Source : RFI jeudi 21 mars 2013
La rébellion avait lancé un ultimatum de 72 heures au président François Bozizé afin que les accords de Libreville soient intégralement appliqués. Au terme de cet ultimatum qui a expiré mercredi 20 mars, le président François Bozizé a promulgué deux décrets pour tenter de calmer le jeu. Des mesures jugées insuffisantes par la Seleka.
En début de soirée, mercredi, quelques heures après l'expiration de l'ultimatum lancé par la Seleka au président François Bozizé, celui-ci a promulgué deux décrets, qui sont une réponse directe aux exigences de la Séléka.
Barrières levées et prisonniers libérés
Le premier décret, signé vers 17h30 TU par le président François Bozizé, prévoit que toutes les barrières érigées à travers le pays lors de l'instauration du couvre-feu sont désormais levées.
Le second décret prévoit que toutes les personnes arrêtées, détenues ou condamnées depuis le 15 mars 2012 recouvrent leur liberté. Cette dernière mesure de libération s'applique également aux prisonniers politiques et aux prisonniers de guerre. Toutes les personnes qui ont été interpellées dans le cadre de la récente crise qu'a connu le pays, a expliqué Gaston Mackouzangba, porte-parole de la présidence.
Mais pour le colonel Oumar Bordas, l'un des porte-parole de la Seleka, ces décrets arrivent trop tard. La rébellion exige désormais le départ pur et simple du président Bozizé.
« C'est lui [François Bozizé, ndlr] qui entraîne l'insécurité et les grands problèmes qui sévissent sur le territoire national », juge le colonel Oumar Bordas. « Nous avons pour l'instant nos armes au pied », précise-t-il. Mais, pour lui, François Bozizé « sera chassé par les armes. Il n'y a que ça : c'est le canon qui va le chercher. »
Il faut dire que l'une des exigences les plus importantes de la Seleka, le départ des troupes sud-africaines du pays, n'est pour l'heure pas à l'ordre du jour.
Les rebelles mécontents, retiennent cinq ministres issus de la rébellion à Sibut, depuis dimanche. Pour le colonel Bordas, « ils ne servent à rien dans un gouvernement, où ils n'ont pas les coudées franches pour travailler. A quoi bon y rester ? ».
Les acteurs politiques veulent une nouvelle concertation
De la majorité présidentielle à l'opposition démocratique, en passant par la société civile, les responsables appellent à une résolution pacifique de la crise.
« Toutes les parties, et particulièrement la Seleka, qui est un mouvement de rébellion, doivent s'abstenir de pouvoir mener des actions qui sont de nature à mettre en péril cet accord, qui est un gage de paix pour le peuple centrafricain. Le peuple souffre véritablement », affirme ainsi Cyriaque Gonda, président du Parti national pour un Centrafrique nouveau et membre de la majorité présidentielle.
L'opposition démocratique, qui s'est réunie en urgence ce mercredi après-midi à Bangui, a appelé les protagonistes à la raison. « Notre patrie est en danger. C'est pour cela que nous insistons, pour qu'ils fassent appel à la raison. Qu'ils utilisent les instruments juridiques qui sont à notre disposition pour une paix durable pour notre chère République centrafricaine », réclame Gabriel Koyambounou, l'un des leaders des partis de l'opposition.
Pour Fulgence Zeneth, membre du groupe de travail de la société civile sur les accords de Libreville, l'urgence voudrait que tous les acteurs puissent se réunir pour se parler franchement : « [Il faudrait que] le représentant du médiateur puisse réunir urgemment tous les acteurs au lieu de les rencontrer un à un, ce qui est une perte en terme de temps. L'urgence voudrait que tous les signataires de Libreville se retrouvent et qu'on commence à poser des actes concrets ».
Condamnation de l'ONU
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné ce mercredi les menaces de la rébellion Seleka de reprendre les combats en Centrafrique. Il s'est inquiété au cours d'une réunion d'urgence de l'échec à appliquer les accords de Libreville de janvier dernier.
La déclaration du Conseil de sécurité est un rappel à l'ordre, non seulement à la rébellion Seleka, mais aussi au gouvernement centrafricain pour ne pas avoir sérieusement appliqué les accords de Libreville. Le Conseil condamne à la fois les attaques des combattants de la Seleka et les menaces que les milices pro-gouvernement font peser sur les civils.
Le texte contient également une mise en garde à peine voilée au président François Bozizé : le Conseil de sécurité se félicite de la nomination du Premier ministre Nicolas Tiangaye et rappelle qu'en vertu des accords de Libreville c'est lui qui dirige le gouvernement d'union nationale.
Margaret Vogt, la représentante de l'ONU en Centrafrique, a appelé les membres du Conseil de sécurité, dont la plupart n'ont pas d'ambassades à Bangui, à ne pas négliger ce conflit.