentants des candidats de l’opposition les copies des procès-verbaux et feuilles de résultats. C’est ainsi que sur 4618 bureaux de vote, le MLPC n’a reçu que 100 procès-verbaux ;
- l’expulsion des délégués des candidats des bureaux de vote et centres de dépouillement ;
- le refus d’appliquer le Code électoral ;
- Etc. etc.
La quasi-totalité des observateurs nationaux et internationaux sont arrivés aux mêmes conclusions dans leurs différents rapports : les résultats de ces élections sont sujets à caution à cause des profonds dysfonctionnements et des graves irrégularités constatés. Ce n’est pas le fruit du pur hasard si les résultats du sondage effectué par l’Institut Panos de Paris du 21 au 25 mars 2011en RCA, font ressortir que plus de la moitié de la population centrafricaine, 54% exactement, ne croit pas à la fiabilité des opérations électorales pour l’élection présidentielle. Pour les élections législatives, 56% de la population ne croit pas à la fiabilité des opérations électorales.
Toujours selon les résultats de ce sondage, 69% des personnes sondées se disent surprises par le résultat des élections présidentielles, tandis que 56% le sont pour les élections législatives.
Comme vous le voyez, la population centrafricaine, la principale concernée, n’est pas dupe. Elle ne croit pas à cette mascarade. Les différents plaidoyers pro domo ne convainquent et ne convaincront personne.
Ces élections doivent être annulées et reprises conformément à la Constitution, et surtout conformément à un code électoral qui devra être profondément remanié avec la participation des forces politiques de l’opposition démocratique. Ce code électoral paritairement revisité devra impérativement tenir compte des dysfonctionnements et irrégularités qui ont entaché les derniers scrutins et lui ont ôté toute crédibilité.
Naturellement, nous continuons à exiger du gouvernement la publication de l’audit de la tristement célèbre Commission Electorale Indépendante avec toutes les conséquences de droit, et en plus de cela, nous exigeons un audit financier et administratif de tout le cycle électoral, quelle que soit l’origine des financements. Il s’agit là d’une exigence minimale de transparence et de bonne gouvernance que ne saurait rejeter un gouvernement qui n’aurait rien à se reprocher.
Ces conditions réunies, l’ensemble du cycle électoral doit être politiquement géré de manière partagée par le pouvoir et l’opposition.
Une élection est le libre choix par les citoyens, de certains d’entre eux pour la conduite des affaires publiques. Ce procédé permet aussi de choisir une orientation politique. Dès lors, il convient de savoir quelle signification donne-t-on au mot élection en Centrafrique et quelles en sont les règles ? Si la réponse est : composition du corps électoral manipulée, liste électorale fantaisiste et affichée seulement le jour du vote, bourrage des urnes, intimidation et violence contre les électeurs par la garde présidentielle, brutalités et agressions physiques orchestrées par le parti au pouvoir et par-dessus le marché, une Commission électorale prétendument « indépendante » mais en réalité aux ordres, alors faisons l’économie d’élections dans notre pays.
À ce jour, ces questions primordiales demeurent sans réponses. En vue de remédier à ces aléas et de relever le défi d’une rigoureuse transparence en matière électorale, il faut introduire un traçage biométrique des listes électorales et des cartes d’électeurs car nous avons eu affaire lors des dernières élections à de l’esbroufe et à la danse du scalp autour des données électorales manipulées par la Commissions Électorale dite Indépendante.
Notre pays étant très peu peuplé, la mise en œuvre d’un nouveau fichier électoral et la production des cartes d’électeurs numérisées avec photo ne prendra pas beaucoup trop de temps et ne coûtera pas trop chère. L’introduction de la biométrie dans le système électoral participera d’une certaine façon, à la recherche de la transparence électorale.
La mise en place de la biométrie repose sur trois étapes fondamentales :
- l’enrôlement, c’est-à-dire le recueil d’informations de l’ensemble de la population afin de permettre la vérification de l’identité des citoyens ;
- le traitement informatique des données qui permet de comparer l’ensemble des données biométriques et détecter les anomalies ;
- la production des titres sécurisés et personnalisés comme les cartes d’identité, cartes d’électeur, cartes de fonctionnaire, permis de conduire, et autres.
Tout cela ne peut être réalisé que si le pouvoir fait enfin montre d’une volonté politique non équivoque.
Ne nous laissons pas impressionner ni décourager par les discours fallacieux et les arguments spécieux de certains, tendant à dire qu’il faut tourner la page de ces élections et passer à autre chose alors que cette parodie d’élections du 23 janvier 2011 est à n’en point douter, un grave déni de démocratie inacceptable et une véritable honte pour notre pays.
En outre, le fait qu’un seul individu soit actuellement tout à la fois Président de la République et député d’une circonscription de la capitale est une singularité qui distingue encore négativement notre pays dans le concert des nations. Une autre preuve éclatante que ces élections groupées ne sont pas sérieuses est leur annulation partielle par la Cour Constitutionnelle dans 13 circonscriptions législatives dont elle demande la reprise, ainsi que l’inversion des résultats dans 12 autres. Au total donc, 25 circonscriptions électorales sur 105 sont remises en cause par cette Cour, soit 24% des circonscriptions. S’agissant des suffrages ainsi remises en cause, elles représentent près de 30% des suffrages exprimés. S’agissant d’élections groupées, comment ce que la Cour annule pour les législatives ne peut-il pas être valable pour les présidentielles ? Qui peut croire à une telle alchimie ?
C’est le sens du combat que nous menons, dans le cadre du Front pour l’Annulation et la Reprise des Elections du 23 janvier 2011 (FARE- 2011) avec les autres partis et mouvements frères. Cette lutte est juste et je puis vous assurer, elle a déjà eu beaucoup d’échos favorables à l’extérieur de notre pays pour la simple raison qu’ aujourd’hui , avec le vent de liberté qui souffle partout dans le monde, l’opinion internationale est surprise de constater que le pouvoir centrafricain rame à contre-courant de l’histoire, en tentant de phagocyter les justes et légitimes aspirations de notre peuple. C’est un combat pour le respect du peuple centrafricain et de son suffrage, c’est un combat pour le respect de notre constitution, c’est un combat pour la survie de la démocratie et du multipartisme chèrement acquis dans notre pays.
Les Centrafricains n’ont pas lutté pendant des décennies pour la démocratie pour se retrouver avec une Assemblée nationale familiale, monocolore, inodore et sans saveur et dirigée par des personnalités qui revendiquent sans vergogne la non-interpellation des membres du gouvernement comme un gage de fidélité à l’exécutif. Qui de la fonction et du pouvoir sacré de contrôle de l’exécutif par le législatif même s’il est vrai qu’avec la configuration actuelle de cette chambre, il n’est point besoin de se faire beaucoup d’illusions. On aura tout vu !
Naturellement, au moment où nous menons cette lutte, Camarades, au moment où vous menez cette lutte sur le terrain au prix de sacrifices diverses et de vos vies, des camarades et non des moindres, des cadres du Parti en qui vous aviez placé hier toute votre confiance, ont choisi de vous trahir et de trahir le Parti, comme en son temps Judas Iscariote a trahi le Christ pour trente deniers.
Ils ont choisi de vous abandonner au milieu du fleuve pour rallier ceux qui ont pourtant faussé et volé ces élections, et refusé de mettre en œuvre la feuille de route du Dialogue Politique Inclusif. Ces camarades ont été eux-mêmes victimes de cette mascarade électorale, mais l’appel, que dis-je, l’appât du gain facile a été plus fort que leur conscience politique. Ils ont humilié le Parti, ils ont trahi les militants. Ils ont joué avec nos vies.
Camarades, si vous voulez que le Parti soit solide et respectueux d’une éthique et d’une morale politique, ces camarades qui ont trahi doivent être sévèrement sanctionnés. Si vous ne le faites pas, vous connaissez bien l’adage qui dit « il n’y a jamais deux sans trois », et d’autres camarades suivront, en se disant que ceux qui ont trahi hier ont réussi à éviter les sanctions en manipulant des camarades naïfs et/ou intéressés.
Mettons fin aux trahisons, à la duplicité et à la malhonnêteté politique qui font tant de tort à notre parti et à notre pays, et qui décrédibilisent la classe politique aux yeux de nos concitoyens. La survie du Parti est à ce prix, douloureux certes mais nécessaire.
J’espère que vous m’avez compris car c’est seulement ainsi que le MLPC vaincra les forces du mal, et les Lucifers de la division !
Dans le même ordre d’idées, le MLPC doit lancer un vaste chantier de la réconciliation avec tous nos anciens camarades qui, pour diverses raisons, se sont éloignés de la maison mère. L’adhésion à un parti étant individuelle, j’en appelle solennellement à leur raison pour qu’ils reviennent tous sans hésitation dans le Parti, afin que nous préparions ensemble le congrès de l’Unité de 2012. Mais avant ce congrès, nous devons procéder à une profonde restructuration du Parti. Tous les militants doivent repartir dans leurs cellules de base. C’est à partir d’elles que nous mettrons en place les sections, puis les sous-fédérations et enfin les fédérations. Ainsi nous arriverons au congrès avec des organes restructurés, réconciliés et dynamiques, largement ouverts aux camarades qui auront décidé de nous rejoindre, et à tous les Centrafricains qui souhaitent prendre leur destin en mains.
Dans cette perspective, je demanderai au Conseil Politique National du Parti de procéder à la réhabilitation à titre posthume, du camarade Ange Félix PATASSE.
S’agissant de la situation sécuritaire, la mort du médecin-chef de la préfecture sanitaire du Haut-M’bomou et de son chauffeur, le rapt de Mgr Edouard Mathos, Evêque du diocèse de la Ouaka, par les éléments d’un mouvement de rébellion, nous montrent à quel point le Désarmement, la Démobilisation et la Réinsertion (DDR) est à notre pays ce que le cœur est à l’homme. Sans sécurité, il n’y aura pas de développement possible, et ce ne sont pas les incantations de nos autorités qui changeront la donne. Les populations centrafricaines en ont assez de l’insécurité qui les empêche de voyager et de vaquer librement à leurs occupations dans leur propre pays. Rien ne bouge concrètement sur le terrain, alors qu’on assiste périodiquement à la valse des multiples responsables ministériels du DDR.
On nous annonce périodiquement des phases dites « cruciales » du DDR mais sans progrès réel sur le terrain. Désormais un silence de plomb pèse sur l’utilisation des 8 milliards de francs CFA que la CEMAC et la BEAC ont débloqués au profit de notre pays depuis le premier semestre 2009 et qu’on nous a assuré qu’ils ont été logés dans un compte à la BEAC pour financer le DDR. Les populations des préfectures sous l’emprise des mouvements de rébellion politico-militaire vivent au rythme des menaces et des privations de toutes sortes, et n’eussent été les actions ô combien salvatrices des ONG des pans entiers de nos régions seraient retournés à l’âge de la pierre taillée et du troc. Que signifie pour ces populations l’Etat ? Où est l’Etat ? Que fait-il ? Quelle est la preuve de l’existence de l’Etat dans leur vie quotidienne ?
La gestion du programme de démobilisation, de désarmement et de réinsertion des combattants de diverses rébellions qui écument notre pays par le Comité de pilotage est un échec cuisant. La relance et la réalisation du processus DDR doivent désormais passer par la mise en place d’une structure plus neutre que le coûteux et actuel Comité de pilotage dont l’inefficacité est patente dans la réalisation effective d’un vrai désarmement que les Centrafricains et le pays attendent tous depuis si longtemps. Il faut sortir du stérile tête à tête gouvernement et mouvements politico-militaires.
Quant à nos compatriotes du Haut-Mbomou, du Mbomou, de la Haute-Kotto et même de la Vakaga, ils vivent sous la peur perpétuelle des agressions et attaques de la LRA. Vous avez tous entendu comme moi le général BOZIZE affirmer que la RCA n’a pas de problème politique avec la LRA. Le vrai problème, c’est que la LRA semble en avoir avec nos populations, et cela suffit pour la combattre par tous les moyens. Il me semble que c’est là le devoir régalien d’un Etat dirigé de surcroît par un officier général. Sinon, vers qui ces populations doivent-elles se tourner pour être protégées ? Vers qui doivent-elles aller pour avoir la vie sauve ?
L’actualité nous oblige à réaffirmer que le MLPC en sa qualité de parti social-démocrate est hostile à tout communautarisme. Républicains que nous sommes, nous affirmons que tous les citoyens d’un pays sont égaux en droit et en devoir, quelles que soient leurs origines et leurs croyances. Les hommes et les femmes qui ont choisi de vivre en RCA doivent bénéficier, comme les Centrafricains, de la protection de la puissance publique, et comme les Centrafricains, ils doivent également respecter les lois et règlements de la République. L’ennemi n’est pas l’étranger, l’ennemi c’est le sous-développement et ses conséquences politiques et psychosociologiques.
2- Sur le plan économique
Comme je le dis toujours, je ne vois pas ce que je dois vous apprendre sur notre économie, vous qui en majorité venez de l’intérieur de notre pays et qui en vivez quotidiennement les réalités.
J’ai entendu, comme vous, beaucoup de choses avant les élections. Nous avons tous suivi la cérémonie en grande pompe de la pose de la première pierre d’une cimenterie en juin 2010. Alors qu’on nous annonçait la production du premier sac de ciment six mois plus tard, c’est-à-dire en décembre 2010, force est de constater qu’en juin 2011, c’est-à-dire un an plus tard, nous attendons toujours ce premier sac de ciment.
De même, depuis 2007, au Palais de l’Assemblée Nationale, nous avons suivi la grande cérémonie de lancement tambour battant de la Cité lumière KNK sur l’Ile Bongossoua, appelée aussi Ile des Singes, avec ses 320 milliards de F CFA d’investissements prévus par les princes du Golfe et la création de plus de 10 000 emplois au profit de la jeunesse. A ce jour, soit plus de quatre ans après, il n’y a toujours pas le moindre commencement d’un début de chantier sur l’Ile des Singes.
Quoi d’étonnant quand on sait que notre pays faute de pouvoir attirer de vrais investisseurs, ne traite seulement qu’avec de pseudos hommes d’affaire au pedigree douteux. Dès lors, on peut déplorer le manque d’une politique sérieuse et attractive de promotion des investissements, ce qui a pour conséquence de nous faire occuper depuis plusieurs années sans discontinuer, le dernier rang du classement mondial de Doing Business..
D’ailleurs comment peut-on raisonnablement parler de ces projets quand les problèmes d’électricité et d’eau se posent avec acuité depuis très longtemps malgré les multiples promesses fallacieuses qui nous sont constamment faites. En effet, les descentes dans les rues de la capitale Bangui ces derniers jours témoignent de l’incapacité du gouvernement à satisfaire les besoins vitaux de ses populations qui pourtant semble-t-il ont voté massivement pour le régime en place.
Notre pays collectionne les mirages et les éléphants blancs qui ne dépassent jamais le stade des poses de première pierre et des effets fallacieux d’annonce que le régime en place affectionne particulièrement par seule démagogie mais dont nos compatriotes ne sont pas dupes.
Nous attendons toujours la réhabilitation du secteur du diamant et d’or, ainsi que la réouverture des bureaux d’achat après les multiples opérations de racket et de spoliation des collecteurs de diamant, et la restitution de leurs biens.
Nous attendons aussi le démantèlement des multiples barrières illégales qui jonchent nos routes et qui empêchent la fluidité de la circulation des personnes et des biens. Tous les transporteurs sont fatigués, et la population désabusée.
Nos routes, y compris les rues de Bangui, sont devenues des nids de poule (dou ti kissoro)
Plusieurs ouvrages d’art sur des artères principales de la capitale sont défectueux depuis des mois et constituent un grave danger pour les usagers mais on est frappé par l’indifférence du gouvernement devant une telle situation.
Le pouvoir a trouvé une nouvelle technique pour ne pas faire face aux obligations de la dette intérieure : chaque année, et par décret, il gèle systématiquement les créances dues aux opérateurs économiques qui ont pourtant fourni des biens et services à l’Etat, tout en choisissant de n’honorer que celles des opérateurs politiquement proches du régime. Comment peut-on prétendre développer l’économie d’un pays en asphyxiant financièrement de petits et moyens entrepreneurs ? Surtout que leur accès à des crédits bancaires est hypothéqué par la politique de l’endettement massif de ce même gouvernement auprès de ces institutions financières pour le paiement des salaires des fonctionnaires et agents de l’Etat, réduisant ainsi leurs capacités de financement de l’économie.
Nous sentons bien qu’il n’y a aucune vision d’ensemble par le pouvoir de la politique économique de notre pays. Il compte exclusivement sur l’extérieur pour financer notre développement à notre place. C’est ainsi qu’après avoir vendu au peuple les prétendus 300 milliards du DSRP I de Bruxelles en 2008, on nous ressort aujourd’hui une autre Table Ronde encore à Bruxelles avec l’effet d’annonce d’autres centaines de milliards.
Nous vivons de mirages financiers en mirages miniers, dont le dernier en date est le pétrole de Birao. On ne se développe pas par hasard, ni par des effets d’annonce, c’est bien connu.
3. Sur le plan social
La République centrafricaine, pays à forte potentialité et à vocation agricole et pastorale, connait une chute continue de ses productions agricoles et animales. Les filières du coton, du café, du tabac, de l’arachide, du manioc, du mil, etc. sont toutes sinistrées, ou ont tout simplement disparu. D’ailleurs on signale la pénurie de manioc, aliment de base du centrafricain depuis ces derniers jours à Boali et à Bouar.
Le monde rural complètement détruit par les rebellions et plusieurs années de mévente des produits, est laissé à l’abandon.
Pour la première fois, dans l’histoire de notre pays, la famine sévit partout sur le territoire national et plusieurs centaines de milliers d’enfants centrafricains et des mères sont victimes d’une scandaleuse malnutrition sévère et dont les échos défraient la chronique internationale.
Tant à Bangui qu’en provinces, le VIH/SIDA et les maladies opportunistes comme le paludisme et la tuberculose ne cessent de ravager les Centrafricains, hypothéquant gravement le développement et l’avenir de notre pays.
La mortalité infantile due aux conséquences du paludisme et les maladies diarrhéiques, la mort en couches des mamans et nourrissons par manque de couverture médicale préventive et curative, sont autant des facteurs de précarisation et d’aggravation des conditions de vie des centrafricains aujourd’hui.
Quant à l’école centrafricaine, elle a simplement perdu tous ses repères car ne répondant plus aux critères internationalement reconnus tant en matière d’infrastructures que de la qualité de l’enseignement. Conséquence logique des formations au rabais et elle ne produit que des désœuvrés et des diplômés sans emploi.
Ce tableau éloigne dangereusement notre pays de la trajectoire de l’atteinte des Objectifs du Millénaire du Développement (OMD) d’ici à 2015, malgré l’engagement et le soutien multiforme des partenaires au développement dans le cadre de l’Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE).
Camarades militantes et militants,
C’est depuis le début du mois d’avril que les opposants que nous sommes avons reçu l’autorisation des princes qui nous gouvernent pour voyager. Entre temps, plusieurs personnalités de l’opposition ont été empêchées de prendre l’avion à l’aéroport de Bangui-M’poko. On nous évoque des instructions que personne ne veut assumer, et qui ne reposent sur aucun texte législatif ou réglementaire. Les libertés individuelles et collectives telles que justement celles d’aller et de venir pour tous les citoyens, sont inscrites en lettres d’or dans notre Constitution.
Aujourd’hui on continue d’embastiller des journalistes en RCA pour des délits de presse pourtant dépénalisés. C’est ainsi que les cas de Monsieur Faustin BAMBOU, directeur de publication du journal « Les Collines de l’Oubangui » qui a été déféré le lundi 6 juin 2011 à la Maison d’Arrêt de Ngaragba après avoir passé dix jours à la Section des Recherches et d’Investigations (SRI) de la gendarmerie nationale et celui de Cyrus Emmanuel SANDY, directeur de publication du journal Média Plus, arrêté le mercredi 15 juin 2011 et placé sous mandat de dépôt, sont proprement scandaleux. Dans ces deux cas, au lieu d’appliquer la loi, c’est curieusement la personnalité du plaignant qui est importante, et on demande à la loi de s’adapter aux humeurs du prince. Malheureusement, c’est cela la réalité de l’Etat de droit et de la démocratie aujourd’hui en Centrafrique.
Ces nouvelles affaires Bambou et Sandy viennent s’ajouter à l’affaire dite Rayan, l’incendie de ce supermarché dans des conditions non élucidées, et dans le cadre de laquelle des Centrafricains arrêtés sur ordre du pouvoir croupissent en prison depuis un an et d’autres contraints à l’exil. A toutes ces victimes de l’arbitraire, nous leur disons que nous ne les oublions pas.
Par ma voix, le MLPC réaffirme sa ferme condamnation de toutes ces dérives autoritaires qui n’ont qu’un seul but : terroriser les Centrafricains, leur faire peur et les intimider par la prison et la violence gratuite pour casser toute voix discordante dans le pays.
L’assemblée nationale étant désormais monocolore, le pouvoir judicaire mis au pas, il ne reste plus qu’à museler la presse, le quatrième pouvoir, afin que la République centrafricaine de leurs rêves ressemble « au pays du matin calme » ou à « l’Empire du milieu », où règnent l’ordre, le silence et la volonté du guide bien-aimé.
Camarades, c’est grâce au silence des justes que prospèrent les dictatures. Le MLPC, né en 1979 pour lutter contre cette dictature que beaucoup de princes d’aujourd’hui avaient servilement servi naguère, et s’en accommodaient sans états d’âme, appelle le peuple à rester vigilant et à se joindre à lui pour mener la lutte combien exaltante pour la démocratie, car la démocratie est d’abord un état d’esprit et la liberté ne se divise pas.
C’est sur ces mots que je déclare ouverts, les travaux de la session ordinaire de notre Conseil Politique National de juin 2011.
Je vous remercie.